Inondations dans la banlieue
Inondations dans la banlieue : Quand l’Etat crée les inondations à la Cité des enseignants
De 2003 à 2008, la presse a souvent fait part des différentes péripéties d’un litige foncier ayant opposé les habitants des cités Enseignants, Hamo 3 et Shs avec des soi-disant promoteurs immobiliers du nom de Bada Thiam et Mor Ndiaye Bata. Pour rappel, ces promoteurs, sortis de nulle part, avaient prétexté qu’une assiette foncière de 2,7 ha leur a été attribuée, en guise de compensation par l’Etat de leurs terrains expropriés pour les besoins de l’édification du Centre de formation sénégalo-japonaise sis aux environs de la Foire de Dakar. C’est ce prétexte très léger et à la limite fallacieux qui a guidé la perturbation et la destruction de tout un écosystème, mis en péril la vie de paisibles et d’honorables citoyens qui ont grandement contribué à l’édification de la Nation sénégalaise en formant plusieurs générations d’intellectuels. Je veux dire, les enseignants qui habitent la cité qui porte le même nom et située dans la Commune d’arrondissement de Golf Sud dans sa partie contiguë au périmètre de reboisement du littoral nord.
Les populations riveraines, en défenseurs ardus de leur environnement et cadre de vie, s’étaient organisées en collectif pour mieux sauvegarder leurs intérêts et pousser l’autorité centrale et locale à leur prêter une oreille attentive. Dans cette optique, elles avaient placé leur combat sous le sceau d’une stratégie ou approche purement légaliste en fondant leur argumentaire sur l’évocation des textes règlementaires et législatifs, codes régissant l’Environnement, l’Habitat et la Gestion des Ressources naturelles. Corrélativement, elles usaient de l’arme du dialogue, de la concertation, de l’information et de la communication avec tous les acteurs concernés de près ou de loin par le litige foncier. A cet effet, un nombre incalculable de correspondances a été adressé au chef de l’Etat, à ses Premiers ministres, à ses ministres en charge de cette question, aux préfet et maire de Guédiawaye, aux chefs de Service et Direction régionale compétents.
Hélas, en dépit de cette volonté d’informer, de dialoguer, de préserver, de sauvegarder afin de pouvoir survivre, les différentes autorités de l’Etat, quel que soit leur niveau sont restées insensibles ou aphones et ont fortifié, encouragé la réalisation du «lotissement Bada Thiam» en le légalisant fortement, mieux, par la délivrance d’un titre foncier. Pis, des gendarmes (pourtant, des fois préposés à la traque des charretiers qui extraient le sable) ont été déployés sur le site du lotissement pour permettre aux bulldozers et camions de décaper, détruire les énormes dunes de sable, de déraciner les souches de filaos. De même, des éléments de la Sûreté urbaine ont été envoyés dans les cités pour conduire, manu-militari, au Commissariat Central de Dakar, comme de vulgaires brigands, les coordonnateurs du collectif qui ont eu à occuper des fonctions essentielles dans ce pays telles que celle d’Inspecteur principal de l’Education chargé de l’Enseignement privé au Sénégal.
Toute cette armada a été mise en place, cette attitude orchestrée par les différents niveaux d’administration rien que pour désavouer, casser la dynamique des populations et faciliter le morcellement de la zone (non aedificandi, conformément aux principes et directives d’aménagement) en 74 parcelles d’habitation.
Résultat, la pluviométrie abondante, avec laquelle Dakar a renoué et qui est partie pour encore des années, si nous nous en référons aux prévisions des climatologues, provoque des inondations monstres et jamais connues d’avant l’implantation du «lotissement Bada Thiam», au niveau de la Cité des Enseignants. Aujourd’hui, si rien n’est fait dans l’urgence, l’avenir des habitants de cette cité dans cette zone est très fortement hypothéqué par les inondations provoquées par la cupidité, le manque de responsabilité, l’incivisme et le cynisme des différents acteurs trempés dans ce projet de lotissement aux antipodes des lois et normes de l’urbanisme dont la quintessence demeure la création des conditions d’un habitat équilibré, sain et sécurisé des personnes.
Dans quelle école d’urbanisme et d’architecture apprend-t-on qu’il faut exécuter un lotissement de 74 parcelles pour déloger 248 logements régulièrement installés ? Alors, à quoi sert un Plan directeur d’urbanisme avec son étude sur les potentialités et contraintes du site sur la base de laquelle le zoning, c’est-à-dire la répartition de l’habitat, des équipements et des infrastructures sur l’espace est effectué ! Ne parlons même pas de l’Etude d’impact environnemental avec son Plan de gestion environnementale et sociale ou des éléments techniques d’un véritable plan de lotissement, etc.
Mamadou DIENG - Villa N° D74 Cité des enseignants Golf Nord / mdieng14@yahoo.fr