La leçon du 23 juin
Le G20, Groupe d’action pour le renforcement de la démocratie regroupant 19 partis politiques, 35 associations de la société civile, le mouvement des chômeurs et sans emplois du Sénégal et le Bloc pour le Renforcement de la Démocratie au Sénégal, a été, comme promis, à l’assaut de la rue ce jeudi 23 juin 2011. La dernière estocade du régime libéral, coup mortel porté à la démocratie sénégalaise est désormais inscrite en lettres ridicules dans l’histoire de notre glorieux peuple. Le G20 tire les conséquences de l’action des assemblées populaires à travers le pays et dans les points mythiques de la capitale. Ces véritables assemblées du peuple et pour le peuple à l’image de celles de la Tunisie et de l’Egypte ont montré que le peuple sénégalais est un grand peuple responsable dont les valeurs républicaines ne souffrent d’aucun doute. De l’avenue Cheikh Anta Diop à la place de l’obélisque en passant par l’avenue Cheikh Ahmadou Bamba jusqu’à la place de l’indépendance le G20 a montré à la minorité déviante comment s’opposer à un projet de loi impopulaire. Promesse tenue. Cela n’a pas été un rêve du G20, ni un vœu pieu. Ce fut à la portée de tous les patriotes qui aiment notre Sénégal. A partir de cette union sacrée, le Sénégal est entré dans le panthéon de l’histoire des grandes nations. Cette loi scélérate, qui a mis en danger tout le monde et a opposé les forces de sécurité au peuple qu’elles sont chargées de défendre au profit exclusif d’une famille et de ses acolytes qui veulent s’éterniser au pouvoir par cette forfaiture qui ne dit pas son nom, n’a pu faire son chemin que parce que le président de la République est entouré de pyromanes : les trois plus grands dangers de la République sont dans l’ordre : le ministre de l’Intérieur, le ministre de la Justice et le ministre de la Défense.
Si le succès de la journée du 23 juin a eu cette ampleur, c’est essentiellement grâce aux jeunes de ‘Yen a marre’ qui ont été d’exceptionnels catalyseurs qui d’autre part, ont sauvé le régime d’une mort certaine, par leur sens élevé du concept de la République. Bennoo et la ‘société civile’ créent le mouvement exclusif ‘du 23 juin’ qui devient leur propriété. Tant mieux pour eux, le message est déchiffré. Le ministre de l’Intérieur convoque pour les coaliser, les partis politiques non coalisés. Une magistrale erreur mais il est coutumier du fait. Bennoo, ‘la société civile’, les ‘amis’ du président et de sa famille n’ont rien compris et jamais ne comprendront.
50 ans de Bennoo, 10 ans de Sopi et 60 ans de ‘société civile’ n’ont pas changé la condition du peuple sénégalais. Quand ce peuple laisse entrevoir sa justice, on l’accuse de vandalisme, d’agression et de tous les maux qu’il subit lui-même depuis notre indépendance.
Qui est agressé au quotidien par l’humiliation du chômage, du sans emploi, des inondations, des maladies, des richesses indues étalées à ses yeux, du manque d’eau potable, de l’électricité, de l’inflation ? Qui a vu sa loi fondamentale modifiée 15 fois sans son avis ? Qui voit ses enfants mourir en mer ? Qui voit ses richesses bradées au profit exclusif de nantis de la République ? Où finissent les prédateurs de notre économie ? Où sont blottis ceux que le peuple a sanctionnés en 2000 ? À la présidence, dans l’entourage du président, dans celui de son fils.
Pourquoi le ministre de l’Intérieur, Me Ousmane Ngom n’a pas prévu qu’il ne pouvait pas mettre face à face, les partisans du projet de loi et le peuple ? Comment se fait-il, malgré tous les moyens que l’Etat met à sa disposition, que les dérapages d’une telle ampleur aient eu lieu ? Comment se fait-il qu’il ne démissionne toujours pas ? Pourquoi le président de la République le maintient-il toujours à son poste ?
Que dire des conseillers du président de la République ? Quand la République a traversé une telle peur, tous ceux qui de près ou de loin, directement ou indirectement ont eu vent de ce projet de loi en ayant eu le pouvoir d’en infléchir le cour et qui ont laissé faire, devraient être démis de leur fonction. Il y va de la crédibilité de l’Etat. Que dire des conseillers du fils ? Tout comme le président de la République, le fils gagnerait à mettre un grand coup de pieds dans cette ruche qui l’entoure. Karim, ‘ lekkoukaye la’, tout le Sénégal le sait, sauf Karim et ses parents. Karim doit se débarrasser de ses conseillers en communication. Wade doit écouter Pape Samba Mboup.
Le 23 juin a prouvé la nullité et l’inutilité du comité de veille qui, jusqu’à nos jours, n’a pas ouvert la bouche. C’est un tube digestif qui ne l’ouvre que pour manger. Ce comité de veille du fichier électoral sensé mettre les candidats à équidistance des électeurs, ne compte aucun candidat déclaré sur les 14 candidats existants. Le comité de veille ne compte que 2 candidats potentiels : Abdoulaye Wade et le candidat hypothétique de Bennoo. Il est donc temps que les 14 candidats déclarés créent un second comité de veille, plus représentatif que celui que nous avons, qui travaille à portes closes en ronflant à poings fermés.
El Hadj Hamidou DIALLO, Secrétaire général du BRDS
Prince Karim, vous permettez ? Créé le 5 Juillet à 11:56
Tout d’abord permettez-moi, Cher Karim, pour des règles de bienséance, de vous saluer, même si dans votre correspondance, ni au début ni à la fin, vous n’avez pris la peine de saluer vos lecteurs, ceux et celles à qui vous avez souhaité vous adresser. De ce manque d’élégance que certains assimileraient à de l’arrogance, on ne saurait vous en vouloir, parce qu’imputable à vos services de com’. J’avoue que je suis resté sur ma faim en parcourant votre missive (…). Pour une rare fois, vous avez décidé de vous exprimer en public, et tant mieux. Toutefois, ceux qui s’attendaient à une démission de votre part, ou à un mea culpa, peuvent encore rêver. Dans votre cri du cœur du 3 juillet 2011, vous vous êtes plaint du fait d’être indexé, ‘qu’il pleuve, qu’il neige, ou lorsqu’un train déraille à Thiès’. Démissionnez alors pendant qu’on y est, Petit prince ! Etant donné que vous vous sentez capable d’assumer à vous seul les portefeuilles de ministre chargé du ciel et de la terre, de l’air, des espaces verts et des embarcadères, il faut tout assumer, jusqu’au bout, et arrêter de vous plaindre.
Vous n’êtes parti de rien, soutenez-vous, alors qu’à vous seul, Karim, vous cumulez près ou plus de 40 % du budget de l’Etat de notre pays. Que vous reste-t-il, que vous faudrait-il d’autre, vous qui bénéficiez des privilèges du père ? Enfin, comment osez-vous dire que vous n’êtes parti de rien ? Vous qui êtes habilité au gré du vent à émarger en lieu et place du ministre du Budget ou des Finances ! Vous qui vous occupez, par moments, de certaines questions qui relèvent du ressort de la diplomatie sénégalaise - je fais allusion à l’escapade de Benghazi, ou à l’affaire Clothilde Reiss, entre autres sujets délicats ne relevant point de vos prérogatives…
Vous avez raison, Karim, de dire que comme tout être humain, vous demandez ‘à être entendu, jugé sur des actes vérifiés et donc probants et non sur des rumeurs sans fondement’. Là encore, vous adoptez une posture victimaire, lorsque vous estimez que vous êtes jugé sur des considérations autres que vos résultats, lesquels tardent à venir : la question de l’énergie que le président vous a confiée depuis bientôt un an, est devenue plus que préoccupante aujourd’hui. Ceux qui réclamaient la tête de Samuel Sarr sont les mêmes qui aujourd’hui exigent votre départ, et ce, pour les mêmes raisons : absence de résultats.
Si les populations en sont arrivées aux émeutes, ce n’est guère pour vous féliciter de votre nomination à la tête du département de l’énergie. Cela signifie tout bonnement que la situation est devenue intenable, vous êtes le mieux indiqué pour le savoir. Cher Karim, il faut que vous sachiez que votre contribution est légitime au titre de citoyen, mais pas indispensable à la bonne marche de ce pays que nous avons tous en commun : le Sénégal, qui ne s’arrêtera pas le jour où vous et votre père ne serez plus aux commandes.
J’ai envie de vous dire que vous étouffez sous le poids des charges qui vous sont confiées, Karim, il fallait les refuser par grandeur d’esprit. Elles sont devenues un fardeau. Car en essayant de vous faire passer pour un surhomme, votre cher père a fini par vous initier aux couleurs du ridicule. J’aurais préféré que vous occupiez un seul département et en réussir les objectifs plutôt que d’être partout en vous appropriant les plus juteux portefeuilles du gouvernement, sans résultat. C’est d’être nulle part que de vouloir être partout, l’adage le dit si bien. Parce qu’il n’y a aucun pays au monde où vous trouverez un ministre avec des charges aussi lourdes que les vôtres.
Je me garderais, petit prince, de vous psychanalyser, mais vous devez comprendre que la démocratie sénégalaise dont vous parlez dans votre missive, n’a que trop souffert de votre patronyme, qui à chaque fois qu’il est évoqué, laisse sous-entendre des velléités de succession dynastique. Abdou Diouf et Senghor à qui vous faites allusion, avaient bien des enfants, qui n’étaient pas moins valeureux que vous, mais qui ont su adopter une certaine discrétion vis-à-vis des charges et pouvoirs confiés à leur père. Vous, non, vous vous êtes présenté en sauveur, en messie dans une certaine mesure.
Quant à vos différends avec vos anciens camarades de parti, devenus des opposants de circonstance, ils intéressent peu les Sénégalais. Je vous comprends lorsque vous vous en prenez à certains d’entre eux. Parce qu’ils ne sont plus conviés au festin, deviennent des bêtes noires du régime, et brandissent l’argument de la dévolution monarchique dans le seul but de se refaire une virginité politique. Ils citent votre nom pour soi-disant justifier leur mis à l’écart des sphères du pouvoir. Ceux-là, le peuple les a à l’œil, et le moment venu, la bonne graine sera séparée de l’ivraie. Mais de grâce, arrêtez de crier avec les loups, Karim : cette idée de dévolution monarchique que vous même qualifiez ‘d’insulte à notre démocratie’, n’a pas été inventée par la presse locale, nationale, encore moins par la presse étrangère. Peu importe si c’est vous même, ou votre père, qui a eu l’idée de vous inscrire sur les listes électorales en mars 2009 pour faire de vous le maire de Dakar. Mais convenez avec moi que les actes que vous et votre père posez incessamment depuis bientôt dix ans, confortent cette thèse de jour en jour. Seulement, en sémiologie, on nous apprend que lorsque vous apercevez un nuage dans le ciel, prenez vos précautions avant que la pluie ne vous prenne au dépourvu.
Je n’aimerais pas être long, je le suis déjà, Petit prince. Comme tout citoyen, vous avez le droit et le devoir de servir le peuple, mais aussi, acceptez d’être comptable lorsque vous décidez de gérer les deniers publics, l’argent du contribuable. C’est justement votre refus de rendre des comptes qui accentue les spéculations à votre endroit. Je prends congé de vous, cher Karim, en espérant que vous conseillerez au président, votre père, de sauver la face en renonçant au pouvoir avant que le pouvoir ne renonce à lui. Dites à votre père que le pouvoir est comme le conjoint infidèle : quand on tente de le séquestrer, il finit toujours par vous quitter. Chez nous, comme vous l’avez si bien remarqué dans votre correspondance, le pouvoir ne se conquiert pas par la ‘voix’ des urnes, mais par la ‘voie’ des urnes. L’envisager par les armes, relève de la petitesse d’esprit.
Bien à vous, Petit prince.
Momar MBAYE http://mbayemomar.over-blog.net
Une presse prisonnière de son droit
Avec une Alternance démocratique réussie le 19 mars 2000, notre pays avait réussi à se hisser dans le petit cercle africain des pays calmes et démocratiques, même si aujourd’hui cette renommée lui est contestée avec l’élection présidentielle du 25 février 2007 dont la fin du processus a été un véritable fiasco, ajouté à cela le boycott des élections législatives de 2009, dont on ne peut se targuer. Cet acquis dont la nostalgie commence à s’installer, n’a été possible que grâce à la conscience démocratique de ses gouvernants mais aussi d’une population naturellement éprise de paix et de justice, imprégnant ses valeurs à une presse multiple et vivace qui joue sans discontinuité son rôle de contrôle, de contre-pouvoir, bref de sentinelle de la démocratie dans un parfait professionnalisme et le respect de l’éthique et de la déontologie.
Mais cette médaille n’est pas sans revers, qui s’exprime sous la forme d’un bouillonnement médiatique, faisant même parler d’une presse partisane ou à scandale. C’est ainsi qu’au moment ou certains organes naissent, d’autres font leurs tristes adieux, par le moyen de sanctions d’infractions comme l’injure, la diffamation, la diffusion de fausses nouvelles, la violation de la vie privée etc., suscitant dès lors chez toute personne soucieuse de la bonne marche de notre démocratie et de la protection des libertés publiques et particulièrement de la liberté d’expression, le reflexe de s’interroger sur la pertinence de certaines dispositions du droit de la presse sénégalaise.
A ce propos, le Sénégal à l’instar de bon nombre de pays africains, s’est inspiré de la vieille loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et sur d’autres instruments internationaux comme la Charte africaine des droits de l’Homme ou la Déclaration de Munich de 1971.
Dans le souci de consolider cette garantie constitutionnelle consacrée à l’article 10 de notre Charte fondamentale, était intervenue la loi 96-04 du 22 février 1996 relative aux organes de communication sociale et aux professions de journalistes et de techniciens de la communication.
Au regard des dispositions de cette loi, l’on constate qu’un véritable problème d’effectivité dans l’application du droit des medias se pose et il n’est point nécessaire d’être juriste, sociologue des medias ou acteur du monde de la communication pour se convaincre de ses nombreux déboires. En effet, du fait de ses références à une loi française vétuste et obsolète qui comporte beaucoup d’aspects répressifs conférant aux journalistes plus de devoirs que de droits, cette législation se révèle contraignante et dépassée par l’évolution du monde. C’est peut-être, la raison principale qui explique que les délits de presse soient sévèrement sanctionnés.
Il s’agit principalement des délits de presse portant atteinte à la chose publique et ceux qui concernent les particuliers. Pour les premiers il s’agit de l’offense au chef de l’Etat prévue par l’article 254 du Code pénal qui ne donne aucune définition précise de l’infraction précitée ; et les journalistes maliens, du fait de la communauté d’héritage juridique, en ont fait les frais il y a quelques années, avec l’affaire dite de «la maîtresse du Président». Ce qui confirme qu’en Afrique pour une affaire anodine, un journaliste peut se retrouver devant le temple de Thémis et finalement atterrir en prison.
Le droit tend le même piège aux professionnels de la communication dans la diffusion de fausses nouvelles prévue à l’article 155 du Code pénal qui renferme les mêmes imprécisions pouvant constituer un sérieux recul pour le journalisme d’investigations.
Pour les délits de presse portant atteinte aux particuliers, citons tout simplement la diffamation, dont les condamnations sont plus spectaculaires avec le renversement de la charge de la preuve qui n’est guère libre, au regard des dispositions de l’article 414 du Code de procédure pénale institué par la loi 65-61 du 21 juillet 1965 qui en pose le principe de la liberté.
Cette remarque, du point de vue législatif, est doublée de nombreuses crises que connaît actuellement le Sénégal avec l’augmentation des prix des denrées de première nécessité qui a fini d’asphyxier les populations, sans oublier les problèmes d’éducation, de mobilité, de santé, de sécurité, de salubrité, le pillage des ressources publiques ; autant de problèmes qui ont largement contribué à la réussite des manifestations du 23 juin 2011 mais aussi des émeutes dites de l’électricité. Etant républicain, on ne peut qu’être ébaubi face à la banalisation et au piétinement de nos institutions, sans oublier les nombreuses tentatives de monarchisation. Ce qui du reste, n’est pas souhaitable pour un pays longtemps considéré comme une vitrine de la démocratie et de la stabilité en Afrique de l’ouest.
Sous ce rapport, il y a de quoi s’alarmer face au retard d’un nouveau code de la presse plus souple et plus promoteur de la liberté d’expression et de l’entreprise de presse, dans la prise en compte de l’évolution des Technologies de l’information et de la communication.
Si l’on sait que les medias sont aujourd’hui l’unique voix d’un peuple complètement perdu dans la pauvreté et la misère, ceci dans un contexte marqué par un manque de confiance en une opposition vieillissante, en carence d’inspiration et de courage politiques.
Sans avoir la prétention d’être exhaustif, on pourrait se demander si l’arsenal législatif sénégalais dans le domaine de la presse ne constituerait pas une véritable menace pour la profession de journaliste.
En effet, ce sont entre autres les sanctions pénales et la violation flagrante des principes fondamentaux de la procédure pénale qui ont poussé certains acteurs à souhaiter l’orientation vers la dépénalisation des délits de presse qui apparaît comme une nécessité à la survie des entreprises de presse, à la seule et unique condition que cette dépénalisation ne rime pas avec l’impunité synonyme d’injustice. Pathé BA - Conseiller Juridique - Chercheur en Science Politique. / pathebateps©yahoo.fr