Le Sénégal victime d’un déficit d’engagement
Le Sénégal victime d’un déficit d’engagement citoyen
Le régime de l’Alternance, s’il a longtemps suscité des espoirs, a au fil du temps donné naissance à trop de frustrations. Aujourd’hui, dans ce pays, il n’y a aucun secteur où les populations ne sont confrontées à des difficultés de toutes sortes. Les observateurs lucides et non complaisants savent qu’en réalité avec ce régime, les limites sont atteintes car il a un style, des méthodes qui sont incompatibles avec les exigences de la bonne gouvernance qui est la voie obligée pour faire enfin du Sénégal un pays émergent.
Malgré tout, ce régime a ses défenseurs acharnés. Ainsi, sur tous les fronts où il aura des difficultés, des individualités comme des groupes bien structurés, seront debout pour le défendre. Il a ses intellectuels, ses marabouts, ses islamologues, sa presse. Et même ses ‘débatteurs’ qui envahissent les médias lors des débats ou des tribunes pour, aux prix d’arguments les plus tirés par les quatre cheveux, faire tout pour déstabiliser les adversaires du régime ou tout simplement pour ‘brouiller’ les échanges et empêcher au public, de comprendre et de situer la vérité. Certains n’hésitent même pas à descendre sur le terrain de la vulgarité pour provoquer ou décourager ! Cela est normal et ne doit guère surprendre : chacun (e) est en effet dans une ‘posture’ et a des intérêts à défendre. Tous les individus qui à chaque fois que c’était nécessaire, ont réussi un tant soit peu à sortir le régime de sa situation embarrassante ont été ‘récompensés’. Que donc, les nominations qui ont eu lieu après l’épisode tumultueuse du monument de la Renaissance africaine, ne surprennent pas. Certains même s’y attendaient peut-être ! C’est un épisode terminé, attendons la suivante…
Mais malgré tout, les faits sont têtus : les chiffres, les beaux discours ne peuvent rien contre la cherté croissante de la vie, le développement de la pauvreté dans les campagnes et les villes, la dégradation continue de l’environnement, la précarisation continue de notre système éducatif, les conditions effroyables du transport public, l’accroissement des accidents et des agressions, la crise des valeurs morales, la corruption tout azimut, l’indiscipline de nos populations. Et pendant ce temps, des structures inutiles et très coûteuses foisonnent, avec un gouvernement pléthorique, entraînant un train de vie impitoyable !
Une passivité difficile à comprendre
Face à ce tableau plus que sombre et incontestable de nos conditions de vie en général, ce qui ne peut manquer de surprendre, c’est l’absence d’une riposte, de survie, au moins, à la mesure de l’ampleur de ces agressions multiformes et multisectorielles. Il faut peut-être que des intellectuelles nous donnent les ressorts profonds qui expliquent la capacité de soumission, d’acceptation, de résistance de nos populations.
La vérité est que ce qui nous arrive, n’est guère une fatalité de l’histoire tant il est vrai que chaque société n’a que les chefs qu’elle mérite.
Aujourd’hui, plus que jamais, il est d’une nécessité urgente que la citoyenneté ait un nouveau contenu. Etre citoyen, ne doit plus se limiter à faire correctement son travail et rentrer tranquillement à la maison. Au contraire, maintenant les conditions sont telles que les vertueux, les consciencieux se raréfient, découragés par la promotion des plus médiocres, des plus incompétents. Et pourtant, les ressources humaines de qualité ne manquent pas dans ce pays. Hélas la plupart sont marginalisées ! Beaucoup d’entre nous sont, sans le savoir, devenus indifférents au sort du plus grand nombre. Chacun gère son quotidien comme il le peut. Cette indifférence est devenue à la longue suicidaire. Alors, la politique ‘politicienne’ a bon dos. Elle justifie toutes les formes d’égoïsmes. Elle justifie même et fortifie les choix les plus contestables.
Si des islamologues ont défendu vaille que vaille le monument de la Renaissance africaine, ce n’est pas pour rien. Ils l’ont fait au nom d’un choix : celui de défendre ce régime qui garantit leurs intérêts matériels. C’est leur façon de faire la politique. Alors qu’à l’opposé, des imams, soucieux avant tout, de sauvegarder les intérêts bien compris de l’Islam, et surtout sensibles au quotidien difficile de leurs concitoyens mènent, eux aussi, des actions, qu’est-ce qu’il y a de plus noble ? A mon avis, c’est cela la véritable politique. Celle qui peut nous mener vers la bonne gouvernance. Comme le disait le Grand Maodo, celle-là n’est pas seulement un droit, c’est un devoir. Y renoncer, comme l’ont fait hélas nombre de Sénégalais, c’est faciliter la tâche à ceux pour qui, exercice du pouvoir rime avec enrichissement, passe-droit, volonté de puissance. Nous devons redevenir autrement citoyens, pour mieux vivre, pour que les générations de demain trouvent un pays viable, vivable parce que la pratique de la bonne gouvernance y sera, à tous les niveaux, un réflexe. Aujourd’hui, reprocher à un père de famille de ne pas faire assez pour prendre en charge correctement l’éducation de ses enfants, c’est avec un peu de recul, trop lui demander. Très souvent, les conditions de vie sont si dégradées qu’à beaucoup de niveau, malgré soi, on baisse les bras. C’est l’Etat qui a tous les moyens, tous nos moyens, qui peut créer un environnement favorable, facilitateur. Mais, soyons-en sûrs, cet Etat ne le fera pas pour les raisons dont nous avons parlé plus haut.
Redéfinir la citoyenneté, la politique et la pratique religieuse Même notre pratique religieuse doit être revue à la hausse. La limiter au simple aspect individuel, c’est la dénaturer. La religion bien comprise concerne toutes les dimensions de la vie. De plus, la pauvreté est le plus grand ennemi de la foi. C’est tromper les gens en leur parlant sans cesse de ‘muñ’ et en leur disant que ‘nguur Yàlla koy joxe’. En 2000, c’est un peuple debout qui a voté contre le président Diouf et l’a fait partir.
De la même manière, chacun de nous doit prendre en charge son propre destin par des choix libres et responsables, de la même manière chaque peuple choisit ses dirigeants, et aussi les accompagne par une attitude faite de responsabilité et de vigilance. Un homme de bonne volonté doit s’intéresser au sort de la majorité de ses semblables. La laïcité n’empêche à personne de prendre ses responsabilités aux heures des choix décisifs. Il ne faut pas faire des confréries un opium du peuple. ‘Allaxira, lu fa waay liggééyul, du ko fa fekk’. Ici, et maintenant, il s’agit de se conformer du mieux qu’on peut aux préceptes de sa religion et aussi et surtout de tout faire pour faire régner la bonne gouvernance. Mais il faut dire aussi que ce sont les consciences qui déterminent les comportements.
Alors, que tous les intellectuels de bonne volonté, s’engagent dans ce combat citoyen pour réveiller beaucoup de nos compatriotes avant qu’il ne soit trop tard ! Ce qui s’est passé en Haïti est plus qu’effroyable ! Mais qu’est-ce qu’on peut y faire ? Rien, sinon compatir, aider. C’est la volonté divine. Mais se soumettre, rester indifférent, devant des maux dus à la mal gouvernance, est injustifiable. Soutenir le régime qui en est responsable est encore pire.
Le mal de notre pays est essentiellement un déficit d’engagement véritablement citoyen. Alors, ce régime, malgré ses graves insuffisances, risque encore de… J’ose me tromper.
Babacar BARRY Enseignant retraité à Meckhé Babacar_barry@yahoo.fr
RECONNAISSANCE DES ÉCOLES CORANIQUES PAR LE GOUVERNEMENT : Il était plus que temps !
Le Gouvernement de l’Alternance vient de mettre un terme à la plus grande des injustices, que notre pays ait jamais connue. En décidant de rédiger un arrêté général portant reconnaissance de l’ensemble des écoles coraniques du Sénégal, de manière que l’Etat puisse, désormais, les assister dans leur mission d’éducation, le pouvoir issu des élections du 19 mars 2000 a définitivement rompu avec un passé fait d’exclusion et de discrimination, dont la responsabilité, par delà le défunt régime, incombe à toute la nation sénégalaise.
Après la bataille implacable que le système colonial a engagée contre les écoles coraniques, depuis Faidherbe, jusqu’à la fin du 19e siècle, aucun des hommes politiques qui se sont succédé n’a essayé de renverser cette tendance totalement incompréhensible, qui voulait que, dans un pays à forte majorité musulmane, où le Conseil privé, dès 1832, avait préconisé l’enseignement de la langue arabe dans les structures éducatives, l’école coranique soit considérée comme un lieu de non-éducation ne méritant aucun intérêt, de la part des pouvoirs publics. Je ne prendrai qu’un exemple.
Au moment où j’étais nommé ministre de l’Education nationale, Serigne Mourtada Mbacké (Puisse Dieu l’accueillir dans Son Paradis) ne recevait de l’Etat qu’une subvention de sept cents mille francs (700.000F) sur un total de sept cent soixante-dix millions de francs (770.000.000F) inscrits au budget, alors qu’il disposait d’un réseau de trois cent trente-deux (332) écoles coraniques dans lesquelles officiaient cinq cents (500) enseignants, payés par ses soins et cent quarante cinq (145) autres personnels administratifs et techniques.
C’était, assurément, une forme inqualifiable d’aliénation qui, apparemment, ne gênait aucun de ceux qui détenaient le pouvoir dans notre pays, depuis au moins 1914. Ainsi, l’argent des musulmans servait, majoritairement, à financer toutes les autres écoles, à l’exclusion de celles coraniques, institutions éducatives, qui ont, pourtant, donné à notre pays des personnalités-phares comme Khaly Amar Fall, Matar Ndoumbé Diop, El Hadji Oumar Foutiyou Tall, les Kounta de Ndiassane, Cheikh Ahmadou Bamba, El Hadji Malick Sy, El Hadji Abdoulaye Niasse, Seydina Limamoulaye et des milliers d’autres. Elles n’en étaient pas moins traitées par le mépris, le plus total.
L’école coranique, il faut le proclamer avec force, est, partout où sa mission est bien comprise, l’un des foyers d’éducation les plus complets et les plus performants. Tous ceux qui l’ont pratiquée ont été formés au quintuple plan physique, cognitif, social, comportemental et culturel. Ils sont éduqués moralement, formés spirituellement dans leur manière d’être, de vivre, de parler, de s’habiller, de commercer avec leurs semblables. Ils savent ce qu’est l’autorité, la responsabilité, la discipline, le respect dû à l’âge, à la famille, à la parenté, au voisinage, aux pauvres, aux déshérités, aux étrangers et à tout être humain. Ils savent ce que l’acte d’éducation signifie et les conduites sociales et morales qu’il implique.
Les élèves des écoles coraniques ne connaissent ni la rébellion, ni la grève, ni la destruction des locaux de leur institution, ni le pillage du matériel, ni les violences exercées contre les maîtres, le personnel administratif ou technique. Voilà pourquoi, chaque fois qu’ils s’insèrent dans la vie professionnelle, économique et sociale, ceux ou celles qui ont fréquenté les « daaras » réussissent facilement, parce qu’ils ont appris à vivre avec peu, à se déployer sans ostentation, à gérer avec rigueur et minutie et à faire fructifier tout ce qu’on leur confie, avec succès.
Le Professeur Malick Ndiaye, avec la compétence qu’on lui reconnaît, a dégagé, avec talent, le profil du « modou-modou » dont le Sénégal s’enorgueillit chez lui, aux Etats-Unis, en Espagne, en France, en Italie et partout ailleurs dans le monde. L’exemple de Serigne Mboup, de Ccbm, est là pour en porter témoignage. Il s’est fait tout seul, à partir des vertus et des valeurs dont les daaras l’ont doté.
En ignorant ces écoles de formation, qui sont pourtant d’authentiques centres d’excellence, et en considérant les arabisants comme des analphabètes, le Sénégal a complètement faussé sa stratégie de développement, depuis des décennies, parce qu’il a mis entre parenthèses près de 50 % de la population, alors que la maîtrise des mécanismes opératoires de la lecture, de l’écriture et du calcul permet d’augmenter la productivité du travail de 8% en Afrique et, même, de 10 % en Asie, selon une publication de la Banque mondiale, datée de 1990, œuvre de Marlaine Lockheed et Adriaan Vespoor.
Au vu de ce qui précède, la mesure que le président Wade vient de prendre est, sans conteste, la mesure la plus révolutionnaire que le Sénégal ait jamais prise, depuis 1960. Il a, enfin, réparé la plus grande des injustices que notre pays ait jamais connues, depuis l’aube de la colonisation. Elle doit être saluée comme telle et marquera, sans nul doute, un tournant décisif dans l’histoire du développement de ce pays, qui a tellement été coupé de ses racines qu’il en arrive à ne même plus reconnaître ses droits et ses intérêts, en raison de la confusion paradigmatique aliénante dans laquelle on l’a durablement immergé.
Par le Professeur Iba Der THIAM
Energie : La Bin Ladin group dit ''non'' au Sénégal et achète les parts de Total dans le capital de la Sar
Considéré comme le Messie qui avec ses 210 milliards devait sortir le pays des ténèbres et renflouer les caisses de la Sar, La Bin Ladin group vient de dire ''non'' à sa fiancée pour Total. Au même moment la BNP paris-bas fatiguée de supporter le prix exorbitant auquel le Sénégal achète le brut quitte le pool bancaire et abandonne le pays à ses ténèbres.
Après Shell qui avait, il y'a quelques mois, quitté notre pays, en cessant toutes ses actions au Sénégal, c'est au tour du groupe Total-Fina-Elf d'abandonner la Sar à ses démons. L'ancien actionnaire majoritaire de la Sar s'est débarrassé de ses «encombrantes actions dans la raffinerie» au profit du fiancé de la future mariée, -la Sar. Partie prenante aux assises de Paris, le groupe qatari qui était intéressé par les 34% que voulait lui céder le Sénégal a préféré s'approprier les 14% des parts que détenait Total dans le capital de la Sar. Cette décision, prise dans les journées du 12 au 14 janvier dernier à Paris, intervient quelques mois seulement après que le ministre de l'Energie ait déclaré devant le Parlement avoir trouvé un accord avec la Bin Ladin Group. À en croire M. Samuel Sarr le groupe qatari aurait accepté de mettre plus de 200 milliards à la disposition de la Sar. Ayant suivi les pourparlers, un observateur affirme qu'il est trop tôt pour parler d'échec mais reconnait toutefois que «la complexité du montage financier peut amener certains à penser que c'est terminé ». «Mais, poursuit-il, les négociations peuvent être reprises à tout moment». Contrairement à la demande du Sénégal qui voulait les voir mettre 210 milliards up-front, le groupe qatari a proposé à l'Etat de lui donner sa caution afin que le Sénégal puisse lever des crédits sur le marché bancaire.
La hantise des ténèbres revient
La rupture des fiançailles avec les arabes tombe au même moment où les Français de la Banque nationale de Paris, BNP-paris, se sont retirés du pool bancaire qui accompagnait le Sénégal dans le financement des Lettres de Crédits. Selon des sources proches de la banque, «les prix d'achat du brut, par le Sénégal, est trop élevé et personne ne peut continuer à supporter cet état de fait». C'est Arcadia, un groupe russo-nigérian, qui avait été retenu par le ministère de l'Energie pour la fourniture du Sénégal en brut. Et il vend le baril à Brent daté -c'est le prix de référence pour les produits pétroliers en provenance des pays anglophones- +7, 5$ US, alors que partout au monde il est vendu au maximum à +4$. Comme le Sénégal n'a plus les moyens de payer ses factures cash -soit 50 millions de $-, comme l'ont exigé les traders d'Arcadia, c'est la BNP-bas qui se portait garant pour permettre au pays de disposer du carburant. Le désistement cette banque intervient aussi dans un moment crucial : les machines de la Sar, faute de brut à traiter, sont aux arrêts depuis plus de 20 jours. Et cette situation, si elle n'est pas réglée, conduira, dans les jours à venir, à des ruptures de stocks. Cela aura comme conséquence la plongée prochaine du pays dans l'obscurité ; puisque la Sénélec ne fonctionne qu'avec ces produits livrés à la Sar. C'est pour masquer cette réalité que les officiels sénégalais se sont empressés, la semaine dernière, d'annoncer l'augmentation des prix de l'électricité et des produits pétroliers, en prétextant le faire sous le dictat de la banque mondiale.
Bacary Touré
Journaliste-écrivain
kimikikiko@yahoo.fr