nécrologue de l'Alternance
L’alternance, festival de manœuvres politiques
La vie politique sénégalaise a toujours été marquée par de grandes manœuvres politiques au sommet de l’Etat. Mais avec le régime issu de l’alternance, les manœuvres politiques ont pris de l’ampleur à tel point que les observateurs les plus avertis de la scène politique nationale y perdent le nord. Cette situation est inquiétante en cette période de bataille de positionnement pour la succession du Chef de l’Etat.
Le régime actuel a une peur bleue de perdre son pouvoir. Dans le but de le conserver encore pendant une cinquantaine d’années, rien n’est laissé au hasard. C’est ainsi que j’ai constaté que l’alternance est un festival de manœuvres politiques. En vérité, toutes nos institutions républicaines en l’occurrence l’exécutif, le parlement, la justice, la police, et même la télévision nationale constituent les instruments de ce festival. Combien de fois nos institutions ont été bafouées pour des intérêts politiques du pouvoir ?
Les hommes passent mais les institutions restent. Au soir du 19 mars 2000, les socialistes avaient légué une architecture institutionnelle moderne pour notre jeune démocratie : 60 sénateurs dont 12 ont été nommés par le Président Abdou Diouf, 140 députés élus au suffrage universel direct, et un Conseil Economique et Social crédible car dirigé par une personnalité de principes. Ce dispositif institutionnel a été jugé inutile et inopportun par les libéraux qui, à l’époque, étaient dans une longue et pénible traversée du désert. Ils ont dénoncé la gestion socialiste dans tous les domaines. Cependant, l’histoire retiendra que toutes leurs récriminations étaient un prétexte pour convaincre les sénégalais à voter pour eux. L’histoire retiendra aussi qu’une fois installés au pouvoir, les libéraux ont fait table rase de tous les acquis démocratiques de notre pays (marches interdites, dialogue politique rompu) et ont cherché coûte que coûte à développer et à caser leur clientèle politique (transhumance, débauchage).
Le régime issu de l’alternance est champion en matière de grandes manœuvres politiques au sommet de l’Etat. Tout est prétexte pour tripatouiller subtilement (les pluies diluviennes, la trêve de trois ans demandée aux organisations syndicalistes). Rappelez-vous également du référendum constitutionnel du 07 janvier 2001 qui avait autorisé au pouvoir exécutif libéral la suppression du Sénat, la dissolution de l’Assemblée Nationale et du Conseil Economique et Social et la réduction du nombre de députés de 140 à 120. Le paradoxe, c’est que se sont les libéraux eux-mêmes qui ont « ressuscités » aujourd’hui les mêmes institutions : la réintroduction du Sénat par une simple loi avec 100 membres dont 65 choisis par l’exécutif, le nombre des députés passe également de 120 à 150 par une simple loi sans compter les 100 conseillers de la République pour les affaires économiques et sociales. Bref, ils ont augmenté le train de vie de l’Etat. Quelle cohérence politique !
A cela, il faut ajouter l’amendement instaurant le 21 novembre 2001 les délégations spéciales suite à l’expiration du mandat des élus locaux et ses conséquences, la loi Ezzan amnistiant le 17 janvier 2006 les auteurs des crimes politiques perpétrés au Sénégal entre 1993 et 2004, le plan « jaxay » pour faire avaler le couplage des élections qui ont finalement été « découplées », le décret n°2006-1350 du 08 décembre 2006 fixant la répartition des sièges des députés jugé non-conforme à la loi par le Conseil d’Etat et ses conséquences, la vote de la loi supprimant en novembre 2006, sans consensus, le quart bloquant pour l’élection du Président de la République, la prorogation à deux reprises du mandat des députés élus aux suffrages universel direct, la dissolution du Conseil Régional de Diourbel, etc…Toutes ces manipulations politiques avaient comme objectifs : caser une clientèle politique, écraser toute opposition significative et conserver le pouvoir durant cinquante années. Quelle ruse politique !
Le festival de grandes manœuvres politiques a connu une phase sombre dans l’histoire des institutions du Sénégal avec le duo infernal Wade/Idy (dualité au sommet de l’Etat et ses conséquences, les chantiers de Thiès). L’histoire retiendra que les relations entre ces deux acteurs de l’alternance sont complexes voire énigmatiques. Nos institutions et nos populations en ont beaucoup souffert. A quand la lumière ? Toutes ces comédies, ces tripatouillages, ces calculs politiciens ont subtilement été maquillés sur le sceau de la légalité au détriment de l’intérêt supérieur de la Nation. A quand alors la fin des manœuvres politiques pour des manœuvres sociales au profit de l’intérêt des populations ?
La démocratie, à mon humble avis, n’est pas uniquement le suffrage universel. C’est aussi le respect des règles et principes démocratiques et la transparence dans la gestion des finances publiques. C’est surtout le dialogue, le consensus constant et permanent entre tous les acteurs majeurs en vue des solutions aux problèmes politiques, électoraux ou institutionnels. Tous ces manœuvres politiques du régime actuel n’ont jamais fait l’objet de consensus entre tous les acteurs majeurs de la vie nationale. « Oui, c’est comme ça… ! La démocratie du plus fort est toujours la meilleure » s’exclamait Alpha Blondy. Quelle cohérence démocratique !
Chers gouvernants, le moment est venu pour s’occuper enfin de la demande sociale. Il y a beaucoup à faire face au déficit budgétaire à près de 6% du produit intérieur brut en 2006, au déficit de la balance commerciale, au déficit de dialogue avec l’opposition boycotteuse, au déficit de vertus morales, au déficit de la pluviométrie, et au recul démocratique.
On a réparé un avion présidentiel à coût de milliards mais on est incapable de trouver deux à trois bateaux pour désenclaver définitivement la Casamance. On a trouvé des milliards pour élargir et embellir une corniche mais on est incapable de régler les délestages intempestifs. On crée un Sénat à coût de milliards mais on est incapable de régler le chômage des jeunes qui continuent de prendre des embarcations pour d’autres « paradis terrestres ». On achète des véhicules 4x4, à coût de milliards, à des députés mais on est incapable de régler les problèmes de transport avec le petit train de banlieue de Dakar, la fatigue du monde rural, l’insalubrité, l’incivisme etc...
Le Sénégal, qu’on le veuille ou non, vit au rythme d’un calendrier successoral. Tout porte à croire que ces grandes manœuvres politiques vont perdurer au sommet de l’Etat. Bataille de positionnement pour la succession du Président Wade oblige. On risque encore une fois d’installer le pays dans une nouvelle campagne électorale permanente. Pauvre Sénégal ! A ce rythme, à quand va- t- on attaquer à la demande sociale ?
« Soyons ingrats si nous voulons sauvez la Patrie » disait Saint-Just , un célèbre homme politique français. Pour un Sénégal meilleur, je souhaite vivement une société civile dynamique et forte, une riposte civique et une opposition non pas de colère mais solidaire et unie pour déjouer toutes manœuvres de politique politicienne. Chers citoyens sénégalais, soyons des citoyens patriotes car le patriote est celui qui soutient la République en masse ; quiconque la combat en détail est un traître. Soyons alors les défenseurs d’un Sénégal de liberté, de justice et de paix. Il faut également que les acteurs majeurs soient à cheval sur règles et les principes de bonne gouvernance pour exiger plus de transparence et plus de vertu dans la gestion des finances publiques. Enfin, chers gouvernants, il incombe à vous de révolutionner les mentalités pour développer notre pays. Vous en avez les moyens car les milliards sont entre vos mains. Les sénégalais sont vraiment fatigués.
Ulrich Mohamet THIOUNE
Email : ulrichmohamet@hotmail.fr
La Rts pour l’apaisement de la vie politique
Cette vocation d’utilité publique devrait couler de source au moins pour deux raisons : le statut de service public d’information et de communication caractérisé par la recherche de l’intérêt général et la référence aux règles éthiques, déontologiques et professionnelles qui sont à la base du métier d’informer.
En se concentrant sur la composante audiovisuelle de ce service public, il est aisé de constater que la stratégie de communication de la Télévision nationale, toujours entre propagande et manipulation de l’opinion, pose un gros problème dans le cadre de la consolidation de la démocratie au Sénégal. Il importe de rappeler ici le mot de Voltaire qui à notre avis devrait sous-tendre le comportement de tous les acteurs au sein de l’espace démocratique : «Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai pour que vous puissiez le dire.»
Si le débat démocratique était convenablement animé et entretenu par les services publics d’information en particulier la Télévision nationale, le chef de l’Etat se retrouverait dans une effervescence politique qui ne lui laisserait pas la possibilité de se recroqueviller tranquillement dans le bocal du pouvoir et de refuser de dialoguer avec ses adversaires.
Combien de fois la Rts a permis au ministère de l’Information, à la Cap 21, à la Cellule d’initiative et de stratégie (Cis) de porter la contradiction à l’opposition, sans une seule fois donner à cette dernière la possibilité de se faire entendre. Un tel traitement de l’information, avant d’être inacceptable sous l’angle démocratique, pose un problème d’éthique, de déontologie et donc de crédibilité de l’information.
Que l’on nous comprenne bien, le rôle de la Rts, ce n’est pas de dénoncer ou de dénigrer le pouvoir. Elle doit rendre compte des activités du Gouvernement, mais elle est également tenue de rechercher l’objectivité et l’impartialité dans la quête de la vérité. Il n’est point besoin d’être journaliste pour savoir qu’il existe des techniques pour y parvenir notamment en diversifiant ses sources et en citant des points de vue opposés.
En ne respectant pas ces exigences déontologiques et professionnelles, la Rts livre des vérités simplifiées et fait même de la désinformation. Etant entendu que la désinformation ne consiste pas assez souvent à donner des informations erronées, mais à procéder à une sur-information sur certains éléments et une sous-information sur d’autres, en focalisant l’attention sur un aspect au détriment de tout le reste pourtant important, pour une bonne compréhension de la situation du pays.
Dans l’intérêt des populations (qui ne nomment pas les responsables de la Rts, mais qui les rémunèrent), l’information doit être traitée de façon équilibrée en permettant à toutes les forces vives de la nation, notamment aux acteurs politiques, d’exprimer leurs points de vue au besoin dans une optique contradictoire.
En d’autres termes, pour la clarté du débat politique, le peuple doit savoir. Ne pas satisfaire à ce minimum de dialogue démocratique, c’est faire le lit des rumeurs, des supputations, des combines, de l’incompréhension, des tensions politiques et par voie de conséquence réunir tous les ingrédients d’une explosion.
Dans le monde hyper-médiatisé du XXIe siècle, la télévision, avec la magie de l’image, joue un rôle extrêmement important sur la perception que les citoyens ont des problèmes de la vie nationale et par conséquent sur la formulation de leur opinion. A cet égard, on comprend aisément pourquoi le Président n’accepte toujours pas de libéraliser le secteur de l’audiovisuel comme l’avait fait son prédécesseur avec les radios privées.
II faut se rendre à l’évidence, ce n’est pas en faisant fi de l’opposition et en la marginalisant que l’on fera passer le Sénégal de sa situation de pays moins avancé (Pma) à celle de pays émergent. En fait, c’est à la faveur d’une dynamique démocratique participative sans exclusive qu’il sera possible d’agir ensemble de manière consensuelle et de réaliser les progrès dont le Sénégal a besoin dans beaucoup de domaines.
Compte tenu de ce qui précède, nous sommes convaincus que la vocation d’un service public d’information et de communication, c’est de contribuer à l’approfondissement de la démocratie et non à la biaiser. Nous restons également convaincus que le manque de consensus n’est pas une bonne chose pour le bon fonctionnement des institutions et le bien-être des populations.
Modou DIOP - Lyon - France / modou2@yahoo.fr
Le bureau des bourses : Désordre, inconscience et service-camarades
Si vous voulez voir du vrai désordre, de l’inconscience professionnelle même et du tripatouillage incarné, allez vous promener du côté du bureau des bourses du ministère de l’Education et vous serez bien servi et pour cause.
C’est la croix et la bannière pour les étudiants et les parents accompagnateurs. Un service social dont la nature est de soulager les citoyens, est ici transformé en véritable bunker avec des portes verrouillées. La porte d’accès ressemble à celle d’une prison cadenacée avec au moins trois gorilles gardiens aussi acariâtres qu’insolents qui bavent de rage. Les visiteurs y vivent un véritable calvaire, debout devant les barreaux ou assis à même le sol sur les marches sombres des escaliers, sous une chaleur moite et étouffante, las d’attendre des fonctionnaires de la République fantômes, toujours absents des lieux.
Les étudiants ont tout le mal du monde à retirer leurs attestations, leurs billets de voyage ou leur autorisation de sortie du territoire. Le responsable des billets de voyage, lui, a déserté les lieux. Les bénéficiaires des billets, jusqu’à la veille de leur départ, n’arrivent pas à les retirer. Ne sont servis dans ce fatras que ceux qui ont le bras long. Les autres sont aux aguets ou, las d’attendre, abandonnent pour revenir le lendemain, caressant le vain espoir de voir apparaître un fonctionnaire fantôme qui ne vient qu’en fin d’après-midi, si, toutefois, il vient.
Je demande au président de la République qui déteste la médiocrité et ne ménage aucun effort pour mettre les Sénégalais dans de bonnes conditions, de mettre fin à ce désordre et d’assainir ce service par la construction de véritables locaux fonctionnels et aérés, accueillants et l’affectation dans ces services sociaux de fonctionnaires compétents, consciencieux et humains.
Un parent d’élève