Lettre ouverte adressée aux candidats déclaré
Lettre ouverte adressée aux candidats déclarés à l’élection présidentielle de 2012
Mesdames, Messieurs,
Pourquoi êtes-vous indifférents ?
Personne d’entre vous, candidats déclarés à l’élection présidentielle de 2012, n’a parlé de la lutte contre le tabagisme dans ses priorités. Pire encore, récemment, quand Philip Morris a baissé le prix des cigarettes Marlboro de 650 FCfa le paquet prix ancien à 400 FCfa prix nouveau, aucun d’entre vous ne s’est prononcé sur cette baisse du prix des cigarettes malgré sa forte médiatisation. Et pourtant, cet acte pris de façon unilatérale par l’industrie du tabac a porté atteinte à l’article 6 de la Convention Cadre de l’Oms pour la lutte antitabac que notre pays a signée en Décembre 2004 et dont les effets sur la santé et l’économie du Sénégal sont extrêmement graves. Selon des sources autorisées, à partir du 15 novembre 2011, date d’entrée en vigueur de cette mesure, le Sénégal perd 340 millions de francs Cfa par mois. Ce qui est un manque à gagner considérable pour l’Etat.
Depuis des siècles, on sait que le tabac est l’une des meilleures sources de recettes fiscales parmi les produits de consommation mais nous devons retenir que le tabac n’est pas un article de première nécessité. Du fait qu’il est largement consommé et sa demande relativement élastique, le tabac est une source de recettes publiques certaines pour l’Etat et facile à administrer.
Au Sénégal, chaque année, plus de 32 milliards FCfa entrent dans les caisses de l’Etat au titre de recettes induites par le commerce du tabac. Cependant, il n’existe aucune loi régulant cette manne financière, en termes clairs, aucune partie n’est affectée à la promotion de la santé.
Ce que nous gagnons vaut-il ce que nous perdons ?
L’article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté par l’Assemblée générale des Nations unies, le 16 Décembre 1966 stipule que : ‘Toute personne a le droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu’elle est capable d’atteindre.’ Selon l’Oms, la consommation de tabac est la première cause de décès évitables, avec cinq millions de morts par an dans le monde. En somme, le tabagisme tue, beaucoup plus que le Vih Sida, le Paludisme et la tuberculose réunis. Et si les tendances actuelles restent inchangées, à partir de 2020, dix millions de personnes mourront annuellement du fait du tabagisme, dont 70 % dans les pays en voie de développement. Même les non-fumeurs subissent les effets néfastes de la consommation du tabac parce que, victimes de la fumée secondaire autrement dit de la fumée des autres. Selon l’Organisation Internationale du travail (Oit) 200 mille travailleurs meurent chaque année des suites d’une exposition à la fumée de tabac au travail.
La consommation du tabac et l’exposition à la fumée de tabac s’accompagnent d’un risque de décès prématuré extrêmement élevé. La moitié de tous les fumeurs de longue durée seront victimes du tabac et la moitié d’entre eux mourront dans la force de l’âge, abrégeant leur existence de 20 à 25 ans.
En Afrique, si rien n’est fait d’ici à une dizaine d’années, le nombre de personnes atteintes de cancers pourrait augmenter. Il passerait de 582 mille à 800 mille par an, soit une augmentation de 40 % avec un taux de décès de 50 %.
Outre ses effets sur la santé, le tabac a aussi des implications socio-économiques reconnues. Selon la Banque mondiale, le tabac entraîne chaque année des pertes financières estimées à 200 milliards de dollars dont plus de 50 % dans les pays en voie de développement...
Devant la mondialisation de l’épidémie du tabagisme avec ses effets transfrontaliers, l’Oms a élaboré, sous ses auspices, la Cclat, dont l’entrée en vigueur en février 2005 a donné naissance à une solidarité internationale et suscité un espoir mondial. La Convention cadre de l’Oms pour la lutte antitabac n’est pas self-executing c'est-à-dire qu’elle ne s’applique pas immédiatement au signataire. Donc, il faut transposer ses dispositions dans notre arsenal juridique et réglementaire antitabac, autrement dit dans notre droit positif interne.
L’objectif général de la Convention cadre de l’Oms pour la lutte antitabac est de protéger les générations présentes et futures, en particulier, celles des pays en voie de développement des effets sanitaires, sociaux, environnementaux et économiques dévastateurs liés à la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée du tabac.
Trois ans après l’entrée en vigueur de la Cclat, les pays membres doivent mettre en œuvre l’article 11 relatif à l’étiquetage et au conditionnement des produits du tabac. Et cinq ans plus tard, ils doivent mettre en application l’article 13 en rapport avec l’interdiction de la publicité, de la promotion et du parrainage en faveur du tabac. Aucune de ces dispositions n’a connu malheureusement un début d’application dans notre pays.
Pourquoi le Sénégal a-t-il reculé en matière de prévention légale du tabagisme ?
En 1981 (avant la signature de la Cclat), le gouvernement du Sénégal a manifesté une volonté politique ferme de lutter contre le tabagisme, matérialisée par le vote de la loi n° 81-58 du 09 novembre 1981 portant interdiction de la publicité en faveur du tabac et de son usage dans certains lieux publics. Mais, cet engagement a été remis en cause quatre ans plus tard, par l’adoption de la loi n° 85- 23 du 25 février 1985 modifiant la loi de 1981. Cette nouvelle loi (85-25 du 25 février 1985) très faible - parce que signant le retour à la publicité en faveur du tabac excepté par voie d’émission de télévision - a entraîné l’implantation tous azimuts des kiosques de tabac dans toutes les grandes artères de nos grandes villes et la propagation de l’épidémie du tabagisme dans toutes les franges de notre société.
Chez les adultes, le taux de prévalence du tabagisme est de 19.9 chez les hommes et 1.3 chez les femmes (Oms, 2000). Chez les jeunes, l’enquête de Gyts 2007 a montré que 12.0 % des élèves garçons fument régulièrement la cigarette contre 3.1 % des jeunes filles. Pour l’exposition à la fumée du tabac dans les endroits publics, un (01) enfant sur deux (02) est exposé autant chez les jeunes filles que chez les garçons.
L’initiation au tabac est de plus en plus précoce. Ainsi, la proportion d’enfants ayant fumé à l’âge inférieur à 10 ans est passée de 19.3 % (en 2002) à 25.9 % (en 2007). Si cette tendance se maintient et persiste, le tabagisme sera responsable de la mort de 250 millions d’enfants et d’adolescents vivant actuellement dans les pays pauvres.
La Convention relative aux droits de l’enfant, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 20 novembre 1989 stipule que ‘Les Etats-parties membres à la Convention reconnaissent le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible’.
Je crois que le meilleur motif d’intervention pour les pouvoirs publics est de dissuader les enfants et les adolescents de fumer étant donné la multiplicité des facteurs qui influent sur le tabagisme juvénile : manque d’information sur les dangers du tabac, risque de toxicomanie et aptitude limitée à prendre des décisions rationnelles.
Les jeunes, cible privilégiée de l’industrie de tabac, sous-estiment plus souvent le risque de devenir dépendants à la nicotine, si bien qu’ils sous-estiment grossièrement le coût futur de leur tabagisme. En 2000, aux Etats-Unis, sur tous les élèves de classe de terminale qui fument mais pensent de cesser dans les cinq années à venir, moins de 2 sur 5 arrivent à le faire effectivement.
J’estime que les autorités ont un rôle d’information à jouer et doivent donner aux adultes tous les renseignements nécessaires pour qu’ils prennent des décisions éclairées en matière de communication. Et sur les risques du tabagisme, les adolescents sont peu aptes à utiliser cette information judicieusement. Il est difficile à la plupart des adolescents de s’imaginer à 25 ans et encore moins à 55 ans. D’où l’intérêt de légiférer d’urgence conformément aux dispositions de la Convention Cadre de l’Oms pour la lutte antitabac pour protéger la santé des populations, en particulier celle des jeunes des effets néfastes du tabagisme.
Le Préambule de la Constitution de l’Organisation mondiale de la santé dispose que ‘La possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale’.
La lutte contre le tabagisme est une question de volonté politique. Légiférer est du domaine exclusif de l’Etat, la Convention cadre de l’Oms pour la lutte antitabac n’étant pas self executing, dans ce cas, je vous demande : une fois élu (e) président de la République du Sénégal, que comptez-vous faire durant votre mandat pour lutter contre le tabagisme dont les effets néfastes sur la santé, l’environnement et l’économie sont connus ?
Baba Gallé DIALLO, Président de l’Alliance nationale pour la prévention du tabagisme au Sénégal (Anpts) Tel : 338275513 / 774582609 / 702012271 / Email :bbgd70@yahoo.fr
Candidature de Youssou Ndour : une apologie de l’illettrisme
Alors que la droite et la gauche françaises affutaient leur armes en direction de l’élection présidentielle de 1980, l’humoriste Coluche fait irruption sur la scène politique. Il déclare de façon surprenante sa candidature avec force arguments populistes qui tranchent d’avec son caractère bouffon. Bien qu’il ne constitue pas une menace sérieuse pour François Mitterrand, ce dernier était obligé de le supplier à renoncer à son initiative. Car la candidature de l’humoriste, en plus de jeter le discrédit sur les institutions, risquait de rabaisser le débat d’idée à des numéros de clown.
La candidature surprise de chanteur Youssou Ndour ressemble à bien des égards à celle de Coluche. Mais la comparaison s’arrête là. Coluche, connu pour son engagement, pouvait se prévaloir d’avoir orienté une bonne partie de ses avoirs dans des œuvres philanthropiques. La création des ‘Restaurants du cœur’ en 1985 pour venir en aide aux pauvres porte son empreinte. You, comme l’appellent les fans, est un homme d’affaires pur jus. Il n’est pas du genre à perdre son temps pour la veuve et l’orphelin. Dans toute sa carrière, il n’a pas ménagé les graines de stars qui voulaient éclore. Aujourd’hui, il se gargarise d’avoir créé des emplois. Certes, le chanteur qui est à la tête d’un groupe de presse riche de plus 150 agents, est fier d’avoir mis sur pied une structure de microfinance appelée Birima. En revanche, il faut souligner que le but de ses entreprises n’est pas de créer de l’emploi, mais de faire des profits. C’est une logique élémentaire du capitalisme.
Tout entrepreneur qui investit cherche avant tout à fructifier sa fortune. De surcroît, la création d’un groupe de presse pour un homme d’affaires s’inscrit plutôt dans la logique de protéger sa position. Presse et affaires sont deux éléments d’un binôme. Dans les pays développés, les hommes d’affaires investissent massivement le secteur des médias et des télécoms de manière générale. En France par exemple, les plus grandes fortunes détiennent les groupes de presse les plus importants. Lagardère, Bouygues, Bolloré ou Rothschild investissent ce créneau pour former un oligopole étouffant.
S’agissant de la mutuelle Birima, le choix du nom de ce champion de l’ivresse est problématique. La mutuelle n’a pas atteint ses objectifs initiaux, à savoir aider des personnes qui ne peuvent pas accéder aux structures classiques de financement. Birima a englouti plus de 500 millions de Cfa du groupe Benetton qui était le grand financier du projet, sans résultats probants. En dehors de ces entreprises, Youssou qui a fêté son premier milliard depuis des dizaines années, est incapable de citer deux ou trois œuvres caritatives à son compte. Au regard de tous ces éléments, il est clairement établi que Youssou Ndour est un simple homme d’affaires qui veut enfiler le costume d’un bon samaritain. Mais entre le dire et le faire, il existe une déconnexion déroutante.
Engagement
Dans ce qu’il sait faire le mieux, le grand chanteur n’a presque jamais pris position pour le peuple. Sa riche discographie réserve une bonne part aux possédants qui sont magnifiés à chaque morceau. La seule chanson de You qui peut être rangée dans le registre de l’engagement, ‘Boulen coupé’ faisait allusion aux coupures d’électricité. Mais, du fait d’un jeu d’équilibrisme, il n’a pas osé prendre position. Cette chanson est remise au goût du jour, à la suite du blocage de l’attribution de sa fréquence de télévision, pour brocarder le monument de la renaissance et la mal gouvernance. En dépit des malversations avérées dans la gestion du Fesman, You n’a pas manqué de réclamer de fortes sommes d’argent pour participer au festival. La logique de la droiture rompt. De même, l’obtention de sa fréquence pose un autre problème de vertu. Car c’est par des conciliabules et des compromissions que le président a consenti à lui accorder ce droit. La procédure viole toutes les règles de bonne gouvernance et la morale de manière générale. Au nom de la bonne gouvernance dont il se réclame, Youssou Ndour devrait refuser de participer à un tel désordre républicain.
Illettrisme
A défaut de titre scolaire pouvant justifier sa prétention présidentielle, You nous sert des arguments au ras des pâquerettes : ‘Etre président n’est pas un métier, mais une fonction.’ On le sait. Mais, une fonction confère un statut qui, à son tour, assigne des responsabilités nécessitant certaines compétences. Comment You compte-t-il assumer ses responsabilités de président s’il est incapable d’avoir un jugement personnel éclairé ? D’autant qu’il ne maîtrise ni le français ou l’arabe. Reconnaître son illettrisme et prétendre diriger des savants est le signe manifeste du mépris pour le savoir.
Notre Constitution dit clairement que ‘le président de la République définit la politique du gouvernement’. Comment définir une politique quand on est incapable de comprendre ce que croissance, Pib, et Pnb veulent dire ? Quand le chanteur prétend qu’il n’a pas de biens à l’étranger, ces propos étalent au grand jour toute son ignorance. Puisqu’un artiste planétaire de sa trempe détient un peu partout à travers la planète, des droits d’auteur et de royalties pour ses œuvres. Sans doute ignore-t-il qu’il y a biens meubles et biens immeubles. Lui qui prétend qu’il a beaucoup appris par le voyage. Pourtant, les étudiants en première année de Droit ont assimilé cette leçon. Un individu qui minimise le savoir à ce point ne peut objectivement pas faire grand-chose pour l’école. You, il faut savoir pour pouvoir. Nous ne voulons pas d’un illettré au palais. Ce serait un grand bond en arrière.
Nb : l’utilisation de ses médias à des fins de propagande traduit sa vision clanique. Nous y reviendrons la prochaine fois.
Baye Makébé SARR, ducsarr@yahoo.fr