Gouvernance inféconde !
SENEWEB:
Nettoyage technique
Souleymane Jules Diop Jeudi 27 Nov 2008
« Ce n’est pas l’expérience qui compte,
c’est le mensonge bien organisé »
Michel TREMBLAY
La Génération du concret fait preuve d’une obscure abnégation, quand elle s’engage dans la provocation. Elle s’acharne sur un accusé, Malick Sonko, en même temps qu’elle chante la promotion d’un repris de Justice, Hassan Bâ. Cet ancien « madamedioufiste » bien connu des milieux judiciaires suisses sera chargé de la « Foire de projets », la nouvelle trouvaille d’Abdoulaye Wade. Mais la famille n’en est pas à sa première provocation en la matière. Le modèle de réussite du Pds, Mbagnick Diop, a fait toutes les grandes prisons de France pour trafic de drogue, avant de finir entrepreneur en chef de la Génération du concret. Quand quelqu’un se livre à un trafic de visas à un niveau aussi élevé, on le livre à la Justice. On ne règle pas ses comptes dans un communiqué. Cette sanction contre le bras droit d’Abdoulaye Baldé est une grossière opération de manipulation. L’avion présidentiel convoie toutes les semaines des immigrants clandestins munis de passeports diplomatiques. Mais il fallait montrer Karim Wade sous les dehors d’un justicier, la dernière étape avant sa béatification électorale. Ses « frères » de la pègre libérale l’appellent déjà « président ». Ils se réunissent comme une bande de mafiosos à table. Quand le Capo passe, ils baissent tous la tête pour ne la relever que quand il est déjà parti. A la différence que les volontés du chef sont tout le temps transcrites et transmises à la nation. Il ne parle pas, il est parlé. Ils ont ainsi ravalé un ami journaliste très talentueux au rang de postier. Son travail se limite à envoyer tous les mois un communiqué aux journaux.
Amath Dansokho va s’en vouloir de s’être fait prendre pour un con. Il y a moins d’un mois, Karim Wade lui jurait, la main sur le cœur, qu’il n’avait pas la moindre ambition, pas même celle qu’on lui prêtait si injustement. Dansokho le croyait « de bonne foi ». Ses propos à peine parvenus aux oreilles des communistes de Khar Yalla, il a viré à cent à l’heure et positionné ses troupes pour les « prochaines échéances ».
C’est pourquoi le président de la République a pris la question d’un journaliste sur le « positionnement » de son fils pour une provocation. C’est une évidence qui saute aux yeux !
Reste à savoir si Abdoulaye Wade n’a pas fait naître chez son fils des ambitions incontrôlables. Il a jusqu’ici organisé la mise à mort de ses fils politiques. Macky Sall et Idrissa Seck ont été les victimes spoliées du pouvoir paternel. Mais c’est leur faux frère Karim Wade qui les a tous assassinés. Peut-être que le temps du parricide est-il arrivé, après tant de fratricides. Le président de « l’Ano-cid » a été le premier à demander, dès le lendemain de la présidentielle, l’ouverture du débat « sur la succession ». Il avait symboliquement tué le père.
Abdou Fall l’a suggéré intelligemment à Sud Quotidien. Un mouvement des femmes sans Aminata Tall et Awa Diop, a-t-il fait savoir, c’est un Pds sans Abdoulaye Wade. Quand on enlève à sa déclaration les éloges de convenance, il en reste un bilan sévère du wadisme. Wade voulait un Pds fort dans lequel la Génération du concret serait incluse. Son fils veut une Génération du concret à laquelle le Pds serait soumis. A défaut de soumettre la machine Pds, Karim Wade en a saboté la mécanique.
C’est donc la Génération du concret qui ira aux prochaines élections locales, ce n’est pas le Pds. Ce sera Hassan Bâ et non Abdou Fall, Innocence Ntap et non Aminata Tall. Pour faire valider le tout, les experts en informatique ne manquent pas. Depuis deux ans maintenant, toutes les mairies hostiles ont été rayées de la carte pour faire la place à des « gécéistes ». Nous avons souvent laissé faire par esprit partisan. Les maires des Parcelles Assainies, de Sangalkam, Thiès et d’autres localités du pays ont été limogés dans l’indifférence générale. Wade et son fils ont partout procédé à des nettoyages techniques qui leur assurent la docilité des élus locaux. Des hommes ont disparu de l’échiquier politique sans raison. Les plus récalcitrants auront dans les semaines à venir l’obligation de se soumettre ou de se démettre.
Faire barrage à ce projet de soumission totale est une urgence majeure. J’ai parfois l’impression que Boucounta Diallo et ses amis des Assises nationales cogitent en attendant que le pouvoir leur tombe du ciel. Je suis d’avis qu’on ne peut pas défendre un projet républicain sans une République. C’est toute l’importance qu’il faut accorder à la dernière sortie de Moustapha Niasse. Ce qui est en jeu, ce n’est pas le modèle de gouvernement. C’est l’existence de la République elle-même. Ce n’est pas ce qui fait que nous sommes divisés, c’est ce qui fait que nous sommes ensemble. Cette préoccupation transcende les partis. L’opposition ne peut pas réussir ce sauvetage sans l’unité qui lui fait défaut. C’est pourquoi, en plus d’en appeler à la République, Moustapha Niasse doit en appeler à l’unité de l’opposition.
Notre architecture institutionnelle rend le pouvoir d’Abdoulaye Wade monarchique. Mais c’est son âge qui le rend caricatural. Toute la gravité de la situation est là. Un homme qui n’a plus aucun contrôle sur ses nerfs n’a plus aucun contrôle sur son pouvoir. Il est passé de l’illusion d’être tout à la crainte de n’être plus rien. Il s’épanchait sur tout, il s’emporte maintenant pour rien. Une bande d’ambitieux conduits par Karim Wade profite de cet état de démence étatique. Ils peuvent un jour mettre le chef de l’Etat sous Prozac et prendre les commandes du pays.
SJD
Auteur: Souleymane Jules Diop
L'Office : Jeudi 27 Nov 2008
POUR MIEUX LUTTER CONTRE LE CHÔMAGE ET LA PAUVRETE : Le mouvement des sans emploi demande la suppression du ministère de la jeunesse
Le mouvement national des sans emploi du Sénégal, porté sur les fonts baptismaux en 2006, va vers une journée régionale le week-end prochain à Thiès. Crosse de masse, concert, conférences, tout y sera pour sensibiliser qui de droit sur le chômage des jeunes. D’ores et déjà, le mouvement a demandé la suppression pure et simple du ministère de la jeunesse qui a jusqu’ici failli à sa mission.
Le mouvement national des sans emploi du Sénégal, qui a aujourd’hui une reconnaissance juridique, a été créé en 2006 par la génération de 1988. Il s’agit de jeunes nés en 1988, année à laquelle les premiers actes qui, ont conduit à l’alternance politique au Sénégal ont été posés. L’objectif du mouvement est de lutter contre la pauvreté et le chômage des jeunes à travers des programmes spéciaux dans le domaine de l’assainissement, l’agriculture, l’environnement, la sécurité, la santé, etc. Mais, selon Massamba Seck dit Seck Mbao, président fondateur du mouvement, la véritable prise en charge du chômage des jeunes et de la pauvreté passe par la suppression pure et simple du ministère de la jeunesse qui n’a pas sa raison d’être. A l’en croire, c’est un département ministériel qui avait imprimé ses marques sous le régime socialiste mais depuis l’avènement de l’alternance, il semble avoir perdu ses repères. En lieu et place, note-t-il, il faut créer un ministère de l’emploi des jeunes. Il ajoute que la suppression du ministère de la jeunesse entraînera la dissolution de l’agence nationale de l’emploi des jeunes (ANEJ) et le Fonds national de promotion de la jeunesse (FNPJ) et tout leur budget pourrait être utilisé par le nouveau ministère pour s’investir carrément dans l’emploi des jeunes. En tout cas, déclare Massamba Seck, le mouvement qui est actuellement crédité de 1664 membres issus de 11 régions, s’intéressera également au pouvoir local lors des échéances de 2009. Le moment venu, il choisira le meilleur candidat pour le soutenir publiquement et le seul critère sera les dispositions montrées pour abréger la souffrance des jeunes sans emploi. Lors des prochaines législatives également, dit-il, le mouvement ne restera pas les bras croisés car il entend apporter son soutien total à la liste capable de défendre l’intérêt des sans emploi à l’assemblée nationale. La journée régionale du samedi 29 novembre sera le point de départ d’activités qui mèneront vers la création d’un centre africain de formation des sans emploi. Elle sera lancée devant l’hôtel de ville de Thiès à travers un cross de masse qui sera couru par trois groupes différents. D’abord, les autorités et les anciennes gloires seront sur la ligne de départ, suivis ensuite par les femmes qui feront une marche et en troisième position ce sera le départ des militaires de la zone 7, des policiers, des gendarmes, des sapeurs pompiers. La journée se prolongera par des séries de sketches sur le thème « il n’y a pas de sot métier ». Il s’y ajoute la projection d’un film sur les emplois créés par la GOANA et un concert public avec Omar Pène et le super Diamono new look. Selon Massamba Seck, le seul interlocuteur du mouvement sur le plan des autorités de l’Etat c’est Karim Wade et même si Wade voulait le recevoir, il refuserait. Sur le pourquoi d’une telle attitude, le président du mouvement répond que c’est une affaire de génération et les vieux ne peuvent rien apporter aux jeunes.
Auteur: Kader KANE
LEQUOTIDIEN:
Pour le Sénégal, j’accuse le Sénégalais !
27-11-2008 Partout dans notre cher pays, le Sénégal, le Sénégalais se plaint d’une pléthore de maux auxquels il est journellement confronté dans n’importe quel champ social. Et pourtant, le Sénégalais ne souffre de rien d’autre qu’exclusivement du «syndrome du Sénégalais».
Pour cette considération, l’anathème devrait être singulièrement jeté à l’homosenegalencis, du point de vue de ses manières de pensée, d’agir, de sentir, de se construire, de s’affirmer, de diriger, de se réaliser et la liste n’est pas exhaustive.
Dans cette perspective, j’accuse le Sénégalais de mal socialiser (inculcation et intériorisation des modèles socioculturels) ses enfants, en n’insistant presque plus sur les valeurs cardinales qui régissaient notre société et de tronquer ainsi son «entrée dans toute relation sociale ultérieure».
Je l’accuse d’avoir accepté, partout dans ce pays, l’institutionnalisation du culte de la médiocrité et de complètement reléguer à la touche les principes de la méritocratie (right men at the right place).
C’est en réalité ce même Sénégalais qui dénonce, fustige ou critique, de manière acerbe, certaines pratiques qui sont devenues lois dans ce pays, qui aurait reproduit les mêmes actes dans pareilles circonstances.
J’accuse le Sénégalais de son indifférence total à la solidarité, au partage, principales solutions pour amortir le poids de la crise mondiale sur la société. En effet, combien sont les Sénégalais qui flirtent avec la misère au moment ou des milliards d’Euros ou de Dollars de leurs compatriotes dorment aisément dans des banques étrangères ?
Je l’accuse pour son goût du gaspillage qui est, en fait, une sorte d’expression d’une «revanche sociale» longtemps mûrie et rendue à la société pour se venger de son propre passé malheureux.
J’accuse le Sénégalais pour son manque de constance dans tous ses choix (koumou dogal toubay, nguemb lankoy xar), la transhumance, les voltes-face et les trahisons perpétuelles dans le champ politique sénégalais en sont des preuves patentes.
J’accuse le Sénégalais pour son envie effrénée de vouloir escroquer et exploiter son prochain chaque fois que l’occasion se présente. D’ailleurs, partout dans les pays voisins, le ternissant sobriquet d’escroc nous est attribué.
J’accuse le Sénégalais pour sa fausseté dans les relations et sa mesquinerie dans les actes.
Son incapacité à dépasser les événements le maintient longtemps à terre et l’empêche de se relever très vite après une chute. Les nombreuses débâcles de l’Equipe nationale de football en sont des illustrations. Sa cohabitation avec les rumeurs lui fait perdre beaucoup de temps et fait qu’il se fourvoie souvent sur beaucoup de questions. Se tromper est un fait qu’il accepte difficilement et laisse apparaître ainsi, un fort handicap du point de vue de son honnêteté intellectuelle.
J’accuse le Sénégalais pour son plaisir ignominieux á vouloir toujours rappeler le passé peu glorieux de personnes qui ont réussi. Ses limites à garder un secret ne sont plus à démontrer ; sa passion de se mêler de choses qui ne le regardent pas est nature chez lui. La notion de ponctualité est un vilain mot qu’il n’a jamais su intériorisé et son intérêt personnel passe toujours avant celui du collectif.
J’accuse le Sénégalais pour son manque d’objectivité dans ses jugements alors que celle-ci doit nous guider en tout et partout. Son allergie à la critique est connue par tous, tandis que l’auto critique est absente de son vocabulaire. Je désigne le Sénégalais coupable pour son silence complice (les universitaires surtout) face à certaines situations difficiles que traverse son peuple et qui nécessitent de dire «non». Je l’accuse pour sa tendance à appliquer partout, où il est promu responsable, une autorité injuste (associations, partis politiques, Ong, université, presse etc.). Le copinage est une exigence respectée dans ses décisions comme en témoignent les recrutements, les nominations et l’admissibilité à certains concours.
J’accuse le Sénégalais pour son anticonformisme aux normes et règles ; chose qui illustre son manque de citoyenneté, les queues et les feux sont respectés par peu de Sénégalais.
De ce point de vue, il urge de comprendre que le problème du Sénégal n’est pas une question de gestion étatique ou gouvernementale comme le crient beaucoup de compatriotes sur tous les toits, mais plutôt «une question de Sénégalais» qui risque de se reproduire et se perpétuer au niveau de toutes les générations à venir.
Même si tout principe qui se respecte souffre d’une exception avérée, le Sénégalais gagnerait à comprendre que le Sénégal ne sautera même pas par dessus son ombre si lui ne change pas de comportement et accepte de voir la réalité en face, car le dirigeant de demain, c’est le Sénégalais d’aujourd’hui.
Mouhidine Abdoukhadre
SANOKO
Chercheur en Sociologie
Ugb - Saint-Louis
SUD QUOTIDIEN:
Un pas de plus ou de trop dans la foulée titubante de la cadence démocratique ?
par , jeudi 27 novembre 2008
Avec la pluralisation de la vie politique, la réinvention des formes de régulation du pouvoir politique, la démultiplication des partis politiques et une alternance politique en 2000, une génération découvrait qu’un seuil acceptable, semblait avoir été atteint dans cet itinéraire politique aux prometteuses perspectives démocratiques. Erreur.
A la faveur de l’alternance politique de l’an 2000, de l’enthousiasme et de l’engouement ainsi suscités, une autre génération de Sénégalais pensaient raisonnablement et sans candeur en avoir fini avec l’établissement des principes, des garanties, des commodités et modalités pratiques les moins endémiques et pathologiques des figures et configurations de la démocratie sénégalaise la plus représentative qui puisse être. Erreur.
Les cheminements législatifs, les réaménagements électoraux et institutionnels les plus décisifs, intégratifs et les plus transparents, ont mené à des recompositions, innovations, institutions et commissions (ONEL, CENA, Haut Conseil de la République, SENAT, etc.) Loin de s’essouffler, le processus de consolidation démocratique est remise en marche comme si l’enjeu se situait plus que jamais à un niveau souvent projeté, bien souvent rejeté, trop souvent avorté, retardant le rêve démocratique et politique suprême d’une nation calme, exprimant sans restriction anticonstitutionnelle, et dans le calme, ses suffrages universels, au cours de scrutins insoupçonnés, incorruptibles et sans restrictions censitaires. Erreur.
On réinvente la composition sociologique de la représentativité, la redéfinition politique de la civilité et de la citoyenneté et la décomposition des objets matériels de l’expression de la volonté et des choix politiques et électoraux passée à un nouveau bricolage mécanique et informatique. L’objectif est de remédier la part de périssable pour mieux conserver le viable, d’oser l’inédit pour mieux asseoir le permanent, de bien situer le constant pour moins appréhender l’inconsistant des traditions participatives, représentatives et légitimatrices. L’enjeu est de fixer de nouvelles responsabilités, d’identifier de nouvelles légitimités, d’inventer d’autres légalités, d’imposer des représentativités, de, promouvoir des matérialités et gouvernementalités du politique. Erreur.
Cette poursuite des efforts démocratiques traduit en théorie une volonté des pouvoirs politiques d’initier des mesures, en vue de conforter la démocratisation des institutions, des structures, notamment à travers des procédures destinées à rassurer la société civile, les citoyens et les électeurs, sans forcément convaincre les partis politiques sur leur pertinence, leur portée et leurs réels respects. Le souci est d’articuler les nécessités politiques aux impératifs démocratiques pour que les principes ne restent pas vains dans leur effectivité. Erreur.
Des divergences d’interprétations et des contradictions apparaissent soulevant des astreintes d’adhésion unanimes au regard de l’esprit qui les caractérise fondamentalement. Ce qui est en cause, c’est dès lors moins leur validité que leur conformité à l’idéal républicain et démocratique recherché. Ces valeurs démocratiques absolues sont imposées sans compromissions ni compromis politiques. Erreur.
De fait, toute une série de ruses politiques (augmentation du mandat présidentiel et réduction du mandat du président de l’Assemblée nationale), de mécanique politique avec une panoplie d’instruments (carte d’électeur numérisée, Sénat), d’arithmétique électorale (vote militaire) et de « discrimination positive » (parité) sont inefficacement proposées pour parfaire ce processus de démocratisation. Erreur.
Même s’ils arguent du fait que ces changements répétitifs ne visent qu’une seule finalité : renforcer sans cesse la démocratie qui est un processus inachevé, on peut légitimement en douter. Plus que jamais notre jeune démocratie fonctionne comme le « coupé décalé » : un pas en avant deux pas en arrière, avec des hommes politiques qui vont à gauche puis à droite. En cela et pour bien d’autres raisons et irrationalités, notre jeune démocratie est une suite d’erreurs jamais rectifiées et surtout de fautes jamais corrigées. Jusqu’à quand pourrons-nous nous payer ce luxe de la passivité ?
Par Ibrahima Silla
Enseignant-chercheur en science politique
A l’Université Gaston Berger de Saint-Louis ***
ETAT DES LIEUX DE LA DEMOCRATIE AU SENEGAL : « Reculs, inquiétudes, stagnations »
Je vous propose, avant de présenter l’état de la démocratie dans mon pays, le Sénégal, de passer en revue, rapidement, son évolution récente en Afrique, évolution qui met en exergue deux crises de la démocratie.
La première est une crise formelle parce qu’elle affecte son fondement, c’est-à-dire les normes qui, dans un système démocratique, doivent constituer des quasi-invariants. En effet, une des plus grandes faiblesses de la démocratie sur le continent africain reste encore l’instabilité normative qui se manifeste par des modifications partisanes et politiciennes des normes d’accession, de dévolution et de gestion du pouvoir, notamment de la Constitution et des lois électorales. Ces pratiques anachroniques, destinées à perpétuer les régimes en place, affectent notamment les règles relatives à la limitation du nombre et de la durée du mandat du Président de la République.
Et la situation est loin de s’améliorer si l’on en juge par la récurrence de ces remises en cause d’un consensus national dans nombre de pays africains. Mais il y a encore pire. Le paroxysme de cette forme pathologique, c’est la tentation monarchique, dont l’illustration la plus éclairante se retrouve dans les subterfuges utilisés par certains Chefs d’Etat africains pour installer leur enfant-héritier dans l’espace public et politique en vue de préparer ou d’organiser « électoralement » une dévolution successorale du pouvoir à leur descendance.
Souvenez-vous que pour le Togo, le Président du Sénégal, Monsieur Abdoulaye Wade, s’était ouvertement et publiquement désolé de la manière dont Faure Eyadéma avait, dans un premier temps, procédé pour s’emparer du pouvoir après le décès de son père Gnassimbé. C’était lors d’une interview sur la radio RFI. Et de suggérer à Faure Eyadéma d’organiser des élections « démocratiques » (démocratiques entre guillemets) qu’il était sûr de gagner dans la mesure où : JE CITE « vous avez l’armée, l’argent, la majorité parlementaire et le parti » FIN DE CITATION. On sait ce qu’il est advenu de cette suggestion : les images d’un soldat s’emparant de force d’une urne et l’exfiltrant du lieu de vote ont fait le tour du monde et Faure Eyadéma a succédé à son père.
La deuxième crise caractéristique de l’évolution de la démocratie en Afrique est une crise fonctionnelle qu’illustre parfaitement la panne chronique des processus électoraux, pour ne pas dire la faillite du système électoral en Afrique pour cause d’un double déficit de fiabilité et de crédibilité.
Les avancées relatives notées dans certains pays africains comme le Cap-Vert, le Mali, le Ghana ou le Bénin constituent l’arbre qui cache la forêt des irrégularités et des fraudes qui émaillent les processus électoraux.
Dans bien des pays africains, l’organisation d’élections dont l’issue est déterminée à l’avance, conforte la formule du Professeur Albert BOURGI qui les assimile à de « simples formalités administratives ». En effet, les élections ne sont généralement qu’une mascarade planifiée depuis la confection du fichier électoral jusqu’à la proclamation officielle des résultats du scrutin (j’y reviendrais avec le cas de l’élection présidentielle du 25 février 2007 au Sénégal) et qu’un coup de force validé par le pouvoir judiciaire et imposé par les forces de l’ordre au service du pouvoir en place (les cas du Togo et du Nigéria restent encore dans nos mémoires). Les difficultés semblent empirer si on en juge par la gravité des crises politiques liées à l’organisation de scrutins récents (crises politiques au Kenya et au Zimbabwé).
Il y a lieu de relever de façon fort paradoxale que la question de la crédibilité des élections se pose encore en Afrique, en dépit de l’institution de structures chargées de la gestion des opérations électorales. Créées dans des contextes particuliers pour pallier la partialité des structures gouvernementales en charge de l’organisation des élections, les commissions électorales nationales, indépendantes ou autonomes, ont vu leurs missions dévoyées, à telle enseigne qu’elles sont maintenant soupçonnées de donner une caution aux mascarades électorales.
Parmi les critiques auxquelles ces commissions n’échappent plus, figurent celles visant leur réelle neutralité, l’étendue de leurs compétences et leur capacité à les exercer dans le respect de l’intérêt général.
Considérées comme une voie privilégiée de résolution des crises et d’expression du pluralisme, les élections se voient attribuer, aujourd’hui et par un curieux retournement, la responsabilité des ruptures de consensus, voire des tensions et conflits qui affectent la stabilité politique et sociale en Afrique.
Au total, et pour conclure sur ce point, je pense pouvoir dresser la cartographie suivante pour illustrer l’état de la démocratie en Afrique, un peu plus de quinze ans après le début de la transition démocratique :
1. Les rares pays ayant connu des avancées démocratiques et qui les préservent.
2. Les pays ayant enregistré des acquis démocratiques et qui ont même connu une alternance politique pacifique, mais où les nouveaux gouvernants remettent en cause certaines avancées démocratiques fondamentales au risque de faire régresser le modèle.
3. Les démocraties de façade où les élections et un relatif desserrement de l’autoritarisme n’ont été qu’un vernis destiné à la consommation de la communauté internationale.
4. Les pays où les processus démocratiques ont été interrompus par des coups d’État.
5. Et enfin, les pays où tout processus démocratique est impossible à l’heure actuelle à cause de conflits ou parce que l’État y est déliquescent et ne contrôle qu’une partie de son territoire.
Je m’en vais maintenant aborder la situation de la démocratie dans mon pays, parce que malheureusement le Sénégal se trouve dans le lot des Etats qui connaissent un recul de la démocratie. Je pense pouvoir même soutenir, sans risque d’être contredit par les faits, que le Sénégal fait partie des pays qui, en Afrique, auront fait le plus grand bond en arrière en matière de gouvernance démocratique car, n’oubliez pas qu’au Sénégal, les élections sont une tradition ancrée depuis plus d’un siècle, avec des citoyens qui, pendant la période coloniale, élisaient leurs représentants aux Assemblées métropolitaines. Cette tradition démocratique s’est perpétuée d’abord sous le Président Léopold Sédar SENGHOR avec la loi sur les courants de pensée de 1976, autorisant un multipartisme maîtrisé et s’est ensuite renforcée sous le Président Abdou DIOUF avec le multipartisme intégral en 1981, associé à l’organisation régulière des élections et à la libre expression des libertés et de tous les pluralismes (politique, syndical, associatif, médiatique).
C’est ce legs inestimable que des générations successives ont construit avec patience et intelligence que le régime actuel d’Abdoulaye WADE, pourtant issu d’une alternance pacifique, citée comme exemplaire dans le monde, est en passe de déconstruire en s’attaquant un à un aux piliers de la démocratie sénégalaise. Permettez-moi, pour illustrer mon propos, de m’arrêter sur le déroulement de l’élection présidentielle du 25 février 2007, au Sénégal.
Force est de constater que la conduite partisane et unilatérale de cette élection et les résultats auxquels elle a abouti constituent des remises en cause flagrantes des acquis du processus électoral du Sénégal fondé sur la concertation, le consensus et la transparence, depuis le Code électoral consensuel de 1992.
Comme vous le savez sans doute, le scrutin présidentiel s’est déroulé le 25 février 2007 dans le calme et a connu un fort taux de participation de 70%, ce qui a amené les observateurs nationaux et étrangers à le qualifier de libre, transparente et régulière, « malgré quelques disfonctionnements constatés sur le terrain », selon leurs propres termes.
A l’issue du premier tour de ce scrutin, le président sortant, Abdoulaye Wade, qui faisait face à quinze candidats dont celui du Parti socialiste, a été proclamé par le Conseil constitutionnel élu avec 55,90% des suffrages, devant une opinion publique éberluée par l’absence d’un second tour qui ne faisait l’ombre d’aucun doute.
En vérité, ce résultat consacre une stratégie de manipulations et de fraudes à grande échelle, mûrement réfléchie, programmée longtemps à l’avance et « proprement » exécutée. Les éléments qui l’attestent, se situent en amont et en aval du processus électoral.
D’abord, dans la période pré électorale, et contrairement à la tradition établie d’une gestion consensuelle, le pouvoir d’Abdoulaye Wade, à travers le bras séculier du Ministère de l’Intérieur, s’est livré à une conduite unilatérale et autoritaire d’un processus électoral qui n’avait d’autre objectif que de réélire le président sortant.
J’en veux pour preuve la modification unilatérale et intempestive de la Constitution et du code électoral, à quelques jours du début de la campagne électorale, à des fins de conservation du pouvoir (suppression du quart bloquant), en violation d’un engagement international du Sénégal (protocole de la CEDEAO). J’en veux encore pour preuve la violation du principe de l’égalité des citoyens devant la scrutin à l’occasion de l’inscription sur les listes électorales et la rétention volontaire d’une part considérable de cartes d’électeurs, empêchant ainsi des centaines de milliers de sénégalais, à l’intérieur comme à l’étranger, d’exercer leurs droits de vote, pendant que ces mêmes cartes ont été distribuées à des partisans du Président Abdoulaye Wade qui ont voté avec.
Mais ce qui aura surtout marqué cette élection, c’est la manipulation du fichier électoral, qui installe la fraude au centre du processus électoral. Au lieu d’être un document national authentique dont la fiabilité ne devrait souffrir l’ombre d’un doute, le fichier électoral suscite des interrogations jusqu’ici sans réponse :
ensuite sur le nombre d’inscrits sur les listes électorales puisqu’en violation de la Loi, le Ministère de l’Intérieur n’a jamais publié, dans les délais prescrits, la liste des électeurs inscrits par bureaux de vote.
Le scrutin, quant à lui, a été émaillé de lacunes et de dysfonctionnements notoires dans l’organisation du vote prolongé dans certaines localités jusqu’à une heure non conforme au droit électoral et de pratiques sophistiquées de corruption électorale, ainsi que de votes multiples avec des mouvements remarquables d’électeurs à travers différents lieux de vote du territoire national, sans compter avec l’absence d’identification de l’électeur et d’authentification de son vote liée notamment au caractère délébile de l’encre constaté que le candidat du Parti socialiste a fait constaté par exploit d’huissier. Les dysfonctionnements, irrégularités et fraudes ont été nombreux et multiformes. Il n’est pas possible de les exposer tous dans cette communication. Pour plus de détails, j’annexe à la présente le mémorandum élaboré par des partis d’opposition du Sénégal, dont le Parti socialiste, à l’issue de l’élection présidentielle du 25 février 2007.
Chers camarades, Chers amis,
Je me suis longuement attardé sur l’élection présidentielle de 2007 pour indiquer que ce système, où les standards minimaux de fiabilité et de crédibilité des élections font l’objet d’une violation systématique, que ce système où la fraude n’est pas à la marge, mais se situe au cœur du processus électoral, ce système ne peut pas assurer la transparence des élections et la sincérité des résultats qui en sont issus.
C’est la raison pour laquelle l’opposition dite significative dont fait partie le Parti socialiste avait proposé au régime en place l’ouverture d’un dialogue franc et sincère pour une évaluation du scrutin présidentiel du 25 février 2007. En appelant à ce dialogue, l’opposition cherchait à faire organiser dans la transparence et au moyen d’un processus électoral fiable et crédible, maîtrisé et sécurisé, les élections législatives annoncées pour le 3 juin 2007.
Cet appel se heurta au refus du Président proclamé qui opposa une fin de non recevoir à toute forme de dialogue avec l’opposition en vue de la tenue d’élections législatives réellement libres et transparentes. Ce refus a été à la base de la décision de boycott de la part de l’opposition significative qui représente, selon les résultats largement sous-estimés, proclamés par le Conseil constitutionnel, près de 44% du corps électoral.
Aujourd’hui, tous les observateurs peuvent constater que l’opposition avait raison de contester la véracité des chiffres proclamés officiellement en faveur du président sortant. Il a malheureusement fallu pousser l’opposition significative au boycott des élections législatives pour arriver à ce résultat. Trois mois seulement après l’élection présidentielle qui a connu, répétons-le, un fort taux de participation, les Sénégalais, répondant au mot d’ordre de l’opposition, ont massivement boycotté les élections législatives.
Seulement 34,75% de l’électorat, selon les chiffres officiels, mais moins de 20% selon tous les observateurs, se sont rendus aux urnes. Même en se fondant sur les chiffres officiels, le nombre d’électeurs du camp présidentiel a chuté de quelques 800.000 voix en trois mois, nonobstant l’implication personnelle du Président Abdoulaye Wade qui venait juste d’être réélu, dans la campagne électorale pour les législatives et son appel pressant à lui donner une très large majorité à l’Assemblée nationale. Le sacrifice de l’opposition de Juin 2007 venait de porter un contredit imparable à la mascarade électorale de Février 2007 et créer dans le camp des vainqueurs autoproclamés un malaise à ce jour non dissipé.
Je voudrais préciser que l’opposition n’a jamais refusé un dialogue soutenu par des arguments raisonnables qui aurait pu éviter le boycott des élections législatives du 3 juin 2007. Alors, l’Assemblée nationale aurait été réellement représentative du peuple sénégalais, différente de celle que nous connaissons aujourd’hui qui, telle qu’elle est issue des urnes, ne représente qu’une minorité du peuple.
Au total, l’évaluation du système électoral révèle une somme de paradoxes et d’irrégularités qui confirment que l’élection constitue encore une équation à résoudre pour la démocratie sénégalaise.
Mes chers camarades, Chers amis,
Lorsque nous interrogeons le fonctionnement de l’Etat, nous ne pouvons manquer d’être frappés par le discrédit qui frappe les institutions, cet autre péril qui affecte le système démocratique sénégalais. En vérité, il s’agit du péril le plus pernicieux auquel notre pays est confronté depuis son indépendance parce qu’il s’attaque aux outils de régulation de la démocratie. Le régime de Abdoulaye Wade a tellement caricaturé nos institutions, il les a tellement vidées de leur substance que des institutions comme l’Assemblée Nationale et le Sénat, travestissent le concept de démocratie. En effet, l’Assemblée nationale, avec une majorité aussi factice qu’illégitime, et le Sénat, dont les 65 membres sur les 100 qu’il compte, nommés par décret du Président de la République, s’illustrent régulièrement dans l’infamie en adoptant des lois scélérates, telles la loi amnistiant les auteurs d’assassinats, de crimes et délits politiques, les différentes lois portant report des élections, ainsi que les nombreuses lois portant modification de la Constitution.
Songez qu’au Sénégal le pouvoir d’Abdoulaye Wade a reporté cinq fois des dates constitutionnelles et légales d’élections : deux reports d’élections législatives par la prorogation, par les députés eux-mêmes, de leur propre mandat, phénomène jusqu’alors inconnu au Sénégal où de 1960 à 2000 les élections nationales se tiennent à date échue, invariablement ; trois reports d’élections locales et ce sont les conseillers locaux dont le mandat venait d’être prorogé qui ont élu les 35 autres sénateurs qui sont venus s’ajouter aux 65 nommés par le Président de la République.
Songez encore que le pouvoir d’Abdoulaye Wade, a unilatéralement modifié, en huit ans, 14 fois la Constitution, qui pour faire passer la durée du mandat du Président de la République de 5 à 7 ans, qui pour supprimer le Sénat et le recréer plus tard, qui pour modifier l’organisation judiciaire en rétablissant la Cour Suprême à la place du Conseil Constitutionnel, du Conseil d’Etat et de la Cour de Cassation.
Les collectivités locales, consacrées pourtant comme des espaces de démocratie, ne sont pas, non plus, épargnées par la funeste entreprise de démantèlement des acquis démocratiques. Plusieurs conseils municipaux et ruraux dans lesquels l’opposition est majoritaire, ont été dissouts, sans motif valable en violation des dispositions pertinentes du Code des Collectivités Locales.
Je sais que vous devez vous dire que devant une telle situation, le pouvoir judiciaire reste le dernier rempart pour stopper les dérives du parti au pouvoir et pour sauver la démocratie. Je dois, à mon grand regret, reprendre cette perception largement répandue dans l’opinion sénégalaise d’une justice aux ordres, ou tout au moins, timorée. Certains magistrats, en dépit du combat héroïque que mènent d’autres de leurs collègues pour l’indépendance de la justice, se révèlent être les complices actifs des forfaitures du régime en refusant de dire le droit lorsqu’ils sont saisis par les citoyens et par les partis politiques. Les recours en inconstitutionnalité de l’opposition devant le Conseil constitutionnel sont systématiquement rejetés pour incompétence alors que les recours pour excès de pouvoir contre les décrets de dissolution de certaines collectivités locales attendent, depuis plusieurs mois, d’être traités par le Conseil d’Etat, et ce en dépit des demandes de sursis à exécution fondées sur l’illégalité manifeste des décrets et sur l’urgence. Comble d’ironie, il est arrivé plus d’une fois où le Chef de l’Etat pronostique publiquement le sens des décisions de justice ou dicte des ordres clairs sur le cours des instances judiciaires.
C’est vous dire combien la démocratie sénégalaise est malmenée par l’instrumentalisation éhontée des institutions et par les tripatouillages de la Constitution, transformées pour les premières en gadgets et pour la seconde en brouillon, afin de servir d’instruments aux calculs politiciens d’Abdoulaye Wade.
Chers camarades,
Chers amis,
Je vais conclure en vous dressant rapidement l’état des libertés, pour montrer comment la politique de mise au pas menée par le régime en place a généré et porté un système policier, source de danger pour les droits humains.
Pour tout vous dire, l’état des libertés est assez préoccupant au Sénégal. Les droits humains font l’objet d’atteintes récurrentes, des atteintes qui résultent d’une violence d’Etat retournée contre les citoyens à travers des formes d’abus inacceptables dans un Etat de droit. En effet, il s’est installé, depuis 2000, ce que Abdoulaye Wade lui-même appelle « césarisme démocratique » visant à enfermer les libertés publiques dans un écrin. Le passe temps favori du régime consiste à intimider et à emprisonner les citoyens qui émettent une opinion dissidente de la propagande officielle que nous assènent sans vergogne les médias d’Etat, aux mains du parti au pouvoir.
D’ailleurs, pour qualifier ce système odieux, les journalistes l’ont désigné, avec beaucoup de perspicacité, sous son visage hideux de monstre qui entend instituer une police des idées chargée de traquer et d’écraser toute pensée dissidente.
Le phénomène n’est pas nouveau. Il rythme le quotidien de notre pays depuis l’accession d’Abdoulaye Wade au pouvoir, avec la convocation et l’arrestation d’hommes politiques, de journalistes, de militants de la société civile, d’hommes de culture pour avoir exercé des libertés publiques telles la liberté d’expression et la liberté de manifestation.
Mais il a pris une ampleur nouvelle et atteint son paroxysme avec l’agression surréaliste de deux journalistes dans l’exercice de leur profession par des éléments de la Police, la mise à sac des locaux de deux quotidiens par des nervis recrutés au plus haut niveau de l’appareil d’Etat, ainsi que l’emprisonnement du Directeur de publication d’un quotidien. En vérité, si les journalistes sont persécutés, c’est parce que nous sommes aujourd’hui, en face d’un régime faible dans le cœur des citoyens, mais qui veut faire peur pour se donner l’illusion qu’il maîtrise une situation qui a depuis longtemps échappé à son contrôle. Le pouvoir cherche à installer une pensée unique et c’est en cela qu’une presse responsable et honnête, et dont le seul souci est d’informer, devient gênante pour un régime qui vit de scandales à répétition. Mais ce qui est encore plus grave, c’est cette impunité ambiante que les autorités ne cherchent même plus à nier et exaltent en convoquant la justice privée pour justifier, par exemple, l’agression des deux journalistes. Comme qui croirait que la routine du crime a des vertus purgatoires au final, le régime d’Abdoulaye Wade assure une protection automatique à tous ses proches, employés dans une délinquance étatique organisée qui sert la finalité de son système de violations des droits fondamentaux. Voilà, chers camarades, chers amis, ce qu’est devenue la démocratie au Sénégal depuis que le pouvoir d’Abdoulaye Wade s’y est installé.
J’aurais pu continuer à dépeindre la situation, en vous parlant des menaces de mort dont les leaders d’opinion sont victimes, de la censure dont les écrivains sont l’objet, de ces entrepreneurs et opérateurs économiques écartés des marchés publics pour suspicion de collusion avec l’opposition, … etc. Mais le tableau est déjà sombre de périls qui menacent gravement les piliers de notre système démocratique, et plus grave encore, les fondements de la cohésion nationale et de la paix sociale.
Le seul rayon de soleil sur ce tableau, ce sont les Assises Nationales lancées depuis le 1er Juin 2008 par les patriotes de toutes conditions et de tous bords dans un seul but : sauver le Sénégal et remettre notre pays à l’endroit, pour le bonheur de tous ses enfants.
En effet, il faut savoir que la régression démocratique dans mon pays se conjugue avec une crise structurelle profonde et préjudiciable à tous les secteurs de la vie nationale. Et c’est dans le but de trouver des solutions à cette crise généralisée, que plus de 100 organisations politiques, patronales, syndicales, de la société civile, et associations, parmi les plus représentatives du pays ainsi que des personnalités indépendantes ont engagé cette initiative inédite et mis en œuvre cette expérience novatrice dont le concept, le format et les résultats apporteront des enrichissements indéniables à la scène politique nationale et africaine et à la science politique comparée des pays en développement qui cherchent leur chemine.
Il me semble utile de préciser que les Assises nationales constituent un grand moment d’exercice de la démocratie consensuelle qui, en partant des acquis de notre histoire récente et lointaine et en traitant avec le même respect toutes les forces vives de notre pays, permettra à toutes les composantes de la Nation de s’entendre sur un diagnostic, sur des analyses et sur des solutions efficaces et durables à mettre en œuvre. C’est d’ailleurs pourquoi la méthode participative, intégrant les consultations citoyennes dans toutes les circonscriptions territoriales du pays et le forum Internet pour nos compatriotes de l‘extérieur, en constitue l’élément moteur.
L’objectif de ces Assises, cadre de concertations inclusives, directes et globales, est de remettre à flots, à partir de propositions consensuelles, les fondamentaux institutionnels, démocratiques, éthiques, économiques, sociaux et culturels, afin d’inaugurer une ère nouvelle de gouvernance publique, de démocratie et de stratégies de développement.
Ousmane Tanor DIENG
Vice Président de l’Internationale Socialiste
Président du Comité Afrique de l’Internationale Socialiste
Secrétaire général du Parti Socialiste du Sénégal
WALFADJRI:
Le patronat sénégalais accuse : La Senelec arnaque les consommateurs
La dernière hausse du prix de l’électricité est restée en travers de la gorge des patrons. Regroupés dans le cadre du Cnp, ils fustigent la différence entre le taux annoncé et le taux réel appliqué. Ils ont, par ailleurs, demandé à la Senelec de ne pas se laisser remplacer par les groupes électrogènes.
De plus en plus, les usagers font recours aux groupes électrogènes pour pallier les insuffisances dans la fourniture de l’énergie électrique. Mais, avec le rythme d’acquisition de ce matériel, l'on a tendance à penser que ces groupes se substituent à la Société nationale d'électricité (Senelec). Mais pour le Conseil national du patronat (Cnp), il n'est pas question qu'il en soit ainsi. Dans sa déclaration prononcée avant-hier lors de l'édition 2008 des Assises de l'entreprise, M. Baïdy Agne a opposé un refus catégorique à cet état de fait, tout en dénonçant la cherté de l'électricité. ‘17 % de hausse du tarif annoncé. Plus de 50 % d'augmentation ont été constatés dans les factures d'électricité. Et que dire de la qualité de l'énergie électrique distribuée, si ce n'est qu'il faut refuser que le groupe électrogène ne se substitue pas à la Senelec. Comment imaginer demain que ce groupe de secours soit notre principal fournisseur d'énergie électrique’, a-t-il souligné.
Cependant, il a reconnu les efforts déployés par le gouvernement pour améliorer la qualité du service. Toutefois, constatant la récurrence avec laquelle se pose la problématique de l'énergie, M. Agne est d'avis que celle-ci doit être l'affaire de toute la nation. Aussi a-t-il préconisé l'ouverture d'un débat national pour résoudre cette crise. ‘Si le prix à payer représente une part significative des ressources budgétaires de l'Etat, les Sénégalais apprécieront les sacrifices nécessaires pour la résolution définitive de cette problématique’, a-t-il indiqué. Et de soutenir, avec force, que ‘cela facilitera et renforcera l'action gouvernementale’. Et ce ne sont pas les ressources énergétiques qui manquent pour y arriver : soleil, vent, eau et biomasse. Voilà ce qu'il faut pour régler le problème. Ce qui manque, de l'avis du président du Cnp, c'est la mise en place des instruments financiers de promotion en concertation avec les banques et établissements financiers. L'Etat a certes manifesté sa volonté de défiscaliser des investissements et équipements en énergies renouvelables. Mais pour Baïdy Agne, il doit aller au-delà de ces mesures incitatives.
Ndakhté M. GAYE
Le Sénégal sous Senghor n’est pas le Sénégal sous Wade
M. Taine : ‘Jamais je ne signerai de bonne foi l’abandon total et permanent de moi-même, ce serait contre la conscience et contre l’honneur et ces deux choses-là ne s’aliènent pas. Mon honneur et ma conscience ne doivent pas sortir de mes mains ; j’en suis le seul dépositaire et le gardien ; je ne les remettrais pas même à mon père.’ Il s’avère que les responsables du Pds d’aujourd’hui n’ont besoin que de militants bien dressés, dociles et dépourvus de toute conviction, de toute compétence, si ce n’est celle de la flatterie. Le Pds a perdu de vue le sens de son combat (la liberté, la fraternité, la justice) pour l’avènement d’une société sénégalaise démocratique. Dans un monde qui est traversé par des mutations et des crises extrêmement profondes, au plan économique et social, et au plan institutionnel en ce qui concerne le Sénégal, il faut le dire, accepter et participer à la mise en place d’une monarchie ne doit pas être le rôle des hommes politiques porteurs d’ambitions de leadership dans notre Etat républicain.
Si Macky Sall a accepté d’être l’agneau de sacrifice, c’est uniquement pour le Sénégal, car dans le Pds, on n’acceptait pas sa capacité de formulation de réponses à ces grandes questions. Comme Premier ministre, Macky Sall qui n’ouvre un dossier que quand il en a refermé un autre, n’a pas été cet homme à courir après deux lièvres à la fois. Chef du gouvernement, il a pris le soin de ne pas confondre ses fonctions et n’a jamais agi comme candidat à la direction du parti, encore moins comme candidat à la présidence de la République, alors qu’il avait la confiance du secrétaire général national et qu’il avait les affaires du Sénégal en charge. Même s’il y a songé, il n’est jamais intervenu dans ces rivalités internes ni n’exploitera, à ce niveau, ses succès de Premier ministre pour prendre une longueur d’avance dans cette folle course à la succession du président Wade.
Peut-on en dire autant pour tous les autres libéraux et Gc candidats à la candidature ? Ces derniers sont-ils plus aptes que Macky Sall ou autres Sénégalais à succéder à Senghor, Diouf et Wade ? Lors de la nomination d’Abdou Diouf comme Premier ministre, le professeur Abdoulaye Ly faisait observer au président Senghor : ‘Si entre tes 65 ans et les 35 ans d’Abdou Diouf, il n’y a rien au Sénégal, c’est triste pour notre pays.’ Aujourd’hui, quel responsable du Pds dans l’entourage du président de la République ou responsable de parti dans la Cap 21 oserait dire au président Wade : si entre tes 84 ans et les 38 ans de Karim, il n’y a rien pour le Sénégal, c’est triste pour notre pays ?
Abdou Diouf, grand commis de l’Etat, a eu tout de même sept ans de formation politique avant d’accéder au pouvoir en 1981 même si c’est par un raccourci (l’art. 35). Les Sénégalais ne doivent pas oublier qu’à l’époque, le leader charismatique du Sopi n’avait pas manqué de dénoncer vigoureusement cette dévolution du pouvoir et d’ailleurs c’est à partir de là que le Pds s’est radicalisé dans toutes ses actions de conquête du pouvoir.
Mais depuis, le monde a changé, il a évolué fort heureusement et le monde d’aujourd’hui n’est pas le monde de 1981, tout comme le Sénégal sous Senghor n’est pas le Sénégal sous Wade. Le peuple sénégalais sait ce qu’il veut et surtout ce qu’il ne veut pas. Et dans ce peuple, un jeune acteur politique, Macky Sall, qui a fini de se distinguer dans différents ministères, à la primature et à la présidence de l’Assemblée nationale, porteur d’ambitions pour son pays, dans un appel mémorable à ses compatriotes sénégalais en date du 9 novembre 2008, a choisi librement : le camp du droit contre l’arbitraire, le camp de la démocratie contre le despotisme.
Macky Sall a compris très tôt, pour ne pas dire trop tôt, bien avant son départ de la primature, que le débat sur les institutions, le type d‘institutions à bâtir dans la perspective du Sénégal de demain, prime largement sur le débat autour des hommes. Jamais, personne ne l’a entendu discourir dans ce débat de succession, débat de chiffonniers, par fidélité à ses convictions, par respect au peuple sénégalais et par loyauté et reconnaissance à son ex-secrétaire général du parti, le président Abdoulaye Wade. Mais trop, c’est trop.
La rapide convocation du président de l’Assemblée nationale à la présidence de la République, afin de lui imposer une démission, du seul fait de la convocation de l’Anoci ou plutôt de Karim Wade, fils du président de la République, par la Commission des finances, marquait en réalité ‘la saga de la Gc’ dans la mise à mort de l’Etat républicain. Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée n’a point de Constitution. Dès son refus de démissionner on ne peut plus légitime, Macky Sall s’attendait à une loi dans ce sens. Conscient de la gravité de l’heure, de l’urgence d’une action originale, citoyenne, de la nécessité d’une progression rapide de notre peuple vers l’épanouissement des valeurs républicaines, le désaccord avec la politique menée par le Pds, dans une situation de grave crise multiforme, ne pouvait déboucher que sur une rupture définitive d’avec le Pds et, par conséquent, la démission à tous les postes obtenus sous cette bannière.
D’aucuns disaient que Macky Sall s’accrochait au perchoir pour se protéger, qu’il manquait d’ambitions, d’autres, qu’il devait rendre le tablier à partir du moment où la seule constante du Pds le lui réclamait, parce que c’est ce dernier qui lui a permis d’accomplir son beau parcours politique. En tout état de cause, il vient de prouver à tous, qu’il a des convictions nobles, qu’il a des ambitions pour le Sénégal et qu’il a eu raison de mener ce combat pour son pays, pour la République du Sénégal. Aujourd’hui, il apparaît clairement que tous les fondements de notre République, de notre représentation nationale sont à reconsidérer, aussi bien les principes que dans leur application. Le gouvernement ne reflète plus la volonté populaire. L’Etat confisqué par une famille et une cohorte d’opportunistes.
Le parti, encore moins l’Etat ne doit pas être l’instrument d’une volonté humaine illimitée et être utilisé au gré de ceux qui le contrôlent. C’est là le sens du combat de Macky Sall. C’est un combat pour un Sénégal émergent. Un seul Sénégal pour tous et tous pour un seul Sénégal.
Alioune Ndao FALL Mse/Coordination de France Mouvement pour un Sénégal émergent
L’Assemblée nationale n’est ni un lieu de meeting, ni une foire d’empoigne
Sans doute, sur une grande échelle, les Sénégalais approuvent-ils la diversité politique de l’Assemblée nationale. Mais, ils regrettent vivement les faux-pas enregistrés ici et là et qui, si l’on n’y prend garde, risquent d’altérer la belle image de marque de cette auguste maison, la transformant en un champ clos, théâtre d’une campagne électorale permanente. Déplorons-le, elle est littéralement engloutie par de graves dérives parlementaires et des scènes de pugilat dignes des professionnels de la boxe, du judo, du karaté sous-tendues par de rudes, chaudes et impitoyables empoignades et invectives que ne méritent ni les Sénégalais ni les étrangers qui vivent parmi nous.
A notre humble avis, l’opposition systématique n’est plus de saison : la cohabitation dans la tolérance, le respect réciproque, la loyauté, la confiance a d’indiscutables et solides vertus ; elle est à encourager et à soutenir. Il est hautement souhaitable, nous semble-t-il, que nos honorables députés, dans une fraternelle et agissante solidarité, abhorrent les injures, les provocations, les interminables querelles de bas étage, les douloureux affrontements. Un vieil adage de chez nous dit que ‘les marques du fouet disparaissent, la trace des injures… jamais’. Ce proverbe arabe est à rappeler : ’Les blessures de la langue sont plus dangereuses que celles du sabre’. Ne l’oublions pas : seule l’humilité distingue les grands hommes.
Les joutes oratoires de positionnement n’ont pas de place dans cette Agora : c’est notre intime conviction. Les élus de la nation, faut-il le rappeler, représentent le Sénégal, abstraction faite de leurs partis d’origine. Ils demeurent, assurément, son esprit, son bras, sa voix. Nul doute qu’ils en ont pris conscience et ont à cœur de mériter une telle mission, si noble, si importante, mais si… redoutable. Le peuple sénégalais, brave, fier, intelligent, généreux mais exigeant, dans son ensemble, ne distinguera pas entre les partis, mais saisira la globalité de leur action. Son verdict est souvent implacable et meurtrier.
Il est sain que, dans une démocratie, s’affrontent des idées : c’est la condition du progrès et du développement. Un débat dans lequel, les protagonistes ont le souci majeur de contribuer à la solution des problèmes ne peut être que bénéfique. Nul ne trouverait à redire. Mais quand le dessein est, manifestement, de contrecarrer systématiquement, de dénigrer ou d’user de manœuvres dilatoires, le peuple ne peut pas être d’accord. La qualité des interventions, reconnaissons-le, est très inégale. C’est le lieu de rendre un vibrant hommage, aux hommes et aux femmes, rompus aux tâches parlementaires, que l’on trouve dans les deux camps (mMajorité et opposition) des ténors et princes de l’hémicycle, séduisants par l’éloquence, l’aisance, la mesure, la pertinence des arguments, l’esprit, d’initiative, d’ouverture, d’analyse de synthèse et que l’on écoute avec un plaisir, sans cesse, renouvelé.
Seulement, bon nombre de députés ont du mal à se départir de considérations ponctuelles, relatives à leur terroir, laissant toute conception globale, plus soucieuse de la nation que des coins particuliers. Si les députés sont issus de telle ou telle région, ou même ville ou village, ils ne doivent, cependant, à notre estime, perdre de vue que leur élection a fait d’eux des représentants de tout le peuple. Leurs revendications sont certes légitimes, mais elles ne doivent se situer que dans un ensemble qui, de ce fait, les relativise.
Quelle que soit la violence des discussions, la bonne tenue, la courtoisie sont de rigueur. Il n’est pas admissible que, par leurs prestations, les députés fassent mal juger leurs mandants. Entendons-nous bien ! Notre intention n’est pas - il va de soi - d’indiquer à nos honorables parlementaires une déontologie quelconque. Mais, il est aisé de comprendre, que le citoyen que je suis ne puisse rester indifférent quand nos députés, par certaines maladresses, prêtent le flanc. Donc place à la discussion d’idées fécondes, novatrices, à un débat plus approfondi, civilisé, courtois, chevaleresque, serein, plus constructif, moins violent, moins passionné, moins spectaculaire, excluant le discours laudatif, ennuyeux et moralement gênant. Halte à la foire et aux interventions qui portent un lourd et sévère préjudice à la nation.
Le peuple est mûr et mérite une représentation parlementaire de haute tenue. De grâce, Mesdames, Messieurs, chers honorables députés, continuez de vibrer à l’unisson de votre peuple et à le représenter, dignement. L’Assemblée nationale, outre le vote des lois et le contrôle de l’Exécutif doit continuer à participer, à sa manière et à ses moyens comme elle s’y déploie, du reste, sur le terrain aux différentes activités visant au développement de la nation, se traduisant par des visites favorablement accueillies de certains secteurs sensibles de la vie nationale.
Après une longue crise qui avait bloqué le fonctionnement de l’institution parlementaire, les députés viennent de se choisir dans un même élan, librement, démocratiquement, souverainement leur président, le dimanche 16 novembre 2008 par 130 voix contre trois, un des leurs : le député-maire de Mbao, Mamadou Seck. Indiscutablement, c’est le meilleur choix !Quel est celui d’entre nous qui ne se souvienne, avec émotion, de la démission surprenante et fracassante du ministre de l’Economie et des Finances d’alors, victime d’une cabale sans nom, qui avait préféré la mort à la honte, l’honneur aux honneurs ? L’homme est adulé pour sa droiture, son intégrité, sa rigueur, sa légendaire humilité, sa discrétion, sa disponibilité, son patriotisme ardent, sa sérénité, son courage, sa vigilance, sa générosité, sa fermeté et son exquise courtoisie qui forcent l’admiration et le respect. D’un calme olympien, toujours de marbre, fin stratège, il saura tenir la balance égale entre tous ses collègues qui écriront, avec lui, devant l’histoire et pour la postérité, une nouvelle et belle page dans un climat de confiance, de concorde, de paix pour l’avènement d’une Assemblée nationale nouvelle, réconciliée avec son peuple. Puisse Dieu, le Tout-Puissant, dans son infinie bonté et son incommensurable miséricorde, consolider notre Assemblée nationale, lui donner la cohésion, la force, lucidement, en toute sérénité ! Mais aussi et surtout protéger et inspirer nos députés, pour un Sénégal émergent.
Cheikh Abdoulaye DIENG
Il fait acte d'allégeance à Wade : Le premier faux-pas de Mamadou Seck
L’histoire retiendra que sitôt élu (ou nommé ?), Mamadou Seck s’est empressé d’aller rendre grâce au président de la République de l’avoir désigné comme le successeur de Macky Sall. Un sacré coup à la séparation des pouvoirs qui n’est, malheureusement, pas le dernier d’une série de coups de Jarnac portés à la tradition républicaine.
Le nouveau président de l’Assemblée nationale s’est-il résolu à emboîter le pas à ses devanciers en faisant de l’institution qu’il dirige un machin de l’exécutif ? Les actes que Mamadou Seck ne cesse de multiplier, depuis son accession au perchoir, ne rassurent, en tout cas, point. Sitôt élu président de l’Assemblée nationale, le premier geste que Mamadou Seck a jugé bon de faire, c’est de remercier son bienfaiteur. Il s’est empressé d’aller au Palais de la République pour y rendre grâce à Wade. Il n’échappe à personne que le maire de Mbao doit sa promotion au locataire du Palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor, que la séparation des pouvoirs, sous nos cieux, n’est que chimère, mais jamais dans l’histoire de nos institutions, le chef du législatif n’a fait preuve d’une telle désinvolture républicaine. Aller remercier le chef de l’Etat de l’avoir choisi parmi ses pairs comme le président de l’institution parlementaire, voilà de quoi faire retourner dans sa tombe, Montesquieu, le théoricien de la séparation des pouvoirs.
Cet acte d’allégeance est certainement le moins qu’on attendait de l’actuel président de la Chambre basse. Au regard de son background et des actes sans précédent dans l’histoire politique de notre pays qu’il a posés, Mamadou Seck a surpris plus d’un. En effet, l’homme est connu comme étant l’un des très rares Sénégalais à avoir marqué les esprits en démissionnant de son juteux poste pour un motif : son attachement à un principe d’intégrité. Après le juge, feu Kéba Mbaye et l’ex-ministre des Finances de Diouf, Pape Ousmane Sakho, il a eu à séduire les Sénégalais en rendant le tablier, alors qu’il était le deuxième ministre de l’Economie du gouvernement issu de l’alternance. Accusé d’abus de biens sociaux à la Somicoa, Mamadou Seck avait jugé bon de se décharger de ses fonctions pour se mettre à la disposition de la Justice qui va, plus tard, le blanchir. C’est ainsi qu’il fera un come-back dans un gouvernement dirigé par Macky Sall, en tant que ministre des Infrasructures, avant de devenir ministre-conseiller à la présidence et plus tard député à l’Assemblée nationale où il était président de la Commission des Finances jusqu’à ses nouvelles charges. L’image que l’homme renvoie, donc, à l’opinion, est celle d’une personne très attachée à certaines valeurs fécondes dont l’intégrité et l’honneur. C’est la raison pour laquelle, dès l’annonce du choix porté sur lui, nombre de Sénégalais avaient l’espoir que l’institution parlementaire allait connaître une nouvelle virginité qui la réconcilierait avec ces derniers.
En cette période cruciale de la vie de l’importante institution devenue, aujourd’hui, l’une des plus banales et la moins crédible, les qualités sus-mentionnées du successeur de Macky Sall avaient leur pesant d’or dans la mue que devait imprimer Mamadou Seck au fonctionnement actuel de notre Assemblée nationale. Hélas, ce qu’il nous est donné, actuellement, de voir ne milite pas en faveur des changements attendus et ne fait pas espérer des lendemains meilleurs. Au regard des nombreuses sorties de Mamadou Seck, sous ses nouveaux habits, et pendant lesquelles ce dernier ne tarit pas d’éloges à l’égard du président de la République en demandant même aux uns et aux autres de mieux soutenir ce dernier et sa coalition, il y a des raisons d’être pessimiste. Le maire de Mbao a-t-il pris sur lui de tourner casaque ? Le virus politique l’a-t-il atteint au point de renier les principes pour lesquels il avait l’estime de ses compatriotes ? Auxquels cas, ce serait dommage pour lui et, surtout, pour l’institution qu’il dirige.
Aguibou KANE
L'OFFICE:
Prétexte baril…
Laye Wade, le prix du baril du pétrole a drastiquement baissé. Et pourtant, c’est cette hausse, à l’époque, qui vous avez poussé à une augmentation sans précédent des denrées de première nécessité et des produits dérivés du pétrole. L’électricité est non seulement devenue un luxe, à cause de son prix exorbitant, mais également introuvable. Jusqu’à quand, vous allez maintenir ce vaillant peuple dans la souffrance et la misère. Le prétexte du prix du baril de pétrole, évacué ; qu’est-ce qui vous reste comme alibi ? Le dilatoire…
( Mor Todjangué )