et la politique
LES INTELLECTUELS SENEGALAIS ET L’ACTIVITE POLITIQUE
Le Journal des Internautes | lundi 28 mai 2007 | 165 lectures Commenter cet article Lire l
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Au Sénégal, j’ai constaté, en commençant par moi-même, que la majorité des intellectuels sont à l’écart de l’activité politique, avec comme simple argument qu’ils sont « apolitiques ».
Ils disent le plus souvent « moi je ne fais pas de la politique ! » avec parfois un air de fierté voire de triomphalisme.
Partant de ce constat j’ai tenté de trouver les vraies explications à ce désintéressement par rapport à la politique, mais surtout j’ai essayé d’en tirer les conséquences sur divers plans, pour enfin lancer un appel envers l’élite intellectuelle pour qu’elle s’adonne en masse à l’activité politique de façon plus intelligente et plus efficace pour le bonheur de l’ensemble des sénégalais.
C’est l’objet de ma présente contribution.
En effet, si on prend la définition étymologique et noble du terme de la politique, c’est l’art de gérer les affaires de la cité ; dés lors, le champ de la politique devient plus large, laissant de la place à chaque citoyen de pouvoir contribuer à l’édification de la société à laquelle il appartient.
Il est vrai que la plupart de ces intellectuels vous diront qu’ils refusent de faire de la politique comme on le fait actuellement dans notre pays, et non sans raison.
Mais ce qu’ils oublient c’est que d’une part, ce sont les hommes qui façonnent leur propre manière de faire la politique, et que d’autre part, la meilleure façon de changer un système c’est d’intégrer ce système et d’agir sur lui de l’intérieur.
Ce qu’on remarque c’est que les intellectuels ont tendance à se mettre à l’écart, à laisser les autres occuper le champ politique, ensuite le pouvoir, pour après se lamenter sur la qualité des hommes et des femmes qui nous gouvernent.
On agit en spectateur passif sur des choses qui déterminent notre vie et celle de nos enfants, alors qu’en principe rien ne nous disqualifie pour agir directement sur ces choses.
Et puis, quel mérite avons-nous, quand nous nous dérobons à cet exercice, par rapport aux citoyens qui ont eu le courage de descendre sur le terrain, d’afficher leurs ambitions pour leur pays ?
Qu’avons-nous fait réellement pour « booster » notre pays sur le chemin de l’émergence économique ?
Avons-nous le droit de nous taire sur les nombreux problèmes auxquels nous sont confrontés quotidiennement ?
Est-ce que nous devons déléguer cet exercice à une faible minorité souvent moins qualifiée que nous, pour leur demander de parler en notre nom ?
Avons-nous peur de prendre partie dans l’échiquier politique de notre pays ?
Ce sont autant de questionnements que nous devons résoudre individuellement pour ensuite faire la mise en commun afin d’y voir plus clair.
Il y’a un proverbe ouolof qui dit « il est beaucoup plus efficace de crier soi même que de demander à une tierce personne de crier pour soi ».
Après tout, peut être que les actuels acteurs politiques font de leur mieux, et si nous ne sommes pas satisfaits de leurs prestations, montrons leur ce que nous autres nous savons faire, et le peuple jugera.
C’est vrai qu’aujourd’hui faire de la politique au Sénégal signifie chez beaucoup essayer de s’enrichir malhonnêtement et rapidement, se faire une place au soleil facilement, bref, réussir sans mérite aucun.
Mais fort heureusement, cela n’est qu’une impression tirée d’attitudes de certains hommes politiques, qui ne pourrait être érigée en une règle générale.
Par ailleurs, les enjeux au plan politique, économique et social sont tellement importants que cela vaut la peine que les intellectuels de notre pays fassent leur auto-critique, se fassent violence pour reconsidérer leur posture apparemment « confortable », mais très préjudiciable pour l’ensemble de la nation.
Vous me direz que tout le monde ne peut pas faire de la politique ; soit, mais je suis certain que nombre d’intellectuels sur la touche du terrain politique ne sont pas à leur bonne place.
Ils doivent investir le terrain politique, soit en intégrant les nombreux partis déjà existants, soit en créant leur propre parti car la pléthore de partis n’est pas une mauvaise chose en soi, car par la force des choses et de l’histoire tout court, il va y avoir une sélection naturelle : les meilleurs d’entre ces partis politiques vont rester et les moins bons vont disparaître inéluctablement.
Si la majorité de la classe intellectuelle, avec son expertise diverse, son niveau de culture fort appréciable, ses compétences et son savoir faire, parvient à s’investir dans l’activité politique, nous verrons ensemble les premiers résultats positifs parmi lesquels on peut citer :
L’instauration d’un dialogue politique de plus haute facture
Un parlement plus habilité à initier et à voter des lois pour le bonheur du peuple qu’il est censé représenter, mais également plus efficace parce que pluridisciplinaire
Des députés moins coûteux pour la nation car être député pourrait ne plus être une profession, mais un engagement simplement citoyen et désintéressé
L’avènement réel et positif d’une alternance générationnelle dont on parle depuis des années sans l’obtenir
L’invite de la société civile à un rôle plus clair, plus efficace et plus engagé
La disqualification des personnes sans capacités techniques réelles dans le terrain politique
Notre pays regorge de jeunes intellectuels dans presque tous les domaines, nous n’avons plus le droit de nous satisfaire ou de nous contenter d’une race de politiciens dépassés par les changements du siècle naissant.
Notre niveau de démocratie et de culture politique doit nous permettre d’être plus exigeants avec nous-mêmes, d’avoir de plus grandes ambitions sur la façon de gérer notre cité.
Il s’y ajoute que personne ne viendra de l’extérieur pour développer notre pays, à notre place : nous seuls devons, sur un élan de sursaut national, nous tenir debout comme un seul homme, en tant qu’une partie de l’élite de la nation, en vue de transformer profondément la façon de faire de la politique, pour des changements réels à la mesure de nos efforts et de nos moyens depuis longtemps consentis dans le vide.
Nous sommes tous responsables ; cessons de pleurer sur notre sort tout en dormant sur nos lauriers.
Quittons les gradins et les tribunes, jetons nos jumelles de spectateurs, cessons les commentaires « d’experts en tout », pour aller sous les feux de la rampe vêtus tous du maillot national, en vue de jouer notre part dans ce match qui ne fait que commencer et que nous sommes contraints de gagner si nous voulons être parmi les pays qui comptent dans ce nouveau village qu’on dit planétaire.
Nous avons tous au moins une raison valable de descendre sur la scène politique ; si seulement un peu plus d’un tiers de la population intellectuelle actuellement sur la touche, parvient à regagner les rangs des hommes et des femmes politiques, demain il fera jour avec un soleil sénégalais plus que jamais éclatant.
Prénom et nom : Mor FAYE
Adresse e-mail : morfay21@yahoo.fr
1 Réaction
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29 mai 2007 13:00
Je me permets d’ajouter quelques commentaires à cet article qui recouvre l’analyse que nous faisons de la posture des intellectuels. Je voudrais rappeler ce que Cheikh Anta Diop disait de l’apolotisme des intellectuels :
- certains sont apolitiques par peur de l’engagement politique ;
- certains sont apolitiques par opportunisme, carrièrisme ; ils préfèrent signaler leurs compétences et se faire coopter par le régime en place pour bénéficier de positions confortables dans des organismes internationaux, des ministères, des postes de direction...etc sachant que s’engager dans l’opposition c’est se voir fermer toutes les portes liées à la puissance publique.
Par ailleurs, je pense que pour un petit pays comme le Sénégal avec plus de 60% d’analphabète, quand on a atteint un certain niveau intellectuel on a le devoir de s’impliquer dans la gestion de la cité, c’est le minimum pour rendre au pays ce qu’il a investi dans l’éducation de chaque intellectuel. La nature ayant horreur du vide, si les intellectuels s’abstiennent de s’engager en politique, il ne faut pas s’étonner que ce soit les Modou Diagne Fada, Farba Senghor, Talla sylla et cie. qui prétendent vouloir gouverner notre pays et Dieu sait que ceux-là sont loin d’être les meilleurs d’entre nous. Hé oui quand les meilleurs désertent, ce sont les médiocres qui occupent l’espace. A bon entendeur, En ce qui me concerne, je suis plus que engagé là oú je considère ma place dans l’échiquier politique.