Mondialisation: jeu
Mondialisation: jeu "sans gagne-perte"
Amadou Gueye NGOM Lundi 28 Déc 2009
Depuis les années 90, la Mondialisation désigne cette volonté de désintégrer les spécificités de chaque peuple ou continent en des systèmes standardisés n’offrant plus d’ alternative identitaire. Jacques Adda de l'université Bar-Ilan (Israël) définit paradoxalement la mondialisation comme “l’abolition de l’espace mondial sous l’emprise d’une généralisation du capitalisme, avec le démantèlement des frontières physiques et réglementaires”.
L’idée remonterait à Polybe (IIe siècle avant Jésus Christ) qui estimait que des événements initialement non liés peuvent en arriver à être interdépendants et inextirpables les uns des autres. Sur un registre plus sombre, on trouve un exemple endémique de mondialisation dans Candide quand Voltaire soutient que Christophe Colomb avait « “attrapé, dans une île de l’Amérique, cette maladie qui empoisonne la source de la génération” . L’empoisonneuse de cette génération aventureuse n’était autre que la Syphilis. Notre millénaire vit sous le règne du sida dont le mode de propagation s’avère aussi tragiquement mondialiste.
Restons dans l’histoire…
Aux XVe et XVIe siècles, la Renaissance partie d’Italie embrasera une bonne partie de l’Europe à travers les Beaux Arts et la musique. Plus tard, l’avènement des transports inter frontaliers -automobile, chemin de fer, avion- accéléra le processus de la mondialisation. Aujourd’hui, Internet permet d’abolir les barrières linguistiques et culturelles, sans bouger de chez soi.
Processus géo-historique, la mondialisation s’est muée en concept autour duquel les intellectuels va-en guerre fourbissent leurs armes alors qu’il s’agit d’une réalité toute simple qui n’est rien d’autre que le choc de cultures qui s’embrassent, se repoussent ou se fécondent pour aspirer à une utopique homogénéisation.
Comme tout produit de civilisation, la mondialisation a ses pourfendeurs et ses gourous. Le Martiniquais Edouard Glissant lui oppose sa “créolité ” et, sur un ton de provocation, la qualifie de “chaos monde”; concept dans lequel il pose la problématique de la survie des peuples au sein de cet universalisme. L’ affreux Max Weber, socio-économiste allemand affirmait avec condescendance que « seul l’Occident avait été capable de produire « des phénomènes culturels » suffisamment puissants pour gommer les spécificités raciales ou ethniques, voire tuer dans l’œuf certaines velléités de sursaut nationaliste. En réalité, c’est l’âme d’un peuple, bien plus précieuse qu’un simple sursaut nationaliste, qui meurt dans l‘œuf.
Selon une opinion communément répandue, la mondialisation aurait des vertus d’efficacité, notamment dans les échanges d’informations, la circulation des idées. Mais l’abolition des frontières ne se traduit pas forcement par une libération des hommes; elle suscite plutôt de nouvelles divisions entre dominants et dominés. Lorsque Senghor invitait les pays développés et le Tiers Monde à réfléchir sur les risques de la détérioration des termes de l’échange les esprits sarcastiques croyaient entendre des élucubrations de poète.
Nul ne conteste aujourd’hui que les pays pauvres sont les grands perdants. de ce rendez-vous du donner et du recevoir.
Jeu à qui perd gagne?
Depuis les invasions almoravides jusqu’aux conquêtes coloniales européennes et les dictats de la finance internationale, Vieille Dame Afrique, tour à tour violée, apprivoisé puis subtilement amadouée, s’est adonnée à des flirts de plus en plus consentants. Par esprit de marketing politique manipulation ou manque de vision projective, certains dirigeants africains font croire à leurs peuples que le développement consiste à l’accroissement et à la consommation des biens d’importation. Une telle attitude est encouragée par la triade Amérique- Europe-Japon que menace l’hydre chinoise en passe de lui ravir la vedette.
S’ouvrir…A quel prix?
On connait le succès déplorable que rencontrent les télénovellas brésiliennes dans les foyers des classes moyennes sénégalaises qui les préfèrent parfois aux productions locales dans la veine des Goorgorlu et Saa Neex. D’autres exemples peuvent sembler triviaux ou dérisoires mais n’en attestent pas moins du glissement des mentalités dans le moule réducteur des modèles étrangers. Je me surprends à regretter ces éphémérides que furent la toque de léopard surplombant l’Abacos made in Zaïre, le faso-danfani du « pays des hommes intègres ».
Il n’ y a guère longtemps, la corpulence des femmes, dans certaines parties de l’Afrique, conférait le respect dû à l’opulence. La norme occidentale, moins pour des saisons de santé que l’esthétique, impose la minceur- parfois jusqu’à l’anorexie- comme critère de modernité. Un autre exemple? Récemment encore, l’auteur d’une chanson se sentait honoré d’être plagié. Aujourd’hui, il porte plainte auprès du Bureau des droits d’auteur. Loin de moi l’idée de déplorer ce signe des temps. Il s’agit d’une simple remarque ayant pour objectif d’attirer l’attention sur le fait que dans l’engrenage de la mondialisation, les mimétismes culturels sont bien plus destructeurs que les déséquilibres économiques.
“Savoir se résigner à être démodé” », suggère Ernest Renan.
Aux demandeurs de solution: pensez-vous que le métissage biologique et conséquemment culturel apportera une solution à la douce aux chocs des civilisations ?
Amadou Gueye Ngom
Critique social
PS
Programmer la mort de la race pour l’émergence du métis ethnoculturel dont il me plait de représenter le spécimen.