L’incohérence de la Revue du Code Electoral
Du 1er au 5 décembre, va se dérouler, à l’Ecole Nationale de Police et sous l’égide du ministère de l’Intérieur, une rencontre entre les partis politiques, portant sur une Revue du Code Electoral. En premier lieu, on pourrait se demander quel est le processus qui a abouti à la décision d’organiser cette revue ? Les partis politiques ont-ils été associés à ce processus ? Pourquoi devrait-on répondre à des questions préparées par le ministère et pas à d’autres préparées d’un commun accord ?
A mon avis et en toute logique, l’opposition réunie dans le groupe Bennoo ne devrait pas participer à cette rencontre. Pour la raison majeure qu’il n’y a eu aucune évaluation objective des scrutins précédents, notamment ceux de la présidentielle et des législatives de 2007, ce qui a d’ailleurs toujours été une des revendications de Bennoo. Ce sera donc, une fois de plus, l’occasion de parler français et de verser dans des juridismes insensés et incompréhensibles pour, au finish, entériner les décisions savamment préparées du ministère avec des coquilles volontairement introduites dans le texte préliminaire afin de contourner le vrai débat. En d’autres termes, le ministère s’apprête à enfariner l’opposition, avec sa caution.
Que va-t-on faire avec un code qui ne garantit pas des élections libres, transparentes et régulières, où un ministre peut décréter la prolongation d’un scrutin au-delà de l’heure limite et sur l’ensemble du territoire, où l’envoi aux partis politiques des listes d’électeurs, bureau de vote par vote, se fait selon le bon vouloir du ministère, où une CENA dispose de prérogatives qu’elle ne peut mettre en œuvre, etc. ?
Cette CENA, ayant largement montré ses limites et désormais sans président depuis peu, devrait être dissoute au profit d’une institution indépendante qui dessaisirait, de facto, le ministère de l’Intérieur et ses services de l’ensemble du processus électoral.
De plus, le fichier audité en 2007 et 2009, nous l’avons déjà dit ailleurs, ne peut être ni revu, ni corrigé encore moins amélioré et un troisième audit, organisé cette fois-ci, avec des experts de la communauté européenne, ainsi que suggéré par le président de la République, le 3 avril 2009, aboutirait aux mêmes conclusions.
En réalité, le Sénégal ne dispose pas d’un fichier électoral, mais d’un fichier hybride erroné, servant aussi bien à l’impression de cartes d’identité que de cartes d’électeur, et sur lequel, toute sorte de manipulation est possible.
Notre conviction est que nous devons nous atteler au plus vite à confectionner un nouveau fichier exclusivement dédié à des élections avec des cartes d’électeur totalement différenciées des cartes d’identité, afin d’éviter toute confusion et que l’encre indélébile invisible figure en bonne place dans le code électoral pour l’identification de l’électeur au moment du vote.
Ce n’est qu’une question de volonté politique et cela peut prendre fin en décembre 2010, si l’on s’y prend tôt. Une solution pourrait être envisagée en prenant comme noyau dur, les électeurs de mars 2009, mais puisqu’il ne faut pas remuer le couteau dans la plaie, mieux vaut tout reprendre, en se basant sur les lieux de vote pour les certificats de résidence des électeurs. Et qu’on laisse les cartes d’identité aux agents assermentés de l’Etat, c’est-à-dire, les services de police et de gendarmerie, aptes à savoir dans quelles conditions délivrer ce type de document !
Nous n’avons rien à gagner avec un désordre à la suite d’élections contestées et il est grandement temps que les uns et les autres reviennent définitivement à la raison afin d’éviter à notre pays des convulsions inutiles. C’est mon point de vue.
Iba GUEYE