D’UN GRAND DEMOCRATE
LE PARADOXE D’UN GRAND DEMOCRATE
Les partisans de Abdoulaye Wade, ses souteneurs, ses proches, ses collaborateurs ses inconditionnels ou encore ses affidés et même certaines brebis égarées et véreuses de la classe politique, sans doute boulimiques et assoiffées de pouvoir et qui ont fini par le rejoindre à la dernière minute, ont toujours soutenu, mordicus, partout et en tout lieu que Maître Wade est un Grand démocrate. Ce dernier s’en est senti tellement flatté, tellement flagorné, adulé et berné qu’il demeure tout à fait comblé, satisfait et serein tout en pavoisant tranquillement du haut de son perchoir intangible.
Il est peut-être important de rappeler et de reconnaître, en toute honnêteté, que l’homme lui-même a connu, par le passé, un parcours politique extrêmement riche et alléchant, parcours quelques fois ponctué de bagnes et de brimades de toutes sortes que le régime d’alors lui infligeait mais, auxquelles il a su courageusement résister, des années durant. On sait également qu’il a été, à l’instar de beaucoup d’autres hommes et femmes de la nation, de tous les combats politiques épiques qui ont contribué triomphalement à l’avènement de l’alternance dans notre pays. Il a été, bien entendu, avec la création de son parti politique le Pds en 1974, à côté de quelques formations politiques de l’époque, de ceux-là qui ont permis l’émergence d’un nouveau paysage politique avec une certaine visibilité et un renforcement réel du multipartisme national. Ce combat historique et stoïque a quand même le mérite de lui être reconnu à juste titre et à tout point de vue.
Cependant, tous ces inconditionnels et ces fanatiques du président qui prétendent et répètent à souhait, quelques fois sans aucune conviction réelle, que Wade est éminent démocrate en Afrique voire au monde, se fondent uniquement sur son riche itinéraire politique dont nous avons fait cas plus haut, et surtout sur certains de ses rêves à l’échelle continentale, rêves ; certes panafricanistes mais, dont la réalisation de la plupart s’avère complètement utopique. Il faudrait que ces gens se rendent à l’évidence que le parcours d’un homme politique, si riche fût-il, ne sied nullement pour que l’on puisse dire de lui qu’il est un grand démocrate. Dans une République, et surtout quand vous exercez le pouvoir que le peuple vous a souverainement confié, et en tant que premier garant des institutions de l’Etat, vos intensions, vos paroles, vos déclarations, vos prises de positions, vos sorties et vos actes quotidiens, sont d’autant plus importants et sacrés au regard de la loi et aux yeux de vos compatriotes qu’ils déterminent même la nature du pouvoir que vous êtes en train d’exercer. Et la démocratie est forcément prise en otage, lorsque les citoyens ne se retrouvent plus dans les actes posés par les tenants du pouvoir, notamment, par celui qui incarne la première institution de la République.
Malheureusement dans notre pays, nous avons constaté et nous continuons encore de constater, avec amertume et regret, que certains actes posés par Maître Wade se distancient, en réalité, des principes démocratiques au premier degré. Nous pouvons, en guise d’illustrations, donner toute une forêt dense d’exemples, mais nous allons simplement nous limiter à un seul.
Quand le président Wade est arrivé au pouvoir en 2000, un an après, en 2001 précisément, il soumet une novelle constitution au peuple qui l’a plébiscitée. Cette nouvelle constitution va désormais limiter la durée du mandat présidentiel à cinq ans, renouvelable qu’une seule fois. Ce qui fut, à priori, très excellent pour un président nouvellement élu, débordant d’ambitions et dont on subodorait encore d’autres actes républicains susceptibles de renforcer les acquis démocratiques dans notre pays. Par cette nouvelle réforme constitutionnelle limitant la durée et le nombre de mandats présidentiels, nous avions eu au départ, l’euphorique sentiment, comme d’ailleurs beaucoup de Sénégalais, que le président Wade avait naturellement compris que l’exercice d’un pouvoir a bien des limites raisonnables au-delà desquelles, ce pouvoir cesserait de s’exercer démocratiquement. Nous avions également eu l’impression que le président Wade, par cet acte fort et salutaire, voulait définitivement marquer une rupture profonde avec certaines pratiques rétrogrades, moyenâgeuses et antidémocratiques de beaucoup de chefs d’Etats africains, y compris les Présidents Senghor et Diouf (20 ans au pouvoir pour le premier et 19 ans pour le second), qui avaient tendance à s’éterniser au pouvoir.
Mais le paradoxe le plus renversant se révélera plus tard, quand maître Wade lui-même, avait avoué solennellement, à la face du monde entier et à travers les media, l’intention pour les libéraux de conserver le pouvoir pendant cinquante ans. Les Sénégalais et le monde entier se souviennent encore et se souviendront toujours, comme dans un conte de fée, de cette déclaration fracassante du président qui les a tous laissés éberlués. En affichant ainsi cette volonté de vouloir conserver le pouvoir, le plus longtemps possible, beaucoup plus longtemps d’ailleurs que les socialistes qui l’ont précédé, on voit là une certaine contradiction abyssale entre l’esprit de la nouvelle disposition constitutionnelle limitant la durée et le nombre de mandants présidentiels et cette volonté manifeste à vouloir conserver le pouvoir le plus longtemps possible que ne le permet la Constitution. Voilà une intention, en réalité, qui n’a absolument rien de démocratique puisqu’elle vient fouler aux pieds l’échéance temporelle bien définie dans la Constitution et qui sanctionne raisonnablement l’exercice du pouvoir. On ne peut pas prétendre servir la démocratie en procédant de façon sournoise, astucieuse et insidieuse, ou bien en posant, au départ, certains actes forts qui ont mérité l’adhésion du peuple, pour venir par la suite, leur opposer des velléités et des démarches incongrues, incompréhensibles et bancales.
Mais le plus inquiétant dans cette intension antidémocratique avouée par le président de la République, c’est son caractère obsessionnel et aveuglant de la longévité du pouvoir suscité dans l’esprit de ses partisans et autres affidés habitués aux délices du trône qu’ils ne sont plus prêts à lâcher très tôt, ayant été rassurés d’avance par le chef lui-même. On peut, dès lors, comprendre l’opiniâtreté inouïe et l’acharnement démentiel de ce régime finissant, à vouloir s’agripper et à s’adosser au pouvoir pour le conserver encore plus longtemps par tous les moyens. C’est là qu’il faut également appréhender l’une des raisons fondamentales qui justifient l’inacceptable volonté manifeste de la dévolution monarchique du pouvoir qui continue toujours de flâner dans le Ciel serein et paisible de notre cher pays.
M. Babou DIATTA
Professeur de Portugais au Lycée Malick Sy de Thiès
E-mail : thelougoumba@hotmail.com
Respectons les enseignants
A entendre certains de nos compatriotes parler des enseignants ou des choses les concernant, on est du coup saisi par une soudaine envie de tomber à la renverse, tellement qu’ils parlent d’eux avec une certaine désinvolture, sans égard, sans respect et parfois avec un total mépris. Combien de fois au quotidien, n’a-t-on pas entendu, à l’endroit des enseignants, des propos du genre : «…Ces enseignants là …», «Ils sont tout le temps en grève…», «Ils ne travaillent pas…», «Ils sacrifient les apprenants…», « ils n’en font qu’à leur tête…», «Ils ne sont bons qu’à faire de la consultance (vulgairement appelée «kharmat ») …», «Ils sont cupides et radins…», encore et encore…
En réalité, ces genres de propos que l’on entend sans cesse et qui sont à la limite choquants et offensants, ne sont pas de nature à respecter ni à honorer les enseignants.
De grâce, que l’on arrête de lapider ces enseignants. Que l’on cesse de les saupoudrer de mépris. Ce sont des citoyens honnêtes et responsables, des pères et mères de familles engagés qui méritent plus de respect et de considération. Ils sont tout aussi méritants que n’importe quel autre fils ou fonctionnaire de ce pays. Ils font partie de l’élite de la nation. Ils ne sont pas que seulement dans les salles de classe. Ils sont présents dans beaucoup de secteurs-clés de l’économie de notre pays, que ce soit dans l’administration ou dans le gouvernement. Si par exemple, on venait aujourd’hui à extirper les enseignants de l’équipe gouvernementale de la République, les autres membres qui resteraient, seraient comptables du bout des doigts. Voilà une preuve indéniable qui montre que les enseignants constituent véritablement le substratum de l’intelligentsia nationale. L’actuel chef de la magistrature suprême de notre pays ne fut-il pas un enseignant ? Alors !... Arrêtons, encore une fois, de nous moquer des enseignants. Ils n’ont rien fait d’autre que d’avoir choisi un sacerdoce, l’enseignement, l’éducation et la formation des jeunes, un travail noble, mais difficile dont ils s’acquittent d’ailleurs avec beaucoup de sacrifices et de compétences pour servir dignement la Nation et contribuer ainsi au développement du pays. Il est évident que l’environnement scolaire et universitaire dans lequel ils travaillent est devenu précaire, pollué et traverse un ouragan récurrent de problèmes pour lesquels on n’a jamais voulu faire des efforts conséquents pour leur trouver définitivement des solutions, malgré les slogans propagandistes et démagogiques que l’on a toujours entendus ça et là.
Tout le monde sait que l’éducation et la formation des jeunes sont à la base de tout processus de développement social et économique d’un pays. On ne peut imaginer un pays sans éducateurs, sans enseignants. Tout cadre ou tout autre agent de l’Etat est naturellement passé par les mains de l’enseignant. Il est clair qu’un Etat se construit avec des enseignants bien formés, dignement traités, respectés et considérés.
Mais, nous sommes malheureusement dans un pays où l’enseignant demeure encore le parent pauvre de la fonction publique. C’est ce qui justifie d’ailleurs qu’aujourd’hui, plus personne n’est motivé pour aller exercer le métier de l’enseignement. La fonction enseignante est tellement désacralisée, banalisée et dévalorisée que n’importe qui peut devenir enseignant, alors que n’importe qui ne peut prétendre devenir, du jour au lendemain, administrateur, juge, médecin ou magistrat. Où est le sérieux ?
L’enseignant est aussi le seul agent de la fonction publique qui, quand il est commis pour une mission (organisation et correction des examens du Baccalauréat et du Bfem), reste pendant des mois avant de recevoir ses honoraires de mission au moment où d’autres agents, qui ne sont pas plus méritants que lui, entrent immédiatement dans leurs fonds à la fin de leur mission. Où est le respect ? Et il a toujours fallu que l’enseignant décrète des mots d’ordre de grève, contre son gré, pour pouvoir entrer dans ses frais de mission. Où est le respect ?
En effet, il est important de savoir que tout ce malaise profond, tous ces mauvais traitements, ces injustices et surtout le manque de respect et de considération que vive l’enseignant dans sa chair, le placent, évidemment, dans une posture qui l’oblige à vouloir conquérir et préserver ses droits de telle sorte que le reste de la société le perçoit plutôt comme un revendicateur permanent et aguerri voire un rebelle. Or, lorsque l’enseignant est réduit à un éternel mendiant de la fonction publique, cela se traduit nécessairement par des sentiments de frustration et de révolte incontrôlables qui finissent inéluctablement par exploser au grand jour. Et c’est là précisément que réside tout le cancer qui affecte dangereusement notre système éducatif national.
M. Babou DIATTA,
Professeur de Portugais
au Lycée Malick Sy de Thiès
thelougoumba@hotmail.com
Magistère de Wade ou le culte du doute
Depuis 2000, et même avant, Me Abdoulaye Wade nous a habitués à des aventures sans épilogue, laissant notre peuple, en permanence, dans sa faim de savoir.
Nos mémoires sont encore hantées par l’affaire Me Babacar Sèye dans laquelle il a été cité, inculpé, puis relâché, sans que la lumière soit faite jusqu’ici. Certes, le temps finit toujours par révéler ses secrets. Pour autant, l’attidude de Maître Abdoulaye Wade tant à l’endroit de la famille du défunt Maître Babacar Sèye que des meurtriers présumés, condamnés puis graciés et même, paraît-il financés, fait planer le doute. Mais, comme disait l’autre, laissons du temps au temps.
Le doute, encore le doute et toujours le doute tant sur les affaires précitées que d’autres affaires criminelles qui se sont succédé durant le magistère malheureusement ensanglanté de Me Abdoulaye Wade.
Les coups de marteau meurtriers sur Talla Sylla, l’incendie criminel de la Bourse du Travail, le meurtre de Balla Gaye et d’autres affaires toutes aussi ensanglantées restent toujours non élucidées. La dernière connue étant le meurtre de Malick Bâ à Sangalkam.
Les multiples agressions subies par la presse avec les attaques contre le journal L’As et le Groupe Walfadjri sont également des tentatives de déstabilisation des médias libres sénégalais par l’installation du sentiment d’insécurité et de peur dans leurs rangs. Fort heureusement, habités par les principes d‘honneur et de dignité qui sont les vertus fondamentales de notre peuple, nos compatriotes qui ont opté pour le sacerdoce d’informer notre peuple, d’éveiller la conscience citoyenne et de dire seulement la vérité, développent chaque jour une ténacité bien supérieure aux intimidations qu’ils ne cessent de subir. Jusqu’à ce jour, ces agressions demeurent impunies et nous laissent dans le doute.
Comment dans un pays, quel qu’il soit, peut-on espérer l’équité de la part de la Justice quand l’Etat n’est ja¬mais tenu responsable de fautes a¬vérées et que la machine judiciaire elle-même semble mise au service de règlements de querelles politiciennes ?
L’utilisation du doute comme moyen de brouillage et d’aliénation du peuple sénégalais et son usage fréquent à dessein pour discréditer les adversaires politiques aux yeux du peuple, sont devenus des moyens ordinaires de marketing politique.
L’innommable affaire dite des «Chantiers de Thiès» avec son cortège d’épreuves douloureuses subies par monsieur Idrissa Seck, sa famille, ses proches et son entourage participe de la même stratégie du doute pour discréditer. Malgré la non condamnation de monsieur Seck, finalement blanchi, le mal est fait. Aujourd’hui encore, le préjudice a laissé des traces dans certains esprits toujours habités par le doute.
Et pourtant, dès l’entame de cette stratégie funeste d’installation du doute pour le discréditer et le détruire, monsieur Seck avait clamé haut et fort que «jusqu’à l’extinction du soleil on ne trouvera rien qui puisse entacher (son) honneur».
N’était-ce pas Abdoulaye Wade qui disait : «Je ne pourrai pas me présenter à l’élection de 2012, car la Constitution me l’interdit. J’ai bloqué le nombre de mandats à deux.»
Mais l’appétit venant en mangeant et les germes de la monarchisation déjà semés, la horde de propagandistes opportunistes a fini de convaincre le «Roi» qu’il était le seul Sénégalais valeureux capable de conduire le bateau du Sénégal vers les horizons de l’émergence économique.
Cela constitue le plus grand affront jeté à la figure des Sénégalais envers qui, le Président est même allé jusqu’à dépasser sa personne pour simplement penser que sa progéniture est de loin la meilleure de notre pays.
A propos de bateau, Le Joola restera gravé dans la mémoire de l’histoire de la navigation. Avec un moteur au lieu des deux requis, plus de 2 000 personnes à bord au lieu des 500 réglementaires, un tonnage largement dépassé et inconnu, personne n’est responsable sinon le commandant de bord déclaré naufragé parmi les victimes. Et pour couronner ce drame, le refus du renflouement du bateau qui aurait permis d’établir des certitudes sur les vraies causes du naufrage, installant un doute permanent et l’impossibilité de faire un vrai deuil pour les familles des victimes non retrouvées.
Jamais dans notre histoire nationale, le peuple sénégalais n’a autant douté. On doute de tout et tout le monde doute.
Le gouvernement lui-même doute. Les ministres vivent avec angoisse le syndrome du limogeage possible à tout instant. Et dans la haute Administration, les hauts responsables des services de l’Etat s’attendent à être défénestrés à chaque Conseil hebdomadaire des ministres. Ce faisant, installés dans ce doute permanent et angoissant, chacun cherche à sauver sa tête, non par des résultats dans les actions de construction nationale, mais dans le degré d’allégeance et de laudation au «mo¬narque» et à sa famille.
Les élus, redevables du suffrage des populations, ne sont pas épargnés de ce doute permanent et angoissant. Les maires, présidents de Conseil régional, de Conseil rural et leurs conseillers s’attendent à tout instant à se retrouver démis et remplacés par une délégation spéciale, souvent pour des raisons qui n’ont aucun lien avec leur gestion ou la légalité des actes qu’ils posent au nom des populations. Le tout est accompli, sans état d’âme, par un ministre plus soucieux de modifier la carte électorale selon les intérêts de son camp que de faire un maillage harmonieux du territoire.
Ce doute permanent et angoissant est accompagné d’une campagne systématique de dénigrement contre tous ceux qui ont le patriotisme de refuser le diktat de la pensée unique.
Ce sont alors des chapelets de calomnies, de dénigrements, de diffamations, de complots, d’harcèlements et même d’agressions contre des citoyens dont le seul tort est de dénoncer les manquements, tout en proposant le redressement de notre pays déstructuré.
Ce battage dans les cerveaux est si prégnant que les citoyens les plus fragiles doutent aujourd’hui tant à l’endroit des personnes capables d’apporter le changement nécessaire, que sur les programmes considérés comme de vaines promesses de politiciens en quête de pouvoir pour se servir et non pour servir le peuple.
Cette stratégie basée sur le doute absolu n’a en fait qu’un seul objectif : développer un réflexe de défense dans l’esprit des Sénégalais, tuant chez nous toute envie de nous lancer dans une nouvelle aventure politique qu’on nous prédit déjà chaotique pour installer une peur du changement devenu indispensable, si nous voulons sauver notre pays.
Malheureusement, les théoriciens et praticiens du doute oublient de compter avec le patriotisme, l’intelligence, le courage et la détermination du peuple sénégalais debout qui ne laissera personne «monarchiser» ou détruire notre République. L’Histoire du Sénégal est jalonnée de hauts faits dans sa marche tant pour l’Indé¬pen¬dance que pour l’avènement d’une vraie démocratie.
Le peuple sénégalais debout ne reculera jamais.
Les théoriciens et praticiens du doute auront beau faire, ils ne réussiront jamais à maquiller la réalité.
Le peuple sénégalais debout sera toujours présent et alerte pour déjouer toute ruse et continuer sa marche irréversible vers un horizon de paix, de liberté, de réelle démocratie et de prospérité dans la justice et la solidarité.
Et ce sera la fin du magistère du doute et l’ère d’une nouvelle espérance pour le brave peuple sénégalais.
Docteur Moustapha LO
Responsable politique Rewmi
LOUGA
Bennoo: Niasse et/ou Tanor
La politique n’est ni la morale ni la religion. Elle est affaire d’intérêts, de conquête et de conservation du pouvoir d’abord et avant tout. Dès lors, seule l’efficacité compte. Et la question de la candidature, aussi essentielle soit-elle, ne saurait se réduire à l’égo. Niasse et Tanor ont de la compétence et de l’expérience à revendre. Si leurs itinéraires politiques ont divergé un moment ; les circonstances les ont fait converger à nouveau. Unis dans l’opposition contre le régime libéral, ils ont démontré, jusqu’ici l’un et l’autre, leur détermination, leur rigueur et leur maturité politique. La cure d’opposition révèle les caractères bien trempés et les citoyens qui ont donné la victoire à Bennoo en 2009 ne s’y sont pas trompés. Niasse et Tanor, avec leurs alliés, ont gagné de nouveaux galons de crédibilité et de patriotisme. Leur engagement, s’il a pour finalité la conquête du pouvoir, ne s’épuise pas dans ce combat. Il est aussi patriotique car ces deux-là ne cherchent ni à s’enrichir ni à gagner de nouveaux lauriers. Ils ont, chacun, occupé des fonctions éminentes et ne sont pas en proie à des fins de mois difficiles.
Mais ils ont conscience de pouvoir apporter des solutions plus efficaces et plus justes (dans le sens de la morale républicaine) aux problèmes qui assaillent leurs compatriotes. Et que le régime en place n’arrive pas à résoudre. D’aucuns diront qu’ils ont déjà été au pouvoir et qu’ils seraient des ‘has been’. Un tel jugement est erroné car le contexte a changé et ce qui manque le plus aujourd’hui c’est la compétence. Ce n’est pas un hasard si des personnalités respectées de tous les Sénégalais comme les Professeurs Abdoulaye Elimane Kane, Abdoulaye Bathily et Maguette Thiam, mais aussi Amath Dansokho etc…qui ont été des opposants résolus de Senghor soutiennent, aujourd’hui, Niasse et Tanor. C’est parce qu’elles (ces personnalités) les ont pratiqués, comme on dit et croient en la dynamique de changement à l’œuvre dans la Nature et dans chaque être vivant.
Il est vrai qu’il y a des gens qui changent mal, si on peut dire et d’autres qui se bonifient. C’est le cas de Niasse et Tanor qui remettraient, si Bennoo arrive au pouvoir, le pays sur de bons rails. Avec tous les patriotes révoltés par les excès du régime Wadiste. Alors il faut trancher la question de la candidature qui ne sera pas un choix exclusif : Niasse ou Tanor. Mais un choix inclusif : Niasse et/ou Tanor. Les deux font la paire dans l’intérêt bien compris de tous. La victoire sera à ce prix ; sinon ce sera la désillusion. Ceux qui poussent à la désunion manquent d’expérience et de vision. Il faut donc jeter la rancune à la rivière et opter pour l’unité. Contre vents et marées. L’un sera désigné ; l’autre le soutiendra. Choix de raison. Choix politique.
Mouhamadou M. DIA, Professeur de Philosophie-Journaliste
Idrissa Seck : Une trajectoire politique à géométrie variable
Les deux maximes de tout grand courtisan sont : toujours tenir son sérieux et ne jamais tenir sa parole. ‘Je ne serais jamais candidat tant que Wade se présente’, nous balançait Idrissa Seck bien avant 2007. Les Sénégalais ne sont pas si amnésiques que cela pour se rappeler des moindres détails de la trajectoire politique de Monsieur Seck. Pourquoi une telle déclaration ? Idrissa Seck a toujours lorgné le fauteuil du président de la République et espérait toujours la clémence de ce dernier pour retourner aux affaires. Aujourd’hui, Idy s’est radicalisé comme ce ne fut jamais le cas en clamant haut et fort sa rupture définitive avec Wade. Eh bien, tout ceci n’est qu’un cours de rattrapage, suivez mon regard. Si vous observez bien, M. Seck s’est radicalisé et a pris son courage politique à deux mains juste après les événements du 23 Juin où il a débuté son opération de charme à l’endroit du peuple avec des attaques violentes à l’endroit du chef de l’état et de son fils.
Pourquoi la date du 23 Juin ? Idrissa Seck en fin politicien a attendu la victoire du peuple sénégalais pour décliner sa trajectoire. Avez-vous entendu une seule fois M. Seck dénoncer le ticket présidentiel ? Pas à ma connaissance. Il a toujours joué le jeu avec Wade pour se servir d’un raccourci vers le palais et je peux vous assurer que si la candidature de Wade était validée, il changera automatiquement de veste. On ne se débarrasse pas d'une habitude en la flanquant par la fenêtre ; il faut lui faire descendre l'escalier, marche par marche. Idy s’appuie sur deux motifs pour se démarquer du clan des Wade : Abdoulaye Wade est rejeté par le peuple sénégalais et sa candidature n’est pas recevable. Idy sait qu’en continuant de réaffirmer son ancrage aux cotés des Wade, il risque d’être vomi lui aussi par le peuple et puisque Wade ne peut plus briguer un 3e mandat, donc il n’a aucun intérêt à le soutenir. Conclusion : virement à 360 degrés de Idy.
Dans l’analyse de la candidature de l’ancien Premier ministre, nombre d’observateurs se sont limités à une appréciation presque périphérique de l’acte posé, se contentant d’une simple estimation du mal qui pourrait en découler pour le parti au pouvoir. C’est une approche, mais elle n’est sans doute pas suffisante. Ce n’est pas en faisant du neuf avec du vieux qu’Idy réalisera son rêve. Car la marque sera toujours préférable à la copie.
A y regarder de près, la candidature du leader de ‘Rewmi’ est grosse de faiblesses quasi insurmontables. En encadrant ce ‘fils’ aujourd’hui renié, en en faisant un leader parmi ceux qui comptent le plus dans ce pays. Wade connaît parfaitement son ‘futur’ challenger. Il l’a pratiqué pendant de longues années et connaît bien donc sa psychologie, même s’il n’a pas su apprécier la mue qui a fait de lui, selon son propre mot, un ‘serpent venimeux’ dans sa propre maison. Mais quand on a été une fois pris à défaut, on redouble de vigilance et l’on s’impose d’exigence. Wade donc s’emploiera avec la hardiesse qu’on lui connaît à débusquer la moindre faiblesse de l’ex-Pm pour le retourner contre lui. Ne l’a-t-il pas du reste poussé à la faute en 2005 en brisant le silence dans lequel ce dernier s’était obstinément enfermé ? C’est dire donc, que dans cette bataille, si elle a lieu, Wade qui garde en plus la puissance symbolique du pouvoir aura une bonne longueur d’avance sur Idy.
BABACAR KEBE, Ingénieur en Télécommunications Membre de la Ccr/Apr Yaakar Email : ingtelecom1@yahoo.fr