revue de presse & contributions
UVELHORIZON:
LÉGISLATIVES DU 3 JUIN Quel gouvernement pour Sopi 2 ?
Momar DIONGUE
Depuis sa démission-reconduction d’après élection-présidentielle, le Premier ministre Macky Sall et les membres de son équipe sont en sursis. Leur sort est entre les mains de Wade et doit, en principe, être scellé au lendemain du 3 juin. Seulement, partagé entre le souci de comprimer son équipe et l’envie d’associer une foultitude d’alliés à la gestion du pouvoir, sa marge de manœuvre paraît bien étroite. Deux questions pour comprendre toute la difficulté de l’exercice.
Macky Sall partira, partira pas ?
Wade ne lui a jamais trouvé assez de bagout pour mener le combat sur plusieurs fronts. « J’espère qu’il ne va pas s’essouffler », disait-il à propos de son actuel Premier ministre lors de son intronisation comme directeur de campagne. De là à dire que Macky Sall n’aurait pas assez de coffre pour mener à bien, et simultanément, ses fonctions de chef du gouvernement, de N° 2 du Pds et de directeur de campagne, il n’y a qu’un pas que Wade n’a pas franchi. Mais le pensait-il sûrement.
En tout cas, piqué au vif par le scepticisme de son mentor, Macky Sall ne s’est pas économisé. Il s’est coupé en quatre et s’est donné à fond sur tous les fronts. À sa nomination comme Premier ministre, le 21 avril 2004, il s’était engagé dans une belle métaphore à « donner corps à la vision du Président ». À l’heure du bilan, ses partisans pavoisent. Des réalisations chères à Wade, tels les échangeurs et l’autoroute à péage, sortent de terre. Un bilan en …béton à l’actif du successeur de Idrissa Seck dont le souhait d’être « le jardinier de ses rêves (NDRL : ceux du président) » est resté, par contre, un vœu pieu. Quant à la gestion du Pds, l’opération de restructuration menée tambour battant par Macky Sall a, certes, fait long feu. En raison de frustrations qu’elle a fait naître çà et là. Poussant le maire de Fatick à freiner des quatre fers. Et sur « injonction » de Wade, seul Maître du jeu, diront les mauvaises langues. Un désaveu certes pour Macky Sall accusé de «noyauter le parti», comme jadis Idrissa Seck, mais en plus fin. Toujours est-il que cette manœuvre que certains lui ont prêtée ne tira guère à conséquence. Intronisé comme directeur de campagne de Wade, il réussira le véritable tour de force d’assurer sa réélection « dès le premier tour ». Alors qu’ils étaient si peu nombreux, y compris dans le camp du Sopi, à croire à une victoire du « vieux ». Ce 3 juin, Macky Sall n’aura donc qu’à parachever cette marche victorieuse du Sopi avec des Législatives qui s’annoncent comme une simple promenade de santé en l’absence de l’opposition significative.
Mais l’actuel Premier ministre va-t-il, pour autant, sauver son poste pour services rendus à Wade ? En principe, avec ce bilan globalement positif à l’actif de Macky, Wade devrait avoir quelque scrupule à l’envoyer à une voie de garage tel que l’Assemblée nationale. Seulement, les félicitations dont Wade l’a gratifié à l’occasion de sa démission-reconduction n’ont jamais été une assurance tous risques pour aucun de ses collaborateurs. Astre lunaire qui ne veut qu’aucune étoile ne brille à ses côtés, présenter une belle carte de visite est d’ailleurs le meilleur moyen de se voir éloigner de la galaxie présidentielle. Mieux ou pis, les derniers actes posés par Wade ne présagent rien de bon pour l’actuel locataire de l’ex-Maison militaire. Après avoir inondé le pays d’affiches où son effigie, en très gros plan, efface quasiment celle de la tête de liste de la coalition Sopi en arrière plan, Wade s’est invité physiquement dans la campagne. D’abord, par son passage marqué par le crépitement des espèces sonnantes et trébuchantes à Gouye Mouride, ensuite par ses « doxantu » à travers plusieurs quartiers de Dakar ponctuée par une virée chez les Layènes. Sans oublier la célébration, en grandes pompes et par ses propres soins, du 150ième anniversaire de la ville de Dakar et la cérémonie, toute d’exhibition, de remise de bus à quelques universités et établissements scolaires. Une campagne, plus ostensible que déguisée, destinée sans doute à faire échec à la campagne de boycott du «Front Siggil Sénégal». Mais aussi et surtout, à enlever à son actuel Premier ministre le gain d’une victoire certaine au soir du 3 juin prochain. De quoi provoquer un brin de scepticisme chez les partisans de Macky Sall. Surtout quand on se rappelle deux récentes nominations dans le gouvernement qui, en aucune façon, ne peuvent être du goût du chef de l’attelage. « L’arrivée dans le gouvernement de Samuel Sarr qui a traité Macky de tous les noms d’oiseaux à son départ de la Senelec et celle de Awa Diop intervenue en pleine réunion du Bureau politique, transformée en congrès d’investiture, témoignent de l’estime et de la considération que Wade porte à son Premier ministre », ironise un responsable libéral. Et d’enfoncer le clou : « Figurez-vous qu’il a dit publiquement à Awa Diop qu’il l’aurait nommée au poste de Premier ministre, si elle avait fait des études. N’est-ce pas là un véritable pied de nez à l’actuel titulaire au poste ? ». Faut-il en déduire que le sort de Macky Sall est scellé ? Et si son départ de la Primature était programmé par Wade, qui pourrait le remplacer à ce poste ?
Wade ayant une fois émis le désir de nommer à nouveau une femme au poste de Premier ministre, après la parenthèse Mame Madior Boye, tous les regards se tournent à présent vers les deux Aminata, Tall et Niane. La première, actuel ministre d’État auprès du président de la République en a manifestement l’étoffe et jouit d’une «légitimité historique » au sein du Pds qui la prédispose à occuper le poste. Seulement, sa carrure politique indisposerait plusieurs proches de Wade qui verraient bien la Directrice générale de l’Apix, Aminata Niane, hériter de la station primatoriale. D’autant qu’elle aurait un double avantage : elle est à pied d’œuvre dans l’exécution des chantiers de Wade et, surtout, elle serait en phase et en parfaite intelligence avec une certaine « génération du concret ».
Quelle taille pour la future équipe ?
S’il est une équation quasiment insoluble pour Wade, c’est bien la compression du futur gouvernement. Partagé entre le souci d’associer une foultitude d’alliés à l’exercice du pouvoir, conformément à sa fameuse théorie sur la « majorité d’idées », et l’impératif de réduire un gouvernement pléthorique, sa marge de manœuvre paraît bien étroite. Surtout qu’en plus de ses alliés actuels tels Djibo Leyti Ka, Abdourahim Agne et autres Mamoune Niass, bénéficiaires de maroquins ministériels au chapitre des « concessions gouvernementales », d’autres pourraient se voir inviter à rejoindre le futur gouvernement. Le ballet qui a d’ores et déjà commencé au palais n’a-t-il pas d’ailleurs toutes les allures de consultations qui ne disent pas leur nom ? Awa Guèye Kébé (Rewmi), Pape Diouf (Rewmi), Modou Diagne Fada (War Wi), Mata Sy Diallo (Afp) et Mamadou Diop «Decroix» y ont tous été reçus par le Maître des céans. Et pour cause. Soucieux de faire contre-poids à l’opposition radicale regroupée au sein du « Front Siggil Sénégal », partisan du boycott des législatives, Wade verrait bien sa majorité actuelle s’élargir à de nouveaux alliés. Qu’ils proviennent de la périphérie du Pds (Pape Diouf, Fada et Awa Guèye Kébé), de la gauche historique (Mamadou Diop Decroix et ses camarades d’Aj/PADS dont le compagnonnage avec les libéraux ne serait pas totalement compromis), voire de l’Alliance des forces de progrès (Afp) peu enthousiaste dans la mise en œuvre du boycott par le « Front Siggil Sénégal ».
Seulement, un retour de l’enfant de Darou Mousty dans la maison du père ne devrait se faire qu’à la seule condition du départ de Macky Sall de la tête du team gouvernemental, vu l’animosité entre les deux hommes. En effet, la subite proximité entre Modou Diagne Fada et le « vieux » qui ne s’est pas privé de lui allonger une cagnotte de 50 millions pour sa campagne lors de la présidentielle, donne bien des cauchemars aux partisans de l’actuel Pm. Mais, il y a surtout la nature de la campagne de l’ex-porte-parole du Pds dont tout le discours-programme se résume à des critiques à peine voilées contre le N° 2 de Wade. Serait-ce avec la bénédiction du pape du Sopi ? L’avenir immédiat de Macky nous édifiera.
Quant à Pape Diouf et Awa Guèye Kébé, les deux lieutenants de Idrissa Seck, leur entrée dans le futur gouvernement est quasi certaine. Puisque ce serait là le meilleur moyen pour Wade de saper les fondements du camp de son ex-Premier ministre. De son côté, Mamadou Diop Decroix ne cracherait pas sur un nouveau maroquin ministériel. Avec ou sans ses alliés de Aj/Pads. Mieux, avec son retour, Wade pourra toujours se réjouir de ne pas rompre définitivement les amarres avec la gauche historique. Enfin, les pourparlers avec Mata Sy Diallo annoncent sinon un nouveau compagnonnage avec les « progressistes », du moins un rapprochement avec le parti de Niasse. Il se susurre en effet que Wade n’aurait identifié que deux véritables adversaires au niveau de l’opposition, en l’occurrence Rewmi et le Parti socialiste dont il s’évertue à hâter le « démantèlement ». Aidé par la retraite hexagonale de Idrissa Seck, il a tout loisir de saper les piliers de Rewmi en arrachant à son ex-sherpa ses deux plus proches collaborateurs. Mais l’exercice de démantèlement paraît beaucoup moins aisé vis-à-vis des socialistes en dépit de ces candidatures « suspectes » sorties des flancs du Ps (Robert Sagna, Souty Touré). À présent que la gauche historique (Pit, Ld/MPT) a touché le fond à l’issue de la présidentielle du 25 février, il ne reste plus à Wade qu’à isoler davantage le parti de Ousmane Tanor Dieng. Et pour ce faire, quoi de plus habile que de ramener l’Afp dans son giron. Avec ou sans Moustapha Niasse. Pourvu simplement qu’il fasse nombre. Et que le Ps sente le vide autour de lui. Sauf qu’à vouloir élargir à tout prix ses bases, Wade pourra difficilement gagner son pari de comprimer son futur gouvernement.
Les électeurs tranchent
Ce n’est pas habituel, chez nous, au Sénégal que les citoyens soient appelés deux fois, la même année, pour élire d’abord, un président de la République puis, une Assemblée nationale. Après le scrutin du 25 février 2007 qui a vu Abdoulaye Wade triompher nettement devant des adversaires politiques de grande valeur, nous voilà face à un scrutin, où le Parti démocratique sénégalais fait face à des formatons politiques d’envergure moyenne ou pire, sans envergure.
On verra bien si l’intérêt suscité par la présidentielle sera pareil à l’occasion de ce second scrutin de l’année 2007. Parce qu’au-delà de cette passion pour les élections enregistrée à chaque fois que les citoyens sont appelés à voter, il y a un test politique majeur pour la majorité présidentielle, mais aussi pour l’opposition dite « significative » qui a décidé de ne pas y aller. La majorité présidentielle, assurée de gagner largement, s’interroge sur la légitimité de la future Assemblée nationale. Ceux qui sont assurés de n’avoir aucun élu dans la future Assemblée s’inquiètent de voir les Sénégalais voter aussi massivement qu’en février dernier.
C’est pourquoi, les Législatives de ce 3 juin 2007 seront l’occasion d’une introspection politique pour tous les hommes et toutes les femmes qui aspirent à diriger ce pays ou à faire partie de ceux qui représentent leurs concitoyens au sein des centres de décisions que sont le gouvernement ou l’Assemblée nationale.
Les citoyens qui sont appelés à élire les députés de l’Assemblée nationale en sont certainement conscients : voter ou ne pas voter sera le reflet d’une posture politique assumée ou considérée comme telle. En effet, pour la première fois dans l’histoire politique du Sénégal, les Législatives seront boycottées par l’opposition significative. Quand les partis, qui avaient obtenu à travers leurs candidats près de 40 % des suffrages à l’élection présidentielle, décident de ne pas présenter de listes à des élections aussi importantes que celles élisant l’Assemblée nationale, un acte politique majeur est posé. Ce sont les citoyens qui vont trancher. En votant ou en s’abstenant d’aller dans les bureaux de vote ce 3 juin 2007. Comme disait en substance, Lamine Guèye, le premier président de l’Assemblée nationale du Sénégal indépendant, un oui n’a de sens que si l’on peut dire non. En décidant donc de ne pas participer au vote, les partis politiques boycotteurs imposent aux citoyens de trancher la polémique sur l’atmosphère politique si épaissie de malentendus qu’elle peut être coupée au couteau.
Le taux de participation sera donc l’enjeu principal du vote. Nettement en deçà du score de Wade à l’élection présidentielle, la majorité présidentielle verra la légitimité de la future Assemblée écornée. Pire, il y aura un affaissement de la légitimité du régime qui va peser lourdement sur les actes qui seront posés durant ce second mandat du président Wade. Qui plus est, le Sénat qui va être installé perdra, avant même de voir le jour tout crédit. Déjà, il prête le flanc avec une composition incroyable : le chef de l’Etat nomme les deux tiers des sénateurs. Institution croupion, ce Sénat sera un enfant mongolien du régime libéral. Et l’Assemblée nationale, élue avec un taux de participation nettement en dessous de 50 %, sera un bébé prématuré qui aura du mal à grandir car handicapé.
La recomposition politique, le démantèlement de partis boycotteurs ou la reprise du dialogue politique sont suspendus à ce taux de participation.
Par Abdoualye Bamba Diallo
LOBSERVATEUR:
Pourquoi je n’ai pas voté ? « Il faut vivre ce qu’on réfléchit et réfléchir ce qu’on vit »
Article Par Philippe Marcel DIOH, Philippe.dioh@yahoo.fr,
Paru le Jeudi 14 Juin 2007
En 2001, j’avais voté pour donner au Président de la République une majorité parlementaire lui permettant de réaliser pleinement sa mission : développement économique et social du notre pays. De nos jours, il y a certes des avancés dans certains domaines mais si je me permets de partager ma réflexion avec les sénégalais, c’est parce que je suis déboussolé.
Oui, j’ose le crier fort. J’ai perdu la boussole c’est pourquoi je n’ai pas voté. Je ne me retrouve plus dans le Sénégal d’aujourd’hui. C’est comme un plan Marketing inversé (Communication, distribution, Prix, Produit). On fait plus de publicité pour atteindre les cibles avant la réalisation concrète du produit. Avec l’avènement de l’alternance en 2000, j’avais beaucoup espéré des changements profonds dans la manière de faire la politique mais aussi dans le vécu quotidien des sénégalais. Maintenant tout porte à croire que ce n’est pas demain la veille. Je suis déçu c’est pourquoi je n’ai pas voté.
LES DEPUTES
Je n’ai pas voté pour élire mes députés car au Sénégal le vote n’est pas obligatoire. Je n’ai pas voté car les députés n’avaient pas besoin de mon consentement pour proroger à deux reprises leur propre mandat. Je n’ai pas voté car certains députés ont dansé à l’Assemblée Nationale pour se réjouir des malheurs d’un citoyen sénégalais, un ex-premier ministre. Je n’ai pas voté parce que le taux d’absentéisme des représentants du peuple est fortement remarquable pendant que d’autres lisent les journaux en pleine séance. Je n’ai pas voté car il n’y a plus de députés du peuple mais des députés au service d’un pouvoir exécutif. Je n’ai pas voté car avec le boycott d’une partie de l’opposition dite significative, je me suis dit que les carottes sont déjà cuites : le pouvoir actuel va majoritairement gagner les législatives car il n’y a plus d’enjeux. En réalité, c’est ce qui s’est passé. La démocratie sénégalaise est malade et a besoin d’être soignée. Le boycott d’une partie de l’opposition sénégalaise qui a participé à la présidentielle du 25 février 2007 et la faiblesse du taux de participation ôtent à la future assemblée nationale toute représentativité et toute crédibilité. C’est un recul démocratique. Avancer dans la vie n’a de sens qu’à condition de ne pas reculer.
LE COUT DE LA VIE
Les prix des denrées de premières nécessités ont tellement augmenté que j’ai l’impression qu’une pluie de malheur a déjà commencé à s’abattre sur nous « goorgolu ». Que Dieu nous en préserve ! L’état a des moyens pour augmenter son train de vie (100 sénateurs, 150 députés, 41 ministres, le CRAES, etc...). Pourquoi ces moyens ont été orientés vers des dépenses de prestige ? A t-on réellement besoin de tout ce dispositif pour développer notre pays ? Les urgences ne sont - elles pas ailleurs ? Lutte contre la désertification, chômage des jeunes, l’émigration clandestine, délestages etc… Pauvre Sénégal ! Le peuple sénégalais qui souffre du fait du coût élevé de la vie ne mérite pas cela. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas voté le 03 juin 2007. Oui, je n’ai pas voté car je ne trouvais plus le gaz. Je paie ma facture d’électricité mais je n’ais pas de courant. Voilà des raisons suffisantes qui m’ont poussé à ne pas accorder mon suffrage à un parti ou coalition de parti pour éviter de revivre la même chose. Donc, Je n’ai pas voté pour manifester mon mécontentement tout en espérant que tout va changer enfin.
SOLUTION
Les autorités de notre pays doivent tirer les leçons politiques et non politiciennes de la faiblesse du taux de participation des électeurs au scrutin du 03 juin 2007. Ressaisissez- vous ! Le moment est venu pour rompre avec les germes de notre propre destruction. Si nous voulons être un modèle de démocratie, si nous voulons faire du Sénégal un havre de paix, si nous voulons faire du Sénégal un pays émergent, il faut que chaque acteur majeur de la vie politique nationale joue pleinement sa partition : un pouvoir qui gouverne, une Assemblée Nationale qui contrôle l’action gouvernementale, une justice indépendante pour tous les citoyens et une opposition unie et solidaire. Tout cela dans le respect par tous les acteurs des lois et règlements garantis par notre Constitution. Le Sénégal de demain sera ce que nous en faisons aujourd’hui. Que le Tout Puissant guide et protège tous les enfants du Sénégal.
SUD QUOTIDIEN:
CHRONIQUE DE L’IMPROVISTE - LA GALERIE BLEUE
Vous avez dit « représentation nationale ? »Par Henriette Niang-Kandé | SUD QUOTIDIEN | jeudi 14 juin 2007 | 728 lectures
Alors que les arbitres (Conseil Constitutionnel) et les spectateurs (les 34% des inscrits sur le fichier électoral) sont allés se coucher, le Pds, qui sera majoritaire à l’Assemblée nationale est encore un ring, où les « frères » et « sœurs » continuent à se taper de toutes leurs forces, les uns contre les autres, à s’entre-déchirer comme les survivants du radeau de la Méduse. Et dans l’exercice d’étripage qui sont les superstars ? Les transhumant(e)s, qui n’ont qu’un (ou deux) mots à la bouche : traître, ou traîtrise. Le mot retient l’attention. Trop de « t » et de « r » le rendent dur et le cognent au fond du palais (buccal bien sûr !). LIENS RECOMMANDES
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DOSSIERS
Parti Démocratique Sénégalais
Les judas sont prompts à interdire mais ne s’interdisent rien. Ils suffoquent en parlant de leurs « frères et sœurs » et manquent de s’étrangler en relatant les faits dont ils les accusent. Puis, trouvant toujours qu’il leur manque un sou pour faire cinq francs, ils se lèvent et déclament dans un chœur assourdissant, une ode à l’adversaire d’hier. On a le destin qu’on peut ! Et puis, n’a-t-on pas les traîtres qu’on mérite ? Même si en politique, surtout sous nos cieux, la traîtrise est un drôle de mot. Tout est d’ailleurs dans le retournement (de veste, de boubou ou de taille-basse). Quand un politique quitte sa formation d’origine pour s’inscrire dans un autre, c’est un traître. S’il quitte cet autre pour s’inscrire dans votre parti, c’est un converti. Dans les deux cas, il y un mélange de mauvais goût, un comportement de félon, de renégat et de la ringardise. Passons sur les stratégies d’approche, les chorégraphies savantes, et les glissements progressifs. Rien de beau. Rien d’élégant.
Ainsi donc, des chefs, des acteurs, des militants, des traîtres ou des convertis de 13 partis, (tout dépend du camp dans lequel on se trouve) feront leur entrée à l’Assemblée nationale. Ils sont 150 et seront « la représentation nationale ».
Prise dans son ensemble, la « représentation nationale » paraît être en décalage avec la population du Sénégal. En parcourant la liste de ceux qui vont faire leur entrée dans l’hémicycle, nous avons pu constater que le portrait-robot du député est un homme de plus de 45 ans exerçant la profession « d’opérateur économique », « d’administrateur de sociétés » (30), ou « d’enseignant » (30 et tous niveaux confondus). Les femmes elles, sont au nombre de 29. La loi sur la parité n’a donc eu aucun effet. Il y a même eu une régression. Cela signifie t-il pour autant que si les femmes sont sous-représentées, un grand nombre de décisions seront prises, allant à l’encontre leurs préférences et de leurs intérêts, qui ne peuvent être compensées par un échange de vote sur d’autres décisions collectives. Faut-il être une femme pour protéger les intérêts des femmes ? Des hommes politiques ne peuvent-ils pas très bien faire l’affaire en proposant des mesures en faveur des femmes et pour lesquelles l’ensemble des femmes vote. Et les agriculteurs ? Ils n’auront qu’un seul représentant. En s’intéressant encore plus à la liste, on constate un « Sénégal invisible », celui jeunes, des chômeurs, des employés, des ouvriers. Ce que l’on reproche aux députés ce n’est pas tant d’être non représentatifs de la population mais d’être trop enclins à développer un esprit de corporation qui les isole de la nation. La dernière législature en est un exemple parfait : prolongation de leur mandat, augmentation de leurs salaires. Ils se transforment en une oligarchie politique qui « s’assoupit » bien vite après avoir voté mécaniquement pour le Chef de l’Exécutif qui est par ailleurs le chef de leur parti. En répondant aux reproches qui leur ont été faits, ils se sont indignés et ont argumenté comme à un défilé de jeunes filles manifestant pour la défense de leur…virginité.
Une représentation-miroir n’est donc qu’illusoire. Faut-il dès lors s’interroger sur le sens de cette délégation des citoyens à leurs élus ? S’entend-elle comme un pouvoir à agir à « leur place » ou à s’exprimer « en leur nom ? »
Quoi qu’il en soit, le bleu entrera comme un tsunami dans l’édifice. Je vois déjà, mesdames et messieurs les honorables députés commander et préparer leur garde-robe. Sûre que les 131 de la majorité, s’imposeront le bleu baxa, avec les babouches qui vont avec. Les femmes, en attendant de faire exploser l’applaudimètre pour un oui ou pour un non, pourront exprimer, avec leur écharpe, toute leur imagination et exploiter le camaïeu de cette couleur : bleu marine, bleu pétrole, bleu lavande, bleu outremer, bleu de Prusse ou de Chartes, gris bleu, bleu indigo bleu roi ou bleu de chauffe. Robert Sagna, nouveau chef de l’opposition parlementaire avec trois députés, fera aussi son entrée, avec un drapelet vert, mais couvert de bleus. Me Ndèye Fatou Touré, toute bleue qu’elle est, a déjà, selon ses propres déclarations, « un programme ». A tous, Maître, cordon-bleu de la politique leur présentera, sur la carte du menu quinquennal un assortiment de plats fumants et fumeux ( ?), que la majorité bleue ingurgitera sans oser faire la grimace pendant que les récalcitrants se risquent à un baston qui leur fera éprouver une peur bleue.
A tous, merci d’éviter de tomber dans les travers de vos prédécesseurs, c’est-à-dire vous absenter. Autrement dit, faire bleu. Quant à Ely Madiodio Fall, il a cinq ans pour élaborer son plan de bataille pour les prochaines législatives, tout en traînant son bleu à l’âme.
DE VOUS A MOI
Discours manipulateurPar Felix NZALE | SUD QUOTIDIEN | jeudi 14 juin 2007 | 216 lectures
Abdou Diouf, alors président de la République, aurait refusé à Abdoulaye Wade, alors opposant, le ministère de la Culture auquel ce dernier tenait tant. C’était à l’époque où l’actuel chef de l’Etat s’adonnait à son sport politicien favori : « l’entrisme-sortisme » dans différents gouvernements socialistes. La raison invoquée par Diouf, selon des sources digne de foi : Wade est trop agité et le milieu de la culture, bouillant, pourrait lui servir de cadre de déploiement rapide et entraînant de son esprit subversif. Diouf postulait ainsi, entre les mots, que la culture et les hommes de culture sont par essence ou par vocation des perturbateurs de l’ordre établi, des sujets subversifs, des êtres de tension et, finalement, une menace pour le régime. Mais la subversion, c’est comme l’utopie : il y a une bonne et une mauvaise, tout dépend de son objet et de la finalité entrevue. LIENS RECOMMANDES
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DOSSIERS
CULTURE
Sembène Ousmane a inscrit son action sur le registre de la « subversion positive », refusant le népotisme et élevant sans cesse la voix pour se démarquer et dénoncer des propos et des attitudes pas nettes, venant surtout des gouvernants. Sembène dérangeait, il n’a jamais craint la brouille avec l’Autorité politique, motivé par la seule conscience de remplir sa part du contrat qui le lie à sa jeunesse et à son peuple. Bref, le « doyen » est de la race des intellectuels qui ont compris que lorsque la situation est trop grave, il est lâche de se satisfaire de propos de circonstance et d’entretenir des amalgames malsains.
La plupart des « intello » et « hommes de lettres » qui vantent le courage de Sembène tiennent pour leur part un discours manipulateur, trop nuancé pour être crédible. Mbaye Gana Kébé, président du Pen-Sénégal, déclare d’une part qu’il prendra sa plume pour dénoncer le régime libéral le jour où ce dernier aura un comportement pas net et, de l’autre, il ne cesse de se féliciter de ce que Wade lui aurait dit et répété qu’il ne mettra jamais un écrivain en prison. Les entorses répétées aux principes démocratiques, les scandales financiers auxquels le président est mêlé (« Protocole de Rebeuss »), les emprisonnements à tour de bras pour des motifs souvent fantaisistes de journalistes, les censures itératives d’œuvres de l’esprit… tout cela, aux yeux de M. Kébé, semble relever du normal. « Le jour où… » Propos fallacieux d’un allié…
Il me semble qu’à l’image de Mbaye Gana Kébé, nos « hommes de lettres », du moins la plupart, membres de l’Association des écrivains du Sénégal (Aes), idéalisent de manière trop opportuniste le chef de l’Etat et ont tendance à le présenter comme un être et/ou un sujet démocratique exceptionnel. Non ! il faut garder audible un esprit critique. Il n’y a pas de démocratie sans lutte et sans une certaine capacité à accepter la contestation. Toute la démarche de Sembène Ousmane était assujettie à cet impératif de libéralisation de la parole. Il a travaillé à nous réconcilier avec le débat critique fondé sur des dimensions essentielles, à aider à davantage nous immerger dans nos cultures, à déconstruire le discours trompeur des politiciens, à ne pas nous laisser désintégrer par une réalité de la colonisation idéologique. Le Congrès du Pen International qui se tient à Dakar en juillet sonnera peut-être le réveil de nos « hommes de lettres » et « intellos » à leur mission citoyenne ?
Elections législatives du 3 juin dernier
Les résultats définitifs proclamés par le Conseil constitutionnel
jeudi 14 juin 2007, par Nettali /
Les résultats définitifs issus des élections législatives du 3 juin dernier proclamés par le Conseil constitutionnel ce jeudi, ne présentent guère de surprise. La Coalition Sopi créditée de 1 190 609 voix arrive largement en tête et obtient 131 siéges de députés sur les 150 que va compter la future Assemblée nationale. Depuis que le multipartisme a été réinstauré au Sénégal, pour la première fois, un parti ou une coalition de partis devance de la sorte ses concurrents. PAR NETTALI
La Coalition Sopi est suivie respectivement de loin par les coalitions Takku Défaraat Sénégal (84 621 voix), And Défar Sénégal (84 998 voix), Waar Wi (74 919 voix) qui obtiennent chacune trois siéges de députés. Le Rassemblement pour le peuple (Rp) de Mamoune Niasse avec 73 083 voix, vient avec deux siéges de députés. Des 14 partis ou coalitions qui ont participé à ces élections législatives, seul le Rassemblement patriotique sénégalais/Jammi Rewmi (Rps/Jr) n’a obtenu de siége. Sinon les autres, hormis la Coalition Sopi , Takku Défaraat Sénégal, And Défar Sénégal, Waar Wi et le Rp, obtiennent chacun un siége. Ce sont le Front pour le socialisme et la démocratie/Benno Jubël (37 427 voix), Jëf Jël (33 297 voix), Convergence pour le renouveau et la citoyenneté (30 658 voix), Parti socialiste authentique (26 320 voix), Union nationale patriotique (22 271 voix), Mouvement de la réforme pour le développement social (20 041 voix), Rassemblement des écologistes du Sénégal (17 267 voix), Psd/Jant bi (15 968 voix). Quant au Rps/Jr qui n’a pas obtenu un seul siége de député, il se contente de 6 847 voix. Le verdict prononcé par le Conseil constitutionnel par la voix de son Greffier en chef, Me Ndèye Maguette Mbengue après « les corrections nécessaires » et en l’absence de contestations de la part des candidats, confirme ainsi les résultats provisoires qui avaient été déjà rendus publics par la Commission nationale de recensement des votes.
SELON UN RESPONSABLE DU PDS
"Les amis de Karim Wade font fausse route"
mercredi 13 juin 2007, par Nettali /
Dans leurs livraisons de ce mercredi, de nombreux quotidiens dakarois ont rapportés des propos de gens se réclamant du camp de Karim Wade, fils du président Abdoulaye Wade, et président de l’Agence nationale pour l’organisation de la conférence islamique (Anoci). Ces "amis de Karim Wade" qui reprochent encore à Macky Sall le faible taux de participation noté aux législatives du 3 juin dernier, réclament ainsi la tenue du congrès du Parti démocratique sénégalais (Pds). Par nettali
Une manière certainement, pour eux, de débarquer le Premier ministre Macky Sall, par ailleurs secrétaire général national adjoint du Parti démocratique sénégalais (Pds) d’Abdoulaye Wade. Seulement, ces "amis de Karim Wade" obtiendront difficilement la tenue d’un congrès du Pds. C’est du moins l’avis de certains responsables libéraux comme Moustapha Diakhaté, ancien chargé de mission du président de la République. M. Diakhaté avoue du reste qu’il y a effectivement "une panne organisationnelle au niveau du Pds". Toutefois, interrogé par la radio privée dakaroise Rfm, Moustapha Diop qui a également eu à diriger Alc/wacco ak alternance n’est pas passé par quatre chemins pour dire ce qu’il pense de la méthode des "amis de Karim Wade" qui, à l’en croire, font "fausse route". Et pour cause, Moustapha Diakhaté, citant les textes et règlements du Parti démocratique sénégalais (Pds), déclare que seul le secrétaire général national du parti ou le bureau politique peuvent convoquer un congrès du Pds. Sinon, a-t-il ajouté, en cas de crise, les 2/3 des fédérations peuvent demander la convocation du congrès. "Les amis de x ou y ne peuvent pas le faire", a souligné Moustapha Diakhaté. Qui rappelle que depuis 2000, le Pds n’a plus de structures régulières qui puissent se permettre de demander la convocation du congrès.
Me Mame Adama Guèye, candidat indépendant à la dernière élection présidentielle
« La société civile ne doit pas être un officine de projets personnels »
jeudi 14 juin 2007, par Nettali /
Durant la dernière élection présidentielle, Me Mame Adama Guèye s’était présenté comme candidat indépendant. Mais, ce n’est pas à l’occasion de l’élection présidentielle qu’il s’est révélé aux Sénégalais. Pendant dix ans, Me Mame Adama Guèye a dirigé le Forum civil, avant de passer la main. Qui donc mieux que lui pour jeter un regard sur la société civile sénégalaise. Dans une interview accordée à l’hebdomadaire Weekend magazine paru ce jeudi, Me Mame Adama Guèye se désole de voir des organisations de la société civile se transformer en officine de projets personnels. Me Mame Adama Guèye qui sait de quoi il parle indique que les organisations de la société civile doivent s’interdire de courir vers des projets pour entretenir le standing de certains dirigeants. Par Nettali
Pour Me Mame Adama Guèye, les organisations de la société civile ne doivent pas être le prolongement d’organisations internationales et de puissances étrangères qui les utilisent pour faire passer un certain nombre de choses. A l’en croire : « quelques fois, les puissances étrangères lancent un appel d’offre du genre ‘’nous faisons appel à des organisations pour financer des projets dans tel domaine, par rapport aux préoccupations de ces Etats’’ ». Justement, explique Me Mame Adama Guèye, « le danger pour la société civile, c’est que cette approche de la gestion de projet la transforme plus en officine de projets personnels, qu’en organisme qui défend sur le terrain des intérêts citoyens. L’effet pervers aussi, c’est l’aspect financier parce qu’il peut devenir une finalité en soi. Car, les organisations se donnent un certain standing de vie, mettent en place un appareil qu’il faut entretenir. Finalement, on finit par courir vers des projets pour entretenir le standing de certains dirigeants. On n’a pas le droit d’utiliser l’image fondée sur la confiance pour se perdre dans des logistiques d’appareil basées sur des intérêts financiers ». Le candidat malheureux à l’élection présidentielle du 25 février dernier se garde toutefois de citer des organisations de la société civile qui s’adonneraient à de telles pratiques. Me Mame Adama Guèye avertit : « ce n’est pas parce qu’on est de la société civile qu’on est des gens honnêtes et compétents ». De même que, « ce n’est pas non plus qu’on est politicien qu’on est malhonnête et incompétent ». Le regard que Me Mame Adama Guèye jette sur la justice sénégalaise n’est pas également tendre. « Malheureusement, de plus en plus souvent, les juridictions ne fonctionnent plus de manière satisfaisante. Du point de vue du système judiciaire. Il est évident qu’il souffre de gros dysfonctionnements liés au déficit de ressources humaines, matérielles et surtout à la moralité des acteurs de la justice. J’insiste car, quand on parle de justice, les gens pensent seulement aux magistrats, mais, il y a aussi les avocats, les greffiers, des experts. C’est tout un système. Aujourd’hui, les problèmes de moralité se posent de manière systématique dans la justice et c’est très grave pour le pays. Il faudra que l’on consacre beaucoup plus d’attention à cette question car elle est fondamentale. La justice a un triple rôle de régulation sociale et politique. Ce système doit être crédible et malheureusement ce n’est plus le cas. J’entends des responsables de ce pays dire : ‘’Nous avons les meilleurs magistrats du monde, la justice marche très bien’’. Il faut être sérieux ! Ceux qui sont dans la justice rigolent quand ils entendent un tel discours parce que ce n’est pas la vérité. La vérité, c’est que nous avons une justice qui souffre de dysfonctionnement », martèle Me Mame Adama Guèye. Et d’ajouter : « cela ne sert à rien de dire qu’on a modernisé la justice en y mettant beaucoup de moyens si, à côté, il n’y a pas de politique claire, reposant sur une volonté politique non équivoque de rupture contre la corruption dans la justice ». Me Mame Adama Guèye qui est le seul candidat lors de la dernière élection présidentielle à avoir fait une déclaration de patrimoine, se pose des questions sur la multitude de maisons qui foisonnent depuis un moment. Pour lui, « il y a eu beaucoup de nouveaux riches, et ils construisent beaucoup ». D’après Me Mame Adama Guèye, « on s’enrichit parce qu’on a travaillé, hérité ou parce qu’on vous a fait cadeau. Sinon, ça veut dire que vous avez eu de l’argent par des voies qui ne sont pas normales ».
MINISTRE - Incompétence, inaptitude, moralité douteuse, cv bidonné… : Gouvernement ou le royaume des critères de nomination insaisissables
Ils sont nombreux, les Sénégalais à avoir accédé au poste politique de ministre de la République. Mais avec le jeu de chaises musicales qui s’apparente à une partie d’échecs en vigueur depuis plusieurs années, il reste malaisé de maîtriser les conditions et les critères qui donnent accès à la fonction. On en est alors à élucubrer sur les motivations profondes du président de la République quand il décide de changer un ministre par un autre.
Sous le régime de l’Alternance, nombreuses sont les personnalités qui ont été promues au rang de ministres. D’ailleurs, le nombre est tellement important qu’il est impossible d’en avoir le chiffre exact. Cette situation serait passée inaperçue si les nominations de ces personnalités censées exécuter la politique de la nation définie par le Chef de l’Etat ne se terminaient pas, le plus souvent, par des fiascos et des clashs. Légèreté et pilotage à vue sont souvent à l’origine de ces impairs qui mettent en évidence la promotion politique d’hommes et de femmes loin d’avoir le niveau, la compétence, la moralité ou l’expérience souhaitée.
Le premier faux-pas, symptomatique de ce qui allait suivre, intervient lors de la formation du premier gouvernement sous l’ère Wade avec la nomination d’une institutrice, Marie Lucienne Tissa Mbengue à la tête du ministère de l’Education. Le milieu s’en émeut et faillit s’étrangler face à une telle désinvolture au sommet de l’Etat. Deux jours et des pressions venues de toutes parts ont suffi au Chef de l’Etat et à son Premier ministre d’alors, Moustapha Niasse, pour constater les limites objectives de Mme Mbengue. Cette responsable politique du Pds à Mboro est limogée pour incapacité et incompétence. Elle disparaît de la circulation politique mais en amenant avec elle le titre de ministre conseiller à la présidence de la République.
Le premier attelage gouvernemental de l’Alternance ne compte pas ce seul cas car, Mamadou Makalou promu ministre de la Culture saute deux mois seulement après sa nomination. Son péché paraît intolérable au président Wade : incompétence, même si lui défend le contraire à travers la presse.
L’autre curiosité restée énigmatique, c’est l’actuel ambassadeur du Sénégal à Rome, Cheikh Sadibou Fall. D’abord ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat dans le premier gouvernement de Mame Madior Boye en mars 2001, après la «défenestration» d’Amath Dansokho, il atterrit trois mois plus tard à la tête du ministère de la Pêche, dans le gouvernement Boye 2. Ejecté, il passe ministre de l’Intérieur le 22 avril 2004. Et…trois mois après, le 19 juillet, il est limogé. S’ouvre alors l’ère Ousmane Ngom, revenu dans les grâces du président Abdoulaye Wade, et fidèle au poste depuis trois ans. Aujourd’hui encore, on ne sait pour quel motif Cheikh Sadibou Fall est passé d’un ministère à l’autre. Incompétence dans le secteur de la pêche, décision politique propre à la guerre des clans, ou pression de la hiérarchie policière ? D’ailleurs, les critères de nomination des membres du gouvernement étaient devenus tellement insaisissables que Me El Hadji Diouf s’en était ému dans une rhétorique célèbre : «La fonction de ministre est celle qui est la plus déshonorante au Sénégal.» Depuis plusieurs mois, Me Diouf est devenu à son tour… ministre de la République, passé avec armes, bagages et idées dans le camp de la mouvance présidentielle.
MORALITE ET MOEURS
Outre ces cas tachés d’incompétence et d’incapacité, la nomination des ministres sous le règne de Me Abdoulaye Wade a souffert d’autres curiosités. L’on retient que c’est en plein Congrès du Parti démocratique sénégalais (Pds) que le Chef de l’Etat a nommé Awa Diop au poste de ministre délégué auprès du Premier ministre. Cette promotion avait déclenché l’hilarité collective en ce sens que Mme Diop est créditée d’un analphabétisme chronique, même si elle se targue d’un diplôme de secrétariat. Mais son cas paraît moins grave que celui de Ahmet Khalifa Niasse qui peine à biffer son nom en français sur du papier. Ce «guide» religieux se réjouit de son statut de ministre en charge de la construction de la nouvelle capitale. Une nomination qui, dit-il, est intervenue par arrêté (?) du président de la République !
Il s’y ajoute, dans ce lot des fiascos ministériels, la nomination scandaleuse de Aminata Diallo à la tête du ministère de la Santé. Moins d’une journée après sa promotion, elle est rattrapée par son passé car, elle est accusée d’être mêlée, à tort ou à raison, dans une sombre affaire d’avortement clandestin. Même si les développements ont plaidé en sa faveur, il reste qu’elle n’a pas duré au département. Son nom est désormais négativement chargé.
Ancien baron socialiste, le néo-libéral Adama Sall, ministre de l’Hydraulique, avait été épinglé par la Cour des comptes suite à une gestion jugée scabreuse de la Société d’aménagement de la petite côte (Sapco). Les magistrats chargés de son dossier étaient à ce point choqués par sa gestion qu’ils avaient suggéré à l’autorité politique qu’aucune charge publique administrative ne fût confiée à M. Sall. Le président de la République n’en tient nullement compte. Comme il fermera les yeux sur le cas spécifique de son chef de Cabinet, Pape Samba Mboup. Le nom de ce dernier a été mêlé à une affaire de pédophilie non encore élucidée. Il n’empêche qu’il est… ministre depuis plusieurs années.
De nos jours, la compétence des ministres promus se mesure à l’aune de leur formation académique. Il existe une tendance nouvelle des prétendants au strapontin gouvernemental à se faire fabriquer des Curriculum vitae étoffés de diplômes fictifs… C’est à la mode.
FILIGRANE - Révolution, M. le Président !
Jamais la fonction de ministre n’a montré un visage aussi particulier. Pourtant, dans le passé, elle était prédestinée aux hommes et femmes capables de relever les défis et d’établir un plan de travail qui puisse leur permettre d’imprimer leur marque dans leurs départements respectifs. Déjà, le premier gouvernement de l’histoire du Sénégal, installé le 20 mai 1957, avait consacré la nomination de la «crème» des instituteurs, alors sortis de la prestigieuse école William Ponty. Parmi ces illustres instituteurs, l’on retient les noms de Alioune Badara Mbengue, Amadou Makhtar Mbow, entre autres. Après cette génération qui a marqué son temps et fait ses preuves, les ères de Senghor et de Diouf jettent leurs dévolus sur les administrateurs civils et secrétaires d’administration rompus à la tâche et ayant suffisamment de bagage intellectuel et moral pour mener à bien les politiques qui leur sont confiées.
Peut-on en dire autant avec l’alternance ? Peut-être pas, car une certaine tradition, naguère rigoureuse dans la sélection des membres du gouvernement, a cessé d’être respectée. L’aspect politicien et le trafic d’influence priment désormais sur la compétence et les aptitudes intrinsèques. Le résultat est là, visible. L’instabilité ministérielle s’est installée, mis à part quelques secteurs comme les Affaires étrangères ou les Finances.
Un constat suffisant pour que des ruptures s’opèrent, à défaut de retourner à l’orthodoxie républicaine. Après une race de politiciens qui a montré ses limites, l’heure est à la promotion d’hommes et de femmes aux compétences avérées. Cette race, pourtant que l’on sache scruter les horizons, ne fait pas défaut au Sénégal et dans la diaspora. Ils ont fait de hautes études sanctionnées par des diplômes certifiés et reconnus, ils ont capitalisé une grande expérience et ne sont mêlés à aucune sombre affaire. Leur moralité n’est pas mise en doute, ils maîtrisent les rouages de l’administration, et leur crédibilité auprès des institutions internationales font d’eux des représentants valables du Sénégal sur la scène mondiale. Toutefois, en amont, les enquêtes de moralité se doivent d’être rigoureuses et sans concessions.
Cette nouvelle orientation est une voie de salut pour Me Wade. Sa volonté de construire semble incontestable mais, en partie, ses projets butent sur les profils inadéquats. Au début d’un mandat, qui est sans doute son dernier à la tête du pays, et grâce à la configuration d’une Assemblée nationale qui accueille nombre de ministres, il a un gros prétexte pour placer des hommes neufs, moralement irréprochables, maîtrisant les dossiers qui leurs sont confiés. Une occasion pareille ne se présentera pas à lui, tous les jours.
Ndiaga NDIAYE
PLUS LOIN AVEC…MOUHAMADOU MBODJ, Coordonnateur du Forum civil : «Un Etat qui s’engage dans l’efficacité doit chercher des compétences»
Selon vous, quels doivent être le profil et les critères de nomination d’un ministre de la République ?
Je voudrais tempérer la question pour définir la fonction de ministre. Elle est une fonction politique. Il faut d’abord comprendre qu’être dans un gouvernement est une fonction politique. Cela découle de la décision du Chef de l’Etat même si on dit formellement que c’est le Premier ministre qui forme le gouvernement. Si nous regardons ces deux éléments, c’est à ce niveau qu’il faut définir les critères de nomination. Du point de vue des textes, il n’y en a pas qui définit les critères de nomination des ministres. Il y a simplement des usages et des habitudes en la matière. Chaque pays, selon son contexte historique et son contexte national, détermine une démarche vis-à-vis de ces questions. Depuis l’indépendance, il y a une tradition politique, mais tradition ne veut pas dire règlement. Ce sont des habitudes qui ont été développées. A cette période, il n’y avait pas beaucoup de cadres au Sénégal, c’est pourquoi, on allait chercher les ressources humaines dans le vivier des enseignants. Après le départ de Senghor, l’administration a généré des cadres de l’administration avec la création de l’Enam. Ainsi, sous le magistère de Diouf, on s’est appuyé sur ce vivier. Les gens étaient formés pour cela et on les amenait à la vie politique. Maintenant, Wade est venu avec des cadres du privé. Il se détourne de ce vivier. Avec lui, l’essentiel du premier gouvernement vient du privé et du politique. Mais, plus tard, Me Wade se sépare de ses anciens alliés pour s’appuyer sur un vivier très politique. Combien de fois a-t-on formé un gouvernement pour préparer des élections. Donc, son critère à lui est politique.
Mais est-ce que cela ne déteint pas sur la gestion des affaires publiques et dans le management des dossiers ?
Je vais en venir. La fonction de ministre est politique et non politicienne, ce qui est la tendance actuellement. Il faut mobiliser les militants et régler leurs problèmes. Tout dépend de la vision qu’on a de l’Etat. Si on pense que l’Etat est une réalité qui est au-dessus des particularismes au niveau national, qu’il est au-dessus des confréries, au-dessus des classes sociales, il joue un rôle d’équilibre et d’arbitrage. A partir de ce moment, les gens qui doivent animer un tel projet doivent avoir un profil d’impartialité. On a vu des populations d’une ville (Ndlr : Kaolack) brûler le drapeau national parce qu’un ministre (Ndlr : Issa Mbaye Samb) est enlevé du gouvernement. C’est cela la gouvernance des particularismes. Quand l’Etat s’engage dans la finalité d’efficacité, il cherche des compétences pour satisfaire les doléances des populations. Mais quand on est dans un Etat hyper politicien, la préoccupation essentielle est d’assurer la reproduction de l’équipe. Les moyens de l’Etat sont mobilisés et convoqués pour assurer la pérennisation du pouvoir.
Pensez-vous que ce soit le cas aujourd’hui ?
Je pense que la note dominante aujourd’hui, c’est une distribution déséquilibrée des prestations de l’Etat. C’est en fonction de la carte du client. Si vous avez des proximités avec le client, vous avez des privilèges ; au cas contraire, vous êtes marginalisés. Ceux que l’on met dépendent de celui qui les met et de sa vision de l’Etat. Souvent, les gens se focalisent sur le cv mais, en France De Gaulle n’avait que le Bac. Charles Pasqua n’avait que le Bac alors qu’ici, on parle de Farba Senghor. Un ministre gère une équipe composée de compétences reconnues. S’il a une bonne approche de management et un bon contexte de management. Avoir un bon contexte de management, c’est un chef qui n’est pas interventionniste, qui a une vision de l’Etat correcte, qui n’est pas un politicien.
Quelle est, selon vous, la place de la moralité dans la nomination d’un ministre ?
Pour moi, la moralité est une question d’éthique. On regarde le parcours moral pour ne pas avoir un repris de justice parce que l’Etat symbolise le consensus national. Il faut que la personne soit représentative des valeurs nationales. Les parcours doivent être revus pour s’assurer qu’ils sont en conformité avec certains principes de la morale républicaine. En dehors de cela, il y a l’éthique qui est personnelle. En gros, il y a ce que le ministre est, il y a aussi ce que celui qui le responsabilise est. Pour juger un ministre, il faut interroger le contexte.
Ndiaga NDIAYE -