«Lécher, puis Lâcher et enfin Lyncher».
Idrissa Seck et la presse, retour sur les amours et le désamour.
Que n’a-t-on pas déjà lu ou entendu sur le rapport filial impérissable qui lie la France et le Sénégal ? Syndrome parmi les plus corrosifs que la presse hexagonale nous a communiqués : la règle des «trois L», «Lécher, puis Lâcher et enfin Lyncher».
Jadis courtisé, par les médias sénégalais, le président du défunt Rewmi (paix à son âme !) est désormais soumis à l’inflation des invectives les plus acidulées : «Tortuosité», «duplicité», «hypocrisie», «tartufferie», «fourberie»... Ce qui a les apparences d’une vendetta médiatique cache en réalité une catharsis. Le refoulement des passions et des émotions infernales nées d’une relation incestueuse est à ce prix. Du temps où il faisait les carrières jusqu’à sa traversée du désert, Idrissa Seck a bénéficié d’une couverture médiatique sans commune mesure. «Arrêt sur images.» Ses sorties ont été diffusées en direct. Chacune de ses paraboles a donné lieu à d’innombrables hyperboles sur le mode du à «qui mieux mieux». Même ses silences ont fait l’objet d’une herméneutique qui rendrait jaloux un Cardinal ou un Khalif général. Idy monte à cheval, Idy boit du lait, un article ! Les fragrances des encens de Ndèye Penda ne nous sont pas inconnues. Nous pourrions en dire autant de ses affaires et de son notaire, de son passeport et de son garde du corps, des occupations ludiques de sa progéniture ou encore de sa fosse septique…
Idrissa Seck est-il plus patriote que Talla Sylla ? Dispose-t-il d’un cursus étatique plus étoffé que celui de Macky Sall ou de Moustapha Niasse ? A-t-il plus fait pour le Sénégal que les leaders historiques de la gauche qui n’ont jamais négligé les pénuries, la cherté de la vie, bref, la souffrance des Sénégalais (Dansokho, Bathily…) ? Qui parmi eux a bénéficié de la même attention ? Quels seraient les scores de la Rtas ou du Mrds avec un tel traitement de faveur ? Sûr de son Karama, Mara s’est même laissé aller à quelques extravagances : des conférences de presse tard le dimanche, une déclaration de candidature un jour férié (la fête de l’Indépendance)… Mais rien n’y fait ! Hypnotisé par l’attrait charismatique du bonhomme la masse médiatique a relayé avec zèle les communiqués largués à la place des conférences de presse annoncées. Elle lui a offert, à des heures de grande écoute, la chance de se ramasser les rares fois où il s’est gouré. Et comme si cela ne suffisait pas, elle a donné à ce génie de la communication la possibilité de sortir des Rédactions avec des enregistrements qu’il transmettait à ses conseillers avant leur diffusion. Puisque aimer, c’est souffrir, l’aventure devint mésaventure lorsque des reporters prirent les coups qui lui étaient destinés lorsque son cortège fut attaqué.
Qui aime bien châtie bien, dira-t-on, mais à l’heure actuelle l’introspection ne doit-elle pas l’emporter sur les imprécations ? L’autocritique ne doit-elle pas prévaloir sur la critique ? Cela dit, conclure à un divorce entre «l’œuf» et cette presse serait une méprise. Non pas parce que la désunion de tels entichés ne dure que le temps d’une rose, mais tout simplement parce qu’il existe une fraction de possédés qui ne feint la répudiation que le temps d’un «bara yeggo». Entre «la bouche» de Idy et «l’oreille» de Wade, J.A. L’intelligent, à la faveur d’un Jottalikat invisible, aura encore la primeur. Tous ceux qui constituent politiquement une menace pour Idrissa Seck entendront, chaque mardi, dëg-La-vérité. Entre deux analyses, l’on fouinera dans leur enfance, l’on soulèvera les draps pour révéler les noms de leurs maîtresses, l’on se gaussera des pilules qu’ils chercheraient dans les officines… Au nom du renouvellement générationnel, l’on promouvra des gens dont l’ombre de Idy ne ferait qu’une bouchée tout en pourfendant Cheikh Bamba Dièye, Malick Diop… Et parce que certains journalistes-rewmistes n’ont été du combat contre la monarchie que pour frayer un chemin à leur préféré, la connivence et les éclats de rire hanteront les interviews de Idrissa Seck là où celles des leaders de Bennoo ressembleront à s’y méprendre à des interrogatoires. Le show médiatique, la délation, la manipulation et la mystification, par voie de presse, constituent la dernière capacité de nuisance d’un homme dont le divorce avec le peuple n’est pas feint. Puisqu’il ne répugne à rien pour être le quatrième Président du Sénégal, il ne se contentera pas d’en user ; il va en abuser.
Majmouth KEBE / ajmouth@yahoo.fr