DEBAT SUR LA GESTION DE L’ACTION REVENDICATIV
PROCESSUS DE REUNIFICATION DU MOUVEMENT SYNDICAL AU SENEGAL
Les rideaux sont tombés sur la célébration du 1er Mai de la fête internationale du travail.
Cette année (2010), le 1er Mai a enregistré des avancées significatives à tout point de vue et marque un nouveau point de départ de la classe ouvrière.
Deux enseignements majeurs s’imposent.
La maturité de la classe syndicale et la volonté de celle-ci de refaire son unité, d’une part, d’autre part, la volonté politique des autorités d’apporter un suivi rigoureux à la demande sociale, pour mieux y répondre.
Dès lors, il me parait opportun de mettre à profit cette situation pour opérer des changements dans l’action revendicative et dans nos rapports en matière de relations professionnelles, mais surtout dans nos mentalités pour l’émergence d’un leadership issu de notre unité, apte à conduire les luttes pour de nouvelles conquêtes sociales.
Le courant de pensée syndicale que la CNTS/FC représente dans le mouvement revendicatif et qui constitue, incontestablement, un nouveau souffle syndical pour de nouvelles conquêtes sociales, s’est fixé comme objectif prioritaire la réunification du mouvement syndical. Pour toutes ces raisons, nous ne saurions laisser passer l’occasion sans poser le débat sur la nécessité de repenser l’action revendicative et nos relations professionnelles sous sa forme actuelle, où règnent toutes sortes de dérives : émiettement des forces syndicales, querelle de leadership, désyndicalisation, crise de confiance dans les rangs des travailleurs, tentatives de remise en cause des acquis sociaux.
La maturité de la classe syndicale et la volonté de celle-ci de refaire son unité :
Les effets pervers de la liberté, ce sont les dérives ; ceux de la démocratie, l’émiettement des forces sociales et politiques, au point de les affaiblir.
Le mouvement syndical qui n’échappe pas à cette règle est tellement dispersé que rien ne peut plus se faire sans son unité.
Plus de vingt centrales syndicales se disputent moins de cinq cent mille travailleurs régulièrement salariés. S’il est bien vrai que le travail salarié n’est plus le seul terrain de prédilection du mouvement syndical, il n’en demeure pas moins que le rapport nombre de salariés permanents - nombre de centrales syndicales se passe de commentaires.
Le moins que l’on puisse dire est que cette situation incite les investisseurs, les bailleurs de fonds à s’attaquer aux acquis de la classe ouvrière conquis de hautes luttes. C’est le moment choisi pour aller à l’assaut des intérêts des travailleurs. L’illustration la plus parfaite nous a été servie par les conseils des investisseurs et bailleurs de fonds à notre gouvernement pour la révision des articles L 42 et L 47 du code du travail, relatifs à la limitation des contrats à durée déterminée et à l’indemnisation de fin de CDD à titre de complément de salaire, soit 7% du montant de la rémunération totale brute due au travailleur pendant la durée de son CDD.
La meilleure réponse que j’attendais, c’est celle que la classe syndicale dans son ensemble a apportée ce 1er Mai.
J’apprécie aussi bien le fond que la forme.
Dans le fond, cette situation engendre une prise de conscience collective de toute la classe ouvrière sur la nécessité d’unir ses forces pour faire face aux attaques contre l’intérêt collectif.
Il ne saurait être autrement pour la classe syndicale dirigeante car lorsque la nouvelle de la précarisation totale de l’emploi s’est répandue dans les milieux ouvriers, la clameur a failli emporter les dirigeants syndicaux que nous sommes.
Dans la forme, moment ne peut être meilleur que le 1er Mai.
Souvenons nous que cette date marque l’histoire la plus importante du mouvement syndical international et consacre les martyres les plus célèbres, l’acquis le plus fondamental du monde du travail, le symbole le plus fort du syndicalisme. L’imposant défilé sur le boulevard du centenaire suivi du rassemblement massif sur la place de l’obélisque, rappelle les pages glorieuses de l’histoire du mouvement syndical Sénégalais, Africain et Mondial.
Si August Spies, Georges Engel, Adolph Fischer, Albert Parsons et Louis Lingg sont tombés en 1886 à Chicago aux Etats Unis pour huit heures de travail, huit heures de loisir et huit heures de sommeil pour tous les travailleurs du monde, nous syndicalistes Sénégalais, nous devons accepter toute sorte de sacrifice pour sauvegarder et améliorer les acquis de la classe ouvrière.
Nous devons surtout accepter de reléguer nos personnes, nos intérêts particuliers au profit de la nécessaire réunification du mouvement ouvrier.
La volonté politique des autorités d’apporter un suivi rigoureux à la demande sociale, pour mieux y répondre.
Si « les promesses de campagne électorale n’engagent que ceux qui y croient », je dis que la réalisation de celles-ci ne tient qu’à la détermination de ceux à qui ces promesses sont destinées.
Lors de la cérémonie officielle de remise des cahiers de doléances, après avoir écouté les interventions des syndicalistes, notamment celle du secrétaire général de la CNTS/FC portant sur le projet de réforme des articles L 42 et L 47 du code du travail relatifs à la limitation des contrats à durée déterminée et à l’indemnisation de fin de CDD à titre de complément de salaire et sur l’analyse de la situation de l’action revendicative au Sénégal, Monsieur le Président de la République a bien voulu revenir sur le projet de révision du CDD pour demander la suspension de celle-ci qui, dit-il, n’est « qu’un projet de projet ». Il est également ressorti des propos de Monsieur le Président de la République, que ce sont les investisseurs qui leur avaient conseillé ce projet.
La remarque pertinente qu’il y’a lieu de retenir est que ce projet est une préoccupation majeure des bailleurs de fonds.
En réagissant à notre analyse qui résume l’action revendicative en deux types de revendications et du message que véhicule chaque type de revendication ; les revendications de restitution appellent à la confrontation, à la révolte et à toute sorte de dérives ; les revendications de conquête appellent à la négociation, à l’apaisement et participent au progrès social, Monsieur le Président de la République a fait une proposition très pertinente qui consiste à créer un observatoire du progrès social composé de tous les acteurs concernés et de façon paritaire. Cette proposition répond parfaitement à nos attentes par rapport à l’état actuel de la revendication au Sénégal (voir notre contribution dans Sud quotidien du 19 Novembre 2009, reprise par le Quotidien du 20 Novembre 2009 et par le Matin du samedi 20 et dimanche 21 Novembre 2009), car devant certainement faire l’état des lieux des revendications de restitution pour décliner un échéancier consensuel de règlement de ces types de revendications, afin de permettre aux syndicalistes de s’occuper résolument des revendications de conquêtes pour le progrès social.
Si la proposition du chef de l’Etat n’arrivait pas à se réaliser, n’en voulons surtout pas à celui-ci, mais plutôt à nous-mêmes.
Si les promesses politiques n’engagent que ceux qui y croient, leur réalisation ne tient qu’à la détermination et à l’engagement des acteurs à qui ces promesses sont destinées.
Dans le cas d’espèce, le chef de l’Etat a eu le mérite et la volonté politique de répondre par des propositions concrètes à nos préoccupations.
Dés lors, il nous appartient de jouer correctement notre rôle de sentinelle et de veille.
Est-il possible dans les conditions actuelles de dispersion des forces syndicales de jouer convenablement notre rôle ?
Agir résolument pour l’unité.
Au delà des déclarations d’intention et de la célébration du 1er Mai de cette année, dans l’unité, nous avons le devoir d’aller plus loin.
Pour ce qui nous concerne, c’est une conviction personnelle, mais c’est aussi un mandat syndical que j’ai reçu de la CNTS/FC, cette centrale qui se fait le devoir d’apporter au mouvement syndical Sénégalais, un nouveau souffle syndical pour de nouvelles conquêtes sociales.
Fort de ce mandat syndical et de mes convictions personnelles, je me fais le devoir d’apporter un élément nouveau dans le débat de l’unité en termes de propositions.
Toutes les centrales syndicales, sinon les plus significatives, acceptent d’aller aux élections de représentativité. Dès lors, créons un cadre de concertation entre centrales et fixons à ce cadre trois objectifs seulement.
• Dégageons des convergences assorties de propositions sur le fichier, sur l’organisation des élections, avec la volonté commune de parvenir à des propositions raisonnables
• Définissons toujours entre nous le nombre de centrales syndicales raisonnables pour le Sénégal, à l’instar des pays comme l’Afrique du Sud, entre autres, qui ne compte pour l’essentiel que trois centrales.
• Signons des accords pour la recomposition de notre mouvement sur la base des résultats issus de ces élections et autour des trois premières centrales (si c’est le nombre de centrales retenu).
Les conclusions du cadre de concertation entérinées par les secrétaires généraux, les engageant tous, seront transmises au ministère du travail comme document consensuel des centrales sur les élections.
A la CNTS/FC, nous estimons que le débat ne doit pas rester figé sur des déclarations d’intention ou sur de simples unités d’actions sans suivi. L’émiettement, l’inefficacité, la désyndicalisation, le manque de solidarité ouvrière dans l’action revendicative et l’insécurité dans l’emploi et dans la préservation de nos acquis sont tels que nous devons capitaliser tous les actes unitaires posés jusqu’ici, pour les mettre au profit d’une unité organique bien pensée et bien organisée.
Nous avons tout à y gagner, tout à y conquérir ou à y reconquérir :
Notre indépendance, notre crédibilité, notre efficacité mais aussi notre sécurité.
L’histoire retiendra que c’est sur la base de notre propre initiative que le mouvement ouvrier s’est réunifié et s’est renforcé, c’est la meilleure preuve de notre indépendance vis-à-vis de nos différentes appartenances politiques, car il n’est nullement interdit à un citoyen, fut-il un syndicaliste, d’avoir des convictions politiques et choisir un cadre pour la réalisation de ses convictions. Moi je suis un militant de la justice sociale et du progrès social. J’ai choisi deux cadres pour parvenir à la réalisation des convictions pour lesquelles je milite : le PDS et la CNTS/FC.
D’autres citoyens ont choisi un seul cadre pour parvenir à leurs fins, soit un parti politique ou un syndicat. Ce qui fait la différence, quand on a un mandat syndical, c’est l’obligation de placer son mandat syndical et sa mission au dessus de son appartenance politique et de faire la part des choses.
C’est ce que je m’efforce de faire chaque jour que Dieu fait.
Je souhaite vivement que les propositions que je viens de faire au nom de notre centrale relancent le débat fructueux sur l’unité et le renforcement du mouvement syndical. Pour qui dit mieux dans ce sens, nous sommes disposés à le rejoindre dans ses positions et à les défendre de façon hardie.
Cheikh DIOP SG CNTS/FC
DEBAT SUR LA GESTION DE L’ACTION REVENDICATIVE ET DU PROCESSUS DE REUNIFICATION DU MOUVEMENT SYNDICAL
Un impératif au regard des graves menaces qui pèsent sur l’intégrité sociale du travailleur
« C’est sur la base de notre propre initiative que le mouvement ouvrier s’est réunifié et s’est renforcé, c’est la meilleure preuve de notre indépendance vis-à-vis de nos différentes appartenances politiques, car il n’est nullement interdit à un citoyen fut il un syndicaliste d’avoir des convictions politiques et choisir un cadre pour la réalisation de ses convictions. »
Ces mots sont tirés de conclusion de l’intéressante contribution de Cheikh DIOP, secrétaire général de la CNTS/FC, parue dans la presse il y’a quelques jours, sur la gestion de l’action revendicative et du processus de réunification du mouvement syndical sénégalais. Ils campent parfaitement la posture qui doit être celle du syndicaliste engagé résolument dans la défense des intérêts des travailleurs, au-delà des considérations de toute autre nature ou d’une quelconque affiliation à un groupe de pression ou, osons le dire, à une formation politique.
En abordant la question sous un angle qui n’exclut pas, loin s’en faut, un certain regard inquisiteur sur la supposée prégnance des états-majors politiques dans les décisions formulées ou mises en avant, lors de certains conflits avec l’Etat ou les organisations patronales, il nous semble en effet juste de clarifier ces rapports, au préalable, pour éviter des interprétations ou des allusions inopportunes.
Quand il s’agit de lutter pour des droits intangibles comme celui d’assurer à l’employé de meilleures conditions de travail et d’existence dans un cadre sain et propice au mieux-être, seuls une parfaite convergence de vues, et des objectifs clairement définis, en dehors de toute considération partisane, peuvent permettre de parvenir aux résultats escomptés. Pour le bénéfice de tous.
Avec l'émiettement du syndicalisme constaté, fort justement, par le SG de la CNTS /FC, il se pose donc le débat sur l'urgence d’un rassemblement, pour dit-il « l’émergence d’un leadership issu de notre unité ». Ce constat est réel et pertinent. Faut-il le rappeler, il s’est posé en France, il y a quelques années, pratiquement dans les mêmes conditions. Nous ne ferons pas l’économie d’un petit rappel historique pour analyser la situation que nous vivons à l’heure actuelle. Chez Sarkozy comme ici, les mêmes causes ont produit les mêmes effets. Jugez-en vous-même !
Après l'élection de François Mitterrand, en 1981, la désunion était totale dans le mouvement syndical français. Les principales centrales évoluaient chacune selon ses convictions. La CGT (confédération générale des travailleurs) demeurait toujours la seule force de proposition et d'entraînement des luttes, alors que la CFDT (Confédération française démocratique du travail) prônait le "réalisme social", FO (Forces ouvrières) "l'indépendance", et la CGC (Confédération générale des cadres) "le corporatisme".
En face de ces mastodontes, on trouve le Groupe des 10 constitué de syndicats autonomes. A partir de 1986, la CFDT tentera une recomposition syndicale avec la FEN, qui elle-même cherchait à mettre en place un axe réformiste avec FO et la FGAF. En 1991, les accords CFDT - FEN ne rallient pas FO, la CGC ni la CFTC. Certaines composantes du groupe des 10 rejoignent la FEN en 1992. Le seul objectif apparent de ces différentes recompositions "ratées" étant la marginalisation de la CGT. Avec l’éclatement de la FEN en 1992, on assistera à la création de la FSU (Fédération Nationale Unitaire).
En 1993, malgré la constitution de l'UNSA à partir des syndicats demeurés à la FEN, la FGAF, la FMC, la FGSOA et la FAT, la CGT poursuivit son travail unitaire. Même si en 1995, FO, SUD, FSU et des militants CFDT se mobilisent avec la CGT contre les projets du gouvernement français remettant en cause les retraites, l'éparpillement se poursuit. L'UNSA, reconnue représentative, et le groupe des 10 tentent de se structurer. FO et CFDT connaissent des divergences internes importantes. C’est dans ce contexte là que la CGT a lancé l'idée du "syndicalisme rassemblé".
Certes, le Sénégal n’est pas la France, et l’environnement des centrales syndicales comme les stratégies de lutte différent, comme également les ressources et les moyens de pression mis en avant pour représenter dignement la classe ouvrière, il n’en demeure pas moins que les mêmes facteurs qui ont été à la base de la dispersion des forces syndicales portent les mêmes stigmates.
Là-bas comme sous nos cieux soumis à la tyrannie des injonctions des bailleurs de fonds très peu soucieux du fait social, le combat reste le même : c’est celui de la lutte pour davantage d’acquis sociaux pour ceux qui amènent la richesse, au prix d’un abandon de soi et d’un engagement total. La révision annoncée, puis démentie en haut lieu, des articles L 42 et L 47 du code du travail, relatifs à la limitation des contrats à durée déterminée et à l’indemnisation de fin de CDD à titre de complément de salaire, en constitue le meilleur exemple.
Face à ce genre de menaces, les centrales syndicales doivent assumer pleinement leur rôle de sentinelle et de veille, Cheikh Diop l’a relevé, mais dans une véritable unité d’action. "Aujourd'hui, nous dit Evelyne Perrin, alors que le salariat est plus hégémonique que jamais parmi les actifs, et bien que les statuts précaires d'emploi soient encore minoritaire en termes de stocks, l'insécurité et l'instabilité de l'emploi se généralisent. Les CDD et les emplois en intérim deviennent la norme d'entrée sur le marché du travail, débouchant de plus en plus difficilement sur l'emploi stable. Parallèlement, la faiblesse et la division syndicales sont sans précédent et fragilisent la défense des travailleurs..." (*)
Il s’agit donc, à mon humble avis, dans le sillage des pistes ouvertes par le syndicaliste Cheikh Diop dont l’engagement pour l’unité syndicale ne souffre d’aucune forme de contestation, d’explorer, à défaut de trouver rapidement les voies de « retrouvailles consensuelles » de toutes les centrales syndicales autour d’un projet commun, d’opter pour soit, l’option de « syndicalisme rassemblé » ou soit celle de « syndicalisme réuni ».
En attendant le grand Soir qui décrétera, enfin, l’avènement du « syndicalisme unifié », qui consacrera aussi, du coup, la disparition des forces éparpillées au bon vouloir et à la merci d’un patronat jaloux de ses prérogatives et décidé à imposer un rapport de forces toujours à son avantage.
Cette initiative donc du SG de la CNTS/FC d’engager le débat autour du processus de réunification du mouvement syndical intervient au moment opportun. La récente mobilisation des travailleurs, en ordres dispersés, à l’occasion du 1er mai dernier ne traduit pas, en réalité, le besoin et la nécessité d’aller rapidement vers l’unité d’action syndicale pour une prise en compte efficiente des revendications.
Mais, il faudra sans doute, au préalable, répondre à certaines interpellations sur cette unité syndicale. Est-elle opportune ? Sera-t-elle efficace ? Avant d'en débattre, ne faut-il pas s'interroger sur le principe même ?
L'unité syndicale ne peut se concevoir en dehors d'une rupture définitive et clairement formulée avec les appareils politiques et/ou syndicaux qui, de tout temps, ont colonisé et en partie dénaturé, dès le départ, le sens même des luttes menées par les centrales originelles, comme c’est le cas de la CGT en France ou de la CNTS au Sénégal, à l’époque de la « participation responsable ». L'unité syndicale doit exprimer l'unité spontanée de la classe ouvrière. Ainsi, l’adhésion syndicale ne doit donc dépendre ni d'une doctrine ni d'un programme, mais seulement de la situation réelle des travailleurs au sein de l’entreprise et de la volonté de ces travailleurs de défendre leurs intérêts par leur propre mobilisation.
L’unité syndicale, le levier déterminant du rapport de forces
Au Sénégal, il arrive parfois que les centrales syndicales mènent ensemble des actions face au renchérissement du coût de la vie qui a déjà mobilisé plusieurs milliers de travailleurs. Mais, en butte aux mêmes travers, l’unité syndicale qui est souvent de façade ne peut empêcher un essoufflement de la dynamique que les centrales et syndicats regroupés selon les affinités ont construite, souvent dans la douleur et le renoncement à certains principes.
On compte un grand nombre de syndicats et de centrales syndicales intervenant sur le terrain interprofessionnel. Toutefois, force est de reconnaître que l’audience des syndicats dépasse largement la réalité de leurs forces organisées. Dans ce contexte là, l’unité s’impose comme un levier déterminant dans la construction du rapport de forces. En France, depuis 2003, date où la défection de la CFDT a irrémédiablement brisé l’élan du mouvement contre la réforme des retraites, l’unité est devenue un sujet de débat permanent au sein du mouvement syndical. Nous l’avons déjà évoqué. La CGT a mis en avant la notion de « syndicalisme rassemblé », faisant de la question unitaire une priorité en toutes circonstances, quand la CFDT théorisait un fonctionnement au coup par coup, en fonction d’objectifs.
Mais en France comme au Sénégal, l’unité syndicale se constitue toujours autour d’un mot d’ordre unique, défensif. Une fois le but atteint, l’attelage de circonstance se disloque. Il en est ainsi du mouvement victorieux, en 2006, contre le contrat dit de première embauche, en France, conjonction d’une puissante mobilisation de la jeunesse et d’une unité syndicale solide, qui ne survécut pas à la lutte menée et gagnée contre le contrat précaire.
Pourtant, les raisons de parachever l’unité syndicale et d’initier une gestion concertée des revendications s’imposent à tous. Les syndicats ont la même analyse de l’évolution actuelle : la crise économique va engendrer une grave crise sociale dont les travailleurs vont faire les frais, alors qu’ils ne sont en rien responsables de la situation. Face à l’ampleur du désastre qui s’annonce, la capacité à agir de concert est mise à l’épreuve. Seul le ferment unitaire mobilise.
Certains peuvent d’ailleurs penser que l’unité d’action peut être, parfois, contre-productive, alors que d’autres franchissent le pas, et ce quelle que soit leur appartenance syndicale. Cependant, le débat se pose moins en termes de formes d’action qu’autour d’une stratégie à construire pour une véritable unité syndicale.
Mais le débat que pose le SG de la CNTS/FC est d’actualité et ne doit pas être esquivé. Il revient à tous les acteurs du mouvement syndical de s’y impliquer, en laissant de côté les querelles de préséance et les considérations politiques. L’unité syndicale requiert un engagement résolu et sans calcul.
Par Karim DIAKHATE
Directeur des Rédactions
La Dépêche Diplomatique Afrique
karimdiakhate@yahoo.fr
(*) Evelyne Perrin - Nouvelles luttes de classes - 2006, page 133
Auteur: Karim DIAKHATE