TOUS, EN LIBERTE PROVISOIRE !
TOUS, EN LIBERTE PROVISOIRE !
A bien réfléchir sur le fonctionnement actuel de l’Etat du Sénégal, Il me revient en mémoire, dans une perpétuelle résonance, le discours du vénéré Khalife Général des Tidjianes, El Hadji Abdoul Aziz Sy Dabbaakh Maalik . Le saint homme dirigeait alors la prière mortuaire de l’ancien Président de l’Assemblée Nationale Lamine Guèye. Il mettait en garde l’ensemble des leaders de la classe politique sénégalaise, et les exhortait à plus de responsabilité dans l’exercice du pouvoir. Il indiquait notamment la nécessité de veiller à l’utilisation moins abusive des pouvoirs qu’ils tirent avant tout, de la souveraineté populaire.
« Lamine Guèye, disait le vénéré érudit, est là allongé devant nous, inerte et sans défense, livré à la seule volonté de Dieu (SWT) ». Et de poursuivre, en rappelant toutes les hautes fonctions que le Président Lamine Guèye a eu à assumer dans sa longue et très brillante carrière à la fois d’avocat et d’homme politique, de même que les pouvoirs qu’il a eu à exercer toute sa vie durant.
Le sens de cette interpellation est claire : rappeler aux uns et aux autres, et en particulier à tout détenteur de pouvoir temporel, la toute relative « puissance » des mortels, face à la seule et véritable Puissance qui subsiste, éternelle, en l’occurrence Celle de notre Seigneur.
En revisitant l’Histoire, combien de fois avons-nous rencontré des personnes hommes ou femmes, dépositaires d’un pouvoir, et qui s’en sont servis à volonté et sans mesure pour maltraiter, rudoyer, humilier des citoyens, leur priver de liberté, voire les assassiner purement et simplement ?
Au demeurant, l’Histoire nous renseigne que bon nombre de ces agressions et viols contre les droits humains ont été perpétrés sous le sceau d’une certaine « légalité ». Bien sûr avec la complicité d’institutions, comme si cela suffisait, pour légitimer les forfaits du commanditaire, ou pire encore, de manière plus cynique, se donner bonne conscience dans l’exécution des basses besognes.
Enfin, l’Histoire nous rappelle aussi que tous ceux qui ont usé et abusé de leur pouvoir pour affirmer leur volonté de puissance, ont terminé leur carrière dans les bas fonds de l’ignominie et de la turpitude. C’est le lieu de méditer cette pensée d’Antoine de St-Exupéry : « Le pouvoir s'il est amour de la domination, je le juge ambition stupide. Mais s'il est acte de créateur et exercice de la création, alors le pouvoir je le célèbre ».
Le concept d’ « acte de créateur et exercice de création » renvoie aux mêmes principes qui fondent l’existence d’un Etat de Droit, à travers l’égalité de tous les citoyens par rapport à la chose publique ; à travers la continuité du service public et la mutabilité qui prend ses racines dans le recours aux innovations, en vue de garantir la qualité du service au profit des citoyens. Tels sont les actes qui doivent inspirer et guider les tenants du pouvoir. Des actes dont les principaux bénéficiaires doivent être, non pas seulement les tenants du pouvoir eux-mêmes, mais l’ensemble des citoyens sans exclusive. C’est là tout le sens de la notion de sacerdoce, pour désigner le rôle de tout détenteur d’une parcelle de la puissance publique.
Ce rappel des principes fondamentaux d’un Etat de droit s’impose face au constat de plus en plus récurrent et alarmant, quant à l’utilisation par les tenants du pouvoir actuel de méthodes peu orthodoxes pour combattre, non pas seulement leurs adversaires politiques, mais de façon générale, tous ceux qui osent être en « rébellion » contre leur désir viscéral de domination.
Il convient toutefois de reconnaître, pour rendre justice à l’histoire, que l’existence de telles dérives n’est pas un phénomène nouveau. En revanche, le niveau de démocratie que le Sénégal a connu, pour avoir été un des rares pays africains à réaliser une alternance politique sans anicroche, pouvait entretenir l’espoir de voir ces tares éradiquées au lieu d’être exacerbées.
Aujourd’hui, Il suffit de constituer une menace, même virtuelle, et de façon démocratique, aux intérêts du système et des clans qui le composent, ou de manifester quelque velléité d’opposition au projet de dévolution monarchique du pouvoir, ou encore de refuser d’entrer dans les obscures combinaisons dignes de la mafia sicilienne… combinaisons liées à l’attribution des marchés publics, au partage du butin foncier et autres magouilles et scandales, pour devenir alors la cible à abattre. Et la méthode emprunte bien souvent le chemin d’une grossière manœuvre, dont le mode opératoire est la combinaison d’un raccourci qui aboutit au montage, à l’exhumation, de prétendus dossiers dits « judiciaires » et la profanation des résidus des valeurs morales de ces pourfendeurs de la rectitude républicaine, qui prennent ou qui font prendre la décision de « poursuite ». Cette démarche, aux antipodes de la démocratie viole le principe de l’égalité des citoyens face aux fondements d’un Etat de Droit, et transgresse la règle de l’équité de l’éthique et de la morale tout court.
Elle viole le principe de l’équité entre les citoyens, en ce qu’elle prend en compte exclusivement des considérations purement subjectives dans le choix des justiciables. La discrimination et le caractère sélectif du choix des « victimes » ne laissent aucun doute sur le manque d’équité des tenants de ce pouvoir, mais surtout sur leur volonté machiavélique de nuire, de porter atteinte à l’intégrité d’honnêtes citoyens. Leur attitude rappelle à bien des égards ce western célèbre des années 50, "Règlement de comptes à Ok corral ", qui fut d’ailleurs le titre d’un brillant éditorial de Mamadou Oumar N’diaye du Témoin. Quelle similitude avec ces brigands de haute voltige, au regard de l’aisance et de l’impudence avec lesquelles ils cherchent à faire payer à certains dignes fils du Sénégal leur refus de s’associer au banquet de l’immonde partage et de la « course » vers la honteuse « obésité ». C’est à croire que le délit de non complicité aux pratiques douteuses en vigueur dans ce pays, est aujourd’hui érigé en loi. Quel outrage à la Morale ! Est-ce donc le monde à l’envers ?
Une nation ne se construit pas à coups de règlements de comptes sur les cendres de la loi et de l’équité, de la justice et de l’égalité !
Quels que puissent être les verdicts qui seront rendus dans ces vraies-fausses affaires de justice, une seule réalité demeure : l’équité dans le traitement des dossiers n’a pas toujours été respectée.
Certes, on ne saurait reprocher à l’autorité publique de saisir la justice à chaque fois qu’il existe des présomptions de violation des lois et règlements du pays. Mais ce qui heurte la conscience des citoyens, c’est la logique sélective employée et la volonté farouche de « sanction humiliante » qui frise un acharnement sur des concitoyens sans doute justiciables, mais qui ne sont certainement pas les seuls à devoir répondre de leurs actes.
Au même moment que l’on s’acharne sur d’honnêtes citoyens pour délit de non compromission, nombre de dossiers judiciaires impliquant de véritables gangsters d’Etat ont été enterrés, mis sous le coude et susceptibles d’être agités tel un épouvantail, en cas de rébellion des personnes concernées.
Et que dire des centaines de milliards engloutis dans des chantiers encore inachevés depuis près de cinq ans, et dont le seul fait d’initier une démarche de vérification aura coûté son poste à l’ancien Président de l’Assemblée Nationale ? Et pourtant, de l’avis de la plupart des experts, il y a une très forte présomption d’une utilisation plus que douteuse des deniers publics. Elargir moins d’un km de route pour près de 6 milliards de nos francs, relève à n’en pas douter, d’un exploit qui ferait tristement bonne figure dans les annales du Guinness. En attendant que ce contrôle soit exécuté, parce qu’il le sera tôt ou tard, le seul bénéfice que l’on peut tirer de cette expérience, sera à la faveur des théoriciens du management, qui y trouveront un parfait exemple de définition et d’illustration du concept d’ « inefficience »,
Des rapports produits par les vérificateurs compétents de la Cour des Comptes, de l’Inspection générale d’Etat (IGE), du Contrôle Financier, de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) de la Cellule nationale de traitement de l’information financière (CENTIF) et qui accablent certains protégés du système sont rangés dans les placards et sous haute surveillance. Loin des oreilles et des yeux de la presse et de l’opinion !
Imaginez un seul instant les conséquences fâcheuses sur la motivation et la diligence de ces hauts fonctionnaires de l’Etat intègres, compétents et dévoués, lorsqu’ils constatent que certains parmi ces prédateurs qu’ils ont épinglés, ont obtenu comme par miracle des promotions. Ces fonctionnaires consciencieux ont fini hélas, de comprendre que les rapports issus de leurs longues et délicates investigations n’ont été que de simples instruments de légitimation des règlements de comptes politiques. Situation effroyable qui rappelle fort opportunément les propos désabusés de la juge EVA JOLY, indignée par le comportement peu recommandable de ces cols blancs corrompus, plastronnant dans quelques hôtels et restaurants de luxe parisiens. « Quelle démocratie peut rester vivante si les élites ont acquis, de facto, le pouvoir de violer la loi et la garantie de l’impunité ? » Ce n’est pas un hasard si ces propos figurent en bonne place dans son livre devenu célèbre : Est-ce dans ce monde là que nous voulons vivre ?
L’équité, selon le Robert, consiste à traiter tout le monde sur un pied d’égalité. Alors que la justice est le pouvoir de faire régner le droit : elle punit et récompense.
C’est au constat du non respect de ces règles et principes que Michel Rocard s’indigne et lance : « la politique est dégueulasse parce que les hommes qui la font la rendent dégueulasse ».
Au Sénégal, le constat est plus qu’amer. Car ces hommes, inaptes à saisir la portée du message de Dabbaakh, devant la dépouille du Président Lamine Guèye, sont bien identifiés, parce que bien nichés dans les plus hautes sphères de la République.
Leurs pratiques quotidiennes travestissent la noblesse de la mission profonde de l’action politique dans un Etat de droit. Hélas, le pouvoir judiciaire leur est fortement tributaire du fait notamment des mécanismes institutionnels qui fondent la nature des rapports entre l’exécutif et le judiciaire. A travers la définition de l’organisation judiciaire, le choix des Hommes, leur affectation aux fonctions et emplois, les sanctions positives ou négatives auxquelles ils sont soumis, assumer de façon pleine et entière l’indépendance requise dans l’exercice normal de sa mission, devient une chimère pour le pouvoir judiciaire. Du reste, la notion de « dossiers signalés » n’est–elle pas l’expression consacrée qui renseigne sur la nature et le degré de l’immixtion du pouvoir exécutif dans la procédure judiciaire ?
Que l’on ne s’étonne plus dès lors, de remarquer de plus en plus au sein des populations, des formes d’insubordination qui trouvent leur fondement dans leur propre constat d’une justice sélective, d’un manque d’équité. Les média sont présents pour les informer du niveau élevé de délinquance de certains de leurs dirigeants. Mais ces populations sont surtout révoltées et indignées par cette impunité qui frappe leur comportement délictuel, et qui a fini de banaliser dans leur subconscient les crimes les plus crapuleux.
Même s’il est vrai que toute démocratie est toujours perfectible, c’est le seuil de qualité des rapports entre les pouvoirs judiciaire et exécutif, que l’on reconnaît les véritables nations démocratiques. Il est temps donc d’engager une profonde réforme institutionnelle, qui affranchirait le système judiciaire des humeurs et désidérata des hommes politiques qui les tiennent en bride. Cette réforme est d’autant plus urgente et nécessaire, que nous sommes dans un pays où l’éthique et la morale ont déserté le champ politique, alors que le système judiciaire est si fortement assujetti au pouvoir exécutif, au point que tout citoyen est en réalité en situation de liberté provisoire.
Abdoul Aziz TALL, Conseiller en Management
Le patriotisme sénégalais, un défi au destin
L’histoire t’interpelle. Depuis un siècle, tu confies le droit de te représenter et de décider de ton sort à des prétendus patriotes qui te promettent toujours de te sortir des carcans où vous êtes tous ensemble. Mais dès qu'ils reçoivent de toi le pouvoir, ils se transforment, se détournent de tes problèmes vitaux, agissent pour leurs propres intérêts et ceux de leurs proches, puis deviennent toujours pires que ceux que vous aviez combattus ensemble. Ainsi, grâce à ta voix, le simple douanier est devenu premier député noir à siéger à l'Assemblée française et cela t'a mené au renfoncement draconien des contraintes serviles du travail forcé qu'il défendait en vrai maître de corvée. L'innocent séminariste de Ngazobil est parvenu, premier nègre à l'académie française, en te laissant les chants et la danse comme en témoigne ton hymne dont la première injonction est ‘pincez tous vos koras, frappez les balafons’.
Le Lougatois qui se vante d'être né avec une cuillère d'or dans la bouche, était bel et bien là avec toi ‘yarlouwan’ à Saint louis. Il a eu soif et faim comme toi. La confiance que tu lui as donnée par résignation après qu'il te l’a arrachée, t'a valu quatre mille huit cents policiers suspendus, dont mille quatre cent quatre-vingt-cinq radiés. Mille quatre cent quatre-vingt-cinq familles détruites, presque bannies, sans droit. Vingt mille Sénégalais coupés de vivres, de soins et de gîtes anticonstitutionnellement. Combien de fous et de suicides, cette calamité a-t-elle engendré ? Cette sorte de génocide a été exécutée par Jean Collin, le censeur de Diouf pour le compte des réseaux, comme ses pères ont assassiné nos pauvres tirailleurs à Thiaroye. Après cela, Diouf se définit en humaniste et personne ne lui présente les statistiques de ses méfaits. Pour tout ceci et pour bien d'autres choses encore, il siège à la Francophonie grâce à ses amis des réseaux. Aujourd'hui, sa fille peut bien fêter son anniversaire à coups de millions après qu'il lui eut donné pendant je ne sais combien d'années, l'exclusivité de l'importation du riz au détriment des commerçants sénégalais beaucoup plus méritants. Il se pavane, et te chahute : ‘J'étais athée’, ‘J'ai dit aux deux khalifes généraux de l'époque que j'ai tôt compris que certains marabouts étaient des exploitants de talibés, (…) ils l'ont admis’, ‘J'ai interdit à ma femme de rejoindre les rangs de l'islam’ (avec un gestuel qui méprise l’islam), ‘Paris est la plus belle ville du monde’, etc. T'avait-il dit tout cela quand il te demandait de voter pour lui ?
Puis il y a l'actuel. Si, à un vieux retraité, tu as confié ton pays, et qu'entre temps il devient sénile et se rêve Bonaparte ou Bokassa, c'est entièrement ta faute ! ‘Yakotey’. Souhaite seulement que dans le clair-obscur de sa conscience, il se rappelle comment ont fini Napoléon et Bokassa.
Cependant, n'oublie jamais que tu es le maître de ton destin. Nul ne t’émancipera, nul ne luttera pour toi. Pourquoi continues-tu de courir derrière n'importe qui avec tes ovations et tes applaudissements, en oubliant le mal que ces pseudo-patriotes politicards t'ont fait et te font subir encore? Ils ont tous un cœur commun : Conquérir le pouvoir et l'exercer à leur guise, nonobstant tes cris de détresse, toi le peuple. Surtout maintenant que le gouvernement de Wade a désacralisé la fonction de ministre et de chef d'Etat par la nomination de tant d'incapables et que presque tous les Sénégalais veulent être élus, des personnes dont tu n'as jamais entendu parler, qui n’ont jamais posé un acte patriote en faveur de notre société et qui n’ont de génie que de croire qu'ils sont plus intelligents que l'équipe de Wade, sèment une anomie dans le rang des patriotes. Ils vont du chanteur aux marabouts, en passant par de riches illettrés et d’occultes diplômés qui reproduisent des styles très connus de propagandes étrangères et qui, assurément, te conduiront à la guerre des sectes ou des clans.
L’humanitariste Christophe Ruffin a tenté de t'ouvrir les yeux sur les intrusions néfastes qui conduisent les valets de l'impérialisme au pouvoir dans ton pays, depuis ta soi-disant indépendance. Dès lors, les journaux s'accordent à te faire accepter comme une fatalité les réseaux. Ils en parlent au grand dam des politiciens pour qui ce mot sacré doit être voilé à ta compréhension et soustrait de ton vocabulaire, toi, le peuple, l'éternel mystifié. Tu ne dois rien comprendre ; aussi tu ne te demandes même pas pourquoi un pur produit de Wade soit décoré de la légion d'honneur française, ni pourquoi tes politiciens courent-ils le monde dépensant des millions de francs pour courtiser les émigrés, un électorat qui, semble-t-il, ne fait même pas cinquante mille personnes, une commune d'arrondissement, dit l'un d'entre eux qui était aux affaires.
Les politicards s'en viennent-ils te voir ou courtisent-ils les réseaux ? Les réseaux sont une filière qui a des ramifications aux idéaux et aux intérêts communs et qui tissent entre eux et leurs obligés une solidarité confidentielle, secrète, une relation durable pour influencer à leurs seuls avantages les décisions qui se prennent dans les structures génératrices de ressources où ils ont placé un de leurs laquais. Ils agissent aux moyens des importantes structures financières qui sont en leur pouvoir ou par les importants pouvoirs autres et divers qui sont en leur possession. Ce n'est pas par hasard que notre jeune métis, après des contacts, se voit soudain pousser des ailes, parler sans vergogne de sa compétence fausse, se croit un nouveau messie, et a la sotte prétention de vouloir diriger les enfants du Sénégal, qui se vendent sur tous les marchés où l’on rivalise d’intelligence et de savoir, avec des Doctorat ou des PhD. Ce n'est pas par hasard que le leader d’un parti côté à l’époque est allé faire une consultation en France entre les deux tours en l'an deux mille. Ce n'est pas innocemment que Wade se vante en déclarant qu'il a beaucoup d'amis et un portefeuille relationnel immense ; ce qui fait qu’il est tout indiqué pour gouverner le pays. Il oublie déjà Mogadiscio en 1974 quand, quelqu’un que tout le monde connait l'avait aidé à obtenir une simple audience auprès de Senghor. S'il parle de réseau, c'est en te représentant toi le peuple, qu'il est parvenu à eux.
Mon cher Compatriote, tous tes malheurs viennent de ce que tes politiciens t'ont toujours menti dans le fond comme dans la forme. Quand ils courent partout où tu es à travers le monde, ce n'est pas pour te visiter toi qui envoies mille cent milliards de francs Cfa au pays, pour rendre positive la balance de paiement extérieur. Toi dont le concours et les investissements ont épargné la suppression de beaucoup de villages sur la carte du Sénégal. Quand ces politiciens viennent te rabâcher les oreilles aux Usa avec l'extinction du soleil et autres absurdités, c’est tout simplement pour se pavaner et faire du toilettage (ensemble d'opérations pour mettre en valeur un chien avant sa présentation) aux seules fins de convaincre les réseaux sur la confiance que tu lui portes, toi le peuple. Ils te visitent dans leurs propres intérêts puisque ces réseaux, pour sauvegarder leurs avantages, soutiennent ou recrutent des types sans idéal ni patriotisme, qui sont connus des populations et qui leur vouent une soumission débile au détriment de tes intérêts. Quoiqu'ils te gouvernent depuis leur déploiement dans le conflit Dia et Senghor, jusqu'à l'assassinat de Olympio par Eyadema et celui plus cruel de Thomas Sankara par Compaoré, pour ne citer que ces exemples sur ton continent.
Cependant, je ne me lasserai jamais de te dire et de te répéter que tu es le peuple souverain de facto, il t'appartient alors d'organiser ce pouvoir à des fins intelligentes qui te sont utiles. Tes politicards ont beau te mystifier avec ces filières pour que tu continues de croire que la fatalité pèse sur ton affranchissement et ton émergence, les réseaux et leurs valets trouvent un écran inviolable devant le militantisme patriote et une citoyenneté saine, active et organisée. Il n'y a aucun mystère, il n’y a que de la mystification, une énigme dont au moins quelqu'un détient la clé ; ainsi tes politiciens pendant longtemps t'ont caché qu’ils servent ou cherchent à se servir de complices pour disposer de ta personne et de ton patrimoine.
Mais maintenant que tu sais, au lieu de pleurer, je te suggère d'observer trois minutes de silence pour rentrer en toi, une minute pour poser un diagnostic sûr sur ton état lamentable qui doit cesser d’être une gravitation, un cercle vicieux infernal ; une minute pour t'assurer que tu connais la cause de ton mal et l'autre minute pour apprendre à briser ce cercle et confier ton sort, à un patriote sincère, nationaliste, panafricaniste, indépendant des réseaux et que rien d’autre n’importe sinon que ton sort. Si, ensuite, quelque cynique individu t'utilise pour avoir le pouvoir, puis te laisser dans la fournaise, le chômage, l'incurie, la faim et les ténèbres de l’obscurantisme, c'est que tu l'auras voulu.
Papa Amadou NDIAYE leconsulteursa@yahoo.fr
WADE : LE DESENCHANTEMENT
Dans une atmosphère déjà saturée de soufre politique auquel se mélangent les effluves anxiogènes de la difficile conjoncture actuelle, le peuple sénégalais broie du noir. La crise que traverse notre pays continue, en effet, d’ouvrir ses crocs vers lesquels nous avançons transis. Au bout de cette pente sombre et résignée du déclin, des éclairs d’orage font apercevoir des précipices symptomatiques d’une République grabataire, à l’économie alanguie et aux institutions acagnardées dans la routine : spectacle pitoyable qu’encense, en plus, le pessimisme ambiant, marqueur des sociétés flageolantes. Ainsi donc, l’anomie s’installe, des forces centrifuges tirent sur les coutures du tissu républicain et l’envie de vivre ensemble recule sans cesse devant l’envie de vivre ailleurs : comme pays, le Sénégal est en difficulté, comme Nation, il est en danger. Et pendant ce temps, Abdoulaye Wade, en pater dolorosa statique, contemple, du haut de son empyrée présidentiel, les souffrances atroces du peuple. Lui aussi traverse, actuellement, une mauvaise passe non pas parce qu’il souffre, comme le peuple, de la cherté de la vie et de ces intempestives coupures d’électricité, mais parce qu’il traine, en ces temps difficiles, une méchante côte dans l’opinion. En effet, de tous les falbalas trompeurs de la popularité, il ne lui reste plus aucun oripeau. Qu’il est bien loin le temps où le président Wade, alors porté par les zéphyrs de son état de grâce présidentiel, pouvait compter sur le soutien indéfectible de tout un peuple. Aujourd’hui, les rubans de son état de grâce sont fanés, les larges manches du magicien sont déchirées et son chapeau est vide. Avec, par ces temps qui courent, la propension des médias à appointer le mécontentement populaire pour le darder contre le pouvoir, Abdoulaye Wade n’est pas encore sorti de l’auberge. Et pourtant, Laye n’aura pas été le plus mauvais des pilotes qu’a connus notre pays depuis l’indépendance. Au lendemain de l’alternance politique qui l’a propulsé au gouvernail d’un navire national encalminé, il aura réussi, avec la vista et l’énergie inventive qu’on lui connait, à sortir notre pays de l’ornière gluante où l’avaient enlisé senghorisme podagre et dioufisme impotent. Des infrastructures routières de qualité, des écoles qui sortent de terre en des endroits insoupçonnés de notre pays, des bourses, en nombre considérable, allouées aux étudiant sénégalais, de nombreux vacataires (dont on peut douter de la competence, certes !) recrutés pour promouvoir l’emploi des jeunes : Non, le Wadisme n’aura pas été que du cosmétisme, comme aime à le claironner l’opposition. Mais l’omniprésence médiatique du président, son addiction à la vitesse et à l’ubiquité auront orné son avènement d’une pavane imprudente. Sa faute fut d’avoir infligé au modèle présidentiel un traitement auquel l’opinion rechigne par atavisme plus culturel que politique .D’avoir trop chahuté le gouvernail du navire national en aura desservi la fonction. D’avoir chéri une impossible proximité populaire aura privé le président des vertus de respect et d’autorité que génère une certaine distance. D’avoir couru aux créneaux de toutes les réformes, les unes fondamentales, les autres en peau de lapin, aura brouillé l’entendement puis l’adhésion populaire. Banalisé comme la météo dans les journaux télévisés de 20H, Abdoulaye Wade est de plus en plus entendu et de moins en moins écouté : manquent un cap et une cohérence lisibles. C’est, en effet, ce tempo trépidant qui, étouffant toute pondération, aura exposé Wade et son engeance au courroux du peuple. Le pays, lui, renaude, déprise à l’excès, l’étalage et l’épate du président, le saugrenu de ses manières, son parler familier parfois jusqu’au déglingué. Alors le conservatisme atavique reprend le dessus, s’essouffle devant le tempo trépidant d’un président omniprésent. Bref, la déception se répand avec son bourdon médiatique, lequel fait des glorioles et défait la gloire. Fichue pente !
Le président se sera aussi, en son règne, distingué par son penchant pour la rupture et la division afin de mieux régner. En son magistère, il aura opposé deux Sénégal : celui pro Wade et celui anti Wade. On pourra remarquer que le président accorde, par exemple, une certaine primauté aux régions qui votent habituellement pour le Pds et qui souvent présentent un visage bien plus reluisant que celui des régions « ennemi es » à l’architecture coloniale vermoulue. Même son de cloche au sein des milieux religieux où Wade ne s’est pas gêné pour étaler au grand jour sa « mouridicité », ostracisant ainsi les autres confréries religieuses. Si Wade est à créditer d’avancées concrètes dans bien des domaines de la vie de notre pays, il aura aussi fragilisé la République en ouvrant des lézardes où suintent le venin de la désunion nationale et le sang de tous les éclopés de cette exécrable politique fractionniste. En ces lendemains de doute mâtiné de crainte pour l’avenir, le peuple a besoin d’un guide qui lui trace le chemin vers l’unité et la solidarité retrouvée et non pas d’un président qui divise. Avec ces élections de 2012 qui approchent à grands pas, Wade doit redouter que l’acrimonie nationale n’y trouve l’occasion rêvée de se débonder. Il a donc intérêt à accomplir sa métamorphose, dompter sa nature politique pour enfin être le chantre de l’union nationale afin de nous sortir de cette panade. C’est là, la seule voie de sortie de crise.
EL HADJI MALICK SALL ELIMANE DONAYE milksup@yahoo.fr
Faut-il supprimer l’Inspection du travail ?
Cela fait exactement deux (2) mois que les inspecteurs et contrôleurs du travail ont déclenché une grève illimitée. A un peu moins d’une année piochée de grèves cycliques et boycott d’activités dont le point d’orgue est la présentation des cahiers de doléances de la part des centrales syndicales lors de la fête du travail, le 1er mai passé, l’administration du travail s’enfonce inextricablement dans un bourbier. Indifférent, le gouvernement du Sénégal assiste, tel un spectateur médusé au naufrage collectif.
En droit du travail, le cumul du congé du travailleur ne peut excéder trois (3) mois. Nonobstant le principe de la prescription, le travailleur qui peut s’absenter de son poste de travail pendant 90 jours, loin d’être indispensable peut s’interroger sur son utilité au niveau de son entreprise. Faisant le rapprochement, (toutes proportions gardées), on peut ainsi s’interroger : Est-ce que l’Etat peut se passer des services de l’Inspection du travail ? Lato sensu, le Sénégal de 2010 survivrait-il à son Administration du travail ?
Très peu connue, l’Inspection du travail est un corps dont les missions se résument au-delà des multiples aspects liés à l’assurance de la police du travail, à la prévention et la gestion des risques professionnels et des risques sociaux. Si l’intervention des hommes de l’ombre peut ne pas être visible sur l’essentiel de leurs activités, il n’en est pas de même dans certains conflits sociaux ouverts.
Il convient d’abord de souligner, en ce qui concerne la prévention des risques professionnels (accidents de travail et maladies professionnelles), que son organisation tourne autour de trois (3) collaborateurs que sont : un auteur (l’employeur), un acteur (le travailleur), et un contrôleur (l’Etat) en la personne de l’inspecteur du travail. Le binôme (santé, sécurité au travail) étant le compagnon le plus sûr du travailleur dans son entreprise, sa création et au mieux son maintien requièrent l’implication effective et au quotidien de ces trois collaborateurs. C’est dire que suivant ce seul exemple, le travail qui se fait en entreprise peut être considéré comme une chaîne ; chaque fois qu’il y a un maillon manquant c’est toute la chaîne qui se détraque. Dans nombres d’entreprises où il n’y a même pas de notions élémentaires et rudimentaires de la prévention, les travailleurs sont exposés en permanence au danger, en raison de l’absence régulière ou prolongée de l’inspecteur du travail, faute de moyens. Dans d’autres, il n’est pas rare que l’employeur lui propose ses moyens, ce qui pose un problème de déontologie. Faut-il le noter, l’accident de travail peut être pris en charge dès sa survenance, alors que la maladie professionnelle peut ne se manifester que bien après l’extinction de l’entreprise. C’est pour lutter contre cette situation de dénuement et renforcer l’éthique dans le corps, que le Syndicat des Inspecteurs et Contrôleurs du Travail et de la Sécurité sociale (SICTRASS), est créé.
Le combat d’un homme doué d’intellect ne consiste pas à aller se coucher sous le chaud soleil encore moins à se faire comprendre par les biceps. Cependant ni le boycott d’activités, ni la médiatisation, encore moins les riches contributions publiées dans la presse venant des collègues de l’intérieur comme de l’extérieur du pays ne parviendront à tirer l’Etat de sa torpeur pour se pencher résolument sur "l’absconse question” des inspecteurs et contrôleurs du travail. Il ne restait que la radicalisation.
Mais pourquoi cet ostracisme de la part de l’Etat ? Inspecteurs et contrôleurs du travail à force de se triturer les méninges en donnent avec beaucoup de philosophie une réponse hypothétique qui traduit davantage leur désarroi : « Nous avons dû autoriser le licenciement d’un “waliu” (saint homme ?) »
A côté de la gestion des risques professionnels, l’inspecteur du travail se pose aujourd’hui comme un acteur du développement censé accompagner l’entreprise dans les différents paliers du cycle de sa croissance. A cet effet Martine Aubry souligne à la perfection son rôle: « Le caractère généraliste de l’Inspection du travail (…), chargée d’intervenir sur l’ensemble des réalités sociales des entreprises fait d’elle un outil essentiel d’observation et d’action au service de l’ensemble des compétences du ministère du travail […] Grâce à son approche généraliste de l’entreprise, l’Inspection du travail est la mieux placée pour inciter et accompagner de manière cohérente les changements de conditions de travail, d’emploi et de relations professionnelles». Le gouvernement du Sénégal semble perdre de vue la pertinence de cette réflexion.
L’idée originelle de la création de l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature (ENAM) était de former des cadres à même de promouvoir la croissance et le développement du pays sur la base d’une harmonieuse interaction des différentes sections de l’administration (travail, douane, impôts…) et la justice. Aucune section ne saurait aller sans l’autre et par conséquent n’a intrinsèquement plus de valeur que l’autre. Malheureusement l’administration est corrompue jusqu’à des méandres insoupçonnées par ce nouveau fléau : le corporatisme. On réussit à faire sauter le corset du régime indemnitaire et la totalité des élèves de la classe, dans un décor féerique crient à qui mieux mieux « Moi monsieur ! Moi monsieur ! » quitte à se piétiner. Chaque fois que le Maître généreux daigne répondre aux suppliques d’une travée, ses occupants en nombrilistes à tout crin se lèvent prestement pour décliner la panoplie des tâches importantes dont ils ont la charge, en guise de légitimation. En quoi dans un Etat le service du travail primerait-il sur celui du commerce et vice-versa ? La logique voudrait que tout le monde soit motivé en conséquence pour susciter une saine émulation.
Décidément les inspecteurs du travail sont les besogneux de l’Administration et vont continuer à travailler pour le roi de Prusse. Résonnent encore en moi les échos de la dernière conversation téléphonique que j’ai eue avec un doyen du corps aujourd’hui entrain de croupir en prison. L’homme articulait avec un trait de fierté non emprunté: « Je prépare ma retraite après 27 ans d’exercice !». Nul doute que ses maigres économies de pauvre inspecteur du travail sont parties à vau l’eau au bout de deux ans d’emprisonnement sans encore être fixé sur son sort. Un sort déjà bien triste, réservé à quelqu’un qui a tout donné à la Nation, l’un des rares inspecteurs du travail à résister à l’appel attractif des sirènes du secteur privé. Pauvre de nous ! La méditation de ce seul cas suffit pour revigorer ses jeunes collègues qui n’ont qu’une seule et unique ambition : faire de sorte qu’il soit loisible désormais d’entrer dans l’Administration du travail, d’y évoluer pendant toute sa carrière et d’y prendre sa retraite. En d’autres termes, ne plus faire d’un salaire décent toute sa préoccupation à la veille du départ à la retraite. Et que ceux qui intègrent ce corps demain le fassent en toute quiétude, dans des conditions de travail honorables. Telle est l’inflexion que les acteurs de ce mouvement semblent lui imprimer. Et quel qu’en soit le prix. Le constat d’un doyen du corps aujourd’hui dans le privé venu témoigner de son soutien lors de l’assemblée générale du SICTRASS tenue au mois de juin à Dakar résume à lui seul cette détermination : « je n’ai jamais vu autant d’engagement dans ce corps».
Le samedi 25 juillet 2010 le reportage de Walf TV montrant des hordes de travailleurs en furie dans un grand chantier (une nouvelle cimenterie) dénonçant leurs conditions de travail a mis en émoi toute la république. Les autorités de l’Etat au plus haut niveau (régional comme central) se relaient au bout du fil pendant tout un week-end pour alerter l’inspecteur régional du travail de Thiès, évitant soigneusement de parler de grève. On aura même l’élégance de proposer des moyens pour la réussite de la mission. Stupéfait, l’inspecteur se prête au jeu. Il me confiera : « Je suis un général sans soldat ». Au-delà du constat sa déchirure semble plus profonde : Le médecin a-t-il le devoir de laisser trépasser le malade au nom d’un mot d’ordre de grève et quel qu’en soit le mobile ? La satisfaction hic et nunc de nos lilliputiens intérêts de mortels doit-elle nous aveugler au point d’hypothéquer l’avenir de ce beau pays ? Un responsable n’est pas un irresponsable.
Dieu soit loué ! Son intervention le lendemain fut couronnée de succès ; le calme revient et les intérêts du Sénégal et de ses partenaires investisseurs furent sauvegardés. Aux yeux de l’inspecteur du travail, il n’y a rien d’extraordinaire en cette action pour qu’elle soit carillonnée sur tous les toits. Par l’action quotidienne de l’Inspection du travail c’est des milliers d’emplois qui sont préservés et des dizaines d’entreprises sauvées. A combien de milliards estimerait-on cela ? Par-dessus tout le climat social serein condition sine qua non pour la productivité, la rentabilité et la compétitivité n’a pas de prix. Alors, rien ne justifie que les garants de la paix sociale, acteurs-clefs du dialogue social soient oubliés dans la redistribution des dividendes que l’Etat reçoit des investissements, même s’ils sont minoritaires dans l’Administration (une centaine d’agents).
Au surplus, le contexte actuel plaide pour le renforcement des capacités et moyens d’intervention de l’Inspection du travail. Le Sénégal a de nouveaux partenaires investisseurs : les Arabes, les Indiens, les Chinois qui n’ont pas forcément la même perception des relations professionnelles que nous. Une meilleure préparation de l’ensemble des acteurs en contact direct avec les investisseurs de tout bord peut toujours faciliter outre leur installation, la sociabilisation des rapports.
Enfin toutes les guerres se terminent autour d’une table. Cette grève, aussi longue soit-elle se terminera de la sorte. Pourquoi ne pas le faire aujourd’hui, le manque à gagner est déjà incommensurable. Immédiatement après attelons-nous à tenir les états généraux de l’Administration du travail pour ne pas dire de l’Administration tout court afin de passer au crible ses problèmes d’ordre structurel et conjoncturel. Gouverner c’est prévoir non ?
Mouhamed M. Loum, IRTSS / THIES
L’EGOTISME DE WADE
Spectre de ruine générale, fragrance de crise politique, cherté de la vie, coupures intempestives d’électricité, prolégomènes à toutes les souffrances :avec ce cortège maudit tapi dans ses fourgons, l’armée de malheurs qui s’abat sur notre pays achève d’assombrir le quinquennat déjà bien obséquieux de Wade(Mansour !). Derrière le drapeau noir qui flotte sur les marmites, derrière un pouvoir d’achat élimé, ce que le peuple aperçoit, aujourd’hui, à travers le miroir national, c’est un pays déclinant où les classes moyennes s’essoufflent, où le travailleur pauvre désespère. Pendant ce temps, l’actuel pensionnaire du palais Léopold Sédar Senghor continue sa dégringolade dans les abysses de l’impopularité. La sienne est d’ailleurs singulière qui tient moins à la difficile conjoncture actuelle qu’à ce qu’il est ou parait. Son omniprésence médiatique, son addiction à la vitesse et à l’ubiquité auront largement favorisé cette exécration hystérique dont il se trouve, ici ou là, harcelé. Il y a, certes, de l’injustice à enfermer l’homme d’action dans une comédie dégradée, à oublier les réformes soit accomplies, soit engagées et dont on mésestime l’entrain. De l’ingratitude à gommer les atouts d’une énergie inventive qui nous aura portés vers un changement plus ou moins visible dans tout le pays. Reste que les images trainent et s’impriment. Pour avoir livré, au jour le jour, une flopée d’annonces prématurées et d’algarades incongrues, il subit les retours de bâton. La crise-il n’y peut rien-dévalue à elle seule ses promesses de campagne. Mais combien de dégâts qu’un peu de contenance et de laconisme eût évité !
Abdoulaye Wade est fils d’Achille, roi des myrmidons et de Shéhérazade, héroïne des mille et une nuits. De son père, il hérite du courage, de l’audace, du sens de l’épopée et vit une vie qui, déjà, porte, en elle, son récit. Que le père ait Homère comme scénariste et le fils, Serigne mbacké ndiaye comme thuriféraire modifie, certes ,l’esthétique mais le procédé demeure :l’Histoire se dit en même temps qu’elle se vit :de Mars 2000 à octobre 2010,ainsi fut présidée la République du Sénégal.
Sa mère, Shéhérazade ,lui légua le goût du récit, du commentaire en direct de ses propres aventures. En son règne, il est narrateur et héros, à la fois et en même temps. Et il se bâtit une stature particulière :de plus en plus, au fil de ses discours, brodant les mesures à venir sur la trame de celles lancées, le président est une mise en abyme vivante. Il est Wade parlant de Wade commentant Wade agissant. Il sature ainsi l’imaginaire politique sénégalais, jetant sur chaque évènement sa lumière personnelle :dans ces contes des mille et une nuits, il est aussi la lune. Cette logomachie Wadienne peut avoir des vertus car elle agite la vie politique et tisonne le débat d’idées. Mais elle est gâchée, corrompue par le rapport biaisé du président au succès et à l’échec. Dans le premier cas ,il se désigne toujours par « je », caractéristique de l’égotisme Wadien puisque tout le mérite lui en revient. Dans le second, la moindre critique l’exaspère en une susceptibilité surprenante. Wade, on le sait, est réfractaire à la critique. Sans doute veut –il éviter que le vinaigre des critiques ne vienne s’ajouter à l’amertume des soucis quotidiens liés à sa fonction présidentielle. Toujours est-il qu’il a toujours récompensé celui qui le caressait et puni celui qui lui résistait(Idy, Macky pour ne citer que ceux-ci).Dans son gouvernement, aucun ministre, ou presque, ne peut prononcer trois phrases sans évoquer les consignes ou l’exemple présidentiels et certains tentent même d’adopter les références et jusqu’aux inflexions de voix du président. Ainsi va le plus abouti des systèmes courtisans :chacun n’a que le nom du maitre à la bouche et s’efforce de le sertir en des ornements multiples. Il n’est d’actes ou de propos qui vaillent hors de la suprême mission de faire briller l’auguste patronyme. Tout conseiller Wadiste érige la servilité au rang des plus grandes vertus. Hier, clan soudé vers la victoire, les wadistes sont, aujourd’hui, une cour attablée aux agapes du pouvoir. Et ceci va jusqu’aux médias favorables à l’exécutif. On se souvient de « Il est midi »,cette défunte Pravda wadiste qui confondait la défense d’une ligne éditoriale libérale(Wade se dit libéral !) avec l’anticipation des désirs intellectuels du président. Ceci prouve à suffisance que tout comme il y a un antiwadisme primaire, il y a aussi un prowadisme pavlovien. Du senghorisme au dioufisme,l’esprit de cour fit des ravages sous des apprêts divers, mais jamais il ne fut plus sirupeux que sous Wade. Sans doute est-ce là un défaut profondément sénégalais, enraciné dans la mentalité nationale depuis que la flagornerie supplanta la sincérité et les valeurs comme ciment des alliances autour du roi. Monsieur le président, sachez l’esprit de cour est fils de l’absolutisme !Si les choses continuent de cette façon, viendra bientôt le temps où seules les bonnes nouvelles franchiront les murailles du palais, où seuls ceux qui affirmeront que tout va bien auront l’oreille du prince. Et le prince les croira, enfermé dans une citadelle d’illusions que le réel balaiera en 2012.
Alors Wade doit se ressaisir et se résoudre à changer de méthode. En dépit de ce quinquennat en cours bien mal parti, ma conviction est qu’il est à mettre à son actif, n’en déplaise aux wadophobes, des avancées concrètes dans bien des domaines de la vie de notre pays. Mais il en ruine l’avantage par son omniprésence et son verbe abondant. En politique, la retenue et la discrétion sont le vernis de la victoire ;l’esbroufe et la forfanterie sa fêlure .J’ai, dans une récente contribution, fait état de quelques réformes que le président doit engager afin de nous sortir de la mauvaise passe actuelle. Mais la plus urgente à laquelle le président doit s’atteler est ,sans doute, la sienne d’abord, c’est-à-dire qu’il doit s’oublier un peu pour mieux servir sa propre cause, évacuer cet égotisme qui ruine son quinquennat. Je l’en crois capable et je suis l’un des rares à être encore optimiste.
EL HADJI MALICK SALL