L’autocrate sous le masque du démocrate
la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 issue de la Révolution Française, dont s’inspire celle de 1793 qui en son article 35 dit : ‘Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.’
“Bien informés les hommes sont des citoyens, mal informés ils deviennent des sujets.” [Alfred Sauvy]
Ce que je crois
C’est que la tâche la plus urgente du peuple sénégalais est de bouter Abdoulaye Wade, sa famille et ses gens hors du gouvernement de la République. Par tous les moyens qu’offrent les lois et règlements de notre pays, donc principalement par la voie démocratique. A défaut, par toutes les autres voies que requiert la survie de notre nation, la Constitution du Sénégal depuis 1960, en son préambule, affirmant son adhésion à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 issue de la Révolution Française, dont s’inspire celle de 1793 qui en son article 35 dit : ‘Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.’
J’étais à la Place de la Bastille le 10 mai 1981 pour fêter, avec l’élection de François Mitterrand, la première victoire de la gauche en France et plus largement celle de tous les idéaux qui nourrissaient les jeunes de ma génération. Un bonheur insoutenable, mais juste un bonheur par procuration, dans un pays qui n’était pas le mien, et que même dans mes rêves les plus fous je ne pensais revivre un soir de 19 mars 2000, dans les rues sablonneuses et surchauffées de Dakar, avec le triomphe d’Abdoulaye Wade sur quarante ans de régime senghorien.
Nous avions mis tous nos espoirs dans cette alternance survenue par la seule voie des urnes, nous l’avions supportée de toutes nos forces, pour voir l’homme qui était pour nous la figure même de la Providence trahir toutes nos attentes et révéler rapidement sa vraie nature. J’ai été l’un des tout premiers à tirer sur la sonnette d’alarme, quand juste quelques semaines après sa Constitution, j’ai vu notre nouvelle République couchée, faisant ostensiblement allégeance à une confrérie. J’avais soutenu alors que le président de la République ne devait se baisser que devant le drapeau national. Un officier supérieur de l’armée m’a écrit pour rectifier et m’apprendre que c’est en réalité le drapeau lui-même que l’on abaisse devant le Président. Depuis, il est allé infiniment plus loin.
Ce que je ne peux pardonner à Wade, bien plus que sa boulimie foncière, son goût indécent pour l’argent et le pouvoir, sa malice immorale érigée en mode de gouvernement des hommes et des choses, c’est d’avoir avili quasi irrémédiablement nos institutions, en commençant par les structures fondamentales de l’Etat transformé en un jouet qu’il a tellement torturé dans tous les sens qu’il l’a finalement cassé. ‘Cette riche articulation du monde éthique que constitue l’Etat, l’architectonique de sa rationalité qui, par la distinction précise des cercles de la vie publique et de leurs droits, par la rigueur de la mesure avec laquelle chaque pilier, chaque arc, chaque contrefort sont maintenus ensemble, fait reposer la solidité du tout sur l’harmonie des parties’ comme le dit Hegel dans la Préface des Principes de la Philosophie du droit, qu’en reste-t-il donc après un peu plus de dix ans de ‘wadisme’ ? Où est la distinction entre les ‘cercles’ de la vie publique et de la vie privée quand les affaires de la res publica, de la chose publique, deviennent affaire de famille, où l’épouse, les enfants, les amis, les alliés, les chefs spirituels, occupent le devant de la scène et jouent les premiers rôles ? Que reste-t-il de ce ‘magnifique édifice’ comme le dit encore Hegel, quand les ‘piliers’ sont systématiquement sciés par celui qui en est pourtant l’ultime gardien, transformant ses serviteurs les plus dévoués en simples laquais qu’on congédie d’un simple revers de la main, nombre de ministres de haut rang ayant appris leur limogeage en écoutant la radio dans leur voiture, ou en regardant la télévision dans leur salon, ou encore alertés par un coup de fil alors qu’ils étaient en mission à l’étranger ?
Que deviennent les ‘arcs’ et les ‘contreforts’ quand ils sont remplacés par des hommes et des femmes de rien, ramassés quelquefois dans les égouts de nos rues, voleurs, violeurs, prévaricateurs, traîtres et péripatéticiennes de tout acabit, constituant le gros du troupeau de bétail politique qui transhume de prairies en prairies pour s’engraisser sur le dos du peuple ? Que reste-t-il enfin de ‘l’harmonie des parties’, quand celles-ci, comme la tapisserie de Pénélope, sont défaites chaque soir pour être reconstruites de nouvelle façon le lendemain, selon l’humeur et la ‘vision’ du Prince qui ne semble plus avoir toute sa raison ? C’est cet édifice qu’il nous faut reconstruire le 26 février, brique par brique, en reprenant tout dès les fondements, pour parler comme Descartes, c’est à cette architectonique qu’il faut redonner sa rationalité en restaurant d’abord les piliers sur lesquels elle repose, à savoir les règles de droit et les règles d’honneur sans lesquelles il n’y a pas de communauté politique.
Au demeurant, je suis étonné par l’ampleur excessive donnée aux questions juridiques dans la perspective de cette présidentielle, avec notamment les querelles incessantes autour des règles constitutionnelles. Je vois les grands Maîtres de la Faculté échafauder des théories extrêmement complexes que leurs propres disciples ayant acquis droit à porter la toge déconstruisent point par point avec la même habileté. Jamais on n’a entrechoqué des couples de concepts aussi complexes et antagoniques, tous incompréhensibles par ailleurs pour le sens commun : ‘compétence - incompétence’, ‘constitutionnalité apparente - inconstitutionnalité réelle’, ‘immoralité publique - incivilité constitutionnelle’, ‘révision consolidante - inconsolidante’, ‘article superfétatoire - silence des textes’, etc.
Jamais on n’a brandi autant de titres, plus impressionnants les uns les autres, ‘agrégé de’, ‘titulaire de’, ‘major de’, pour finalement se contredire les uns les autres, et c’est un jeune ‘Assistant’, Abdoul Aziz Diouf, qui finalement semble avoir vu le plus juste, en écrivant dans un article admirable que ‘l’inculture et le mysticisme primaire de la ˝loi˝ par l’universitaire-juriste sous l’étiquette d’une séparation entre droit et morale, ont fini de faire du droit une science sans conscience’, qu’il faut ‘déplacer l’analyse sur le terrain de la morale’ et qui conclut fort bien ainsi : ‘Enseigner à nos étudiants la hiérarchie des normes, c’est bien ; leur enseigner la hiérarchie des valeurs, c’est encore mieux.’ Ne nous torturons pas inutilement les méninges, aucune interprétation strictement juridique ne nous sortira de l’imbroglio créé par le choc entre les articles 27 et 104 de la Constitution. Le texte a été écrit dans le camp des vainqueurs par des hommes qui se disaient hommes d’honneur et se comprenaient ‘sur parole’. L’un a retiré sa parole et tiré un trait sur son honneur. Ce n’est plus une question de droit, mais de morale.
Ainsi ce qu’oublient les juristes, c’est que les lois sont fondées sur des principes non point juridiques, mais philosophiques. Et la césure apparente entre la loi et le droit, c’est-à-dire entre la lettre, à savoir la transcription codifiée, et l’esprit qui en est la substance rationnelle, fracture qui fait que la justice n’est jamais totalement juste, est quelque chose qui a de tout temps préoccupé les philosophes. ‘Summum jus, summa injuria, l’extrême droit est une extrême injustice’, rapporte Cicéron dans son œuvre Des devoirs et on connaît la sentence de Sénèque, qui se vérifie encore de nos jours, ‘ex senatus-consultis et plebiscitis crimina exercentur, c’est en vertu des senatus-consultes et des plébiscites qu’on commet des crimes.’
On peut donc toujours faire dire, faire faire à la loi ce qu’on veut car, observe Pascal avec raison, ‘la juridiction ne se donne pas pour le juridiciant mais pour le juridicié’, ce que, bien entendu, le ‘peuple’ ne sait pas et il y a ainsi en toute justice toujours un coup de force. C’est pourquoi, écrit encore l’auteur des Pensées, ‘la justice est sujette à dispute. La force est très reconnaissable, et sans dispute. Aussi on n’a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit qu’elle était injuste, et a dit que c’était elle qui était juste. Et ainsi ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste.’
C’est à cette application biaisée de la justice que les juges de notre pays, comme partout ailleurs est-on tenté de dire, nous ont habitués. En droit commun d’abord, où on condamne avec sévérité les voleurs de poule et laisse libres des gangsters en col blanc qui dépouillent le peuple à coups de milliards ; où on envoie aux travaux forcés la domestique abusée convaincue d’infanticide et absout des criminels patentés à l’abri dans les factions politiques et religieuses. Et bien entendu, puisque c’est cela qui est à l’ordre du jour, en droit constitutionnel aussi, où les Hauts Magistrats ont toujours obstinément fermé les yeux sur les forfaitures et les ‘incivilités’ commises sur notre Loi fondamentale, quand ils ne se déclarent pas pudiquement ‘incompétents’ pour fuir leur responsabilité. Il est facile de claironner que le ‘peuple est fatigué’ et quand il faut juger en sa faveur et contre le Prince, déserter vers des cieux plus ‘neutres’. Abdoulaye Wade serait-il encore là, à se cramponner désespérément au pouvoir à près de quatre-vingt-dix ans, si en 1993 on lui avait reconnu la victoire gagnée de haute lutte ?
Et sept ans après, c’est sans doute bien moins par le courage et l’impartialité des juges de l’époque que par la netteté du verdict livré par les urnes et, reconnaissons-le tout de même, la sagesse de Diouf, que les Sénégalais ont pu, dès la matinée du 20 mars 2000, fêter partout dans le pays l’heure d’une alternance espérée pendant quarante ans. Juges et hommes politiques, vous qui trahissez si souvent le serment fait devant le peuple, méditez ces paroles des Lettres écrites de la Montagne de Rousseau sur le gouvernement de la cité : ‘Toutes les barrières qu’on donne dans les Républiques au pouvoir des Magistrats (à savoir autant les juges que les gouvernants) ne sont établies que pour garantir de leurs atteintes l’enceinte sacrée des Lois : ils en sont les Ministres, non les arbitres, ils doivent les garder, non les enfreindre. Un peuple est libre, quelque forme qu’ait son gouvernement quand, dans celui qui gouverne il ne voit point l’homme, mais l’organe de la Loi. En un mot, la liberté suit toujours le sort des Lois, elle règne ou périt avec elles ; je ne sache rien de plus certain.’
Pourquoi donc tant de bruit et de fureur aujourd’hui sur la question de la Constitution, que plus de 90 pour cent des Sénégalais n’ont jamais lue ? En parcourant les travaux très documentés du Professeur Ismaïla Madior Fall, j’ai vu que la Constitution de 1963, qui a régi notre pays jusqu’à l’alternance de 2001, donc pendant 38 ans, a été révisée 20 fois, dont 6 fois sous Senghor, entre 1967 et 1978 et 14 fois sous son successeur Abdou Diouf, de 1981 à 1999. Il faut dire que sous Senghor, sûr d’un pouvoir sans partage, les changements ont été le plus souvent mineurs, portant notamment en 1967 sur l’adoption du quinquennat (1ère révision), sur les trois courants de pensée, ‘libéral et démocratique’, ‘socialiste et démocratique’, ‘marxiste-léniniste ou communiste’ en 1976 (4e modification), qui seront plus tard étendus à quatre (plus un courant conservateur) avec la 6e et dernière modification en 1978, le fait le plus marquant étant sans doute la 5e modification intervenue en avril 1976 qui accordait la suppléance du pouvoir au Premier ministre, préparant ainsi sans doute en douceur la ‘dévolution’ successorale de Diouf. On aurait pu craindre qu’un caprice du despote éclairé de l’époque, qui voulait tout régenter, y compris sur les questions de linguistique et de grammaire, le poussât à retoucher la loi fondamentale pour un imparfait du subjonctif mal accordé, mais cela n’eut heureusement pas lieu…
Il en alla tout autrement pendant les vingt ans du règne de Diouf. On commença à ‘tripoter’ la Constitution par simple calcul du nouveau Chef de l’Etat en vue de consolider son pouvoir ou régler des comptes au niveau de sa majorité. Ainsi si la première révision du 6 mai 1981 consista à supprimer la limitation des partis et des courants, la deuxième, en mai 1983, consacra la suppression du poste de Premier ministre, qui avait justement permis une transition sans heurt, justifiée, selon les attendus, à permettre ‘une appréhension directe des problèmes du peuple sénégalais par le chef de l’Etat lui-même et son équipe’, et la troisième, en 1984, se solda par la réduction du mandat du Président de l’Assemblée nationale de cinq à un an, le but visé étant, à l’évidence, l’affaiblissement du deuxième personnage de l’Etat, mesure qui sera rapportée lors de la sixième révision sous Diouf, en avril 1991. On appréciera l’avant-dernière retouche du 10 octobre 1998 qui fit disparaître dans l’article 21 l’alinéa 2 qui indiquait que le Président de la République ‘n’est rééligible qu’une seule fois’. Le dauphin, installé douillettement au Palais, avait sans doute pris goût au pouvoir et ne se satisfaisait plus de ses trois mandats (plus deux ans d’intérim) déjà consommés…
Wade a été déclaré champion toutes catégories du ‘tripatouillage’ de la Constitution avec pas moins de quinze modifications de notre Loi fondamentale en onze ans, certaines d’entre elles étant induites d’ailleurs par des erreurs en chaîne constatées dans les lois rectifiées que le législateur brouillon, dans sa réécriture hâtive, n’avaient pas vues. Et on s’est donc mis à retoucher des retouches, à la mode du fameux pantalon de Moriba, qui de rapiéçages en rapiéçages, ne ressembla plus finalement à rien! (A suivre)
Ousseynou KANE, Département de Philosophie(UCAD)
Il faut tenir l’élection présidentielle à la date échue
L’impératif commande de demander aux citoyens d’investir les bureaux de vote, le 26 février 2012, afin de s’acquitter de leur devoir en ne prenant en compte, exclusivement, que les treize candidats légaux et légitimes. Le quatorzième, Me Wade, dont la validation de la candidature est une violation flagrante du droit politique constitutionnel perpétrée par les cinq juges, est en train de réunir, en ce moment, les conditions pour prendre d’autorité la décision de reporter l’élection, arguant d’une violence qu’il organise et planifie insidieusement, lui-même, à travers l’ensemble du territoire. Me Wade se base sur les principes de la démocratie pour biaiser le jeu démocratique. Les électeurs ont le devoir impérieux d’ignorer royalement les bulletins de vote du président sortant. Les acteurs politiques patriotes, renforcés par ceux d’une Société civile républicaine, ont, à travers cette forme de validation des candidatures, une autre forme de résistance. Face au forcing juridique et politique, la défaite est la sentence imparable en démocratie.
Cette forme de résistance est aussi une parade contre les rentiers du chaos, nichés dans des officines de conception de cocktails diaboliques pour conserver le pouvoir. Conscient d’une impopularité croissante qui le caractérise, Me Wade sème les germes de la violence afin de disposer d’un solide alibi pour reporter l’élection présidentielle. La flambée de violence notée à Dakar et dans toutes les capitales régionales est la conséquence des multiples violations de la volonté populaire perpétrées par Me Wade. S’y ajoute que l’interdiction formelle notifiée aux candidats légaux et légitimes de procéder à une campagne électorale dans certaines portions du territoire national, en violation flagrante des dispositifs du Code électoral, participe de cette volonté du chef de file des libéraux de reporter l’élection présidentielle dans le but de permettre à son régime de parfaire les techniques de fraudes massives et de procéder à la passation du pouvoir à Karim Wade qui se trouve être son fils biologique.
Il ne saurait être question de reporter l’élection présidentielle car les citoyens ne peuvent se résoudre à accepter, sans broncher, les multiples violations de la souveraineté populaire dont Me Wade passe pour être le maître incontesté. Il est de notoriété publique que le report d’une élection présidentielle prépare le lit de toutes les violations possibles des règles de la démocratie. Laurent Gbagbo, en Côte d’Ivoire, en a administré la preuve, lui qui a réussi le tour de force de reporter l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire pendant plus de cinq ans. Et, en ce cas d’espèce, Gbagbo est un nain comparé à Wade. Le respect du calendrier électoral est le meilleur moyen de contrecarrer la politique despotique et tyrannique de Me Wade et de proposer une politique alternative crédible articulée autour de la refonte des institutions, de la définition de la bonne gouvernance dans les affaires publiques et privées, du respect des droits humains et de la promotion d’un développement harmonieux. Une autre voie pousserait les tenants du régime actuel à se croire investis de toutes les possibilités de violer la volonté populaire à chaque fois que le vent de l’alternative, poussé par les libertés souveraines, se lève. Il urge d’écouter les échos sincères de cette prise de parole populaire. Ce ne sont pas que des hommes en colère qui crient ; ce sont des âmes tourmentées par la perspective de voir leur pays sombrer.
La bataille pour le respect du calendrier électoral doit être sous-tendue par la mutualisation de toutes les forces citoyennes et, notamment, de celles des treize (13) candidats légaux et légitimes. Une mutualisation des arsenaux électoraux afin de permettre aux représentants des candidats légaux et légitimes d’être présents dans chacun des 11.904 bureaux de vote et des 6.192 centres de vote. Les représentants plénipotentiaires des candidats doivent avoir à l’esprit qu’il n’existe que 5.080.294 civils à l’interne, 204.433 au niveau extérieur et 23.003 militaires et paramilitaires, soit un total de 5.307.730 inscrits au fichier électoral. De ce chiffre, il faut aussi débusquer les multiplications des identités en se basant sur les règles informatiques d’identification des sexes notamment 1 pour les hommes et 2 pour les femmes. Toute pièce d’identité qui commence par un chiffre autre que 1 ou 2 est une fausse et doit être rejetée par les représentants des candidats légaux et légitimes.
Il est vrai qu’il existe plus de 2000 bureaux de vote clandestins dont les procès-verbaux sont déjà disponibles dans les tiroirs des responsables libéraux. Mais il s’agit, hic et nunc, de ne pas être fataliste ni défaitiste, mais d’être le garant de sa propre liberté. La lutte contre la fraude électorale ne peut être gagnée que si les candidats mutualisent leurs forces en se basant sur les techniques informatiques de contrôle bancaire des signatures. Les responsables des questions électorales des treize états-majors doivent disposer, au moins, des signatures scannées de leurs 11.904 représentants dans les bureaux de vote. Après le vote, les citoyens doivent surveiller leur volonté en restant dans les centres de vote et en affirmant clairement leur choix. A l’issue du vote, si Me Wade poursuit son abject projet de violer la souveraineté populaire, le peuple aura le devoir impérieux de faire respecter, par tous les moyens, sa liberté fondamentale.
Abdoulaye SEYE, Journaliste
L’autocrate sous le masque du démocrate
Le candidat Wade nous avait juré qu’il respecterait la décision du Conseil constitutionnel, quelle qu’elle soit. En vrai démocrate. Mais dans la foulée, le Président Wade ajouta qu’il était «sûr» que ce Conseil constitutionnel dont il avait soigneusement sélectionné les membres et comblé de faveurs, validerait sa candidature. Une menace à peine voilée digne d’un vrai autocrate.
Confirmé dans sa prémonition par «son» Conseil constitutionnel, le candidat Wade s’est lancé avec ferveur dès le 04 février dans la campagne électorale pour la «team Wade», faisant un usage éhonté des moyens de l’Etat mis à la disposition cette fois-ci de Wade le Président.
Mimétisme oblige, les thuriféraires de la «team Wade» nous exhortent désormais à nous plier au verdict imminent du peuple souverain, la candidature ayant été validée par l’arbitre constitutionnel. Ces mêmes porteurs d’encensoir qui, cette fois sous les habits de ministres, nous affirment qu’ils sont «sûrs» que la «team Wade» emportera les élections dès le 1er tour avec 53% des voix.
«Sûr» d’être encore confirmé dans cette nouvelle prémonition, le candidat Wade dans ses habits de futur Président nous promet (après qu’il aura pacifié le pays), d’engager des négociations avec cette opposition éternellement mauvaise perdante, en vue de distribuer des maroquins. En vrai «autocrate démocratique». En échange de quoi bien sûr, il désignera «le plus intelligent d’entre nous» à ce poste de vice-président qu’il a gardé au chaud depuis plusieurs mois. Et cédant magnanimement à l’appel de l’opposition et de la communauté internationale, il sortira par la grande porte, dans «3 ans» précise-t-il, et bien entendu après avoir installé le fiston, personnification de la «relève générationnelle» dans ce fauteuil que lui convoitent les 13 «poltrons». Autocrate, lui ?
L’héritier, terminant tout simplement un mandat du père pourra ainsi prétendre à «ses» 2 mandats constitutionnels à partir de 2019, aidé en cela par un formidable butin de guerre et doté d’une expérience d’achat des consciences puisée à la bonne école. Wade nous promet donc rien de moins qu’une autocratie héréditaire !
Je vous invite à chercher l’erreur dans ce scénario à la «ndiombor». Il y manque un acteur, et un acteur de taille. Il s’appelle le peuple sénégalais. Ce peuple qui dans la rue lui dit «assez de tes ndiomboreries». Ce peuple qui armé de pierres pour l’instant a décidé de contrecarrer ses plans et, au-delà, d’inscrire dans l’histoire de notre jeune démocratie un avertissement de taille : plus jamais dans notre histoire à venir nous ne laisserons un Président tenter de prendre en otage notre Constitution et notre Nation.
Cela me rappelle étrangement cet autre autocrate célèbre, Nicolas II de Russie qui, lui aussi se targuait de ne tirer son pouvoir que de lui même (pas de la Constitution encore moins du peuple), et qui ne parvint pas à freiner l’agitation politique en Russie. Celle-ci déboucha sur une première révolte en 1905 suivie de la Révolution de 1917. Il finira assassiné avec sa famille en 1918.
Nul ne souhaite une telle fin de «règne» à Wade le «démocrate», mais il doit comprendre une bonne fois pour toutes que l’ère des autocrates est révolue et qu’il doit «dégager». Maintenant !
Et de grâce, qu’il emporte avec lui cette grotesque statue d’autocrate qui défigure l’horizon de notre si belle presqu’île !
CEDEAO :la Cour de justice appelée à suspendre l’élection sénégalaise
Un centre sud-africain pour les droits humains et l’ONG sénégalaise Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO) ont saisi la Cour de justice communautaire ouest-africaine pour la suspension d’urgence de la présidentielle de dimanche au Sénégal en vue d’instaurer un dialogue politique inclusif, a appris l’APS, jeudi à Dakar.
Le Centre for Human Rights (de l’Université de Pretoria), conjointement avec la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO), ont saisi la Cour de Justice de la CEDEAO d’une requête en procédure accélérée tendant à la suspension immédiate du processus de l’élection présidentielle prévue pour se tenir le 26 février 2012’
Selon le texte daté de mardi, ‘’les auteurs de la requête appellent également la cour à ordonner au gouvernement d’enclencher des pourparlers inclusifs avec les partis d’opposition et la société civile en vue de garantir les conditions propres à la tenue d’une élection crédible dans les meilleurs délais’’.
‘’A cette étape du processus électoral, un report serait une insulte au peuple sénégalais’’, selon un militant sénégalais des droits de l’homme et du citoyen, tandis que le porte-parole de campagne du candidat sortant Abdoulaye Wade, Me El Hadji Amadou Sall, soutient que ‘’ce n’est pas respecter les Sénégalais et, le peuple de son droit d’exprimer librement ses choix’’.
‘’C’est absolument inacceptable de demander à trois jours du scrutin un report (…). C’est curieux que des organisations des droits de l’homme en arrivent à refuser à des citoyens la liberté d’expression de leurs idées et de leurs choix’’, a-t-il estimé. ‘’Toute déclaration de la RADDHO, dont le président est dans le M23 (mouvement d’opposition à la candidature de Wade) est partisane’’, a ajouté Me Sall.
Il a rappelé que rien ne s’opposait à la tenue de l’élection présidentielle, dimanche, avec la participation des 14 candidats en lice. ‘’Nous avons un fichier électoral accepté par tous, un Code électoral consensus et un processus électoral acceptés par tous les acteurs (à travers) le Comité de veille, de même nous avons un juge des élections et la campagne électorale suit son cours’’, a-t-il souligné.
‘’Le seul juge des élections au Sénégal, c’est le Conseil constitutionnel et non de quelque autre cour. Le calendrier électoral du pays n’est pas fixé de l’extérieur, il résulte de notre Loi fondamentale et nulle part ailleurs. Il faut être vendeur d’illusions pour nous faire croire le contraire’’, selon le porte-parole du candidat de la coalition des Forces alliées pour la victoire (FAL 2012), dont la nouvelle candidature est à l’objet de controverse.
‘’Le Centre for Human Rights a suivi avec grande inquiétude les évènements qui se déroulent en République du Sénégal depuis l’annonce de la décision du Conseil constitutionnel, le 27 janvier 2012, d’autoriser l’actuel président de la République, Abdoulaye Wade, à briguer un troisième mandat’’, ajoute le communiqué.
Selon la même source, les responsables dudit centre sud-africain de défense des droits de l’homme observent, ‘’avec une grande consternation, les violations des droits de l’homme commises au Sénégal depuis la décision du Conseil constitutionnel’’.
Le centre sud-africain appelle le gouvernement sénégalais ‘’à se désister immédiatement d’empêcher les citoyens d’exercer leurs libertés d’expression et de réunion (…), à cesser (…) immédiatement d’user de balles réelles pour disperser les rassemblements (…)’’. Il réclame aussi la remise en liberté « immédiate » des manifestants arrêtés.
Aussi le Centre for Human Rights a-t-il demandé au gouvernement du Sénégal d’‘’enclencher des investigations sur les cas de décès enregistrés jusqu’à présent et poursuivre les officiers de police responsables desdits cas de décès tout en versant des compensations à toutes les parties ayant subi des préjudices du fait de cette situation’’.