POLITIQUE ET MORALE
L’Institut de Droits de l’Homme et de la Paix , dirigé par le professeur Aminata Sow Sidibé, vient d’organiser le 25 avril 2007 une importante table ronde sur le thème : »Législatives : plaidoyer pour la consolidation de la démocratie ». LIENS RECOMMANDES
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L’objectif visé, me semble- t’il était de réunir les segments les plus significatifs de la classe politique, de la société civile, des intellectuels et des leaders d’opinion, en vue de jeter les bases d’un dialogue fécond et de trouver les mécanismes internes à notre génie propre, pour aplanir les difficultés qui jalonnent le processus continu de la démocratie. Celle-ci est en effet une donne inaltérable de notre culture. Elle est une machine qui n’admet ni frein, ni marche arrière encore moins un virage à droite ou à gauche.
C’est pourquoi aussi bien ses acteurs que ses bénéficiaires doivent s’interdire d’en bloquer le système sous peine d’en être victimes comme l’enseigne l’histoire de la géopolitique mondiale.
Il s’agit avant tout de respecter la légalité constitutionnelle, fruit d’une longue lutte de plusieurs générations, avec ses mécanismes électoraux et institutionnels avérés et rythmés dans le temps et l’espace.
La défaite électorale ne doit donc conduire ni à la rébellion, ni à l’exclusion ; mais bien au contraire au fair play propre à l’esprit de gentleman. C’est-à-dire l’acceptation du verdict des urnes et la préparation active à la saine revanche lors de compétitions électorales, seul baromètre qui régule le système démocratique.
Bien que le vote ne soit pas obligatoire chez-nous , que la participation des partis politiques aux joutes électorales non plus, l’inviolabilité du suffrage individuel de l’électeur interdit toute attitude tendant à déchoir la pratique démocratique.
Le Sénégal s’est doté d’une nouvelle constitution par voie référendaire, d’un code électoral consensuel, d’une Cena opérationnelle pour éviter toute dérive autoritaire ou anarchique.
C’est vrai que tout cela est perfectible à la lumière des contingences et exigences de la consolidation de la démocratie qui s’enrichit continuellement.
Nul doute qu’elle repose sur un socle solide, universellement reconnu. Le boycott est un certes un acte politique normal dans une société civilisée qui, pour être actif, doit se traduire par un fort taux d’abstention qui remet en cause la légitimité des élus.
Mais s’il rencontre le contraire c a d, une forte participation de l’électorat pour légitimer les nouveaux élus, les boycotteurs doivent en tirer l’impertinence de leur décision, et se soumettre à la vérité du suffrage universel. Aussi la classe politique doit s’approprier l’essence même de la démocratie qui s’exprime à travers la loi naturelle de la lutte et de l’unité des contraires qui nous impose l’acceptation des opinions opposées.
C’est ce qui fonde l’autorité du pouvoir et l’affirmation de l’opposition qui sont les deux mamelles de la bonne gouvernance démocratique. Il en découle la nécessité de la refondation morale et intellectuelle de la praxis politique, pour reprendre Jean Renan s’adressant à la France. Le mérite de ce panel de l’Institut des Droits de l’homme et de la paix réside dans cette tentative d’un déclic déclencheur d’un comportement républicain où la déception cesse d’obéir aux forces du reniement ou du nihilisme destructrices.
La légalité et la légitimité du Président Wade maintenant reconnues par l’opposition significative, il s’agit maintenant pour elle de reconnaître ses propres erreurs d’appréciation ayant conduit au boycott et d’accepter de se conformer à la légalité en utilisant les voies de recours que lui offre loi, pour se hisser à la hauteur du dialogue sans préjugé aucun.
Le pouvoir que nous incarnons, nous de la majorité présidentielle, a été acquis sans effusion de sang, par la légalité. Nous n’avons rien à perdre en le renforçant par le dialogue et l’esprit d’ouverture qui ne nous ont fait défaut. A l’actif de cette permanente disposition attestée par huit (8) appels du président Wade depuis 2000, la Cena , la refonte du fichier électoral, le toilettage du code électoral consensuel, la numérisation des cartes d’électeur et d’identité nationale, la présence d’anciens opposants au sein de notre gouvernement, l’assistance permanente aux chefs de l’opposition en détresse ou situation difficile.
Au-delà des critères politiques, notre propre culture traditionnelle et religieuse nous prédispose à l’ouverture, à la tolérance pour ne jamais humilier l’adversaire.
Les changements politiques ne pourront jamais modifier substantiellement ce substrat culturel qui est le ciment de l’unité national qui structure notre conscience nationale.
Mais un pays qui se respecte aux de la communauté internationale qui, elle aussi, a ses normes d’appréciation, doit se conformer à un code de conduite qui minore les sources de conflits internes nés de litiges électoraux d’une part ; et réduit celles qui nous excluent du concert des nations démocratiques.
Il n’y a pas en effet de démocraties valables seulement pour les pays de seconde zone. D’où un exercice quotidien au dialogue pour conserver de démocratie mâture acquise par sédimentation successive pour reprendre l’expression du professeur Iba Der Thiam.
C’est à mon sens l’invite de cette table ronde dont les contours appellent un mea culpa collectif qui est l’électrochoc nécessaire au dépassement. Mais ce mea culpa est aussi valable pour la société civile trop encline à jouer le rôle de censeur et non d’animateur de la conscience collective. Il est également valable pour les intellectuels déserteurs du champ politique qui capitulent devant leurs responsabilités historiques et se réfugient confortablement derrière leur statut pour distiller une vérité par les hauteurs et les distances. Notre pays et le continent ont besoin certes de la lumière des hommes de sciences et de culture, mais surtout de leur implication dans la chose politique qui toute la cité. C’est ainsi que le « Vautrin », ces politiciens sans âme et morale dont parlait Balzac quitteront les stations qu’ils ont longtemps occupées par usurpation de fonction.
Alors « éviter le délit de non assistance à la consolidation de la démocratie « dont parlait un des panélistes, aura tout son sens. Le renouvellement des ressources humaines et politiques, le renforcement de leurs capacités passent par l’implication des intellectuels organiques aptes à apporter du sang neuf à la pensée et à la culture démocratiques.
En cette période de déperdition de la culture démocratique du fait de l’absence d’une analyse fine des stratégies déployées par les états-majors politiques envahis par les applaudisseurs beaucoup plus que par les apostropheurs, l’invite permanente du Président Wade et l’actuelle disposition de l’opposition significative au dialogue sont des atouts qui militent en faveur de la consolidation de la démocratie et de l’état de droit qui interdisent toute exclusion de quelque force que ce soit, dans la voie de la construction de nation sénégalaise, notre patrimoine commun pour lequel nous militons.
Pape Mody Sow
Consultant en communication
Secrétaire Général National du Parti de l’Espoir et du Progrès ( Pep)
Membre de la Cap 21