LE LIT DE LA DESINTEGRATION DE LA SOCIETE
Dans notre premier article nous avions essayé, pour tenter de bien motiver l’enjeu et la raison du dialogue politique national, de citer certaines problématiques dont la résolution pourrait contribuer à sa tenue. D’autant que l’accès aux services sociaux de base du plus grand commande, impérativement, une prise en compte réelle du Social. Et surtout du chômage qui reste un véritable facteur de déshumanisation sociale. Cette problématique, le chômage s’entend, demeure un danger et constitue, à la limite, un réducteur total et permanent qui ne permet pas aux jeunes de mettre le pied à l’étrier. Et de continuer, pratiquement, la construction nationale.
Comment assurer une modernisation économique et sociale d’un pays sans pouvoir garantir à la majorité de sa population active un avenir ? Population dont 60%, en convoquant la pyramide des âges conçue après les derniers recensements démographiques au Sénégal, se situe, du point de l’âge, entre 25 et 40 ans.
Pourquoi devant une aussi importante fracture sociale, voire humaine ne pas rectifier notre stratégie globale ? Comme certains pays ont eu à procéder après des crises qui ont détruit biens, ressources et futur. En effet, l’escalade de la déshumanisation sociale évolue à un rythme galopant et le chômage devenu, tout de suite, massif et sélectif compromet, grandement, l’avenir et le devenir des populations. Populations qui ont bravé, après l’accession à l’indépendance, douleurs et peines pour construire une nation exploitée et surexploitée par le colonisateur.
Alors, aujourd’hui, sacrifice, endurance, patience et persévérance acceptés par nos populations ne devraient générer que valeur ajoutée ou plus-value .Après, presque 50 ans de bataille constante et âpre pour sortir le SENEGAL du bourbier engendré par le sous-développement. La jeunesse, comme ses parents, doit-elle, à son tour, s’empêtrer dans la précarité sociale devenue, de toute évidence, le lit du non-être ?
Sortons de cette fange pour préserver demain après avoir perdu hier et aujourd’hui.
En abordant, dans un deuxième article, le chômage qui est devenu un obstacle majeur de la croissance et du développement, nous tentons de sensibiliser et de conscientiser l’ensemble des acteurs sociaux. Pour des rectifications du système général de gouvernance, conduisant à une recodification capable de produire une législation de nature à neutraliser les dérives.
Le pouvoir, le contre pouvoir et la religion sont interpellés .Et non apostrophés .Afin que la prochaine réforme, aboutissement du dialogue politique national, puisse aider à la réduction de la fracture sociale en tant que facteur de déshumanisation.
C’est pourquoi il est utile d’appeler l’attention des acteurs sociaux sur la nécessité de réajuster leur approche et de dépasser, également, une communication qui ne vise qu’à maintenir les populations dans un archaïsme profond.
Il faudrait, surtout, analyser la structure de l’emploi et du travail ; son rapport aux besoins réels de la population victime d’un chômage féroce à la fois massif et sélectif. Et mesurer le faible taux d’accès au travail de la population active.
D’ailleurs une première étude de l’état du marché du travail et de l’emploi révèle une accumulation continue de la demande de travail et une réduction progressive et constante de l’offre d’emploi. Un tel état de fait réduit grandement, l’espoir et l’espérance des populations qui ne cessent de naviguer dans l’océan de l’incertitude.
L’urgence serait, après avoir dépassé le constat et évalué l’impact des options en stratégies afférentes au développement de l’emploi, de définir de nouvelles politiques très appropriées en création de richesses nationales, de revenus et d’emplois. Parce que le tâtonnement et le bricolage en matière de lutte contre le chômage sont à éliminer.
Oui, le tâtonnement et le bricolage ont marqué, sans aucun doute, certaines politiques retenues pour promouvoir l’emploi .D’autant que le financement des politiques choisies pose toujours problème.
L’Administration, les syndicats de travailleurs et le patronat ont choisi des démarches qui, du point de vue du principe, sont pertinentes. Mais il reste que le déploiement des fonds nécessaires au financement des politiques d’emploi se fait de manière peu orthodoxe.
Est-ce que les populations du Sénégal sont conscientes de l’ampleur de la massification du chômage, de l’importance de la demande sociale en matière d’emploi et de travail ?
La massification du chômage a atteint un niveau indicible car à analyser la structure de la demande en travail et en emploi permet, sans complaisance, de connaitre certaines tendances lourdes de ce phénomène très ravageur. D’ailleurs le nombre des chômeurs, des sans métiers ou des sans emplois perce tous les plafonds et atteint toutes les crêtes prévisibles. C’est pourquoi le financement de la politique de l’emploi est problématisé devant la taille des populations en scolarité, de celles des diplômés sans emploi. Donc s’interroger ou interpeller les acteurs sociaux sur le rapport qui existe entre le développement de la professionnalisation, l’introduction de la réforme LMD et enfin la prolifération d’établissements privés dans notre pays devient légitime.
A notre sens, il serait irresponsable de manquer d’invoquer la faible capacité nationale de l’embauche au SENEGAL, l’absence du contrôle de l’emploi et la dimension atteinte par la forte relativisation de la durée des liens de travail. Le pouvoir, le contre pouvoir et les opérateurs économiques sont interpellés afin qu’une approche conséquente au plan du financement de la politique de création de richesses, de revenus et d’emplois soit examinée : chaque famille en milieu urbain compte au moins 5 chômeurs ou 8 sans emplois : Pourquoi les populations du Sénégal sont maintenant très préoccupées par les ravages du chômage ?
Approcher certains renseignements statistiques afférents au travail à l’emploi et à son contrôle aide à comprendre l’ampleur de ce phénomène .Et explique l’existence de certaines dérives dont les plus déterminantes, selon notre humble avis, sont :
L’accentuation des maladies à ralentissement social,
Le rush dans l’arrivée des adolescents dans la criminalité,
L’escalade à un rythme galopant de la criminalité,
Le puissant diktat des contre-valeurs,
La persistance du célibat et de la nuisance générée par l’absence de revenus.
La démotivation rendue structurelle par l’absence d’offre de travail et d’emploi et ses effets corrélatifs comme le désengagement manifeste dans la formation, la tendance à l’oisiveté et l’inclinaison de niveau élevé vers la dépersonnalisation du fait de l’accès à la jouissance des loisirs malsains.
Il importe, devant l’ampleur sociale des ravages générés par les effets du chômage, de reconsidérer certaines démarches au plan des politiques si l’Etat du SENEGAL souhaite assurer un futur aux générations montantes.
Les services du Ministère de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs pourraient dans une première mesure proposer aux acteurs sociaux des voies d’approche pour améliorer le marché du travail et de l’emploi. Comme le Ministère de la Culture rendrait à son tour les industries culturelles très inductrices en revenus et en emplois. Enfin, un management approprié de l’économie informelle où est notée une forte présence de non nationaux adhérait, à moyen terme, à stabiliser la progression de l’offre de travail et d’emploi.
Peut-être les acquis en appui institutionnel et en encadrement des voies d’approche du social, ne souffrent à n’en point douter, d’aucune faiblesse. Par contre, des urgences au plan travail et emploi n’autorisent, en aucune façon, certaines tergiversations en dynamique de créations de richesses. Et exigent un redressement dynamique et opérationnel du dispositif inhérent à la lutte et au combat menés contre le chômage .Chômage qui expose, malheureusement, une bonne part de la population active nationale aux contre-valeurs qui déciment à petits feux, toute la fine fleur des générations appelées, c’est notre vœu, à continuer, demain, le SENEGAL.
Les formations politiques, les forces confrériques et le pouvoir devraient réadapter les approches en produisant des reformes profondes tendant à privilégier, avec abnégation, des modifications au plan de la mobilisation et de l’emploi des ressources financières.
Priorité devrait être accordée, sans nuance, au financement des politiques de création de richesses nationales .Par contre une rigueur devrait être réservée aux dépenses qui obèrent le budget d’un Etat. De plus certains centres de coûts, considérés comme structurels, seraient réduits et les gains réalisés redéployés dans des approches génératrices d’emplois induits et d’auto-emplois.
Certes, les fondamentaux programmatiques des formations politiques suggèrent, par exemple, des recettes. Mais l’électoralisme et l’abus des recours aux media déprécient, malheureusement, leur communication politique.
L’opinion nationale souhaite la tenue du dialogue et la définition de consensus qui aident à bien négocier le virage de la précarité sociale et a réaliser une émergence. Ce qui viendrait réduire, progressivement, l’effervescence politique et le pessimisme social qui sont des facteurs, en somme, du désordre et de la décroissance.
Wagane FAYE
Professeur d’Anglais
Coordonnateur des Cadres du F.A.P
Vice Président de la commission des Cadres et Experts de la CAP21