Au-delà des iconoclasmes, les stratagèmes du
Attaque Wade-Eglise : Au-delà des iconoclasmes, les stratagèmes du sens
L’histoire semble vouloir nous donner raison quant à l’urgence de déposséder le président Abdoulaye Wade du Monument de la renaissance, et de nous l’approprier sémantiquement. A voir, eu égard aux frasques ô combien abracadabrantesques, le talent par lequel le vieillard politicien sait s’y prendre pour mettre la République dans tous ses états, il y a, à défaut de ne pouvoir se vautrer par terre d’ahurissement, de quoi retenir son souffle, pour autant qu’on est attaché spécialement à une situation sereine qui permette de poser les bases d’un débat profond et constructif. Qu’a ce vieillard singulier, à vouloir, quand tout l’appelle au repos et à la jouissance statutaire, allumer le feu partout, comme si son vieux venin d’incendiaire politique n’avait pas assez giclé ? Quand, pour défendre ‘son’ Monument de la renaissance, on s’engage dans des entrées en jambes aussi problématiques dans le domaine théologique, jusqu’à s’inviter en pleine célébration liturgique chrétienne, s’empêtrant à souhait dans les mailles de l’iconographie universelle, doit-on seulement y voir une exagération à visée politicienne machiavélique, ou une indiscipline caractérisée de septuagénaire choyé ? Un gosse, à coup sûr, aurait enregistré une raclée en bonne et due forme, ici, au Sénégal, mais redresse-t-on, ou confie-t-on à Dieu le vieillard intempérant et le bois sec, ici, au Sénégal, en Afrique Noire ?
La déraison, poussée à l’extrême, engendre quelque doute à l’innocence de l’acte et de la parole. L’Eglise est un grenier céleste, un tabernacle inviolable, où sont gardés des secrets, des trésors de gestes, d’actes, de paroles, de symboles dont l’humanité aura besoin de s’approprier d’ici peu pour gérer le tournant décisif de ce millénaire. Sinon pourquoi la dernière sourate descendue du Saint Coran (s. Al Mahida) aurait tant insisté sur la dimension eschatologique de Jésus ?
Ce Monument de la renaissance africaine ne doit souffrir d’aucun amalgame quant à la légitimité de son érection, mais à vouloir se faire la ‘tempête’ qui ‘déchire le rideau du temple’, on risque de distraire la nation dans de vulgaires intifada théologiques dont on pourrait se passer, et pire, on risque de donner l’occasion à tous ces ‘absents d’esprit et de cœur’ qui ne veulent pour rien au monde entendre parler de Renaissance africaine, étrangement, de se volatiliser avec la grande cause qui, tant, nous importe.
Où n’est pas le symbole, sur cette terre, dans cette création ? Et où, sur cette terre, dans cette création, n’est-il pas secondaire et facultatif vis-à-vis de ce qu’il symbolise ?
Le dira-t-on jamais assez, fidèlement à la promesse divine de guider sa création dans son aventure terrestre, par des ‘signes évidents’, c’est quand une vérité est trop élevée pour se prêter à l’intellection bornée du profane ou à la compréhension insuffisante d’une communauté à laquelle elle est destinée, que le symbolisme s’impose comme la voie la plus indiquée pour confier l’appréciation de cette vérité à l’entendement relatif de chacun.
Quant à confondre le symbole avec ce qu’il symbolise jusqu’à lui en attribuer la puissance ou le piédestal, dans l’ordre hiérarchique du sacré, c’est le travers de ceux qui, n’étant jamais que les représentants du plus bas niveau d’entendement d’un peuple, sont inaptes à saisir quoi que ce soit de tant soit peu profond et d’un ordre assez élevé. L’Egypte ancestrale n’a que trop souffert de cette calomnie officielle, à base de velléité monolatrique, qui est la source de la conspiration religieuse dans laquelle on a enfermé jalousement sa supériorité doctrinale et spirituelle. Diffamation outrageante de sa sacralité ! Pour avoir eu à gérer la plus dense des émanations et théophanies divines, alors que le monde qui l’environnait n’avait encore aucune idée d’un Dieu unique, maître, auteur et destinataire (Al Warris) responsable de la création, le recours au symbolisme fut une urgence doctrinale de la Révélation osirienne des anciens.
Le domaine par excellence du symbolisme
La tradition noire a été le domaine par excellence du symbolisme parce que les vérités les plus incommunicables du mystère de l’immanence divine y ont pris forme. Cela engage-t-il, pour autant, un Djoser, que des immatures spirituels aillent se prosterner devant ou autour de la pyramide à degrés de Sakkarah, pensant idolâtrement que la vitalité de la prophétie du patriarche nègre repose dans la pierre, quand ce dernier, ayant reçu le dépôt sacré universel n’a cherché et recommandé que sa concrétisation provisoire, sans plus, vu qu’étant en marche, ce dépôt devait par la suite, se transformant, aller se déposer chez les pharaons de la dynastie suivante, selon les modalités appropriées à l’instant de sa ‘descente’ ? Idolâtrie monumentale !
Le récit de la Genèse, les 7 jours de la Création, l’histoire d’Adam et Eve, le meurtre d’Abel par Caïn, les Généalogies bibliques, le Déluge, le sacrifice d’Isaac, Le Buisson ardent, la nuée qui guidait Israël dans le désert, Le Veau d’or et certains récits de l’Ancien Testament sont-ils de l’ordre du symbolisme ou de l’ordre de l’histoire réelle ? Que symboliseraient-ils, le cas échéant ? Acceptera-t-on qu’ayant été uniquement des supports de compréhension de leçons divines à l’humanité, ou à un peuple déterminé, par le canal merveilleux d’un imaginaire fantastique babylo-mésopotamien, pour des peuplades dont c’était le moyen le plus approprié à la capture du sens de la théodicée relatée, on en fit leur propre fin à eux-mêmes, c'est-à-dire une fin en soi dépourvue de tout sens à capturer ou message à décrypter, comme d’aucuns l’envisagent ?
La Croix, comme symbole universel de vie et de l’Eucharistie cosmique (qui est le rapport de maternité/paternité et de nutrition que la nature a avec ce qui est issu de son sein) transposé dans l’Eucharistie chrétienne (sang et corps du Christ, symbole mutatis mutandis de ce même rapport de filiation et de nutrition entre le Père et sa création incarnée en Christ, symbole de l’homme universel), est un symbole plus ancien que la naissance officielle du christianisme. Un symbolisme de la croix est, en effet, attesté dans des civilisations pré chrétiennes telles que les civilisations atlantidéenne et égyptienne. Eminemment présent et sous jacent dans la représentation géométrique de la multiplication des pains, dans comment la graine de moutarde devient le plus géant des arbres par le mystère universel de la mort/résurrection et du transfert du souffle vital qui est la base du fonctionnement et de l’accomplissement de la Promesse, dans le mystère de la Passion, dans le déploiement selon les axes vertical et horizontal, vers le Fruit (messie rédempteur), de l’Arbre (Révélation), de la Semence (Promesse) enfouie en Terre depuis l’Ancienne Alliance (Tradition primordiale), demeure-t-elle pour autant, et rien que par elle-même, en dehors de son contenu eschatologique universel, une fin en soi ?
Attaque Wade-Eglise
II - L’islam n’a-t-il pas ses propres symboles ?
L’islam a aussi ses symboles. Dans la sourate Al Kahf, pourquoi Khitmiir est-il un chien ? Un musulman ira-t-il adorer tout chien parce que Dieu a proposé à Mouhammad (Psl) d’utiliser cet animal comme porteur de sens, sans être lui-même la finalité du message ? Hudh’r et Moise, Jonas et le ventre du poisson, ces récits sont-ils réels ou métaphoriques, c'est-à-dire de l’ordre du symbole à saisir ? La Kaaba, symbole fort du monothéisme abrahamique en direction du polythéisme en général, des idoles mecquoises en particulier, ne perdrait-elle pas sa légitimité spirituelle en tant que support intemporel d’une Alliance entre Dieu et l’Humanité, si l’on se rendait subitement compte que tous ceux qui y vont en pèlerinage n’avaient plus en tête le pour quoi, mais le comment (de pierre granitique noire, décorée et enjolivée, etc.) de la ‘sainte pierre’ ? Il y a, en effet, loin de la quête de sens à la recherche de sensations fortes.
Il existe, dans les traditions hermétiques et pythagoriciennes, un symbolisme du ‘bouclier protecteur’, arme providentielle à laquelle est associé le ‘serpent primordial’, survivance symbolique du ‘jaangoor’ ou cobra royal pharaonique, chargé jadis de la protection rapprochée et mystique des maîtres de l’Egypte antique. Et parmi les insignes distinctifs des souverains grands inspecteurs généraux du 33e degré de la franc maçonnerie écossaise, ne figure-t-il pas, dans la ‘Grande Décoration de l’Ordre’, un bouclier autour duquel est une banderole bleue portant en lettres d’or l’inscription latine Ordo Ab Chao, banderole enfermée dans un double cercle formé de deux serpents d’or, chacun d’eux ‘tenant sa queue entre ses dents’… Certains intellectuels francs maçons, ignorant que cette dernière (la franc-maçonnerie résiduelle occidentale qui a séduit et désaxée nombre de ces intellectuels) n’est que le déchet symbolique du background ésotérique des patriarches fondateurs de la haute antiquité négro africaine, comme les rois Khéops(Ngoombèl/Sombèl ou Sangamaar Bouré), Thoutmosis 1 à 4 (Yélimanèl-le-grand et les teignes Mbissaane et Thiamassaass), nourrissant un extraordinaire complexe d’infériorité vis-à-vis de leurs ‘maîtres’, se basent le plus souvent sur un symbolisme, des enseignements et initiations pour la plupart vidés de leur véritable sens, pour remettre en question certaines valeurs socles de nos sociétés, de nos religions et des grands hommes qui président à leur destinée (même si ces religions et ces hommes de religion ne sont pas toujours indemnes de superficialité et d’obscurantisme). D’où nous viennent nos emblèmes nationaux ? D’où sont transposés nos protocoles de solennité républicaine, nos décorations, nos tenues vestimentaires officielles, nos grades de fonctionnaires, la haute nomenclature administrative ? Idolâtrie symbolique !
Pourquoi pas la queue de taureau sur la ceinture de nos officiels ? Pourquoi pas le bonnet sacré du grand chasseur avec ses cauris sur la tête de nos généraux d’armée, la démarche du varan Mboossé comme défilé de nos troupes d’élites, l’enclos d’initiation et la circoncision en masse comme préparatoires aux classes de philosophie ? (…)
Enfin l’homme, l’être humain s’entend, par l’agrégation successive des différents règnes de la création en lui, n’est-il pas le plus chargé des symboles, le Symbole par excellence, celui surtout à ne jamais considérer uniquement en lui-même, dans la mesure où ce qui y est préfiguré, ne peut qu’être l’Absolu, c'est-à-dire la synthèse universelle de Tout (on revient au symbolisme du Père et du Fils) ? Si le minéral, le végétal, l’animal, l’angélique, qui sont les déclinaisons ou spécifications du cosmique, sont dans leur intégralité enchâssés dans l’humanité, l’Homme n’est-il pas, dès lors, et éminemment, la caution même du symbolisme traditionnel, originel et divin ? En vérité, toute chose qui n’a pas, en elle-même, sa propre raison d’être, ne peut se dire affranchie de la condition de symbole. Alors, tout n’est-il pas que symbole, vanité, chimère, illusion, utopie, leurre, attendu que seul Dieu est à lui-même sa propre fin ? (Fin)
Louis Alphonse J. SARR K. K. Guide spirituel du Groupe Touba Salikhiine Saromaadh.lajkk@yahoo.fr
Nb : Le titre est de la rédaction.