pour Karim
CONTRIBUTION «L’honneur jeté au chien»
Article Par Ibrahima BAKHOUM, REWMI France,
Paru le Mardi 26 Juin 2007
Il jure devant DIEU et vous impose de jurer devant lui. En effet il a modifié sa constitution pour désormais jurer devant la divinité et le peuple et il vous contraint de le faire devant un mortel, lui seul maître du Sénégal. Quel mépris pour notre pays et la dignité de ses serviteurs. La démarche de Wade est si singulière par ce qu’avec lui, on aura tout vu, mais aussi constitue un signe inquiétant pour notre démocratie.
La Constitution qui est la charte fondamentale qui gouverne et donne existence à la vie de la Nation ne présage nullement ce cas de figure : des ministres jurer devant un homme. Par contre lui, il a juré de respecter comme de faire respecter les lois et dispositions de la Constitution donc sacrilège. Ce serment ne peut avoir aucune valeur juridique, sa portée ne peut être que morale dans un pays ou la moralité est synonyme de violation des droits humains, des assassinats, de la corruption etc… Désormais les ministres sont au service d’un homme, d’un clan, d’une dynastie : WADE II. L’image du Sénégal offre un spectacle digne de l’ère de BOKASSA ou encore plus récent de MOBUTU. Wade s’imagine un parcours pour lui et sa postérité et chacun de ses actes doit être analysé dans le cadre d’un schéma global de transmission patriarcale de la destinée nationale. La cérémonie, avec sa mise en scène rappelle un JULIUS CAESAR au summum de sa gloire. Si Rome et Sparte ont Péri, aucune puissance politique ne doit songer à l’infinité. Les clignotants sont au rouge et tous les indices de développement affichent une nette régression masquée par des politiques de « trompe- l’œil ». Au nom de la République, de tels actes sont à proscrire pour la dignité des hommes mais et surtout pour moins de fantaisie et de fourberie : le temps de l’action est arrivée. Aucune dynamique de sursaut national ne peut et ne doit se faire en dehors du dialogue social. Le régime de sa « majesté » a réussi l’inimaginable exploit de rompre le dialogue politique et de placer les Sénégalais entre deux camps : ceux du pouvoir (avec ses privilèges) et ceux de l’opposition républicaine représentative (à liquider). Le régime libéral a certes le pouvoir mais le pays et son bien-être est une affaire de tous et la préservation des acquis sociaux et démocratiques est une tâche patriotique et collective. Que Dieu protége notre pays.
Dissolution de toutes les instances du Pds, reprise de la vente des cartes et création d’un grand parti présidentiel Wade s’apprête-t-il à quitter la scène politique ?
Article Par SERIGNE SALIOU SAMB,
Paru le Mardi 26 Juin 2007
La logique de demi-mandat dans laquelle se serait inscrit le président de la République est-elle en train de prendre forme ? En tout cas la désignation de Abdou Fall pour mettre sur pied un grand parti politique regroupant toutes les forces acquises à la cause du « Sopi » sonne comme une volonté de Wade de préparer sa retraite. Pour préparer le terrain à son fils Karim Wade ? En tout cas dans les milieux libéraux, on annonce un grand congrès qui devrait intervenir après la dissolution des structures du Pds et la reprise de la vente des cartes.
Une vaste campagne de récupération des pontes libéraux frustrés et qui pourraient bien rejoindre le « front Macky » est lancée par le président de la République. De Abdou Fall à Aliou Sow en passant par Aïda Mbodj et les autres, ils sont tous dans le viseur de Wade. Qui est plus que jamais déterminé à mettre sur pied une sorte d’union pour une majorité populaire (Ump) en France, version sénégalaise. Et c’est l’ancien ministre de la santé dont on dit qu’il flirterait avec la « génération du concret », en compagnie d’autres ministres comme Farba Senghor et Ousmane Masseck Ndiaye, qui est chargé de donner corps à cette grande formation politique. Laquelle devrait regrouper, outre les formations acquises à la cause du « Sopi », les mouvements apolitiques plus ou moins favorables au président de la République ou son fils. Par ailleurs, selon des sources proches du Pds, Me Wade aurait manifesté son intention de dissoudre toutes les instances du Pds, à l’exception notable du comité directeur qui ne tardera pas d’ailleurs à être « relooké ». Et comme l’avait recommandé Boubacar Bâ de la cellule de la présidence de la République, un congrès devrait se tenir sous peu, pour procéder à un renouvellement de toutes les instances du Pds. D’ici là, le « réformateur » Abdou Fall a pour mission de procéder à la vente des nouvelles cartes du Pds (Ndlr : Me Wade ne voulant plus des anciennes cartes)… La question qui se pose maintenant est de savoir si la nouvelle stratégie de Wade s’inscrit dans sa volonté de faire un demi- mandat et de se tirer ou non. Si tel était le cas, le président de la République donnerait des arguments à tous ceux qui le soupçonnent déjà de vouloir baliser la route du palais à son fils Karim Wade. En attendant, le patron du Pds continue de discuter avec les responsables libéraux mécontents. Il aurait rencontré Aliou Sow le week-end dernier à Popenguine et s’apprête à recevoir les autres « amazones » comme Aminata Tall, Awa Diop et Aïda Mboji.
DECORATION EN PLEINE GUERRE DE SUCCESSION DE ME WADE La France manifeste son soutien à Macky
Article Par Latir MANE,
Paru le Mardi 26 Juin 2007
Le Grand officier de la légion d’honneur française n’est pas n’importe quelle décoration. Il est rare qu’ « un homme d’Etat sous tutelle, comme c’est le cas de Macky Sall, soit élevé à ce grade». Et dans le contexte actuel, ce geste n’est rien d’autre que la manifestation du soutien que la France accorde à Macky Sall dans sa bataille de l’heure. C’est en tout cas l’avis d’une source diplomatique.
Macky Sall reçoit aujourd’hui une décoration de Nicolas Sarkozy, président de la République de la France. Il a été élevé au grade de Grand officier de la légion d’honneur française. Une source diplomatique a confié que cette décoration n’est rien d’autre qu’un soutien politique que la France a manifesté à l’endroit de Macky Sall, dans sa lutte pour la succession de Me Abdoulaye Wade, président de la République du Sénégal. Notre interlocuteur a tenté d’expliquer sur quoi il fonde son raisonnement. Il a d’abord soutenu que la France utilise ce grade pour décorer ses amis. C’est-à-dire des personnes qui ont rendu un grand service à la France. Et la plupart du temps, c’est un ressortissant français ou un étranger influent, c’est-à-dire un chef d’Etat ou autre. Il est aussi arrivé que cette décoration soit attribuée à des hommes qui se sont distingués dans leur secteur d’activité. Mais jamais un homme d’Etat sous tutelle, comme c’est le cas de Macky Sall, n’a été élevé à ce grade par la France.
Et notre source de poursuivre en précisant qu’aujourd’hui la bataille de succession est aux yeux de certains amis du Sénégal comme un combat entre l’Orient et l’Occident. Macky Sall symbolisant l’Occident et Karim Wade symbolisant l’Orient.
Interpellé sur la question, un proche collaborateur de Macky Sall a balayé d’un revers de la main ce raisonnement. Cette personne, qui n’a pas souhaité que son nom soit cité, a expliqué que la décoration date de Décembre 2006 à janvier 2007. Mais c’est pour éviter de soulever des jalousies que Macky Sall avait décidé d’aller la retirer sans faire du bruit. De plus, le président de la République lui a demandé de s’occuper des élections législatives. Pour ce qui est des relations que Macky Sall entretient avec la France, notre interlocuteur signale que Macky Sall est très apprécié au niveau de l’Elysée, du Matignon et du Quai Dorset. En d’autres termes, il a des entrées dans ces institutions. Sans oublier de préciser que Macky Sall a toujours voulu que cette décoration se fasse dans la discrétion. Mais finalement c’est le président Français qui va le décorer car un ambassadeur n’est pas en mesure de décerner une telle décoration.
VERS UNE TRANSFORMATION DU PDS EN UN GRAND PARTI Wade balise-t-il le terrain à Karim ?
Article Par HAROUNA FALL,
Paru le Mardi 26 Juin 2007
Le chef de l’Etat Me Abdoulaye Wade est-il en train de préparer le terrain à son fils pour lui succéder à la tête de l’Etat ? Non pas par une modification de la charte fondamentale en faisant de lui son dauphin constitutionnel, mais par la voix des urnes ? Tout porte à le croire. L’idée de transformer le Pds en un grand parti pour baliser le terrain à Karim Wade participerait de cette entreprise de succession légale.
Selon des sources proches du parti démocratique sénégalais (Pds), Me Abdoulaye Wade a été on ne peut plus clair sur sa succession lors de la dernière réunion du comité directeur avant le remaniement ministériel. À en croire nos sources Me Wade, s’adressant aux membres du comité directeur, a indiqué ce qui suit : « Je lui (Ndlr : Karim) avais demandé de s’éloigner de la politique. Mais, s’il a des ambitions politiques et s’il veut être président de la république, pourquoi pas ! ». Des propos qui cachent mal les intentions de Me Wade de faire du patron de la génération du concret son successeur à la tête de l’Etat. Cela est d’autant plus plausible que Me Abdoulaye Wade est revenu la semaine suivante, c’est-à-dire lors de la dernière réunion du comité directeur, lever un coin du voile sur la voie par laquelle il veut faire accéder son fils au pouvoir sans trop forcer les textes. Et ne pas donner l’impression de vouloir imposer son fils aux Sénégalais. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la demande faite au porte-parole du Pds Abdou Fall de réfléchir sur les voies et moyens à faire du Pds un grand parti. Le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, veut lever les obstacles qui pourraient se dresser devant Karim Wade dans son ascension vers le sommet de l’Etat. Abdou Fall a déjà donné le ton en déclarant sur les ondes des radios que le comité directeur du Pds pourrait, dans cette dynamique, être ouvert aux membres de la génération du concret (Gc) dont Karim Wade est le patron.
Au-delà de cette invite tacite d’Abdou Fall à Karim Wade, les observateurs croient savoir qu’en modifiant les statuts du Pds et le sigle (Ndlr : certains parlent déjà de Pds/W « Wadiste »), Wade veut former un autre parti dont personne ne peut revendiquer la paternité. Un parti où personne ne peut dire qu’untel est un militant de première heure et qu’un autre est militant de dernière heure. Et par conséquent tout le monde sera sur le même pied pour prétendre au poste de secrétaire général de ce nouveau grand parti. Afin d’aller ensuite briguer le suffrage des Sénégalais. En ce moment les militants ou responsables du Pds, s’ils le veulent, restent dans ce parti et se rangent derrière celui qui aura la charge de le diriger (on voit mal qu’il soit quelqu’un d’autre que Karim Wade). Ceux qui ne seront pas d’accord avec cette nouvelle donne auront la liberté de quitter les rangs et d’aller créer leur propre parti politique. Beaucoup de responsables du Pds semblent avoir décodé le message de Me Abdoulaye Wade. Ils commencent un à un à s’approcher du camp de Karim Wade. Chaque jour ils sont nombreux les libéraux, à quelque niveau de responsabilité qu’ils se situent, à jeter le masque. Et de se déclarer membre de la génération du concret. Qui semble de plus en plus être la voie pour accéder au sommet de l’Etat ou d’être dans les bonnes grâces du maître des céans.
l se moque encore de nous
Le gouvernement de Me Wade est tombé. Il a, à sa tête, un Premier ministre homme et est composé de trente sept membres, des politiques pour leur écrasante majorité. Comme à l’accoutumée donc, Me Wade n’a pas, encore une fois, respecté ses engagements. Il nous avait promis un gouvernement restreint, avec un Premier ministre femme. A l’arrivée, c’est exactement tout le contraire qu’il nous sert. Il faut, d’ailleurs, vraiment méconnaître Me Wade, pour s’attendre à ce qu’il nomme un gouvernement restreint, composé seulement de technocrates. L’homme, politicien pur et dur, est incapable d’une telle performance. Je ne serai pas, d’ailleurs, surpris que les rares «apolitiques», qui siégent dans le tout nouveau gouvernement, soient un jour remerciés pour être remplacés par des politiques, comme l’ont été les Pr Penda Mbow et Eva Marie Coll Seck, Aïcha Agne Pouye, Soukeyna Ndiaye Bâ, etc.
De Londres où il était en visite, il y a deux ou trois années, le politicien Wade s’était, imprudemment, engagé, à nommer un Premier ministre femme après les élections législatives de 2006, reportées en juin 2007. Depuis lors, des femmes se sont agitées pour rien : Hadjibou Soumaré leur a été finalement préféré. Encore une fois donc, les engagements de Me Wade sont restés ce qu’ils ont toujours été : des paroles en l’air.
Un Premier ministre, ce n’est pas un homme ou une femme, en particulier, qu’on nomme deux ou trois ans auparavant. Un Premier ministre, c’est un profil, un profil qui peut être celui de Massamba ou Mademba, de Daba ou de Rokhaya. Quand il est incarné par Massamba ou par Daba, la seconde peut être préférée au premier, pour faire genre. Et puis, le problème du Sénégal, ce n’est certainement pas son Premier ministre, qu’il soit homme ou femme. Le problème du Sénégal, c’est son président de la République, qui prend tout et ne laisse rien aux autres. Le Premier ministre du Sénégal a beau être un homme ou une femme avec un profil de l’emploi idéal, il (elle) aura bien du mal à s’accomplir, puisqu’il (elle) n’aura pas les coudées franches. Il lui sera interdit d’avoir des ambitions, de prendre quelque initiative que ce soit. Lui-même comme l’ensemble des ministres dont Me Wade a une curieuse conception.
Rappelons, pour nous en convaincre, qu’en marge du deuxième sommet de l’Union africaine (Ua) qui se tenait à Maputo (capitale du Mozambique) du 10 au 12 juillet 2003, Buur Saalum a accordé une interview à l’envoyé spécial de Sud quotidien. A une question sur la représentation des femmes dans la Commission de l’Ua, il répondit longuement et, chemin faisant, fit ce curieux témoignage sur ses femmes ministres :
«Les femmes ministres me donnent entière satisfaction dans leur travail gouvernemental. Elles viennent me demander, à chaque fois, la voie à suivre, ce qui n’est pas le cas avec les hommes ministres. Certains d’entre eux se permettent de tenter des choses dans leurs secteurs respectifs sans s’en référer au président de la République, en oubliant que nous avons, depuis longtemps, tracé la voie à suivre. Le programme qui est appliqué est celui du Parti démocratique sénégalais (Pds). Ceci est très important à noter. C’est dire donc que les femmes ministres me donnent satisfaction.» Et le journaliste de saisir l’opportunité pour lui poser la question-ci : «Est-ce à dire que vos ministres n’en font qu’à leur tête ?» Question à laquelle Boroom Ndar répond :
«Je ne dis pas cela. Je constate simplement que les femmes de mon Gouvernement ne font rien sans s’en référer à moi. Et ceci me semble important et je les y encourage. Car nous avons réfléchi, depuis longtemps, au moment où nous étions encore dans l’opposition, sur le programme à appliquer. Et c’est celui-là qui est aujourd’hui mis en œuvre. Il s’agit donc de s’y conformer.»1
De cette déclaration, nous retenons au moins deux remarques :
1) C’est bien du Me Wade, encore du Me Wade, toujours du Me Wade, le même Me Wade de qui tout part et vers qui tout revient, qui sait tout et a réfléchi sur tout une fois pour toutes. Les ministres n’ont donc pas à réfléchir, ni à se risquer à prendre des initiatives. Ce qui pourrait leur coûter leurs postes.
2) Le rôle du Premier ministre de Me Wade est insignifiant. Qu’a-t-il à coordonner (ce qui est sa fonction fondamentale), dans la mesure où aucun ministre ne doit rien entreprendre sans s’en référer au président de la République ? Si c’est à lui seul qu’il se réfère avant de prendre quelque initiative que ce soit, c’est également à lui qu’il rendra compte. Quel intérêt y a-t-il donc à être Premier ministre de Me Wade ? Aucun ? C’est ce qu’a compris le débonnaire Macky Sall quand, au lendemain de sa nomination, il a tenu à faire comprendre à tous ses compatriotes, parlant de ses prérogatives par rapport à celles de Me Wade, que «c’est lui, encore lui, toujours lui seul qui décide».
Que nous ayons donc un Premier ministre homme ou femme, compétent ou incompétent, politique ou technocrate, tout cela ne changera rien au résultat : il (elle) se contentera d’exercer docilement la fonction, en répétant à l’envi : «Selon la vision du président de la République, son Excellence, Abdoulaye Wade ; comme me l’a instruit son Excellence Abdoulaye Wade ; etc.»
Donc, le débat autour du choix d’un Premier ministre homme ou femme, technocrate ou politique, compétent ou médiocre, n’a pas beaucoup d’intérêt. Me Wade ne s’accommodera jamais d’un Premier ministre qui ait un certain charisme, une certaine envergure. N’oublions pas qu’il ne voit ni au Pds, ni dans la mouvance présidentielle, nulle part au Sénégal, un homme ou une femme capable de le remplacer. Après lui, ce sera évidemment le déluge, le tsunami.
Peut-être que son très choyé fils Karim sera l’homme de la situation. Il a fait de solides études à la Sorbonne, d’où il est sorti avec un diplôme d’Ingénierie financière2. Il est, en outre, tout clean. Il ne voit aucun rotin des centaines de milliards qu’il gère à l’Anoci, avec la certitude de ne jamais être inspecté. En tout cas, tant que son père de Président le restera, ce garçon pourrait bien nous être imposé. Il n’y a plus aucun doute que Me Wade se prend désormais pour un monarque. La mise en scène grotesque, ridicule et burlesque qu’il a osé nous servir, avec cette prestation de serment de nos pauvres ministres, en est une parfaite illustration3. Quelle mouche a-t-elle, vraiment, piqué Me Wade pour qu’il soit amené à faire prêter serment à ses ministres ? Passe encore qu’il les fasse jurer fidélité, loyauté et dévouement à sa personne, puisqu’il est Buur Saalum, Buur Siin, Boroom Ndar et que sais-je encore ! Passe encore qu’il les fasse jurer de garder les secrets dont ils seront amenés à être dépositaires ! Ce qui est inacceptable, par contre, c’est qu’il les amène à jurer de «faire un usage respectueux des deniers publics et biens de l’Etat dont (ils auront) la responsabilité».
Me Wade, l’homme de la rénovation de l’avion de commandement, du dédommagement clandestin de la famille Sèye, de la gestion calamiteuse des fonds spéciaux de la Présidence de la République, du «protocole de Rebeuss», des fameux sept milliards de Taïwan et que sais-je encore ! Ce Me Wade-là ayant le toupet de demander à des ministres de respecter les deniers publics ! Quand même ! S’est-il baigné lui-même, avant de demander à ses ministres d’en faire autant ? Transparence pour transparence, que ne demande-t-il pas aux très liquides Karim Wade et Abdoulaye Baldé de nous rassurer, en jurant publiquement d’avoir respecté les importants deniers qui leur sont confiés ! Et quid des autres deniers qui se comptent par centaines de milliards et sont gérés presque de façon discrétionnaire au niveau de certaines structures et institutions de l’Etat ! Comment le président de l’Assemblée nationale et son premier questeur ont-ils géré, pendant six longues années, l’important budget de cette institution ? La même question pourrait être posée concernant le Pcrpe, l’Apix et les nombreuses autres agences qui prolifèrent avec la gouvernance libérale. Et les responsables de collectivités locales ! Nombre d’entre eux, qui étaient aussi pauvres que des ras d’église avant le 19 mars 2000, rivalisent aujourd’hui d’ardeur à construire des maisons luxueuses, dont ils n’auraient jamais osé rêver de leur vie. C’est, en tout cas, le bruit qui court avec insistance, dans ce Sénégal qui est un petit village où tout se sait. Que Me Wade donc et ses mille courtisans arrêtent de nous prendre pour des moins que rien. La prestation de serment ridicule de nos ministres ne changera rien. Nos problèmes se situent ailleurs. La lutte contre les détournements de deniers publics et la corruption se fait autrement que par des artifices grossiers. Le président du groupe parlementaire Libéral et démocratique entre dans la danse en nous promettant la mise en place de réseaux dont un consacré à la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption. C’est très bien et il doit en être félicité. C’est encore mieux, cependant, de prendre l’initiative de propositions de lois pour modifier le statut de l’Inspection générale d’Etat. Cette structure est à soustraire de la tutelle de la Présidence de la République. Nos députés doivent dépasser les questions orales dont certains d’entre eux se gargarisent à longueur d’année. Que ne constituent-ils pas des commissions de contrôle, de vraies, pour en voir plus clair sur le fameux «protocole de Rebeuss» ? Sur ces fameux milliards qui sifflent au-dessus de nos têtes, notamment sur ceux que l’ancien Premier ministre aurait planqués à New York et en Suisse ? Pourquoi pas sur les sept milliards de Taïwan ? Ont-ils effectivement atterri dans les mains de l’ancien Premier ministre Macky Sall ? Les a-t-il effectivement distribués comme il le prétendait ? Si oui, comment ont-ils été dépensés ? A quel titre distribue-t-il autant d’argent à la place des comptables publics ? Voilà des chantiers où nous attendons nos députés de «rupture», plutôt que de déplacer un gouvernement pléthorique de 37 ministres et leurs collaborateurs, pour leur poser des questions-bidons.
Après la fameuse et inédite prestation de serment, le président de la République, qui s’est félicité de la cérémonie, a souligné avec force, en tout cas, au moins en apparence : «Il faut qu’on travaille avec du sérieux. Nous gérons une Nation et des vies humaines. La grande bataille, c’est celle économique et financière. C’est très important. Les considérations politiques et autres nous font perdre du temps.» Ah ! Si, ces propos étaient au moins une fois dénués de tout soubassement politicien ! Ah ! Si, au moins une fois, Me Wade parlait en homme d’Etat et non en politicien ! Ah ! S’il se souciait, enfin, davantage du Sénégal que du Pds ! Ah ! Si nous assistions à la fin des interminables bains de foules et de doxantu ! Ah ! Si la détestable transhumance et les minables débauchages auxquels elle donne lieu connaissaient, enfin, une pause salutaire, faute d’être carrément éradiqués de nos mœurs politiques !
Me Wade se prend, à tort ou à raison, pour un grand homme d’Etat. Tous les grands hommes d’Etat abandonnent, dès le lendemain de leur accession à la magistrature suprême, leurs fonctions de responsables du parti qui les a présentés. C’était notamment le cas de François Mitterrand en 1981, de Jacques Chirac en 1995, tout récemment de Nicolas Sarkozy. Me Wade a fait de la politique politicienne pendant sept longues années. Il est temps, vraiment temps, que les intérêts du Sénégal passent avant ceux de son Parti. Ces temps derniers, on lui prête l’intention de restructurer et de reprendre en main ce Parti. Que ne consacre-t-il pas ses forces à reprendre en main le pays et son économie chancelante ! Il ne lui reste plus que cinq petites années, s’il ne compte pas se présenter en 2012, pour nous laisser une autre image de lui-même, celle à laquelle il nous a jusqu’ici habitué étant loin d’être luisante, malgré les tombereaux de louanges dithyrambiques que ses mille courtisans déversent infatigablement sur lui, nuit et jour.
1 Sud quotidien du lundi 14 juillet 2003, p. 3.
2 De jeunes Sénégalais nantis de ce diplôme et d’au moins deux ou trois autres bien plus costauds, gagnent leur vie en Europe et en Amérique du Nord comme gardiens d’immeubles.
3 Je crois qu’il y a un sérieux problème de langue dans le texte très officiel du serment des pauvres ministres. «Je jure de ne révéler à quiconque, même à mes proches, les secrets dont je serai amené à être dépositaire (….).» Le Pr Sankharé a dû, très certainement déjà, attirer l’attention de la Présidence de la République sur le tout petit (mais important) mot qui manque à cette partie du texte.
Mody NIANG / modyniang@arc.sn -
Réformer la gouvernance économique mondiale
Le départ en catimini de Paul Wolfowitz de la direction de la Banque mondiale, la révolte du président Chavez constituent autant de signes qui poussent à ouvrir une réflexion sur la Gouvernance économique mondiale. En effet, cette dernière créée pour agir et construire, est devenue une caisse de résonance des constats d'échec du système économique mondial. Le dernier rapport publié sur la flambée des prix des matières premières en est un exemple. Le pouvoir financier des institutions internationales est amoindri. Le rôle de la gouvernance économique mondiale pour le financement de notre développement affaibli. Il faut savoir que le montant du déficit des finances extérieures américaines de plus de 1 000 milliards de dollars en 2006 a été financé par l'épargne du reste du monde devant les institutions de la gouvernance économique mondiale médusées.
Les pays émergents pourvoyeurs de remboursements sont devenus surliquides, favorisés par la flambée des prix des matières premières et la forte demande mondiale tirée par la Chine. L'Indonésie en 2006 a remboursé 4 milliards de dollars, l'Argentine 9 milliards de dollars, le Brésil 15 milliards de dollars diminuant ainsi 90 % de leurs encours - Adieu les bons des payeurs ! Tandis que ces pays profitent de cette manne, les pays les plus endettés n'arrivent plus à respecter leurs échéances. Et concomitamment, les Usa refusent de réduire un déséquilibre malgré les injonctions du Fmi (Fonds monétaire international).
L'arrivée de Paul Wolfowitz, véritable néophyte parachuté pour des raisons politiques, n'a pas arrangé les choses. Il faut souligner que le Fmi et la Banque mondiale ont toujours eu un combat de retard. En effet, dans les années 80, ces deux institutions ont mis 10 ans pour comprendre que tout ajustement structurel en économie avait sa dimension sociale. Sinon à quoi servirait-il ! D'autant plus que son but, c'était justement d'améliorer le quotidien des plus démunis. Malgré tous ces manquements, la logique de complexe des dirigeants africains vis-à-vis des fonctionnaires des deux institutions n'a pas reculé. Elle est certes cachée, mais elle demeure. Les gourous à col blanc qui crèchent dans nos cinq étoiles et qui sont reçus à grande pompe par nos dirigeants, maîtrisent certes la théorie des jeux et autres subterfuges, mais ignorent totalement les réalités de nos économies.
L'Omc, à côté de ces deux institutions, ne maîtrise plus le rouage des échanges mondiaux. La révolution commerciale mondiale appuyée par l'informatique et l'ordre marchand devenu polycentrique a affaibli sa force de contrôle. La conception de cette organisation enfantée par l'idéal narcissique de l'Occident lui a fait perdre sa crédibilité. Il faut dire aussi qu'autant à la Banque mondiale, au Fmi qu'à l'Omc, des problèmes de compétences se posent. Après Bretton Woods, la gouvernance mondiale avait à sa tête des hommes profilés qui tenaient compte de certaines valeurs de solidarité. Aujourd'hui, les ronds de cuir qui dirigent ces institutions, sont souvent des hommes politiques à la recherche de point de chute ou de hauts fonctionnaires placés par quelques potentats pour services rendus.
L'échec des dernières négociations de l'Omc est patent. Comment peut-on négocier simultanément des centaines de tarifs douaniers pour 150 pays ! Ajouté à cela l'incroyable manque de données fiables sur les subventions.
La gouvernance économique mondiale, tout en étant au service des pays riches, leur rend un mauvais service. La lourdeur de ses institutions et le manque de courage des pays pauvres pour prendre en main leur propre destin ont sclérosé le système.
La Fao, après des dizaines d'années d'existence, n'a jamais créé une révolution agricole et son silence sur la bêtise des biocarburants et des Ogm est révélateur. Ah bon, il paraît qu'il faut faire ‘boire’ les voitures à moindre coût, avant de nourrir les conducteurs de calèches ! Drôle de logique. En matière agricole, la recherche et le développement, le financement et la modernisation sont les éléments clefs. Sans oublier la réduction de la fracture numérique agricole. Mais la Fao parle de famine : Médecin après la mort !
Le G8, miroir aux alouettes, regarde avec indifférence malades, affamés et pauvres, avant de les soigner ou de les aider. Au banquet de Cocagne, à quoi cela sert de donner en obole quelques milliards de dollars sans conditions pour soi-disant combattre le Sida et le paludisme. Avec à la clef, la moitié des fonds détournés par les politiciens avant qu'une piqûre ne soit faite au Zambèze. Alors que dans nos hôpitaux, il n'y a pas d'aspirine ni de lits propres, alors que les routes sont défoncées et que la crasse de nos villes charrie toutes les maladies. Pourquoi, alors que nos usines tournent à 25 % de leur capacité et que l'échange mondial est devenu quasi inégalitaire, personne ne bronche ?
Soyons sérieux ! La vraie gouvernance économique mondiale doit permettre l'ouverture de marchés riches aux produits des pays pauvres. Elle doit financer les investissements créateurs d'emplois, promouvoir une agriculture moderne, un système bancaire non usurier et adapté, ainsi qu'une sécurité sociale performante. Cette nouvelle gouvernance doit laisser éclore une nouvelle démocratie fondée sur nos propres valeurs. Ceci en libérant une élite nouvelle et productrice en soutenant de nouveaux médias et les organisations non gouvernementales. Tout en se donnant les moyens de combattre la corruption tumeur malignes de nos économies. L'urgence pour y parvenir est de réformer la gouvernance économique mondiale. Le président Sarkozy de son côté, révolutionnaire ‘branché’, l'a compris en voulant proposer une plus grande simplicité des textes de l'Union européenne. C'est bien pour la France, mais pour les pays Africains, l'enjeu se trouve ailleurs.
Mais l'exemple, c'est qu'il faut secouer le cocotier. En effet, nous sommes arrimés au système monétaire européen qui ne peut échapper à la ‘dollarisation’ du système monétaire mondial et ceci, malgré la naissance de l'euro. Les pays africains regardent ainsi en spectateur leur destin se jouer. Car l'inconvénient potentiel pour nous est que la Fed (Banque centrale des Etats-Unis) fonde ses décisions de politique monétaire sur les conditions économiques américaines. Et il est peu probable qu'elle les modifie. Tandis que, la Banque centrale européenne elle-même a taraudé les capacités de décisions des pays membres, y compris la France, d'où le rejet du dernier traité européen par le peuple français.
En Amérique latine la révolte du président Chavez àla tête des six Etats d'Amérique latine et l'écho de son action dans le monde montre le ras-le-bol de nos populations. Est-ce le début d'une nouvelle prise de conscience ?
Il faut au plus tôt créer d'autres socles de la gouvernance économique mondiale autour de l'Inde, de la Chine, de l'Argentine, de l'Iran et de quelques pays arabes. L'heure est aux grands ensembles qui se créent autour d'objectifs communs en fonction de la donne. Et à l'instar de la Grande Bretagne avec le Pfi (Private Finance Initiative), les pays africains doivent inventer - et c'est facile - de nouvelles ressources de financement. Afin de capter les énormes ressources aujourd'hui disponibles en faveur de nos pays. Ceci est beaucoup plus facile que de faire passer le temps à nos gouvernants réduits à de simples factotums des institutions internationales à monter des dossiers de crédits à des conditions léoniennes. Faisant ainsi subir aux générations futures des préjudices incommensurables.
J’ouvre cette réflexion pas seulement pour les économistes mais pour tous ceux qui croient à l’avenir de nos pays et du continent. Car notre devoir à tous est de laisser aux générations futures les moyens de vivre dans un monde plus juste.
Ibrahima SALL Economiste kossodarou@yahoo.com
Les défis budgétaires du nouveau gouvernementLe gouvernement du 19 juin 2007 a des défis majeurs à relever. Confrontée à des problèmes liés aux déséquilibres budgétaires et de balance des paiements, la dégradation des finances publiques de l’économie sénégalaise a pour cause principale le choc pétrolier et l’accroissement rapide de la masse salariale. Le déficit budgétaire en 2006 est à 6 % du Pib, largement supérieur au seuil de 3 %, déficit qui passe du simple au double, soit 136 milliards en 2005 à 272 milliards en 2006. Les causes sont, en grande partie, imputables aux subventions d’équilibre affectées au secteur de l’énergie pour près de 150 milliards. Le phénomène de répercussion de l’augmentation du pétrole pourrait être moins ressenti par les ménages sénégalais s’il portait sur un large éventail de produits de grande consommation. En plus des subventions de l’Etat, il convient d’apprécier l’accroissement de 12 % de la masse salariale entre 2005 et 2006. Elle passe en valeur absolue de 255 à une moyenne de 285 milliards. En effet, l’accroissement des salaires en majorité dans la fonction publique a une légère incidence sur l’amélioration des recettes fiscales du fait que celles-ci sont constituées à plus de 70 % d’impôts indirects.Il convient en évidence de préciser que le déficit budgétaire n’est pas forcément un facteur paralysant la croissance économique. Pour illustration, les tenants de l’école keynésienne soutiennent que ‘l’équilibre budgétaire est une opération financièrement saine, mais n’est pas forcément économiquement rentable’. De ce point de vue, il est loisible de ne pas trop se focaliser sur la dégradation budgétaire quand bien même elle renferme un caractère non rassurant pour les institutions de Bretton Woods telles la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.Le défi majeur repose sur une allocation optimale des recettes budgétaires. En considérant les recettes prévisionnelles de 1 520 milliards en 2007, la contribution fiscale sera de 995 milliards, soit les 2/3 des recettes budgétaires. Mieux, encore 87 % des recettes internes sont issues des impôts. Il y a lieu alors de bien gérer sa fiscalité au sens des allocations, surtout quand le poids des produits d’impôt est considérable dans le budget. Le caractère dispendieux de l’Etat se mesure par le montant élevé des dépenses de fonctionnement et de personnel qui se chiffrent à 548 milliards, soit plus du tiers. Les seuls transferts occuperont plus de 12 % des recettes budgétaires alors que le service de la dette prévu est de 88 milliards, soit 5,7 %. Cette répartition montre que le Sénégal est sorti du gouffre de l’endettement dû aux incessantes remises de dettes, mais dépensera bien trop pour ses institutions. En somme, le budget des dotations internes de l’Etat sera de 54 %. Le taux bien qu'appréciable grâce à la faiblesse de la dette publique devrait être maîtrisé afin de rehausser les dépenses d’investissement, car l’économie est en chantier ou de réduire le train de vie de l’Etat. Il convient de préciser que le budget d’investissement pour 2007 est de 651 milliards, soit 43 %.Il est d’usage bien sécuritaire qu’un pays dispose d’une bonne marge de recettes intérieures par rapport au budget. Cette manne financière est due à l’augmentation non moins rapide des recettes fiscales. Elle passe de 738 milliards en 2004 à 922 milliards en 2006 et 995 milliards prévus en 2007. Le rythme d’accroissement moyen annuel des recettes fiscales de 2004 à 2007 est de 10,5 %. Le Sénégal compte beaucoup sur ses produits d’impôt pour résorber ses déficits macroéconomiques. En l’absence de monnaie flottante pour ajuster les déséquilibres par la dépréciation monétaire, le Sénégal a tendance à procéder à des ajustements sous la sphère fiscale.En 2006, notre taux de pression fiscale est de 20 %, largement au dessus des 17 % fixés par l’Uemoa dans le cadre du pacte de convergence et de stabilité. Cette grande performance est, sans nul doute, réalisée grâce aux fruits des investissements et équipements alloués à l’Administration fiscale, à son mode de fonctionnent avec son système efficace de retenue à la source et son Centre des grandes entreprises et surtout aussi l’élargissement de l’assiette fiscale.En définitive, le défi fiscal est plus pesant car à défaut d’endettement et de privatisation, le Sénégal a intérêt à mieux gérer sa fiscalité par un meilleur rendement fiscal, tout en évitant les effets exogènes qui peuvent pousser à la fraude ou au mécontentement des contribuables. Mamadou NGOM Economiste fiscaliste ngomcaudex@yahoo.fr
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Pourquoi le boycott devrait profiter à Idrissa Seck ?
Les élections législatives du 3 juin 2007 ont livré leur verdict. Il est sans appel. Il consacre même un raz-de-marée bleu à l’Assemblée nationale. Quel homme politique n’aurait rêvé pareil triomphe, pour peu que les fondements de l’esprit républicain soient respectés ? ‘Ce n’est pas la révolution’, comme disent les gens de Gauche, loin s’en faut. Juste ce préalable qui donne une caution, une légitimité à toute démarche politique, dans le sens noble du terme.
Sous ce rapport précis, la victoire de la coalition présidentielle a un goût amer. A l’image de ces victoires à la Pyrrhus qui coûtent tellement cher à leurs vainqueurs qu’elles ne valent plus la peine d’être remportées. Me Wade a donc eu le triomphe modeste. Nous l’avons vu décliner pour une fois un Sommet du G-8, lui, naguère, si prompt à coltiner avec les grands de ce monde. Il rasait à peine les murs, la semaine dernière à Paris, alors qu’il aime plus que nul homme sur terre les bains de foule et les accueils folkloriques, riches en couleurs et en sons, mais coûteux pour le contribuable sénégalais. Non satisfait de son ‘massacre électoral’, il aurait remué ciel et terre à la recherche d’un nouveau chef de gouvernement. Comme s’il était véritablement une machine à ‘broyer du Premier ministre’. Un épigone de Cronos, ce Titan qui, non content d’avoir mutilé son propre père, dévorait ses propres enfants. Abdoulaye Wade en a ‘liquidé’ pas mal, sans que le peuple ne s’en émeuve. Il aura multiplié les bourdes diplomatiques et les tripatouillages constitutionnels. Rien n’y fait. Il a même agité le chiffon d’une succession à la Eyadema ou à la Papa Doc. Il s’est trouvé encore des affidés pour justifier l’injustifiable.
Mais cette fois, il souffle bien un vent de malaise dans les jardins de ‘Maître’ Wade. Son image de démocrate a été sérieusement écornée, et ceux qui doutaient encore de son score presque ‘à la soviétique’ lors de la présidentielle commencent sérieusement à se dire qu’il y a quelque chose de pourri dans ce scrutin. Le boycott a donc eu cet éclat qu’on lui prédisait, il faudrait en tirer toutes les conclusions face à ce nouveau remaniement qui opposera deux institutions (l’exécutif et le législatif), le camp de Karim et le camp de Macky.
C’est d’abord et avant tout un retour en grâce de l’opposition dite significative. Celle-là dont la ligne de campagne à l’élection présidentielle et les stratégies de communication qui l’ont accompagnée, se sont révélées franchement nulles et honteusement improductives. Au-delà d’avoir suscité des querelles de leadership, une cacophonie et des tâtonnements inacceptables à ce niveau de responsabilité politique. Le boycott aura donc gagné son pari : celui de remettre tout ce beau monde en jeu. Et dans tout jeu, les fortunes sont diverses et souvent ingrates. Moustapha Niasse qui avait été le plus durement affecté au lendemain de la Bérézina de février, retrouve la voix.
Mais il semble que la déstructuration de son parti - planifiée en haut lieu par l’équipe présidentielle - lui pose encore problème : l’Afp n’est plus, ses rangs ont été dynamités. Or, en politique, il faut avoir les reins solides, une base pour le moins solide à partir de laquelle devrait se lancer la conquête du pouvoir suprême. L’enfant de Keur Madiabel l’a manifestement perdue.
Il en va de même pour le Parti socialiste de Tanor qui a vu sortir de ses flancs, et le PS/authentique de Souty Touré, et le mouvement fractionniste de Robert Sagna. Des défections qui viennent allonger une liste ouverte depuis 1998 par le courant du Renouveau, et qui se concrétisera par la chute d’un régime vieux de quarante années. Pire, ni Robert, ni Souty ne semblent disposés - en tout cas pas pour le moment - à regagner la ‘Maison Verte’. De la sorte, si l’on projette les scores régressifs réalisés par Ousmane Tanor Dieng depuis les législatives de 2001 sur la dislocation de l’héritage de Senghor et Diouf, il s’annonce peu probable que le Premier secrétaire puisse redresser la barre et ramener les socialistes aux commandes en 2012.
C’est en ce sens que les choses deviennent intéressantes pour Idrissa Seck.
Pour la raison d’abord évidente qu’en rejoignant le camp du boycott, alors qu’il pouvait capitaliser ses 15 % de voix acquises au dernier scrutin, il se rachète aux yeux de l’opinion. Les suspicions de collusion avec l’’ennemi Wade’ qu’il aura longtemps traînées, se dissipent dans le même temps. Idy se prive volontiers de sièges de députés largement à sa portée. Ce, nonobstant les objections provenant de son propre camp, avec une fermeté et une dignité qui forcent le respect. Ensuite - et il faut en convenir - dans l’état actuel de notre paysage politique, Idrissa Seck est le seul en mesure, sinon de tenir tête à Abdoulaye Wade, du moins d’organiser autour de sa personne les conditions nécessaires pour battre le ‘Pape du Sopi’ (ou son candidat) en 2012. Mais pour cela, il lui faut s’installer au Sénégal, la seule arène qui vaille. ‘Yobbanté galgal ouboul làmb’, dit l’adage wolof : la lutte ne se gagne pas par procuration. Wade fait peut-être exception à la règle puisque - au risque réel de s’y méprendre - il n’est pas resté assez souvent au pays durant ses ‘vingt-six années d’opposition’. Sans cela, il aurait mis moins de temps à concrétiser son rêve (...)
Il serait donc essentiel et vital pour Idy de lancer des signaux clairs et forts en direction des militants et des partenaires sociaux. Car les risques de débauchage seront permanents et énormes et le camp d’en face ne lésinera pas sur les moyens. Awa Guèye Kébé et Kidiéra sont déjà partis. Tant pis pour eux ; tant mieux s’ils devaient être les derniers à quitter l’épopée ‘Rewmi’. D’autres départs ne sont pas à exclure. Mais cela ne dépend que d'Idrissa Seck. A lui de donner le minimum de lisibilité à ses actes politiques. A lui également d’éviter les erreurs passées comme les audiences ‘occultes’, voire fantaisistes avec le président. Certes, il est une courtoisie républicaine qui voudrait que l’on réponde à l’Exécutif, quand il en manifeste l’intérêt, quand la survie de l’Etat est menacée. Mais une audience aux contours mal dessinés cause plus de torts qu’elle n’apporte de solutions. Vous aurez ainsi à recevoir les émissaires du ‘Pape’, officiels ou officieux, peu importe, en fin de compte. Ils vous feront surtout des propositions des plus mirifiques ; elles seront toujours démenties par le Palais, et tournées en dérision par sa presse de chapelle. Mais jamais, le combat n’aura été aussi prometteur ; la détermination aussi intacte. Donc ne vous laissez pas piéger une troisième fois. Celle-là serait vraiment fatale. La saga, elle, continue.
Alioune Kébé DIA Rewmi e-mail : une_voix_en_france@yahoo.fr