La marche des femmes pour un septennat fémini
La marche des femmes pour un septennat féminin
‘Jiggen amoul bopp’ (La femme manque d’esprit). Proverbe wolof
La femme manque-t-elle d’esprit ? Doit-elle toujours avoir l’homme comme directeur de conscience ? Dans le Coran, à une époque anté-islamique, on entend cette prière de la femme de pharaon : ‘Seigneur, préserve-moi de pharaon et de son œuvre et construis-moi auprès de toi une maison au paradis.’ Ici commence une volonté d’émancipation que travaillent idéologiquement les mouvements féministes modernes qui tentent de lutter contre la totémisation du mâle considéré comme le protecteur tout puissant du foyer et du clan.
Victime de discrimination, infériorisée, voire chosifiée, la femme revendique pleinement de nos jours son humanité. La femme moderne entend jouer dans l’histoire un rôle d’acteur et non de patient. En France, le slogan du Mouvement de libération de la femme (Mlf) précise bien : ’Les femmes sont des hommes comme les autres.’
Les femmes qui revendiquent un statut d’homme sont souvent déroutées par la religion. L’Islam matinal comme le Christianisme à sa naissance en Palestine n’ont pas donné à la femme l’importance d’un homme. La femme qui n’avait pas une entrée dans la vie publique, était une domestique et sa place était au foyer. Dans l’empire romain, l’Apôtre Paul recommandait aux femmes d’être ‘des maîtresses de maison bonnes et actives, soumises à leur mari’ (Lettre à Tite. Nouveau Testament). La tradition chrétienne ne souhaite guère que la femme élève la voix. L’Apôtre Paul dira à Timothée : ’Je ne permets pas à une femme d’enseigner en prenant autorité sur l’homme. Qu’elle garde plutôt une altitude paisible.’
Pas de voix dans le foyer
Dans la tradition musulmane sénégalaise, la femme n’a pas de voix dans le foyer. Cela s’illustre par le fait que la formule que doit employer une femme pour réclamer le divorce chez les Wolofs est : ’Mayma sama baat’ (littéralement, ’donne moi ma voix’, ce qui signifie accorde-moi ma liberté). En Occident, la femme porte le nom de son mari et délaisse son nom de jeune fille dans la vie civile.
Les luttes féministes ont bouleversé les sociétés phallocratiques pour permettre aux femmes de jouer un rôle plus important dans la société. Les femmes de France n’auront le droit de voter qu’après le décret du 21 avril 1944 du Gouvernement provisoire de République, c'est-à-dire près de 100 ans après l’instauration du suffrage universel masculin qui remonte à 1848. En 1793, la lame tranchante de la guillotine a sectionné la tête de l’écrivaine Olympe de Gouges qui aura le cran de publier une déclaration des droits de la femme et de la citoyenne où elle dira que la femme est un être supérieur à l’homme par sa beauté et son courage dans les douleurs de la maternité.
Les écritures bibliques ne magnifient guère la femme, pécheresse damnée pour avoir avalé la première le fruit défendu. Quand Olympe de Gouges fut exécutée, le procureur de la commune de Paris n’aura pas des mots tendres à son égard et dira au public : ’Rappelez-vous l’imprudente Olympe de Gouges qui, la première, institua la société des femmes et abandonna les soins de ménage pour se mêler à la République et dont la tête est tombée sous le fer vengeur des lois.’
Jamais exclues de la vie politique sénégalaise
La France a évolué depuis. Une femme (Ségolène Royale) a failli être portée à la tête de la République lors de la dernière élection présidentielle. Au Sénégal, une femme a été Premier ministre. Les femmes n’ont jamais été l’objet d’une quelconque exclusion de la vie politique sénégalaise. Le préambule de notre Constitution assure : ‘L’accès de tous les citoyens sans discrimination à l’exercice de pouvoir à tous les niveaux.’
La République française qui garantit également l’accès de tous les citoyens à l’exercice du pouvoir ne s’embarrasse pas de nouvelles lois. En France, une loi sur la parité absolue homme-femme dans les fonctions électives n’existe pas, pour la simple et bonne raison que les femmes sont des hommes comme les autres et ne doivent pas bénéficier d’une mesure spéciale et avantageuse. Au Sénégal, une loi sur la parité absolue homme-femme vient d’être enregistrée à grand tam-tam à l’Assemblée nationale. On accélère la promotion politique de la femme parce que 2012 approche et les voix des femmes sont à conquérir. Le président Wade est devenu le champion de l’égalité des genres. Certains n’y voient rien d’autre qu’une opération de charme envers l’électoral féminin.
Pour ma part, je veux demander à notre bien cher président soucieux de la promotion féminine pourquoi il a préféré son fils Karim à sa fille Sindiély. Karim occupe de hautes fonctions dans l’Etat qu’il dirige alors que Sindiély n’est que l’ombre d’elle-même.
Les femmes de ce pays ne doivent pas manquer d’esprit et doivent exiger du chef de l’exécutif un projet de loi sur l’alternance des genres dans la plus haute fonction élective de la République, car ce sont toujours les hommes qui se mettent à la tête de l’Etat. Si le président veut prouver sa sincérité dans sa volonté politique de promouvoir les citoyennes, il doit également souhaiter une alternance des genres dans le poste de président de la République. Quand un homme passe sept ans au pouvoir, une femme doit lui succéder au septennat suivant. Femmes, levez-vous pour exiger une rotation des genres dans la plus haute fonction élective. Le Sénégal aura ainsi une présidente de la République en 2019.
Mahamadou M. FAYE Mahamadou3@hotmail.fr