chimérique des biocarburants
La révolution chimérique des biocarburants
Le Journal des Internautes | mardi 22 mai 2007 | 456 lectures Commenter cet article Lire l
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L’extraction des deux ressources fossiles que sont le pétrole et le gaz, rencontrera une limite temporelle et quantitative objective. Le début du déclin de la production, connu sous le nom de Pic pétrolier global, se situerait, selon différents spécialistes, entre 2010 et 2028 (peut-être 2035 pour le gaz). Le Professeur Pierre-René Bauquis de l’Ecole du pétrole et des moteurs (ENSPM) de Paris souligne cependant que « personne ne peut se vanter de connaître la date exacte du Pic ». On sait seulement qu’à partir de cette date, l’extraction ne sera plus régulée par la demande, mais l’inverse.
Olivier Appert, Président de l’Institut français du pétrole, lors d’une conférence organisée à Rueil-Malmaison en mai 2006, annonçait que « l’âge du pétrole pourrait connaître le début de son déclin » pour de multiples raisons liées aux réserves, au volume des investissements et à la géopolitique.
Sous ce rapport, il est à la fois louable et responsable de songer au développement progressif d’énergies de substitution, d’inciter plus ardemment les populations à économiser l’énergie et d’explorer toutes les sources d’énergie possibles, notamment les renouvelables.
De plus en plus de nations (dont la nôtre), ont fait l’option de se lancer dans la production de carburants d’origine végétale, issus de la biomasse, dont le potentiel utilisable pour produire de l’énergie à partir de déchets urbains et agroalimentaires, semble important.
L’agro-carburant est coûteux en eau, en terres et détruit la biosphère.
Certes, « transformer de l’huile de friture en carburant pour moteur est une bonne chose ». Mais comme l’écrit Georges Monbiot dans « The Guardian » du 6-12-2005, « en faisant la promotion du biodiesel comme substitut au pétrole, nous utilisons chaque année quatre (4) siècles d’équivalent plantes et animaux ». Il ajoute : « l’idée que nous puissions simplement remplacer cet héritage fossile – et la densité d’énergie extraordinaire qu’il nous fournit – avec de l’énergie ambiante est un truc pour la science fiction ». Le biodiesel ne crée pas un marché pour la vieille huile de friture, l’huile de colza ou l’huile faite à partir d’algues cultivées dans des mares désertes, mais crée un marché pour les cultures les plus destructrices de la biosphère.
Le premier facteur de production d’agro-carburant est la terre, principalement la terre agricole. Des espaces naturels vitaux tels que la forêt amazonienne, vont se réduire, ou simplement disparaître ; leur surexploitation accentuera la désertification. Toutes les réserves potentielles d’huile de palme brute de Malaisie vont servir en 2007, à faire du biodiesel pour l’Union européenne ; et ceci sera responsable de 87 % de la déforestation malaisienne.
Dans un article publié le 24 mars 2007, Dominique Guillet, membre d’une association de production de graines et semences de jardin, citant la FAO, indique que la surface moyenne de la terre arable mondiale, par habitant, était :
de 0,32 hectare en 1961 / 1963, pour une population mondiale de 3,2 milliards,
de 0,21 hectare en 1997 / 1999 pour une population mondiale de 6 milliards, et sera
de 0,16 hectare en 2030 pour une population mondiale estimée à 8,3 milliards.
Au Brésil, aux Etats-Unis ou au Sénégal, les avantages environnementaux qui sont attendus, tels que la lutte contre l’effet de serre, et qui valent à ces fameux carburants le préfixe flatteur de « bio » – bio évoque la vie -, ne seront-ils pas anéantis par les quantités de pesticides et de semences transgéniques aux effets pervers, qui seront englouties dans les terres ?
Par ailleurs, tous les futuristes s’accordent pour prédire l’accentuation des problèmes qui seront posés par l’eau durant le 21ème s. Le stress hydrique – situation où la demande en eau dépasse la quantité disponible pendant une certaine période, ou lorsque la mauvaise qualité en limite l’usage – frappe déjà plus d’une dizaine de pays en Afrique.
Selon le Rapport 2004 du programme mené conjointement par l’OMS et l’UNICEF,
plus d’une personne sur six buvait encore de l’eau provenant de sources non potables (soit 1,1 milliard de personnes),
plus de deux personnes sur six manquaient d’installations sanitaires de base (soit 2,6 milliards de personnes, sans tenir compte qu’en 2002, 3 900 enfants sont morts chaque jour de maladies transmises par l’eau).
Dans ce contexte, l’irrigation agricole représente plus de 60 % de la consommation d’eau, avec une multiplication par six de l’utilisation des ressources en eau douce depuis le début du siècle.
Les Etats-Unis utilisent, pour obtenir un litre d’éthanol, 2,37 kilos de maïs, 500 grammes de charbon et 4 litres d’eau. Et dans l’Etat d’Iowa où l’essentiel du maïs est produit, la production d’un kilo de maïs nécessite entre 500 et 1 500 litres d’eau. Ce qui représente une consommation de 1 200 à 3 600 litres d’eau pour obtenir un litre d’éthanol.
La sécurité alimentaire est menacée, ou, pour le moins, concurrencée.
Les deux principaux producteurs d’éthanol sont les Etats-Unis et le Brésil ; pour ce faire, ils transforment respectivement du maïs et de la canne à sucre. En Europe, on produit l’agro-carburant avec de la betterave, du soja, du colza, du blé, du tournesol, etc.
Le manioc, quant à lui, est très ciblé à cause de sa teneur élevée en amidon, qui en fait une excellente matière première pour éthanol. Peu importe qu’il soit l’aliment de base de près de 200 millions d’Africains. Son prix va augmenter de 33 % d’ici 2010 et ira crescendo les années suivantes. Le prix du maïs, du fait de son détournement vers la production d’agro-carburants, va augmenter de 20 % d’ici 2010 ; les oléagineux de 26 à 76 %, le blé, de 10 à 30 %, etc.
Pendant que les transnationales étasuniennes qui produisent de l’éthanol à base de maïs reçoivent 100 milliards de dollars par an de subventions directes et sous forme de tarifs protectionnistes, le Brésil dont le maïs n’a qu’un rendement de 3 tonnes /ha et qui a produit près de 35 millions de tonnes en 2005, totalement consommées sur place, a vu le cours de cette céréale doubler durant cette période.
L’agro-carburant, une révolution pour les multinationales
La production des carburants « bio » est une révolution à l’avant-garde de laquelle se trouvent les généraux de transnationales du pétrole (sic), de l’agrochimie, de l’agroalimentaire, ainsi que les brillants penseurs de l’ordre néolibéral et conservateur.
Jugez en par cette liste non exhaustive de sociétés impliquées dans la production d’agro-carburants : BP, DuPont de Nemours, Pioneer HiBred, Toyota, Volkswagen, Archer Daniels Midland Company (ADM), Royal Dutch Shell, Cargill, Monsanto, Bayer, Syngenta, et puis…
Et puis, Tereos. C’est le second sucrier mondial ; il produit de l’éthanol à partir de la betterave et du blé. Pour cela, il a obtenu 31 % des agréments français. Ce géant qui a déjà traité 7 millions de tonnes de sucre au Brésil et prévoit d’en traiter 18 millions en 2012, va aussi transformer 840 000 tonnes de blé en 3 millions d’hectolitres d’éthanol dans le département français de la Marne. Particularité : Tereos a déclaré sa ferme intention d’être le premier sucrier à s’implanter en Afrique. Il est déjà à pied d’œuvre ; ce qu’un proche avenir confirmera.
En détruisant des aliments pour du carburant, pense-t-on un seul instant que chaque jour 36 000 personnes meurent de faim dans le monde ?
Bush et Lula ont décidé de créer la nouvelle « OPEP de l’éthanol »
Nicholas Burns, sous secrétaire d’Etat des USA révèle le vrai sous-bassement idéologique de cette OPEP en ces termes : la production d’éthanol « tendrait à réduire le pouvoir de certains Etats dont nous estimons qu’ils exercent une influence négative sur le monde, comme le Vénézuela ». Cette belle réflexion ne serait pas complète s’il ne s’y ajoutait pas « qu’une grande partie du pétrole produit au début des années 2000, provient de pays ou régions instables (Nigéria, Vénézuela), de pays où les assassinats sont quotidiens (Irak) ou de pays dont les Occidentaux se méfient (Iran, Russie) ». Gardes, à vous !
Que M. Bush, leader du conservatisme mondial ne se soucie pas que 11 % du maïs produit dans son pays serve à remplacer à peine 1 % du carburant qui y est consommé, peut se concevoir. Après tout, nous vivons une époque où le prêt-à-penser ambiant, savamment construit par le néolibéralisme et diffusé par ses puissants moyens de désinformation, nous rebat les oreilles sur la prétendue mort des idéologies et nous chante bêtement l’air de la mondialisation, un concept bâti sur les modèles ringards du capitalisme du 19ème siècle, auxquels même les épigones de Jean Baptiste Say ne croient plus. « L’équilibre n’est pas optimal » (dixit Nash).
Ce qui est moins concevable, c’est que, telle une armée aux ordres, à la tenue guindée et raide, des sortes de nouveaux tirailleurs d’Etats en développement comme la Turquie, l’Indonésie, le Mexique, l’Uruguay, l’Afrique du Sud et le Sénégal se lèvent comme un seul homme pour se jeter dans l’aventure de l’agro-carburant, sous prétexte d’une hypothétique indépendance énergétique
Aventure qui n’a rien de révolutionnaire, pour au moins deux raisons :
historiquement, les premiers moteurs d’automobiles – à explosion et à combustion- ont été conçus par Nikolaus Otto et Rudolf Diesel pour tourner à l’éthanol et à l’huile d’arachide, avant que, pour diverses raisons, les produits pétroliers ne s’imposent à tout le monde.
5 à 15 % seulement des carburants classiques peuvent être remplacés et requièrent un équipement en moteurs polycarburants (flex fuel). L’Union européenne a fixé un objectif de 5,75 % en 2010.
Si ce qui est exposé ci-dessus ne vise pas le rejet pur et simple de l’agro-carburant, j’invite à plus de mesure sur le sujet ; cela évitera peut-être bien des désillusions. Parallèlement, j’invite les scientifiques et les décideurs de mon pays à approfondir la réflexion sur le solaire – il existerait au moins une thèse de doctorat soutenue sur ce sujet par un de nos compatriotes - et l’éolien. Et puis, pourquoi le nucléaire est il encore un sujet tabou, même si les réserves d’uranium ont, elles aussi leur pic ? Ou serions nous les éternels grands enfants auxquels il ne faudrait pas remettre des allumettes, de peur que nous allumions des feux d’artifice dans nos savanes et ailleurs ?
Amadou Makhourédia DIOP
Enseignant à L’UFR de Sciences Agronomiques et Développement Rural de L’Université de Thiès
Département d’Economie et Sociologie rurales
amakhouredia@yahoo.fr
1 Réaction
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24 mai 2007 11:13, par Neobiol
Parce que la réglementation évolue, parce que les mentalités évoluent, parce que les besoins des restaurateurs évoluent,
Neobiol propose un service de proximité économique et pratique de collecte des huiles alimentaires usagées auprès des restaurateurs. Forte de plusieurs centaines de clients conquis en Seine-Saint-Denis durant ses six premiers mois d’activité, Neobiol étend son service à l’ensemble de l’Île de France.
La démarche citoyenne de Neobiol s’inscrit dans une logique de l’après pétrole : l’organisation de l’ensemble de l’entreprise est pensée pour réduire l’impact de la hausse du prix des énergies fossiles. Elle se traduit par des centres de collecte et de revalorisation de proximité et des traitements économes en énergie, de préférence non fossile. Cette structure apporte de nombreux bénéfices à la collectivité.
Bénéfice environnemental - Les rejets dans les égouts posent un problème évident de pollution des cours d’eaux ou de maintenance des stations d’épuration lorsqu’elles existent en aval. Il en est de même pour les rejets dans les ordures ménagères qui perturbent les traitements standards et empêche tout recyclage des lots contaminés. Les huiles alimentaires usagées étant des huiles végétales (colza, tournesol, arachide, sésame…), leur revalorisation par réinsertion dans la filière des biocombustibles représente autant d’économie sur les produits pétroliers auxquels les huiles alimentaires usagées peuvent se substituer, avec des performances écologiques meilleures que les carburants fossiles, principalement par leur meilleure efficacité énergétique, leur neutralité vis-à-vis du CO2 (le CO2 rejeté provient de plantes qui l’ont capté préalablement dans l’atmosphère) et l’absence d’émission de soufre responsable des pluies acides.
Bénéfice économique - La revalorisation des huiles alimentaires usagées permet directement de réduire les importations d’hydrocarbures fossiles auxquels elles se substituent et de stimuler l’investissement industriel par la mise en place de la filière (véhicules propres et équipement de collecte et de revalorisation, matériel de protection de l’environnement).
Bénéfice social - La création de d’emplois locaux est favorisée par la démarche de proximité de Neobiol.
A propos de Neobiol - Neobiol est une éco-entreprise entièrement dédiée à la collecte de proximité des huiles alimentaires usagées essentiellement auprès des restaurants et métiers de bouche de taille petite à moyenne et à leur valorisation. Neobiol est une entreprise innovante nominée régionale du concours national d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes organisé par le Ministère délégué à l’Enseignement Supérieur et à la Recherche. Etablie en Seine Saint-Denis, Neobiol rayonne dans toutes la région Ile-de-France et offre un service économique et pratique.
Contact presse : Jean-Marie-Vidal +33 1 48 68 25 16 jeanmarie.vidal@neobiol.com www.neobiol.com