le peuple en a assez des fêtes !
Les festivités marquant l’anniversaire des cinquante ans d’indépendance du Sénégal ont été lancées samedi dernier au stade Léopold Sédar Senghor sous la présidence effective du chef de de l’Etat.
D’emblée, la fête a été morne, sans saveur. Le Pds, parti au pouvoir n’a pas su mobiliser les foules malgré sa campagne électorale, déguisée, prématurée.
Les masses euphoriques du 19 mars 2000, jour de la célébration de l’Alternance politique intervenue au Sénégal grâce à des élections claires et transparentes organisées par l’ex-Président Diouf et son gouvernement ; les foules historiques de cette journée mémorable du changement ont pointé absent. Le peuple sénégalais, par cette manifestation inoubliable, debout comme un bloc humain, a fêté et magnifié l’arrivée à la magistrature Suprême sénégalaise de l’homme Abdoulaye Wade, leader charismatique du Pds. Le soutien des autres candidats de l’opposition, réunis au sein du Fal a été d’un apport déterminant pour l’avènement de l’Alternance.
La victoire de Abdoulaye Wade sur Abdou Diouf serait plus qu’incertaine, sans le soutien décisif d’hommes politiques comme Moustapha Niasse, Abdoulaye Bathily, Amath Dansoko, Landig Savané et de couches importantes de la société civile. La presse privée n’a pas été en reste.
Mais depuis, de l’eau a coulé sous les ponts : les belles promesses d’hier sont devenues des mirages sans lendemain. L’opposition, regroupée au sein de Bennoo a boycotté Abdoulaye Wade et sa fête, et derrière elle, le peuple sénégalais tout entier !
Le stade Léopold Sédar Senghor, témoin de la fête était désespérément vide : gazon vert étendu à perte de vue, espace vide, baobab fou, dénudé de feuilles vertes signe de vitalité et de jeunesse ; regards nostalgiques et hagards ont marqué une ambiance triste en ce jour historique d’anniversaire de notre indépendance nationale.
Les badauds se sont retirés avant l’heure convenue, laissant les élèves et les militaires assurer…
Les Sénégalais, après l’euphorie des deux premières années sont fatigués et déçus des promesses non tenues ; fatigués d’une vie devenue insupportable, cherté oblige, dans un Etat incapable de satisfaire la demande sociale devenue plus exigeante.
Sous le Sénégal de l’Alternance, assurer les trois repas quotidiens est un défi. La flambée des prix du riz, du sucre, de la tomate, du lait de l’huile et du mil a accru la disette, les prix de l’essence, du gasoil et des transports sont devenus exorbitants. La bonbonne de gaz de 5 kilos à 3 200 francs Cfa est simplement inacceptable pour une ménagère sans ressources.
Est-il normal que ces mêmes denrées et produits alimentaires coûtent beaucoup moins chers au Burkina Faso, en Mauritanie et en Gambie quand l’essentiel de ces produits transitent par le port de Dakar pour atterrir dans la sous-région ?
Du coup, le fameux tiéep bou djeen sénégalais en devient incolore, inodore, sans saveur.
Pendant ce temps, pour l’année 2009, les services des impôts ont recouvré 697,7 milliards de francs Cfa ; à la Douane près de 400 milliards l’ont été pour aller renflouer les caisses de l’Etat devenu super-dépensier. (Source : L’As quotidien du 2010-02-17)
Et dire qu’un milliard, c’est dépenser 100 000 francs Cfa par jour ; soit 1 200 000 francs Cfa par année ; ce pendant 28 années !!!!
Dans les milieux défavorisés, beaucoup de nos concitoyens se contentent d’un seul repas par jour
Au plan sanitaire, la situation n’est guère mieux lotie
Pour disposer de soins médicaux quand arrive la maladie, il faut se lever tôt et savoir bourse délier. Le plan sésame agonise devant des centres de santé dénudés de finances.
Les hôpitaux Aristide Le Dantec, Abass Ndao et général de Grand Yoff (ex-Cto) croulent sous le poids d’un manque criard de moyens. Ne parlons pas des zones d’habitation victimes d’enclavement de certaines régions de l’intérieur où la femme sénégalaise meurt facilement en donnant la vie, faute de moyens de transport ou de structures sanitaires décentralisées.
Pendant ce temps, les milliards de l’Anoci sont restés au travers de la gorge des artères principales de l’aéroport et du centre ville où les voitures rutilantes produites par l’alternoce s’étirent à longueur de journée. Dans les quartiers périphériques de Pikine et des Parcelles assainies ; dos d’ânes et embouteillages vous assaillent si ce ne sont pas les petits talibés qui vous arrachent la monnaie.
La jeunesse sénégalaise jadis fierté de la Nation a fini par sombrer dans un gorgorluisme sans issue alors que nos valeurs morales ancestrales sont devenues démodées.
L’océan, après l’inoubliable tragédie du bateau Le Joola jamais élucidée n’en finit toujours pas d’engloutir des milliers de jeunes sénégalais candidats à l’aventure faute d’alternative crédible ; entre Barzakh et Barça.
Cette jeunesse combattante jadis prompte à lever haut la main en signe de Sopi ! Cette jeunesse pour l’Alternance chantée par Talla mon jeune frère victime d’agression !
Que n’avons-nous pas enduré pour porter haut le flambeau du changement pour un Sénégal de justice, de développement et de démocratie. Nous sommes-nous trompés de choix ou de chemin ?
S’afficher à cette époque dans un combat politique d’avant garde était signe de courage, de dévouement et de désintérêt !
Et voila que le changement, fruit de sacrifices cumulés de tous bords, de passions aveugles portées par tout un peuple est dévoyé, vidé de sa substance et de ses objectifs par ceux là même qui sont censés l’incarner.
En l’An 2010, si le Sénégal est incapable de réguler et d’organiser un processus électoral exempt de suspicions par la mise en place d’un Code électoral consensuel par le choix d’un modérateur indépendant capable de conduire les négociations contradictoires entre pouvoir et opposition, alors là il y a problème !
La question du management des collectivités locales se pose avec acuité ; le cas des inondations pérennes de la banlieue de Dakar doit être pris en charge de façon sérieuse
Comment un président de la République peut-il se permettre de proposer l’asile à des étrangers ; fut-il le cas pathétique des Haïtiens alors que les Sénégalais qui l’ont élu dorment sous l’eau avec serpents et caïmans ? L’argent des fêtes et des festins trouverait meilleure destination dans la banlieue dakaroise. Les mallettes bourrées de devises de Alex Segura resteront à jamais gravées dans nos mémoires.
La gestion du domaine public et privé de l’Etat pose de sérieux problèmes d’entendement aux Sénégalais qui voient leur espace vital se réduire considérablement. Même les plages en bordure de mer sont agressées.
Si le régime socialiste avait pris d’assaut les réserves foncières du pays, celui de l’Alternance n’en trouverait point à revendre !
Pour toutes ces raisons, l’absence du peuple sénégalais aux fêtes du cinquantenaire marque un signal fort à l’attention des nouveaux riches qui nous gouvernent.
Nous en avons vraiment assez des fêtes comme des fêtards !
Mme Aminata DIEYE - Diplômée en Droit - Diplômée en management des Collectivités locales