Manque de perspicacité et prévision
Le report des élections est encore dans l’ordre du possible car, le risque est toujours embuant.
Le site : www.elections.sn qui renferme le fichier électoral pour les élections locales du 22 mars 2009, répond par ceci à ce jour 23 Janvier 2009, quand vous l’interrogez : « En construction à cause du nouveau découpage électoral »
L’impréparation à tout point de vue, l’incompétence et le cafouillage monstre de l’administration en général et, de toutes les structures de l’Etat, y compris la CENA, chargées des élections et du processus électoral, ont assurément toutes lamentablement échoué. Elles ont fait preuve, d’un manque de professionnalisme à propos de ces élections, qui frise même, l’amateurisme au-delà du tolérable.
Rappelons au passage s’il en est besoin que, Me Wade dans le cadre du NEPAD, est chargé du volet des NTIC et particulièrement de la fracture numérique. Il s’est toujours vanté de l’avancée de notre pays dans le domaine de l’informatique par rapport au reste de l’Afrique d’abord et même au niveau du tiers monde. On l’a même entendu récemment dire qu’il n’a trouvé à son arrivée à la présidence de la république que 2 ordinateurs –naturellement, permettez-nous de douter de cette sortie invraisemblable- que nul ne peut croire.
Ceux qui fréquentent régulièrement l’administration sénégalaise sous le régime libéral, savent pertinemment que la réalité est tout autre. Tout le tintamarre fait par Me Wade autour des NTIC, n’est que du vent et, la preuve nous est donnée par son équipement informatique archaïque –à dissocier d’avec les micros informatiques flambants neufs, qui ornent et servent de meubles dans les bureaux des ministres et directeurs généraux, s’ils ne prennent pas le chemin de leur propre domicile- dans les divers services de l’administration générale. Disons plutôt, après avoir détruit tous les fondements d’une bonne administration, Me Wade et son gouvernement, n’ont procédé à aucune modernisation tant au point de vue méthode qu’organisationnelle depuis leur arrivée au pouvoir, dans le but de rendre plus performante cette administration. Ainsi, la vétusté de l’équipement existant et l’archaïsme de l’organisation combinés, ont conduit notre pays, au bas de l’échelle des administrations africaines, sauf au niveau du discours, faux en tout.
Ainsi, malgré un report d’un an, la direction générale des élections a été dans l’incapacité totale de mettre à jour le fichier électoral et de le tenir à la disposition des citoyens sur Internet, conformément à la nouvelle configuration du découpage administratif et territorial actuel. Pour vous en convaincre, visitez vous-mêmes le site des élections qui doit renfermer le fichier électoral pour les élections locales du 22 Mars 2009. En tout cas, jusqu’au moment où nous écrivons ces lignes, le site est toujours en construction. Mais pour combien de temps encore ? Nul ne le sait. Il s’y ajoute tenez-vous bien encore, que même le n° de téléphone de la direction générale des élections qui est indiqué (33 823 75 44) est déclaré par la Sonatel, comme étant non attribué.
Vous conviendrez avec moi, qu’il est inadmissible voire inconcevable à l’heure du numérique que de pareils faits puissent se produire et même exister depuis un an, dans un pays dont le chef vante partout les prouesses du génie informatique de son gouvernement, mais qui est tout même, incapable de solutionner un problème qui ne relève point du tout d’un génie. En vérité, tout ceci n’est que pure vanité pour tromper son monde comme à l’accoutumée. La réalité crue, que veut dissimiler le gouvernement, ce sont les lacunes criardes liées à une absence presque totale d’un réseau informatique Internet comme intranet qui couvrirait l’ensemble de l’administration sénégalaise pour la moderniser et la sortir de son archaïsme sur le plan informatique. En effet, aucun site d’un ministère ou d’une direction nationale ne fonctionne correctement, pour permettre aux citoyens de communiquer à distance avec leur administration. On ne devrait plus à l’ère du numérique, pour l’obtention d’une pièce d’Etat civil, se déplacer ou faire la queue pour en obtenir une, grâce justement au génie de l’informatique et de l’Internet. Mais hélas !
L’informatique et le numérique en particulier, limitent en grande partie la fraude à défaut de l’éliminer. Il est établi que Me Wade ne mène pas une lutte conséquente contre la fraude et la corruption. Alors dans une certaine mesure, pour maintenir la fraude dans les centres d’Etat et la corruption d’une manière générale dans l’administration, L’Etat laisse entrouvertes toutes les possibilités de manipulations ultérieures pour des besoins éventuels de fraude.
Par ailleurs, nos gouvernants pensent naïvement ou plutôt bêtement, que la seule parole leur suffit pour hisser notre pays au sommet du développement économique et social, ou de la technologie de pointe. Même si du reste, nous sommes les derniers partout, eux, se proclament comme Me Wade, les premiers sans la moindre preuve à l’appui. Ainsi, au rendez-vous où l’on présente les faits palpables et concrets, nous, nous nous présentons avec le verbe et beaucoup de sonorité pour cacher nos faiblesses.
Nous sommes aujourd’hui à la veille des élections locales qui ont été déjà renvoyées, on s’en souvient, sous le prétexte fallacieux de la création de nouvelles régions et leur découpage qui ne pourrait être fait à temps, pour permettre à ces nouvelles entités de prendre part aux consultations de 2008. J’avais en son publié un article intitulé : « La création de régions « bidon », un prétexte fallacieux pour reporter les locales. »
Alors, est ce que, c’est cela une bonne préparation des élections, après les avoir reportées une première fois pour le même motif ? Nous voici toujours à la case départ et le risque de report se précise avec évidence, par la faute de l’administration et, de la CENA plus spectatrice qu’arbitre. Au vu des couacs et de la pagaille qui ont émaillé, le dépôt des listes, marqué par une inorganisation incontestable traduisant simplement une incompétence notoire du ministère de l’intérieur et de la CENA, on peut bien craindre, connaissant nos gouvernants et leur façon cavalière de régler les conflits, sans compter la crise en leur sein et la situation défavorable qui plane sur leur coalition, qu’une décision inattendue de report, survienne à tout instant.
Au demeurant, comment peut-on organiser des élections dans une circonscription dont les limites géographiques ne sont pas connues, dont la population qui y habite n’est pas déterminée, par voie de conséquence, le nombre d’électeurs et des élus qui s’y rapportent sont aussi ignorés? Pratiquement c’est du néant ! Sans parler de l’inexistence d’une administration territoriale sur place.
Cette impréparation du gouvernement, qui est à tous égards, au-delà de l’incompétence, une manière de mettre devant le fait accompli, les acteurs qui prennent part à ces consultations, mais aussi les citoyens électeurs appelés à choisir leurs élus locaux, à se poser certainement cette question évidente, à savoir : à quoi servent réellement nos administrateurs, dans la mesure où, ils sont incapables de préparer et d’organiser des consultations transparentes à tous points de vue et à date prévue, depuis 7 bonnes années ?
Les interrogations fusent tout logiquement de partout, à propos de responsabilités relatives à ces élections. Naturellement, dans cette confusion supposée, le gouvernement y trouve son compte pour se tirer d’affaire. Mais, je pense que, si nous sommes conséquents avec nous-mêmes, en notre qualité de citoyens, nous devons absolument situer objectivement les responsabilités. En nous fondant sur un principe républicain simple, à savoir, le pouvoir est remis entre les mains de ceux qui sont désignés pour une période donnée à nous administrer. Durant toute cette période, ce sont eux qui sont les décideurs et même leurs décisions erronées, font force sur l’ensemble de la population, ainsi, jusqu’au terme de leur mandat, ils sont responsables de tout ce qui nous arrive. Par conséquent, il ne me parait pas logique de chercher des responsables ailleurs que dans le gouvernement ou de vouloir leur substituer d’autres.
A cet effet, l’Etat est le premier responsable à respecter les échéances électorales, à organiser selon la loi des élections libres, démocratiques et transparentes sans équivoque. La préparation administrative relève entièrement de sa compétence et à elle seule. Et tout ceci, devrait se passer dans l’ordre et la discipline. Il dispose de tous les moyens et pouvoirs pour s’en acquitter correctement.
C’est pourquoi, à mon avis, les cafouillages, les manquements et autres distorsions de l’administration notés çà et là, ne sont que des signes, d’une incompétence à assumer une tâche régalienne, dans les règles de transparence. On peut penser aussi, que c’est un prétexte pour reporter encore sine die les élections en vue.
D’autre part, la CENA qui doit veiller sur le processus en amont et en aval est malheureusement forclos et dépassée par les évènements ou, plus exactement s’est mise au service du parti au pouvoir. Elle a terriblement failli à son devoir et rôle d’arbitre des élections. Nulle part, on ne l’a entendu remettre de l’ordre ou appelé les acteurs à l’orthodoxie.
Ensuite l’administration a manqué de perspicacité et prévision en direction des élections, pour n’avoir pas mis à disposition les pièces d’Etat civil prévues à l’occasion et à temps ainsi qu’en quantité suffisante.
Les autres acteurs ne sont que des administrés, qui doivent se plier aux ordres des décideurs si toutefois la loi est respectée. Par conséquent, en cas de report, ne soyons pas surpris car, les éléments sont quasiment réunis.
Mandiaye Gaye
Gaye_mandiaye@hotmail.com
LE QUOTIDIEN;
Dette intérieure - 29 milliards non payés au monde rural
23-01-2009 Plus d’un mois après le démarrage officiel de la campagne de commercialisation de l’arachide, il n’existe aucun point de collecte officiel et de vente qui soient fonctionnels à travers le pays, car les opérateurs n’ont pas d’argent. Le motif ? Tous courent après les créances que leur doit l’Etat, et qui auraient dû leur permettre de rembourser les banques qui leur avaient prêté de l’argent pour l’achat des semences. Ces 28,5 milliards de francs Cfa ne venant pas, les paysans ne voient personne négocier leurs récoltes, et n’ont plus d’autre choix que de les brader. Par Mohamed GUEYE
La campagne de commercialisation de l’arachide de cette année est en train de se présenter comme la plus mauvaise que le Sénégal ait connue depuis bientôt une dizaine d’années. Le président du Conseil de concertation des producteurs d’arachide (Ccpa), M. El Hadj Ibrahima Niasse, par ailleurs producteur d’arachide dans le Saloum, ajoute : «On est en train de faire la plus mauvaise campagne de commercialisation depuis l’instauration du carreau-usine.» Approché en marge de l’atelier international organisé par le Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (Cncr) à Dakar, sur la crise alimentaire, M. Niasse explique que la campagne de commercialisation agricole de cette année, au-delà de l’arachide toute seule, met toute l’agriculture sénégalaise dans une situation de précarité qui pénalise fortement les paysans sénégalais.
Il indique que la situation des paysans s’est aggravée en dépit des bons résultats de la campagne agricole, réalisés particulièrement grâce à la Grande offensive agricole pour la nourriture et l’alimentation (Goana). «Les producteurs ont fait ce qu’ils devaient faire, et ont produit, à la suite du programme Goana, lancé par le président. Les producteurs ont produit beaucoup, et pas seulement pour l’arachide. Le mil, le niébé, le maïs, ou le manioc, en plus de l’arachide, ont connu une forte augmentation.» Le problème est qu’il ne suffit pas de produire, il faut être en mesure d’écouler. Or, la campagne de commercialisation concerne des acteurs comme les intermédiaires qui achètent, les industriels qui triturent pour faire de l’huile, et surtout les banques, qui financent, fait comprendre le président du Ccpa.
Malheureusement, cette année, ni les opérateurs ni les industriels n’ont les moyens d’acheter la production des agriculteurs. Déjà endettés auprès des banques, en particulier de la Caisse nationale du crédit agricole du Sénégal (Cncas) pour l’achat des intrants, les opérateurs et les industriels n’ont pas été en mesure de contracter de nouveaux crédits pour la campagne de commercialisation.
Il faut indiquer que les intrants fournis aux paysans par l’Etat, par l’intermédiaire des opérateurs et des industriels, sont subventionnés, à hauteur de 50 à 80%. Le paysan ne prend en charge qu’une petite partie du montant, le reste étant payé par l’Etat. «Pour l’arachide, par exemple, la semence d’arachide est vendue au producteur à 100 francs Cfa le kilo, et facturée à l’Etat à 250 francs Cfa. Donc, l’Etat paie aux opérateurs, 150 francs par kilo de semence. Si vous multipliez cela par 71 000 tonnes de semences, qui ont été livrées cette année, cela fait près de 9 milliards de francs. Si cet argent n’est pas payé aux opérateurs, ils ne peuvent pas contracter d’autres prêts auprès des banques. Et, ce qui est valable pour l’arachide, l’est aussi pour d’autres spéculations», commente M. Niasse.
5 milliards dEbloquEs
D’autres spéculations, prises en compte dans le cadre de la Goana, sont également concernées. Le maïs, le mil, le niébé, le manioc, entre autres, ont été financés par les mêmes opérateurs, ce qui porte l’ensemble de la dette due aux opérateurs économiques de l’agriculture à 28,5 milliards de francs Cfa. Voulant, sans doute, relativiser les problèmes, le propriétaire terrien explique que «le gouvernement a commencé à faire des efforts, et a payé environ 5 milliards». Il ne manque pas, pour autant, de préciser que ce montant, qui a été débloqué cette année, est un report de créance de l’année dernière. Il n’en reste pas moins que les pouvoirs publics doivent encore près de 23 milliards aux opérateurs économiques, pour permettre à ces derniers d’éponger leurs dettes et de contracter d’autres crédits de campagne.
Les huiliers se sont engagés pour cette campagne, à acquérir 300 000 tonnes d’arachide. Cela représente environ 40 milliards de francs Cfa à trouver. Même l’huilier Sunéor qui, souvent avait plus de ressources que les plus petits partenaires, semble également affecté. Si ce stock n’est pas écoulé, il va s’ajouter aux 500 000 tonnes que les paysans devaient écouler par d’autres canaux, ou conserver pour leur consommation. Mais, plus dramatiquement, ce sera une véritable sécheresse financière que vont connaître les ménages dans le monde rural.
En début de semaine, en marge de la signature de la Convention de financement de 33 milliards et demi de francs, signée avec la Bei et l’Afd, le ministre d’Etat, en charge de l’Economie et des finances, avait assuré que la dette intérieure était payée, et que tous les créanciers enregistrés au mois d’octobre de l’année dernière seraient désintéressés au plus tard à la fin de ce mois, comme promis par le président de la République. Malheureusement, pour les producteurs agricoles, ce décompte ne les a pas enregistrés, et il est certain qu’ils devront attendre encore. Mais, les conséquences de ce choix seront rapidement perceptibles, on peut s’en convaincre.
mgueye@lequotidien.sn
Wade/Idrissa Seck : Retrouvailles de déblocage ?
23-01-2009 La science politique n’est pas une science de la prédiction. Elle a principalement pour champ d’intervention les faits politiques, et ne peut, en conséquence, préprogrammer les phénomènes politiques.La science politique n’est pas une science de la prédiction. Elle a principalement pour champ d’intervention les faits politiques, et ne peut, en conséquence, préprogrammer les phénomènes politiques. Pour qu’elle puisse le faire, il faudrait que les politistes ou politologues, au-delà de leur art et en plus d’être des médiums, soient dotés d’un don d’ubiquité, cette faculté surhumaine d’être présent partout et simultanément ; il faudrait qu’ils soient capables d’être dans la tête de chaque acteur politique pour lire, comprendre les lois d’interaction qui régissent leurs pensées et anticiper leur jeu dans le monde des profanes. C’est dire, combien dans l’approche objective du politique dans nos sociétés africaines où à démocratie aléatoire, le rationalisme est d’une relativité somme toute «absolue», (oui, vous avez bien lu). L’absence de lois structurant l’objet d’étude – la politique – rend caduque toute démarche d’observation convoquant la trilogie scientifique hypothèse-vérification-thèse.
Alors que reste-t-il comme mode opératoire d’approche de la pratique politique au Sénégal ? Réponse : L’intuition !
L’intuition, érigée en sixième sens, permet seul d’appréhender les dynamiques ambiantes du microcosme politique sénégalais et de présager de leur matérialisation sur le champ public. Ceux des Sénégalais qui s’y sont exercés n’ont, sans doute, pas été surpris par l’annonce des retrouvailles entre le Président Abdoulaye Wade et son ancien Premier ministre, Idrissa Seck. Depuis l’exclusion de ce dernier du Pds, le 5 août 2005, divers indices concourraient à confirmer l’irréfutabilité de sa réinsertion dans le parti: le boycott inexpliqué et non motivé des élections législatives par son parti Rewmi, (contrairement aux autres partis de l’opposition qui l’ont fait par réaction aux «irrégularités» de la présidentielle de 2007 et à la «non-fiabilité» du fichier électoral) ; le silence de Idrissa Seck depuis la fin des élections présidentielles alors que les autres leaders d’opposition défiaient le pouvoir dans des marches populaires et par médias interposés. Un silence qu’on aurait fort raison d’interpréter comme une observation d’un pacte secret de non-agression entre les deux hommes. L’alternance de tumultes et d’apaisements dans leurs relations repose sur une double hypothèse.
La première hypothèse est celle d’un «cessez-le-feu» pré-électoral.
L’écueil à éviter serait de croire que l’épisode de ce lundi 12 janvier 2009 défie toutes les logiques de bon sens politique. Car, dans l’alibi démocratique qu’est le système politique sénégalais, le bon sens, cela a toujours été l’absence de logique. Durant l’entre-deux tours de la présidentielle de Mars 2009, le leader de l’Urd, jusque-là viscéralement opposé au candidat sortant, Abdou Diouf est reçu en audience express au Palais, par ce dernier. Au sortir, il n’hésita pas à braver l’aspiration et l’élan populaires au changement en appelant à réélire le Président Diouf. A l’appui de son volte-face inattendu, Djibo Kâ avançait, au nom du Socialisme, l’argument d’une cohérence idéologique. Le même homme se retrouvera plus tard comme l’un des acteurs clefs d’un régime libéral dont il a combattu l’émergence durant toute son histoire politique.
Le précédent de Djibo Kâ incite à replacer les retrouvailles entre Wade et Seck dans une perspective d’approche plutôt réaliste de tout comportement politicien. Il faut y voir une volonté de Wade d’amortir le désastre électoral qui hante son parti à la veille des élections locales de mars 2009. Il y a lieu donc pour l’instant de s’en tenir à l’hypothèse d’une pure réconciliation de déblocage. Idrissa Seck, lui-même, ne manque pas de conforter cette projection lorsqu’il déclare qu’«en période de guerre, il est plus digne de s’allier à son père et de périr que de s’allier avec l’ennemi pour tuer le père». La question est de savoir si la filiation putative est définitivement renouée à travers cette réconciliation ; elle est de savoir si l’on n’assiste pas là au montage par Wade d’un ultime scénario consistant à apprivoiser son «fils égaré», à s’offrir ses services dans le front électoral à venir pour limiter la casse libérale et mieux l’achever par la suite. Cette interrogation aurait perdu toute son opportunité si le Président Wade n’avait pas, jadis, laissé entendre qu’il lui «restera toujours une clef pour mettre Idrissa Seck à terre». L’on n’est peut-être pas au bout des rebondissements dans les relations entre les deux hommes.
La seconde hypothèse est celle de la survivance politique de Wade.
Il est reconnu qu’en général, les précurseurs de grande œuvre sont rarement les acteurs de la propagation et de la pérennisation de leurs idées et de leurs causes. Ils en jettent simplement les fondements théoriques, à charge pour les élèves, les héritiers ou autres adeptes d’en assurer la promotion, la diffusion et la sauvegarde à travers temps et espaces, en prenant garde à l’altération de la matrice fondatrice. Karl Marx a écrit sa pensée, ses élèves ont fait du marxisme ; le Général De Gaulle a créé la 5e République française, ses héritiers politiques ont donné corps au Gaullisme ; Cheikh Amadou Bamba a posé ses bonnes pratiques du service de Dieu, ses fidèles ont propagé le Mouridisme. Cet honneur d’une réincarnation dans la postérité fait, incontestablement, partie de l’agenda post-politique (et post-mortem) de Wade. De par son tempérament et la vocation qu’il donne à sa place dans l’histoire du Sénégal, de l’Afrique et du monde, le Président Wade ne souhaiterait pas être réduit en une simple mémoire outre-tombe qui ne survivra qu’au travers d’héritiers mécaniques mimant systématiquement sa pensée et ses visions avec un automatisme irrationnel et dépendant. Il a aussi besoin de ceux qui la vivifieront «jusqu’à l’extinction du soleil» ; il a aussi besoin de ceux qui prolongeront son punch, son baroud en y ajoutant une plus-value personnelle pour assurer une mise à jour permanente du «Wadisme», en fonction des époques, des contextes et des lieux. Cette angoisse politique n’en est pas moins existentielle : qui, dans son entourage actuel est à même de lui survivre, en tant que personnage public et individu privé ? Quelle que soit la profondeur de leur désaccord, Wade conserve la conviction qu’avec son ancien Premier Ministre aux affaires (Présidence ?), il peut trouver le gardien de tous ses temples, politiques comme «familiaux». La forte imprégnation par Idrissa Seck de l’assise privée et publique de la personne de Wade en fait un «fils» incontournable à même de garantir un équilibre social et politique à tous ses authentiques héritiers, politiques comme biologiques. D’un point de vue idéologique, au sein du Pds, M. Seck ne souffre d’aucune concurrence quant aux facultés et au volontarisme d’incarner, de conserver, d’enrichir et de diffuser la pensée, les convictions et l’œuvre politique de Wade, dans toute leur configuration originelle.
Sous cet angle, croire qu’il y avait une profonde rupture entre les deux hommes, c’est faire montre d’une réelle naïveté politique. Si leurs matières se querellaient, leur esprit s’embrassait par ondes télépathiques et se réclamait comme deux époux que les contingences de l’amour mettent, pour un instant, à l’épreuve d’une nostalgie réciproque. Du 24 avril 2004 (date de publication du décret n° 2004-560 mettant fin aux fonctions de Premier Ministre de M. Seck) jusqu’à ce 12 janvier 2009, on était dans un cas de figure d’une séparation dite circonstancielle destinée à provoquer une conjoncture politique de nature à brouiller les pistes de successions pour mieux protéger Idrissa Seck. Puis, un enjeu d’importance s’est introduit dans le jeu pour finalement donner une dimension tragique au scénario de départ : l’indépendance. Pour l’un comme pour l’autre, le différend de gestion administrative (les Chantiers de Thiès) s’est mué en un duel d’autodétermination politique alimenté par des exercices de défiance réciproque sur fond de : «Tu vas voir, je vais te prouver que tu ne peux pas exister sans moi !» Wade lui-même conforte cette thèse lorsqu’il déclare que «entre Idrissa Seck et moi, c’est un jeu d’échecs à distance». En réalité, Idrissa Seck sait qu’il ne peut pas se construire et exister politiquement sans l’onction de Wade et de son parti ; de même, ce dernier sait qu’il ne peut pas survivre et se réincarner dans la postérité politique du Sénégal sans Idrissa Seck. Tragiques destins !
Dans un contexte, il va de soi que le cas Idrissa Seck soit un structurant de la problématique sur le leadership libéral de l’ère post-wadienne.
Par ailleurs, le Libéralisme en tant que matrice idéologique du Pds n’est qu’une réalité fictive. Car, le libéralisme, doctrine politique qui, avec Locke et Montesquieu, s’est affirmée dans l’opposition à tout absolutisme, est, par vocation, la pratique et la promotion constante de la liberté. Or, il n’existe au Pds aucun autre membre, quel que soit son statut, en dehors de Idrissa Seck, qui soit libre de ne pas avoir, de ne pas être, de ne pas dire et de ne pas faire comme le Chef. Il n’y a pas si longtemps, devant des militants Pds conviés à sa rencontre le 20 décembre 2008 à Paris, le Président Wade déclarait qu’il n’a pas de «pouvoir d’exclusion» d’un membre du parti. Ce qui revient à dire que le Pds, comme toute formation démocratique, vit sur le fondement de textes régissant ses organes et son fonctionnement. Les décisions d’exclusion et de réadmission d’un membre obéissent donc à des procédures juridiques internes qui font appel à l’autorité des organes compétents. Sur ce fondement, la prévalence de la seule volonté de la personne physique du chef dans le retour de Idrissa Seck au sein de l’exécutif du parti épouse les contours d’une voie de fait.
Alassane Mamadou NDIAYE / andiaye5@yahoo.fr
www.alassane.canalblog.com
Paris
Réponse de Bennoo Siggil Senegaal au Pdt Abdoulaye Wade : L’opposition contre le report des Locales
23-01-2009 La coalition de l’opposition a tenu une conférence de presse, hier, à la suite des déclarations du chef de l’Etat, appelant à une concertation pour reporter les élections. La coalition Bennoo Siggil Senegaal refuse toute prorogation et se dit prête pour le 22 mars 2009. Par Cheikh Fadel BARRO
Non ! La coalition Bennoo Siggil Senegaal ne servira pas de prétexte et refuse d’être un faire-valoir pour reporter les élections locales. A la suite de la proposition du chef de l’Etat de soumettre le report des élections locales à l’opposition, cette dernière répond par la négative. Hier, chez Amath Dansokho, Serigne Mbaye Thiam, en porte-parole du jour, a relayé la position catégorique de ses camarades et alliés : «La coalition Bennoo Siggil Senegaal se déclare prête à participer aux élections locales du 22 mars 2009 sur la base de la situation des listes déposées dans le délai légal du 20 janvier 2009.» En effet, cette coalition déclare s’en tenir aux délais prescrits par la loi électorale, en dépit «des carences coupables du gouvernement». L’opposition avait relevé le 18 janvier dernier, «les retards cumulés dans la mise en place des nouvelles collectivités locales et l’adoption des textes légaux et réglementaires, ainsi que les fautes par défaillance de l’administration», pour exiger du gouvernement qu’il mette en œuvre tous les moyens pour permettre aux partis politiques et coalitions de déposer leurs listes dans le délai fixé par la loi et, de participer à la compétition électorale en toute régularité, transparence et démocratie. Ensuite, le 20 janvier dernier, Ab-doulaye Bathily mettait en garde le pouvoir contre la tentative de s’inventer des alibis pour proroger le délai des dépôts de listes. Il proposait alors une rallonge, uniquement pour le complément des dossiers dans le but d’éviter les forclusions massives de listes, comme le souhaiterait le pouvoir, visiblement pas encore prêt pour aller aux scrutins, rappelle Serigne Mbaye Thiam.
Aujourd’hui, deux jours après la clôture du dépôt des déclarations de candidature, la coalition Bennoo Siggil Senegaal se dit satisfaite de sa représentation et déclare qu’elle sera «massivement présente lors de ces élections». Dans le même temps, elle constate que la coalition Sopi 2009, dont la base des listes est constituée du parti au pouvoir, le Pds, a été forclose dans de nombreuses collectivités locales.
C’est pourquoi, elle exige de la Commission électorale nationale autonome (Cena) «qu’elle prenne ses responsabilités de contrôleur et de superviseur du processus électoral, en assurant le respect strict des conditions de recevabilité et des délais prescrits par la loi électorale et en s’opposant à toute régularisation a posteriori des listes et des dossiers de la Coalition Sopi 2009». Bennoo Siggil Senegaal demande également à la Cena de publier, dès à présent, la situation des différentes listes de candidats, visées par ses superviseurs telle qu’elle se présente après l’expiration du délai de dépôt des déclarations de candidature. Tout comme l’opposition invite «l’Administration territoriale à observer une stricte neutralité dans le déroulement du processus électoral et à ne point céder aux pressions et intimidations de la hiérarchie tendant à la rendre complice des opérations illégales de régularisation des listes et des dossiers de la Coalition Sopi 2009». Le cas de Diourbel où la forclusion de la coalition au pouvoir est connue, préoccupe Benno Siggil Senegaal, en particulier. Elle engage l’administration territoriale à rejeter fermement la régularisation du dépôt des listes de la coalition Sopi 2009 des collectivités locales du département de Diourbel «que le gouvernement veut imposer».
delfa@lequotidien.sn
REFORME - Statut de l’élu local et de la fonction publique
23-01-2009
La redéfinition du cadre légal et réglementaire en ligne de mire
Dans le cadre du processus des réformes envisagées pour définir le cadre législatif et réglementaire régissant les ressources humaines des collectivités locales, le ministre d’Etat, ministre de la Décentralisation et des Collectivités locales a présidé l’ouverture, à Saly, d’un atelier de partage et de finalisation des projets de textes sur le statut de l’élu local et de la fonction publique locale.
Par Assane DEME
Installée progressivement au Sénégal pendant la période coloniale, l’Administration territoriale et locale a fait l’objet d’une véritable politique dès le lendemain des indépendances. Dès son accession à la souveraineté internationale, rappelle Mamadou Diouf, ancien directeur des collectivités locales, le Sénégal a harmonisé les différents statuts de communes existantes, en les érigeant en communes de plein exercice, avec des Conseils municipaux élus au suffrage universel qui élisent, à leur tour, leurs maires. Ainsi fut promulguée la loi n° 66-64 du 30 juin 1966, portant Code de l’Administration communale qui regroupe, en un texte unique, l’ensemble des dispositions régissant l’organisation, le fonctionnement et les compétences des communes. Ce dispositif est complété, d’une part, par le décret n°66-510 du 4 juillet 1966 portant régime financier des collectivités locales et, d’autre part, la loi n°69-54 du 16 juillet 1969 et le décret n°79-788 du 23 juin 1979 relatifs, respectivement au statut de la fonction publique communale et statut particulier des fonctionnaires communaux. Le processus de décentralisation va, ainsi, s’étendre au milieu rural au cours des années 70, avec la création d’un second ordre de collectivités locales par la loi n°72-25 du 25 avril 1972 portant création des communautés rurales. Celles-ci, en raison de leur spécificité, vont bénéficier d’un encadrement rapproché de la part des autorités déconcentrées (sous-préfets) qui vont assurer sa gestion financière jusqu’en 1990. Par ailleurs, marquant sa volonté de faire des communautés rurales de véritables centres de développement, le législateur oriente résolument leur budget vers la satisfaction des besoins d’investissements. Ce qui l’amène à prohiber tout recrutement de personnel. A partir de 1996, le Sénégal s’enrichit d’un troisième ordre de collectivités locales, à travers la loi 96-06 du 22 mars 1996 portant Code des collectivités locales. Cette même loi institue, par ailleurs, les communes d’arrondissement au sein des grandes communes dénommées villes. Cette réforme de 1996 va marquer un tournant décisif dans le processus sénégalais de décentralisation puisqu’elle modifie fondamentalement les relations entre l’Etat et les collectivités locales, en renforçant l’autonomie de gestion (libre administration, allègement du contrôle, etc.), ainsi que les compétences (transfert de compétences dans neuf domaines) de ces dernières. Elle s’accompagne, par ailleurs, de l’institution de nouveaux dispositifs destinés au renforcement des moyens financiers, humains et matériels des collectivités locales, afin qu’elles puissent assurer une bonne gestion de leurs compétences. Toutefois, «les collectivités locales sénégalaises peinent encore à exécuter convenablement leurs missions, en raison de nombreux dysfonctionnements constatés, notamment dans le domaine de la gestion de leur personnel», constate M. Diouf, selon qui, partant du principe de l’égale dignité des collectivités locales qui disposent d’un même statut, la loi 96-06 du 22 mars 1996 uniformise les dispositions qui sont applicables aux régions, aux communes et communautés rurales et abroge les lois 66-64 et 72-25 qui régissaient jusqu’alors respectivement les communes et les communautés rurales. «Le statut général de la fonction publique communale est régi au Sénégal par la loi n°69-54 du 16 juillet 1979 qui s’inspire du statut des fonctionnaires de l’Etat et qui a été promulgué dans un contexte marqué par l’existence d’une seule catégorie de collectivités locales à savoir les communes», précise l’ancien directeur des collectivités locales. Ce statut ne s’applique qu’aux agents qui, nommés à un emploi permanent des communes ont été titularisés à un grade de la hiérarchie des corps communaux. Ainsi, il ne s’applique pas aux personnels titulaires régis par le Code du travail et les Conventions collectives en vigueur (contractuels et auxiliaires et aux fonctionnaires et agents non communaux qui restent régis par leur statut d’origine). Ces dispositions font que l’essentiel du personnel actuel des communes n’est pas considéré comme des fonctionnaires communaux au sens de la fonction publique communale.
EVOLUTION DES COLLECTIVITES LOCALES
Par ailleurs, l’évolution de l’architecture des collectivités locales ne s’est pas traduite par l’adaptation de statut du fonctionnaire communal aux agents des autres collectivités locales (régions, communes d’arrondissement et communautés rurales). Au regard de ce contexte, les autorités jugent opportun, en relation avec l’érection des régions en collectivités locales et l’intervention de plus en plus importante des communautés rurales dans le développement économique et social, de repenser globalement le régime du personnel des collectivités locales. Ainsi, il a été jugé aussi nécessaire, pour tenir compte de cette nouvelle donne, d’élaborer un projet de loi portant statut de la fonction publique locale. Cet atelier de partage et de validation, qui s’est ouvert lundi à Saly, constitue pour le ministère de la Décentralisation et des Collectivités locales «un chantier significatif» à l’étape de la conception et que les résultats qui en seront issus devraient parquer l’évolution «historique» des collectivités locales du Sénégal. «Nous sommes en train d’ouvrir et de baliser une rampe de lancement à partir de laquelle les collectivités locales pourront décoller vers des horizons de développement magnifiques, parce que jamais atteints dans leur histoire», déclare Ousmane Masseck Ndiaye. «La matérialisation du statut de l’élu local, consacrant les droits et obligations de l’élu local, permettra, non seulement de valoriser et de mieux sécuriser la fonction, mais aussi et surtout de réarmer, d’un enthousiasme nouveau, les acteurs locaux face à leurs missions et responsabilités accrues», pense le ministre d’Etat, ministre de la Décentralisation et des Collectivités locales. Concernant la fonction publique locale, «sa mise à jour, adaptée aux nouveaux besoins et aux multiples défis du système local décentralisé, permettra, sans nul doute, de bonifier, à bien des égards, les ressources humaines des collectivités locales et de définir un statut unique pour l’ensemble des travailleurs locaux», poursuit M. Ndiaye qui indique que «la portée et la valeur, attachées aux deux projets en gestation, ne se mesurent pas seulement à leur genèse et à leurs objectifs. C’est une démarche proactive, participative et consultative qui a permis d’impliquer tous les acteurs et de pétrir, au même moulin, leurs points de vue et leurs sensibilités», précise-t-il. Il signale que ces deux points inscrits à l’ordre du jour de cet atelier, à savoir le statut de l’élu local et la fonction publique locale répondent «singulièrement» à des instructions du chef de l’Etat lors du dernier Conseil national de développement des collectivités locales. A signaler que dans le cadre de cette nouvelle réforme, un fonds spécial de l’élu local va être mise en place. Les conclusions de cet atelier définiront les modalités d’éligibilité et les obligations des élus locaux. Il est également envisagé la création du Conseil supérieur de la fonction publique locale.
Correspondant
Location des terres : Opportunité économique ou néocolonialisme agraire ?
23-01-2009 Par Jean PIEL
D’un côté, les multinationales et les pays acquéreurs de terres agricoles à l’étranger : pour eux, cela ne fait aucun doute, ces contrats représentent une opportunité pour des pays parfois très pauvres. De l’autre, les mouvements écologistes et les associations de défense des droits Humains : ils dénoncent le déséquilibre de ces contrats et les dérives inéluctables d’une telle pratique. Au centre, les institutions internationales – en premier lieu, la Fao– : elles restent circonspectes, mais ne veulent négliger aucune source d’enrichissement pour certains Etats en grave difficulté financière, rappelant que la course à la terre a historiquement toujours existé.
Des pays en dEveloppement demandeurs
Spécialiste des questions foncières à la Fao, Paul Mathieu estime, dans Le Monde, que «ce phénomène comporte des risques, comme l’expropriation des paysans les plus pauvres. Mais, il peut aussi constituer une opportunité. A l’échelle mondiale, il faut augmenter la production agricole. Un accord gagnant-gagnant suppose des apports de capitaux et de technologies pour améliorer la productivité des terres, en veillant à ne pas sacrifier les habitants. De tels contrats doivent s’inscrire dans un processus de développement durable».
Au demeurant, la demande vient parfois des pays détenteurs de terres eux-mêmes. Ainsi, l’Indonésie et la Papouasie ont démarché des investisseurs saoudiens, leur offrant un million d’hectares pour qu’ils puissent y produire des céréales. A Madagascar, le Président Marc Ravalomanana souligne que l’accord conclu avec Daewoo Logistics permettra de moderniser l’agriculture et créera 70 000 emplois. Un chiffre moins impressionnant qu’il n’y paraît cependant pour la location de 1,3 million d’hectares pendant 99 ans. «Ils ont les terres, nous avons l’argent», résume sobrement un investisseur saoudien dans le Wall Street Journal.
Menaces sur l’environnement et l’economie
Le déséquilibre entre des Etats riches ou des multinationales et des pays aux caisses désespérément vides est évident. Sans compter les risques de corruption. Quant à la loi, elle reste une protection illusoire. Ainsi la législation malgache interdit à un opérateur étranger d’acheter plus de 2,5 hectares. Du coup, Daewoo Logistics a conclu, sur 1,3 million d’hectares, un contrat de location… de 99 ans. Pourtant tenu à une certaine obligation de réserve comme tout diplomate onusien, le directeur général de la Fao, Jacques Diouf, avoue redouter, dans la multiplication de ces acquisitions de terres agricoles à l’étranger, «l’émergence d’un pacte néocolonial pour la fourniture de matières premières, sans valeur ajoutée pour les pays détenteurs des sols».
De leur côté, les Ong insistent sur les nombreuses dérives possibles, voire inéluctables. D’abord celle de renforcer les monocultures intensives, considérées comme l’une des causes du désordre alimentaire actuel. C’est ce qu’écrit Grain, une association de défense de l’agriculture traditionnelle, basée à Barcelone : «Dans la mesure où la plupart de ces acquisitions visent à mettre en place de grandes exploitations agricoles industrielles -que ce soit au Laos, au Pakistan ou au Nigeria- pour produire des denrées alimentaires destinées à l’exportation, elles favorisent un modèle industriel d’agriculture qui a engendré pauvreté et destruction de l’environnement.» Un avis partagé par le géographe Christian Bouquet : «A Madagascar, malgré les promesses de Daewoo Logistics, les terres cédées seront exploitées sur un mode intensif. Quatre hommes et une hyper-mécanisation remplaceront 2 000 familles pour gérer 1 000 hectares. On peut déjà imaginer l’exode vers les bidonvilles de ces familles chassées. Le gouvernement malgache est dans une logique d’ultra-libéralisme. En outre, la valeur symbolique de la terre pour les habitants est totalement négligée.»
De son côté, Alain Karsenty, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) explique que «la déforestation risque de s’aggraver puisque les terres agricoles vont alors acquérir une valeur supérieure à celle des espaces forestiers».
Un Monopoly immoral ?
Dans un article au vitriol publié dans Le Nouvel Observateur, le journaliste Doan Bui compare ces acquisitions à un Monopoly d’un genre nouveau : «Le Soudan, j’achète ! Le Kazakhstan, j’en revends une partie ! Imaginez un Monopoly où l’on n’achèterait plus des rues, mais des pays entiers. Comme au Monopoly, les gagnants seraient ceux qui amasseraient le plus de terres, bref, les plus riches à la banque. Les perdants ? Ce serait les fauchés, obligés de céder leur bout de terrain pour renflouer leurs caisses. Ce Monopoly serait un peu particulier. Il s’agirait non pas de construire des immeubles, mais d’installer des tracteurs et des machines agricoles pour produire du blé, du riz, du maïs. Bref, de la nourriture. Ce serait un jeu où les nantis, au lieu de piquer l’hôtel de la rue de la Paix au voisin ruiné, lui faucheraient ses récoltes futures. Le problème est qu’il ne s’agit pas d’un jeu.»
Ces achats de terres arables à l’étranger posent des problèmes environnementaux, économiques puisque le pays loueur n’y gagne pas nécessairement et agit parfois sous la contrainte de la misère, des problèmes sociaux aussi avec les risques d’expropriation des paysans. Ils posent enfin un problème moral. Les surfaces exploitées se trouvent parfois dans des pays qui ont connu, ces derniers mois, des émeutes de la faim. Leur seule richesse est l’agriculture, et elle sert à nourrir les ressortissants de pays riches alors que comme, en Haïti, les habitants en sont réduits à manger des galettes de boue.
«Il ne faut pas noircir le tableau à l’excès», estiment en substance les experts de la Fao, qui rappellent que parmi les pays qui cèdent leurs terres, tous ne sont pas dans l’extrême misère ; que certains contrats sont justes ; qu’il s’agit aussi d’un moyen de développer le potentiel agricole d’une région. L’organisation onusienne reconnaît cependant le danger potentiel du système. Pour l’économiste Louis Bourgeois, cité par Le Monde : «Si un pays riche manque de ressources, il ne doit pas assécher les marchés, au risque d’affamer les pays en développement. Aucun pays ne peut déléguer sa sécurité alimentaire à d’autres.»
Mfi
L'OBSERVATEUR;
L’ASSEMBLEE NATIONALE NOMME LES "JUGES" DE FARBA SENGHOR DIAGNE FADA, ALÉ LO, JOSEPH NDONG ET DIOUF NIOKHOBAYE FACE À L'HISTOIRE
Article Par Mamadou SECK,
Paru le Vendredi 23 Jan 2009
L’Assemblée nationale a choisi depuis, hier, les «députés-juges» qui doivent siéger à la Haute Cour de justice pour statuer sur le sort de l’ex-ministre des Transports aériens Farba Senghor. Ce dernier a été désigné par les assaillants des locaux des journaux l’As et 24 Heures chrono comme étant le commanditaire de leurs actes de vandalisme. Ce, moyennant 15 000 francs Cfa par personne. Mais au moment où, les exécutants de ces actes de vandalisme purgent une peine de six à cinq ans de prison, Farba hume toujours l’air de la liberté.
Joseph Ndong, Modou Diagne Fada, Alé Lô et Ibra Diouf viennent d’être choisis comme titulaires pour siéger à la Haute Cour de justice. Ce qui veut dire qu’ils «porteront» la robe de magistrat pour «juger» l’ex-ministre des Transports aériens, Farba Senghor, commanditaire des actes de vandalisme, le 17 août 2008, dans les locaux des journaux l’As et 24 heures chrono. Ces députés sont tous membres du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (Pds). Du côté des suppléants, il y a Aliou Sow, Moussa Sy, Ndéye Guéye Cissé et Moussa Cissé. Sur les 96 députés présents dans l’hémicycle, 92 ont voté pour, 3 contre. Un bulletin a été déclaré nul. Là-dessus, des sources renseignent que c’est le député Omar Khassimou Dia qui a refusé de voter. Car, révèlent nos interlocuteurs, «on lui avait proposé pour son groupe parlementaire un titulaire et un suppléant». Mais, «quelques jours avant le vote, on n’est revenu pour lui proposer dire qu’il ne peut avoir qu’un seul membre à titre de suppléant».
Les non-inscrits refusent de voter
Les députés non-inscits de leur côté, n’ont pas voté pour la désignation de ces «juges». Me Ndéye Fatou qui en fait partie explique, «qu’une Haute cour de justice est une juridiction spécialisée, qui permet de vaincre l’impunité notamment à l’égard des membres du gouvernement qui, dans l’exercice de leur fonction, ont eu à commettre des infractions. Et n’étant pas souvent justiciables des juridictions ordinaires en raison des privilèges attachés à leur fonction. Ils doivent être soumis obligatoirement à une juridiction qui aura à connaître des faits». Mais, constate l’avocate parlementaire, « la Haute cour de justice qui vient d’être mise sur pied est politique. Elle n’est pas installée pour respecter à ce qu’on appelle le principe de la séparation des pouvoirs». Elle est composée unilatéralement de membres de la majorité mécanique qui n’a même pas eu la courtoisie encore moins la délicatesse de consulter l’opposition parlementaire constituée par les non-inscrits. «Cette Haute Cour de justice est utilisée à des fins politiques et de règlements de compte politique». Dans cette même optique, elle a déploré, «le manque de sérieux dans le fonctionnement actuel de l’Assemblée nationale». Pour illustrer ses propos, elle souligne «que la séance qui a été convoquée à 15 h 30 n’a démarré ses activités qu’au-delà de 18 heures 30, sans aucune explication». Au moment où, révèle-t-elle, «plus de 80 questions orales et d’actualités croupissent dans les territoires et que des propositions de loi émanant des députés ne sont même pas à l’ordre du jour. Donc l’Assemblée nationale ne fonctionne pas, elle est devenue une Assemblée sans âme depuis des mois. Elle n’exerce aucun contrôle sur l’Exécutif».
Me El Hadji Diouf : « L’opinion les attend »
Ce membre du collectif des avocats qui défendent les journalistes plaignants souligne que «c’est une bonne chose que l’Assemblée nationale mette en place le dispositif pour le jugement de Farba Senghor devant la Haute Cour de justice». Selon lui, «les juges qui composent la Haute cour de justice doivent être désignés, connus, installés et prêts à statuer en cas de saisine». Car poursuit-il, «si elle n’est pas régulièrement composée, elle ne peut pas statuer et cela crée un déni de justice». « L’opinion ne peut pas comprendre que l’on condamne le chauffeur de Farba Senghor et ses deux gardes du corps à 6 ans d’emprisonnement sans pour autant juger Farba Senghor. Qui doit prouver son innocence devant la Haute cour de justice pour ne pas être condamné», conclut Me El Hadji Diouf.
COMMENTAIRE Le jeu de la fraternité !
Article Par NDIAGA NDIAYE,
Paru le Vendredi 23 Jan 2009
Il y a seulement deux jours, le Comité pour la défense et la protection des journalistes (Cdpj) publiait un éditorial pour s’offusquer de la tentative d’endormissement du dossier qui implique Farba Senghor dans le saccage des locaux de l’As et de 24 heures chrono. Le même jour, les avocats des journalistes dénonçaient les lenteurs du dossier. L’on serait tenté de croire que la nomination, hier, des quatre députés devant siéger à la Commission d’instruction de la Haute Cour de justice procède de la volonté des autorités d’accélérer la procédure. Que non ! Il suffit de voir la liste des députés qui devront juger Farba Senghor pour se convaincre de la volonté affichée du pouvoir incarné par le Pds de voler au secours du prévenu commanditaire des actes de vandalisme dans les locaux des deux journaux.
Le choix des quatre personnes que sont Modou Diagne Fada, Alé Lô, Joseph Ndong et Ibra Diouf Niokhobaye est loin d’être gratuit. La seule exclusion volontaire des députés de l’opposition de la Commission d’instruction de Haute Cour de justice est un indicateur qui permet de lire, en filigrane, le caractère partisan que le Pds veut donner à cette grave affaire. Outre le constat que la Commission ne soit composée que par des frères de parti de Farba, il s’y ajoute qu’il n’a jamais été noté de divergences politiques ou une quelconque inimité entre Farba et ses «juges». Ce qui risque de déteindre sur l’avis que les députés porteront sur la culpabilité de leur frère. La «fraternité libérale» est une valeur forte qui dicte le soutien et l’assistance en toutes circonstances. Même s’il n’est pas permis de douter de la bonne foi de ces députés, il peut être permis de croire que ces libéraux maîtrisent bien la devise de leur parti.
Cette orientation dégagée depuis le début de cette affaire suit une logique de blanchiment de Farba Senghor dans une affaire dans laquelle il est cité par des nervis qui croupissent actuellement en prison pour les mêmes faits. En effet, le pouvoir du Pds n’a jamais été aussi constant dans sa démarche de soutien déguisé à son responsable de la propagande. La confection des listes pour les investitures pour les élections locales de mars prochain apporte encore la preuve que les libéraux ne sont pas encore prêts à encourager la lecture du droit dans cette affaire. Alors que son dossier reste pendant devant les juridictions compétentes, l’ancien ministre des Transports est bombardé tête de liste de la plus grande commune d’arrondissement de la capitale : le Plateau. Ainsi, il part aux élections en toute quiétude avec la certitude de se faire passer l’écharpe. Cela dit, d’ici l’élection des maires, le dossier de Farba ne connaîtra pas de dénouement. Sinon, le Pds n’aurait pas investi ce dernier et ses hommes de confiance à des positions qui leur permettront de contrôler l’institution municipale du Plateau. Pendant ce temps, des citoyens comme lui paient pour avoir commis des délits de moindre gravité. On est où là ?
SUD QUOTIDIEN;
CONTRE TOUT REPORT DES ELECTIONS LOCALES L’opposition rectifie Wade et menace
par Bacary Domingo MANE | SUD QUOTIDIEN , vendredi 23 janvier 2009
La Coalition « Benno Siggil Senegaal » qui réunit les partis d’opposition dite significative ne veut pas entendre parler de report des prochaines élections locales. La Conférence des leaders l’a déclaré hier, jeudi 22 janvier, lors d’un point de presse pour préciser que le prolongement du délai de dépôts des listes demandé aux fins de compléter les dossiers, n’est pas synonyme de report des élections. Par conséquent, elle met en garde Me Wade « contre la tentation de s’inventer un alibi pour proroger le délai de dépôt des listes de candidats »
« Deux jours après la clôture du dépôt des déclarations de candidature, et en dépit des carences coupables du gouvernement, la Coalition « Benno Siggil Senegaal » s’en tient aux délais prescrits par le Code électoral et met en garde le pouvoir d’Abdoulaye Wade contre la tentation de s’inventer un alibi pour proroger le délai de dépôt des listes de candidats ». Cette déclaration émane de la Conférence des leaders de la Coalition Benno Siggil Senegaal qui a tenu un point de presse hier, jeudi 22 janvier au domicile d’Amath Dansokho, patron du parti de l’indépendance et du travail (Pit). Le socialiste Serigne Mbaye Thiam qui a lu la déclaration précise « qu’il n’a jamais été question de demander un report du délai de dépôt des listes électorales. Il n’a jamais été question de repousser la date. Mais, on avait juste demandé un délai pour compléter des dossiers après le dépôt des listes le mardi dernier »
Il a tenté de lever l’équivoque au sujet des trois jours ou 72 h accordé par le Code électoral pour apporter quelques réglages mineurs aux listes déposées. « Trois jours après le dépôt des listes, il est permis d’apporter des modifications mineures. Mais ni de retrait ni de substitution, ni de dépôt de nouvelles listes et ni de réaménagement de listes », précise Serigne Mbaye Thiam. Et tente de « démasquer » le jeu du Président Wade : « il ne faut pas que le Président Abdoulaye Wade tente de faire croire à l’opinion publique que pendant ces trois jours dont on parle, on peut déposer de nouvelles listes ou modifier des listes. Cela n’est pas possible. Parce que les listes incomplètes doivent être déclarées irrecevables ».
La faute aux autorités…
Les leaders de la Coalition Benno Siggil Senegaal met ces « couacs » sur le dos des autorités. Ils avaient, dans une déclaration en date du 18 janvier dernier, « relevé les retards cumulés dans la mise en place des nouvelles collectivités locales et l’adoption des textes légaux et réglementaires, ainsi que les fautes par défaillance de l’administration ». Suffisant pour que la Coalition Benno Siggil Senegaal « dénonce les actes dilatoires du président Abdoulaye Wade et du gouvernement tendant à provoquer une forclusion massive des listes de candidats, pour ensuite s’en servir comme prétexte pour renvoyer à une autre date les élections locales du 22 mars 2009 ».
La Coalition de l’opposition rappelle qu’elle avait « exigé du gouvernement qu’il mette en œuvre tous les moyens pour permettre aux partis politiques et coalitions de déposer leurs listes dans le délai fixé par la loi et de participer à la compétition électorale en toute régularité et en toute transparence comme le recommande la démocratie ».
Mais qu’à cela ne tienne, les membres de la Coalition « Benno Siggil Senegaal’ » sont déterminés, malgré ce qu’ils appellent « les manœuvres d’obstruction », se présenteront massivement à ces locales. Même s’ils martèlent que la quasi totalité des forclusions est imputable au gouvernement.
Par ailleurs, la Conférence des leaders de la Coalition « Benno Siggil Senegaal » compte saisir les tribunaux pour contester les forclusions « illégales » de certaines de ses listes.
La Cena invitée à prendre ses responsabilités
La Coalition Benno Siggil Senegaal n’a pas manqué aussi de demander à la Commission électorale nationale autonome (Cena) de « prendre ses responsabilités de contrôleur et de superviseur du processus électoral en assurant le respect strict des conditions de recevabilité et des délais prescrits par la loi électorale et en s’opposant à toute régularisation a postériori des listes et des dossiers de la Coalition Sopi 2009 qui a été forclose dans de nombreuses collectivités locales ». Elle exige une « publication, dès à présent, de la situation des différentes listes de candidats visées par ses superviseurs telle qu’elle se présente après l’expiration du délai de dépôt des déclarations de candidature »