mal gouvernance
LA REPUBLIQUE : CIMENT QUI FEDERE TOUTES NOS CONVICTIONS SPIRITUELLES
Récemment, les sénégalais ont noté des dérapages dans les déclarations officielles pouvant semer la zizanie au niveau des croyances spirituelles et confrériques. C’est comme s’il s’est agi, à travers des bouts de phrases, de s’essayer à un exercice périlleux donnant l’impression de vouloir mettre sur des tables de valeurs hiérarchiques les croyances spirituelles. Certains ont parlé de bourde monumentale ou de lapsus. En réalité il semble s’agir d’une entreprise insidieuse et machiavélique à but électoral. Il s’agirait, pour les diseurs de gaffes, de chercher à désaxer les déterminants du vote.
D’ici 2012, il y a de fortes chances que, sous la poussée folle des ambitions, le débat politique sorte du cadre des bilans et autres propositions pour emprunter les chemins de la suggestion tacite d’un choix affectif et collectif plus par parti-pris que par libre arbitre du citoyen. C’est ce que cherchent les diseurs de gaffes qui savent que les déterminants du vote en 2012 devraient logiquement s’articuler autour des questions de base comme le travail, la santé, le logement, la sécurité, l’environnement, l’éducation, la bonne gouvernance, les vertus etc. De tels déterminants économiques et sociaux n’arrangent certainement pas les diseurs de gaffes qui préfèrent désaxer le vote autour de motivations affectives comme l’ethnique, le spirituel, le confrérique.
Un citoyen libre d’exercer son pouvoir électoral en toute connaissance de cause est dangereux pour les diseurs de gaffes. C’est pourquoi, à notre avis, les gaffes en parole ne sont pas des lapsus mais sont programmées et ont un objectif précis qui veut pousser les républicains qui condamneraient ces mêmes gaffes à donner l’impression de s’attaquer en réaction à une croyance spirituelle, à une confrérie.
C’est un piège politique. C’est un jeu dangereux et les joueurs le savent bien.
En actionnant les leviers liés à la croyance spirituelle et aux confréries, les diseurs de gaffes veulent pousser les autres à s’inscrire en porte-à-faux pour tomber dans le piège du reniement de la croyance magnifiée.
C’est une tentative machiavélique de désaxage des mobiles du vote pour le faire basculer du temporel vers le spirituel, de l’individuel vers le collectif, du libre choix vers l’affectif. Sans doute, le temporel est assez « hard » (dur) pour laisser passer comme lettre à la poste le bilan. Sans doute pensent-ils ces politiciens que le spirituel est plus à même d’installer les électeurs dans une logique de vote collectif-affectif occultant les errements graves notés depuis quelques temps.
En faisant les déclarations semant la zizanie sur les croyances spirituelles et confrériques des uns et des autres, le politicien cherche à alimenter un débat dans le subconscient des masses pour capter d’abord un électorat bien ciblé. En attaquant avec véhémence cette attitude, les autres prêtent le flanc et installent le pays dans une logique affective de nature à désaxer les déterminants du vote. A qui ne profiterait pas un vote libre du citoyen confronté aux problèmes quotidiens ? A qui profiterait un désaxage des mobiles du vote ?
Une chose est sûre. Les diseurs de gaffes continueront les écarts de langage d’ici 2012. Il faut simplement éviter de tomber dans leur piège par réaction véhémente et démesurée.
Les acteurs politiques et spirituels doivent faire preuve de plus de lucidité en recentrant le débat autour d’un vote citoyen, sincère et libre qui transcende les familles, les villages, les ethnies, les religions, les confréries. C’est cela la république et on a tous intérêt à rester en république !
Certainement ceux qui titillent l’arme des croyances spirituelles populaires notamment confrériques ont un objectif temporel à court terme. Mais cette façon de faire est irresponsable parce que grosse de danger pour la cohésion nationale en dressant consciemment les citoyens les uns contre les autres dans des espaces réduites. Nous sommes trop imbriqués et liés pour survivre en polémique spirituelle fratricide ! Cette stratégie machiavélique de gaffes calculées est une démarche politique de courte vue qui place l’intérêt individuel du politicien au dessus de l’intérêt collectif des citoyens.
Ceux qui actionnent ces leviers là ne veulent qu’une chose : brouiller les déterminants du vote en 2012. En réalité, ils ne veulent pas d’un vote rationnel sur des bases individuelles en fonction du vécu de tout un chacun. Ils veulent un « farr» collectif affectif de partisans à la place d’un « Fal » lucide de citoyens.
Ce qui désole, c’est que ce glissement peut demain tuer la république.
C’est pourquoi sont d’abord interpelés les guides spirituels qui doivent remettre les hommes politiques dans les rails du temporel et insister sur le choix libre des citoyens pour préserver la république qui est l’unique ciment qui fédère toute les croyances spirituelles.
Si demain les politiciens nous font tomber dans le piège d’un vote affectif, confrérique ou, ethnique, nous serons étroits dans la république. Il n y aura plus de république.
Nous devons savoir que c’est la république qui fait de nous tous des citoyens égaux en droit. C’est la république qui respecte toutes les croyances spirituelles avec une égale dignité. C’est la république qui garantit la paix sociale au-delà de nos croyances différentes et non antagoniques.
Le comprendre est déjà un pas important pour faire face aux calcules machiavéliques des diseurs de gaffes qui titillent nos croyances spirituelles à des fins politiciennes.
Le comprendre c’est aussi créer un cadre permanent et autonome de dialogue des croyances spirituelles.
Ce chantier là du cadre formel de dialogue des croyances doit être défriché par les guides spirituels pour renforcer la république qui est notre arche commune.
Ce chantier serait l’antidote idéal contre les propos aventuriers des diseurs de gaffes.
Mandione15@gmail.com
Mots et maux de la décentralisation Amorcé dans les années 60, le processus de
décentralisation s’est élargi et approfondi en 1996 avec le transfert aux
collectivités locales de certaines compétences[1] dévolues jusque là à l’État, la
création de nouvelles communes et communes d’arrondissement ainsi que l’érection en
collectivité locale de plein exercice des régions. Ce nouveau pallier dans le
processus de décentralisation, s’inscrit dans la promotion de certaines valeurs
républicaines de renforcement de la démocratie et de la citoyenneté, de bonne
gouvernance, de renforcement de la cohésion sociale, de lutte contre les inégalités
et de réduction de la pauvreté.
Dans ce cadre, l’État, garant de l’unité et de la solidarité nationale, se fixe
comme ambition de donner aux collectivités locales les moyens de leur politique de
développement. Il s’agit aussi d’alléger le contrôle de la gestion publique
locale, d’accompagner au mieux les changements et d’harmoniser l’intervention des
partenaires.
Huit années après la mise en place de la régionalisation des maux subsistent.
Les finances locales constituent, sans aucun doute, le maillon faible du processus
de décentralisation au Sénégal. Les ressources des collectivités locales
proviennent à hauteur de 20% des transferts financiers de l’État constitués
essentiellement du Fonds d’équipement des collectivités locales (FECL) et du Fonds
de dotation de la décentralisation (FDD). L’enveloppe de ces fonds est largement
en deçà des ressources nécessaires aux collectivités locales pour faire face à
leurs nouvelles responsabilités. Tant que la réforme sur la fiscalité locale
n’aura pas produit les résultats escomptés, l’État devra augmenter sensiblement
l’enveloppe de ces fonds. Ceci permettrait aux collectivités locales d’assumer
correctement les compétences qui leur sont transférées et d’honorer leurs
engagements financiers vis-à-vis des partenaires extérieurs.
Les mesures à entreprendre se situent à trois niveaux : l’amélioration des
ressources propres des collectivités locales par la réforme de la fiscalité locale
, la réforme des systèmes de transferts financiers de l’État et l’orientation de
l’aide extérieure aux collectivités locales vers un appui budgétaire. Les
différentes études menées sur les finances locales, depuis 1997, confirment cette
tendance pour laquelle l’Etat et les représentants des associations d’élus locaux,
souhaitent inscrire des actions concrètes.
Sur le plan des ressources humaines, les collectivités locales disposent d’une
palette de lois et règlements pour mettre en place une fonction publique locale.
Cependant les collectivités l’ont peu investi, malgré l’expiration de la période
transitoire de cinq (5) ans du système de convention de mise à disposition de
fonctionnaires pour l’exercice des compétences transférées.
Afin de rompre cette situation de dépendance, l’État a entrepris des mesures
opérationnelles visant à renforcer les capacités humaines des communautés rurales
avec le recrutement de secrétaires communautaires. Cette série de mesures a été
complétée par le renforcement des moyens humains et techniques des Agences
Régionales de Développement (ARD). Ce qui pose dans toute son acuité la nécessité
d’élaborer un statut de la fonction publique locale tel que prévu à l’article 165
du code des collectivités locales.
La formation des acteurs locaux demeure une composante majeure du renforcement des
capacités. A cet égard, une redynamisation du Dispositif National Paritaire de
Formation (État, élus et partenaires) permettrait de mieux structurer l’offre.
Déconcentration
Le renforcement du processus de décentralisation doit aller de pair avec celui de la
déconcentration. Ce qui doit se traduire par la relance volontaire de ce processus
au niveau de l’Etat mais aussi par l’élargissement du bloc déconcentré, et la
recherche d’une grande performance de l’administration territoriale.
La relance de la déconcentration passe, d’une part, par un changement de mentalité
des autorités centrales et, d’autre part par l’adoption de textes de lois, à
l’instar de la décentralisation. Ce qui en ferait une politique autonome et
indépendante.
La restructuration des services donnera, au plan organisationnel une plus grande
cohésion, davantage d’efficacité et une économie de moyens.
L’efficacité c’est aussi le développement du contrôle de la gestion publique
locale. La responsabilisation des collectivités locales doit être accompagnée par
la promotion de la bonne gouvernance, garant de l’optimalisation des deniers
publics. Le contrôle de légalité et le contrôle budgétaire confèrent aux
représentants de l’État une grande responsabilité dans la gestion publique locale.
Les missions des services chargés de ce contrôle doivent être menées en synergie
afin de donner à l’État les moyens de renforcer l’orientation vers l’appui
budgétaire. Il s’agit notamment de la Direction des affaires générales et de
l’administration territoriale (DAGAT), de la Direction financière du ministère des
collectivités locales et de l’Inspection de l’administration territoriale)
La décentralisation, s’est aussi la mise en place de mécanismes de suivi et
coordination des interventions .Le Conseil National de Développement des
Collectivités Locales (CNDCL), a été créé en 1996 , en ce sens, pour servir de
cadre de rencontre entre l’État et les élus locaux. En dépit de la reconnaissance
de son importance capitale, son opérationnalité reste à prouver. Espérons que le
projet de création d’un secrétariat technique du CNDCL, à l’étude, saura la
redynamiser. La concertation entre l’État et les partenaires au développement a
été toutefois formalisé en février 2001 avec la mise en place d’un cadre de
concertation des acteurs en décentralisation qui cherche à coordonner et
harmoniser leurs interventions.
Hadja TINE
Violence au Sénégal : Que faire après le pogrom manqué contre le Bureau politique du Ps à Thiès ?
L’incendie provoqué lors du meeting du Ps à Thiès constitue, d’une part, une manifestation de la résurgence de la violence politique au Sénégal et exprime, d’autre part, un nouveau mode opératoire de ce phénomène. Il met également en relief l’émergence et le rôle des milices dans l’espace politique. Il s’agit de groupes armés qui sont sous le commandement d’un homme politique ou religieux. Les déclarations émises par le correspondant de Wal Fadjri à Thiès désignent comme commanditaire le responsable des Jeunes wadistes. Ce dernier s’est ensuite rétracté (…)
Il importe de relever dans ce cas de violence produit à Thiès, quelques réactions de la classe politique : il s’agit surtout des déclarations des frères de parti du présumé commanditaire. En ce sens, la qualification juridique des faits de cet acte de violence ne peut être que criminelle vu le lieu et les circonstances de la production de cet acte. C’est pourquoi il est regrettable d’entendre un député libéral, Me Tafsir Thioye, qualifier, sur un plateau télévisé, cet acte de fait isolé, au moment où quelques-un de ses frères de parti ont fait preuve de responsabilité à travers leurs déclarations. De plus, il est regrettable d’ignorer dans un régime dit de libertés la gravité de certains actes de violence comme cette tentative de pogrom. N’est-il pas aussi contradictoire que de condamner cet acte, et en même temps le qualifier de fait isolé pour avancer un argumentaire fragile ? Le bon sens et la sagesse ne recommanderaient-ils pas de condamner l’acte et de s’en limiter là ? Au même moment, le silence du maire de la ville de Thiès où cet acte criminel s’est produit, demeure plus qu’étonnant pour quelqu’un qui nourrit des ambitions présidentielles. Encore faut-il préciser que, dans le cadre de la police administrative, le maire a la double casquette d’autorité administrative et celle de police judiciaire.
Pourtant, des responsables du Pds à Thiès ont pris leurs distances par rapport au présumé commanditaire et réclamé que la loi s’applique dans toute sa rigueur. Dans ce cadre, certaines déclarations de responsables du Pds montrent que, du point de vue moral, la violence ne doit pas faire l’objet d’une approbation au sein d’une organisation politique, même si elle est le fait d’un de ses membres. A ce titre, le député Mamadou Dramé a tenu des propos qui mettent bien en lumière le principe de la continuité des institutions, autrement dit ‘les hommes passent les institutions restent’. Il précise : ‘Nous ne pouvons pas cautionner la violence. Puisqu’il (Massaly) réclame lui-même cet acte, la loi doit s’appliquer. Le Sénégal a eu un président qui s’appelle Senghor, Abdou Diouf, il s’appelle Abdoulaye Wade, il s’appellera quelqu’un d’autre. Je suis un Sénégalais, je ne peux pas cautionner de tels actes.’ De plus, Mme Hélène Tine, porte-parole de l’Afp, déclare : ’Au plan politique, nous allons analyser ce qui vient de se passer et voir ce qu’il y a lieu de faire. On n’acceptera pas que la violence parte de Thiès ! Nous serons aussi vigilants. On est à l’approche de la fête du 4 avril et on ne peut accepter que la grâce présidentielle soit donnée à l’instigateur de ce qui s’est passé. Rappelez-vous des condamnés dans l’affaire Me Sèye, qui ont, par la suite, obtenu la grâce présidentielle. Cette fois, nous n’accepterons plus cette grâce pour ces monstres de l’Alternance qui cherchent à brûler le pays et le peuple.’
Dans le même registre, M. Pape Samba Mboup, ministre, chef de cabinet du président de la République, précise dans une radio de la place : ‘Le Sénégal est un pays de droit. Il y a des militants qui croient que tout ce qu'ils font, va faire plaisir au président. Abdoulaye Wade n'a pas besoin de ça pour gagner des élections. Il est arrivé au pouvoir sans marcher sur des cadavres. Il n'aime pas la violence. Que ce soit Massaly ou qui que ce soit, nous ne cautionnons pas ces choses-là. On ne va pas laisser des gens saboter ce que nous sommes en train de faire. La justice doit faire son travail’. Une dernière déclaration importante du point de vue de l’analyse est celle de M. Babacar Gaye du Pds qui précise : ‘Il est regrettable que dans une démocratie, les contradictions se règlent par la violence et non par les idées… Ce regain de violence politique n'honore pas notre démocratie et constitue un danger pour la paix civile et la stabilité politique de notre pays saluée par toute la communauté internationale.’
Ces déclarations auxquelles il faut ajouter celles des autres partis de l’opposition et de la majorité, des organisations des droits de l’homme et de la société civile, mettent en relief une éthique de responsabilité. Car cet attentat manqué contre la direction du Ps est révélateur d’une invention de pogrom dans l’espace politique sénégalais. Cela signifie qu’on assiste à de nouveaux modes d’action ou d’expression de la violence. Mais si la démocratie suppose une expression plurielle des idées et une gestion des contradictions par des arguments, la violence politique apparaît comme un corps étranger qui peut la gripper lorsque des garde-fous ne sont pas créés et rendus opérationnels.
Ainsi, il importe de décliner maintenant quelques pistes de sortie de crise, après avoir relevé ces déclarations politiques au sujet de cet incendie de la tribune officielle du meeting du Ps à Thiès. L’histoire et la science politique nous enseignent qu’après la chute du Tsar en Russie, la question a été, selon Lénine, ‘que faire’ pour reconstruire ce grand pays ? A cette interrogation, une des réponses a été, au plan politique, la création du Parti communiste de l’Union des Républiques socialistes soviétiques (Pcus). De la même manière, l’on peut se demander ‘que faire ?’ après l’incendie criminel de Thiès ? Dans le cas d’espèce, il s’agit de décliner quelques pistes en partant de l’analyse qui précède.
Pour que des énergumènes ne se jouent plus de la faiblesse des sanctions du pouvoir politique, il urge de rompre avec l’impunité, car ‘toute société qui n’a pas de culture de sanction se désagrège’. Pour ce faire, le pouvoir se doit de vider sans ambages les dossiers cités ci-haut. Car il est incompréhensible d’appliquer la loi pour les voleurs de poules et de protéger les bandits à col blanc. Une justice à géométrie variable n’est pas un facteur qui garantit la cohésion d’une nation. Il s’agit d’éviter que les citoyens soient obligés de prendre eux-mêmes leur propre sécurité. En d’autres termes, la loi du talion ne doit pas être le recours ultime dans un Etat de droit. C’est pourquoi les magistrats ont une responsabilité historique dans la consolidation de l’Etat de droit et de l’indépendance de la justice. Un Etat est toujours gouverné par un principe de continuité des institutions et la société a toujours le droit de demander des comptes à tout agent de son administration (article 15 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789).
Par ailleurs, il urge d’opérer une introspection collective sur certaines pulsions et comportements qui encouragent la violence ou l’impunité dans la société sénégalaise. Ce processus de civilisation contribue à la construction d’un espace civilisé et pacifique. Mais cette pacification de l’espace public passe par un processus de socialisation. Pour ce faire, les partis politiques qui constituent un des cadres, ont un rôle important à y jouer. Il s’agit, entre autres, de construire une culture politique et citoyenne pour leurs militants. En cela, les partis ont un rôle de formation politique de leurs militants. L’intérêt de cette socialisation politique permet l’intériorisation de valeurs incarnées par la République. Cette éducation politique et civique est pourtant assurée à travers des cadres structurels dans certains partis comme le Ps qui vient d’ailleurs d’organiser un colloque international sur ‘les processus de démocratisation en Afrique’. Sous ce rapport, les partis politiques sénégalais doivent renouer avec leur fonction de socialisation politique.
En outre, la bonne gouvernance doit passer par la suite à donner aux résultats des audits : il s’agit de faire de sorte que force reste à la loi. Il est de ce point de vue important que la marchandisation de l’impunité des audits avec la transhumance partisane ne soit plus une variable déterminatrice du gouvernement de la société. Car, si la tyrannie s’enveloppe de mystère, la liberté commence par la clarté. A ce titre, la promotion de bandits à col blanc à des positions politiques de pouvoir favorise des sentiments de violence latente. Dans ce cadre, l’Etat de droit est devenu aujourd’hui la principale caractéristique des régimes démocratiques. En faisant du droit un instrument privilégié de régulation de l'organisation politique et sociale, il subordonne le principe de légitimité au respect de la légalité. En d’autres termes, l'Etat de droit suppose de nos jours l'existence effective ou même minimale de libertés individuelles et collectives (liberté de croyance, d'association, d'opinion) et l'indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis des pouvoirs politiques. Il suppose aussi des lois connues, publiques, appliquées par les forces publiques (police et tribunaux particulièrement), y compris à l'endroit d'elles-mêmes, et la bonne gouvernance.
A ce titre, le discours sur la bonne gouvernance doit transcender l’appartenance politique pour devenir une véritable révolution dans la gestion des affaires publiques. Chaque citoyen doit y trouver son compte et le sens de la justice sociale doit imprégner l’action publique. En cela, l’Etat de droit doit consacrer la suprématie de la loi sur tous. Il est aussi important de renforcer les corps de contrôle de l’Etat, notamment l’Inspection générale d’Etat (Ige), la Cour des comptes (Cc), l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) et le Conseil d’Etat (Ce). Toutes ces conditions réunies offrent des perspectives efficaces à la consolidation de la démocratie.
Au total, il semblerait que les condamnations morales de la violence dans le champ politique soient devenues quasi unanimes avec la consolidation des démocraties pluralistes, même si la violence semble inscrite dans une logique de négociation ou de marchandage de rentes. Dans la hiérarchie des impératifs qui structurent le destin des peuples, la démocratie apparaît comme une problématique planétaire, voire une exigence historique. Mais la construction de l’infrastructure démocratique ne peut se faire dans un espace non civilisé, voire non pacifié. En cela, la violence doit avoir l’Etat de droit comme mode de régulation. Car toute communauté humaine norme le comportement de ses membres, puisque l’anomie n’existe pas dans les sociétés humaines. En ce sens, les entrepreneurs de milices qui entretiennent la violence au Sénégal doivent se mettre à l’évidence que le commun vouloir de vivre en commun ne se construit qu’à partir d’un abandon ou d’un contrôle de certaines pulsions. L’autocontrainte qui sous-tend, au sens éliassien (Norbert Elias) du terme, le contrôle social dans la dynamique de construction étatique, se doit aussi de passer par le bon exemple.
L’autorité politique qui est chargée d’assurer la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire ne doit exercer sa fonction avec des discours émaillés de violence verbale. Les déclarations du genre : ‘Sédhiou a la chance d’être mon terroir. Ç’aurait été ailleurs, j’aurais donné l’ordre d’ouvrir le feu. Mais si je le fais, les populations diront que c’est parce que je suis de Kolda. J’ai failli à mon serment, car je n’ai pas autorisé qu’on ouvre le feu’, sont révélatrices d’un manque d’éthique de responsabilité. Car, tous les terroirs du Sénégal se valent et ne doivent faire l’objet d’aucune différenciation à travers des propos. Joseph Konrad ne disait-il pas d’ailleurs dans son élégie à Léopold Sédar Senghor : ‘Tout brin d’herbe a son coin de terre d’où il tire sa source, sa force et sa vie. Aussi bien l’homme est enraciné dans son sol natal d’où il tire force, foi et vie.’ De ce point de vue, l’attachement de tout individu à son terroir ne doit entacher en aucune manière la primauté des principes de neutralité et d’égalité dans l’exercice du service public de la politique administrative.
Aujourd’hui, les Sénégalais ont besoin que leur confiance soit restaurée vu la récurrence des actes de violence d’une manière générale. Pour ce faire, il est impératif que l’Etat reprenne sa fonction de seul détenteur du monopole de la violence légitime. Mais dans la mesure où il ne peut agir sans tenir compte des logiques sociales qui constituent les assises sociales de la société sénégalaise, les guides religieux et autres leaders d’opinion doivent rompre avec le silence. Dans ce contexte de tensions, chacun doit jouer une mission de colombe : Unissons le mieux de nous-mêmes pour l’intérêt de la République ! (Fin)
Abdou Rahmane THIAM Docteur en Science politique Montpellier - France
Bennoo et appréhensions justifiées.
Depuis l’avènement du régime libéral, les Sénégalais ont progressivement épousé l’idée que la structure des batailles politiques représentées échoue à figurer les situations réelles des citoyens. Il y a un décalage tel que l’expression des projets par les candidats à l’élection ne rencontre pas les aspirations des groupes sociaux qu’ils prétendent représenter. Une structure comme Bennoo est appréhendée dans sa transversalité, c’est-à-dire en retraçant son passage des causes qui ont milité à sa création, à sa forme organisationnelle et à sa démarche politique.
Or les concertations peu translucides aux allures de coquetteries politiques à n’en pas finir et les désaccords souvent exprimés sur la place publique, font que Bennoo reste encore perçue comme un idéal au lieu d’une structure militante fédératrice et stabilisée. Ce qui pose problème aux yeux de l’opinion sénégalaise, car la démarche, la lisibilité du projet politique, la clarté des idées et la position tranchée sur des questions aussi essentielles que celle de l’unité dans le choix d’un présidentiable au nom de cette coalition font terriblement défaut. Il faut exprimer une position claire pour faire en sorte que la parole politique, souvent exprimée par un porte-parole du jour, manifeste une vision qui est celle de Bennoo. Cette vision doit, dès à présent s’afficher à travers un leader agréé dans le consensus car entre le projet et le porte-étendard, le rapport est double. L’expressivité du second permet au premier de s’incarner en un sujet politique décryptable. En retour, le projet, tentative de réponse de la demande sociale ainsi clairement exprimé et expliqué aux sénégalais, autorise les leaders de cette coalition à se constituer en tant que fer de lance du débat politique.
Pour cela, Bennoo bénéficie d’une opportunité inespérée car la demande sociale trouve aujourd’hui des réponses pertinentes dans les conclusions des Assises nationales et la charte sur la bonne gouvernance. Dans la mesure où ce projet s’adresse également à l’ensemble des citoyens, il constitue en outre pour Bennoo (si cette coalition en fait un bon usage), une promesse qui transforme la parole politique en engagement faisant de chaque dessein politique une entreprise profitable à chacun et à tous. Vouloir s’en distancer en parlant de candidat naturel ou de programme de parti ou encore répondre à toutes les provocations, est un jeu dangereux avec le feu.
Macky Sall n’est lié aux Assises nationales qu’à la suite de son adhésion à Bennoo. A ses risques et périls, il s’est voulu clair sur sa volonté irrévocable d’être candidat à la Présidentielle prochaine. Une telle audace de Macky Sall, exploitée à bon escient par Bennoo pourrait d’ailleurs être salutaire car le leader de l’Apr serait la porte de sortie pour les libéraux inconditionnels qui ne se reconnaîtraient plus dans l’assemblage hétéroclite du Pdsl au service de Karim Wade. Au bout du compte, c’est la mouvance au pouvoir qui est affaiblie. D’autre part, Macky Sall est encore sous l’euphorie née de sa tournée nationale et internationale, d’où son attachement jaloux à sa liberté de nouveau chef de parti, ce qui n’est pas le cas pour Moustapha Niasse et Ousmane Tanor Dieng. Ils ont directement milité en faveur de la concertation historique nationale des Assises. L’idéal serait donc que le Progressiste et le Socialiste, ensemble avec leurs partisans, s’entendent au plus vite pour que l’un ou l’autre soit le porte-étendard de la pluralité de Bennoo, puisque tout porte à croire que Madior Diouf, Abdoulaye Bathily, Talla Sylla et Amath Dansokho sont prêts à se retirer en faveur d’un candidat consensuel. Tous les leaders de cette coalition deviendraient ainsi une opportunité pour la Nation au lieu d’apparaître comme une race désespérée de prétendants à la prédation. Tout compte fait, Bennoo pourrait présenter deux candidats sérieux face au candidat de la mouvance présidentielle.
Cette urgence est telle que malgré l’embellie du 22 Mars 2009, Bennoo n’est pas à l’abri d’un différé des jugements sur ses actes d’expression et de représentation, si sa parole politique se réduit encore à une posture seulement communicationnelle et diffuse. Son image et sa crédibilité en prendraient un sacré coup, d’autant que Niasse, Tanor et compagnie tardent encore à aller vers les Sénégalais afin d’expliquer comment un candidat élu sur la base d’une Constitution républicaine (fut-elle écornée par Wade), lui donnant un mandat de cinq ans, pourrait se soumettre à un accord non coercitif pour une transition ? Quelles garanties offrir aux Sénégalais sur la fiabilité de l’engagement d’un tel élu au-delà de la simple exhibition de critères comme le pédigrée, l’expérience politique ou le patriotisme qui ont tous le vilain défaut de dépendre de critères souvent subjectifs pour leur appréciation (Wade en est la parfaite illustration)?
Il s’agit donc pour Bennoo de corroborer les charges émotives, affectives et passionnelles des Sénégalais aux opportunités qu’offre le projet politique, économique et social issu des Assises. Si le défaut d’engagement au consensus et à la conciliation se traduit par une multiplication de candidatures dispersées dans Bennoo à l’élection présidentielle, c’est le signe que cette coalition cesse d’être arrimée solidement à la société réelle. Il y aura rupture de croyance alors que les sorties des candidats seraient simplement une mimésis politique des luttes des groupes ou des classes intéressées dont ils se font les champions. Les électeurs pourraient alors refuser de valider les discours socialistes, progressistes ou républicains dans lesquels ils ne peuvent plus s’accorder.
L’indécision ou du moins ce qui la ressemble, au moment où les Sénégalais attendent des actes forts, cohérents et décisifs, produit une érosion qui fait apparaître les actes politiques déjà accomplis par Bennoo comme des actes gratuits. Ce diagnostic paraît paradoxal mais dans la mesure où la rhétorique politicienne n’atteint pas encore les véritables aspirations des Sénégalais au changement, il semble que les mots prononcés sur la scène du politique ne sont là que pour mettre en valeur et entretenir ce que l’on pourrait appeler des comédiens du politique.
La confiance en Bennoo suppose donc une forme de transparence par une démarche proactive de dialogue et de contact avec le peuple dans un processus qui opère en situation d’asymétrie d’information. Cette asymétrie caractérise en premier lieu la relation entre l’offre (les élites politiques et bureaucratiques) et la demande (l’ensemble des citoyens) politiques, dont il est facile de percevoir qu’elles ne disposent pas de la même maîtrise des éléments pertinents pour appréhender l’action publique. Dès lors, que Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Amath Dansokho, Abdoulaye Bathily et les autres, occupent le terrain politique en allant ensemble vers les Sénégalais dans toutes les régions et contrées du pays afin d’expliquer leur état de préparation à la Présidentielle et le projet déjà existant des Assises nationales. Bennoo doit donc s’enhardir et s’engager résolument dans la bataille de terrain au contact des Sénégalais de l’intérieur du pays.
Frédéric Tendeng / fredcikaw@gmail.com
Alerte
Sommes-nous tous en danger ? Eh bien, celà peut inquiéter, mais les périls qui nous guettent sont réels. Nous assistons de plus en plus à des catastrophes dont nous prenons Dieu comme prétexte, alors que nous sommes les acteurs des ces faits.
En effet, combien d’accidents, effondrements, affaissements… se sont déroulés sous nos yeux avec de multiples dégâts collatéraux, que l’on impute au destin. Nous sommes tous responsables, face au laxisme, au mépris du danger.
Nous avons en mémoire, l’émanation de gaz de la Sonacos de Dakar, l’incendie de l’usine Lesieur au Mole 1, la catastrophe du «Joola», l’effondrement de l’immeuble de la rue 25 à la Médina, et le plus récent, l’incendie du magasin de pneus des Allées Papa Gueye Fall.
Les causes souvent liées au destin, sont imputables à notre négligence coupable, car les acteurs de la vie active qui sont chargés de concevoir, d’étudier, de construire, de vérifier, de contrôler, ne prennent pas en compte les aspects sécuritaires de ces différentes réalisations, par rapport à leur environnement direct, ne respectant pas les normes ou règlements.
Le volet de sécurité Incendie est encore mal perçu dans nos pays en voie de développement, ce qui nous occasionne des pertes très importantes en cas de sinistres. Nombre de chefs d’entreprise, d’usines, de fabriques, de lieux de commerce, méconnaissent les dispositifs de sécurité, disposés à protéger leurs structures.
Ceux-là même qui en disposent, n’instruisent pas ou ne font de mise à niveau, de leur personnel, afin qu’il ait les réflexes de sécurité. Le secteur dit informel est le plus touché par ce phénomène, soit parce qu’inculte ou refusant d’investir sur le matériel adéquat.
Combien de visas ou de permis ou autres documents ont été délivrés sans que le matériel ne soit visible ?
Combien de commissions de contrôle ou de vérifications sont soudoyées afin de leur éviter le déplacement pour faire l’état des lieux ou le constat qui sied ?
L’on est tenté de se demander si les organismes de sécurité publics sont fonctionnels ou s’ils exercent réellement leurs pouvoirs.
Il n’est pas rare de voir des agences immobilières, vendre des terrains non habitables (qualité du sol, inondations, atmosphère non propice…) et disparaître comme des fantômes, laissant les acquéreurs dans le désarroi.
Nous sommes tous en danger, messieurs, sachez évaluer et minimiser les risques.
P.B.GUEYE / Bo-gueye@live.fr
Déchaînement de la mer sur les plages : tout sauf un mur !
Depuis quelques jours, il a été constaté le déchaînement de la mer sur plusieurs plages le long du littoral sénégalais. Ce phénomène est encore plus visible au niveau des plages des Parcelles assainies, de Diamalaye, de Yoff et de Saint-Louis où l’eau a rejoint des niveaux inquiétants. Cette situation qui se manifeste de manière cyclique chaque année prend de plus en plus d’ampleur avec le changement climatique à l’échelle mondiale. Et c’est l’occasion de faire le rapprochement avec ce qui se passe dans les autres pays en termes de perturbations du cycle de l’eau.
Les réactions des populations dans le vif sont compréhensibles, avec le souhait de mettre en place un mur de protection. La dernière en date est celle des populations de Guet Ndar et de Gokhu Mbathie sur la Langue de Barbarie. Mais le déferlement des eaux serait plus catastrophique si l’option de l’édification d’un mur est adoptée. En effet, ça sera l’occasion pour la force motrice de l’eau d’avoir un élément fixe à attaquer. Les exemples ne manquent pas des murs de protection qui tombent quelques mois après leur mise en place.
Ce qui doit pousser les autorités, les acteurs de la protection de l’environnement et les populations à une réflexion beaucoup plus poussée sur la gestion rationnelle de nos plages. Tout le monde constate avec regret les emprises privées installées sur les plages, dont les conséquences sont incommensurables. D’abord, ces emprises ont des conséquences néfastes sur les mouvements naturels des houles, le transfert des bancs de sable et autres phénomènes naturels qui se produisent le long des plages. Ensuite, l’accès à ces espaces très sollicités par la jeunesse, pour le sport ou des activités récréatives, est de plus en plus restreint. Ce qui peut avoir des réactions incontrôlées avec le mutisme des autorités sur ces phénomènes. Dernièrement, les réactions violentes des jeunes contre le morcellement en parcelles de la plage en face du centre aéré de la Bceao est illustratif.
Cette gestion rationnelle de nos plages suppose tout d’abord l’application des lois et règlements en vigueur. En effet, il est bien indiqué qu’aucun établissement ne peut être édifié sur 80 mètres après la ligne des hautes eaux. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui sur la plupart de notre frange maritime. Le cas de la Langue de Barbarie est encore plus édifiant, avec la pression foncière qui s’y exerce. Cette bande de sable, large de 300 mètres, devrait faire l’objet d’une surveillance beaucoup plus accrue afin d’éviter une catastrophe.
La nature subit plusieurs modifications de ses aspects naturels depuis plusieurs années. Le cycle de l’eau qui est une partie intégrante de ces aspects naturels a un caractère spécial. En effet, à chaque fois qu’on modifie ou supprime une partie du cycle de l’eau dans une partie du globe, les réactions sont immédiates et violentes. La construction d’un mur n’a jamais été une solution pour arrêter une mer. A la limite, cette solution peut être envisageable dans le cadre d’un cours d’eau pour éviter le déversement des eaux hors du bassin.
Vouloir construire les pieds dans l’eau ou proche de la mer ne doit pas être plus important que la protection d’un bien commun inestimable : les plages. Il faut réagir !!!
Mbaye Babacar DIAGNE - Expert Eau-Assainissement - BP 7719 Dakar-Médina / ababacarmbaye@yahoo.fr
Sommes nous prêts à vivre avec le Sopi jusqu’en 2033 ?
A l’élection présidentielle de 2012, le Sopi devrait en principe persister sur la candidature actuellement annoncée en dépit du «double défi à la nature et à la raison». Les cadres et militants du Pds devenu Pdsl savent pertinemment qu’une candidature à 86 ans pour un septennat signifie courir le risque de voir et d’avoir à gérer un chef d’Etat jusqu’à 93 ans. Le risque est sans doute bien calculé. Si le candidat de 86 ans passe en 2012, le Sopi pourrait continuer le tripatouillage de la Constitution pour nous placer dans le contexte de 1981 avec la fameuse modification de l’article 35 ayant permis à Diouf de continuer le mandat de Senghor. Les arguments ne manqueront pas au Sopi qui a montré qu’il ne porte pas de gants quand il s’agit de planter un couteau au cœur de la démocratie. Apres 2012, si le Sopi passe, c’est bien parti jusqu’en 2033 ce qui fera au moins 33 ans de règne au forceps sauf accident grave de parcours.
2033 avons-nous dit. Pourquoi ?
Après 2012, le candidat du Sopi, s’il gagne par extraordinaire, pourrait faire deux à trois ans pour mettre sur orbite le successeur désigné connu de tous. Ce dernier, dans ses habits de chef de l’Etat par héritage, organisera la mort politique de ses contradicteurs internes au Pdsl qui ne perdent rien pour attendre. Ils passeront tous à la trappe un à un sans cri sinon quelques soubresauts sans impact sur la marche des choses. Des pans entiers de toutes les institutions pourraient être neutralisés le temps du grand nettoyage. Jusqu’en 2019 fin du septennat, le dauphin aura le temps suffisant pour s’installer et installer sa machine.
En 2019, il briguera un septennat qui juridiquement sera son premier. S’il passe d’une manière ou d’une autre, il se présentera encore sept ans plus tard en 2026 pour aller en route vers 2033. Il aura ainsi fait 19 ans au sommet de l’Etat, le temps d’asseoir ses tentacules. Entre-temps les actuels leaders de Bennoo auront assez de temps pour des regrets si le destin les épargne.
En 2033, en fonction des rapports de force, le dauphin aura encore assez de forces pour continuer la bamboula pour atteindre le pronostic des 50 ans de règne du Sopi.
Ce scénario n’est pas une fiction
C’est du domaine du possible si tous les ingrédients notamment la fraude et le morcellement de l’opposition y aident. L’obstacle majeur à ce scénario est et n’est que 2012. Un moment historique durant lequel Bennoo Siggil Senegaal doit se dresser comme un seul homme pour barrer la route au patriarche. Il n y pas trente six mille solutions. Il n y a en que deux :
- La candidature unique et,
- Une stratégie audacieuse de lutte contre la fraude.
En 2007, ces deux stratégies n’ont pas fonctionné raison pour laquelle il y a eu la grande désillusion.
En 2012, les mêmes causes produiront les mêmes effets et les adeptes de la stratégie de candidatures multiples se réveilleront avec une migraine terrible qui les poursuivra durant sept longues années. Il n’est pas seulement hypocrite de prêcher une multiplicité de candidatures. Il est simplement suicidaire de le faire quand on sait qu’en face, la grande machine est en marche avec des moyens colossaux qui vont faire croire aux populations que les bouts de réalisation, à l’horizon 2012, sont le fait du patriarche et de son dauphin inaugurateur en chef.
La stratégie de conservation du pouvoir à l’horizon 2033 est en marche.
Elle a pris en compte tous les paramètres y compris les quatre variables qui peuvent mettre du sable dans le couscous. Ces variables sont :
Le combat interne au Pdsl qui dépendra de la détermination des autres dauphins s’ils ont l’intelligence de savoir qu’en 2012, il faut tout de suite anticiper les combats à venir pour ne pas être les agneaux du sacrifice pour le règne du dauphin voulu. Auront-ils, ces autres dauphins, assez de courage et de ressources pour anticiper le combat ?
Autre variable essentielle, la détermination du peuple qui, au delà des combines pourra dire un non intelligent et intelligible. Mais un peuple, peut-il faire foule sans catalyseur ?
Troisième variable, l’intelligence et l’oubli de soi des leaders de Bennoo qui n’ont pas le droit de laisser le Sénégal courir le risque d’une dévolution monarchique du pouvoir. 2012 ne doit pas être pour eux un baroud d’honneur mais un moment sublime de sagesse et de réalisme politiques au profit du seul Sénégal.
Enfin quatrième variable et non des moindres, le destin ou la main invisible du bon Dieu. Le chanteur Ndiaga Mbaye disait «Yallaa aay ci pootum buur. Dangay weer ba mu fendi mu taw ci kawam». Mais si le destin s’accomplit, la destinée elle, s’élabore. Ceux qui choisissent de peser sur le destin ont plus de chance que ceux qui attendent.
En définitive, prédire l’avenir n’est certes pas une photo. Mais c’est du domaine du possible que l’on peut corriger si la sincérité et la lucidité sont érigées en lanternes.
Les leaders de Bennoo auront trahi toutes les générations à l’horizon 2033, s’ils laissent ce scénario de la succession par le dauphin connu se dérouler.
Au lieu de perdre du temps à tirer sur le Sopi impopulaire dans les cœurs, ils doivent, ces leaders de Bennoo taire leurs ambitions personnelles et messianiques et proposer tout de suite au peuple une tête crédible quitte à aller vers une transition et non une mandature.
L’essentiel est d’arrêter le scénario d’une passation de pouvoir non démocratique. En somme, remettre la démocratie sénégalaise, seule gage de paix sociale et d’émergence, sur les rails.
En 2033, le temps ne sera plus aux regrets et l’histoire jugera.
Et puis, de 2012 à 2033, du mode d’expression des rapports de force, dépendra la stabilité du Sénégal qui s’accommodera difficilement d’un régime impopulaire imposé.
Le dire n’est pas une tentative de jouer les cassandres. «Magum waxoon na ako moo gën magum xamoon naa ko.»
Le dire tout de suite est une manière de tirer la sonnette d’alarme s’il y a encore assez d’oreilles pour l’entendre.
Mamadou NDIONE / Mandione15@gmail.com
Apix, mal gouvernance
Tares managériales ou questions et réponses de bonne gouvernance auxquelles s’adressent les résultats publiés par l’Agence de Régulation des Marchés Publics au titre l’année 2OO9 :
Terrain d’application de l’APIX
A la lueur de l’actualité économique et de part la pertinence des informations issues des audits portés au public, il ressort que les entreprises publiques sous tutelle de l’Etat ont été victimes de pratiques scandaleuses aux antipodes de la rectitude financière et de la discipline organisationnelle.
La passation des marchés publics et autres actes sont couronnés de mal gouvernance publique. Les externalités négatives ou encore les conséquences lourdes et fâcheuses, découlant de cette conduite éhontée au sein desdites structures, appelées à produire dans l’exercice de son management à secréter de la valeur ajoutée, sont alarmantes à plus d’un titre. C’est l’avis commun, suite aux échanges publiques et débats recueillis, auprès des doctes analystes, observateurs, praticiens et promoteurs de la bonne gouvernance.
Pour les tenants de cette école de pensée doctrinale, aux fondements de responsabilité et de valeurs citoyennes, il n’est plus question de reconduire les tares managériales dans la gestion des deniers de l’Etat confiés. Non plus, ne point omettre de situer les responsabilités civiques et par ricochet la nécessité absolue de corriger les fautes très graves relevées au nom du Droit. Et non en faveur de l’impunité, ajuster au mieux, les déséquilibres rompus par les personnes en charge de fructifier les retombées attendues dans leur charge de manager public.
Dans une unité d’action, les voix s’accordent pour que réparations soient apportées aux préjudices, remèdes aux dérives et corrections aux abus. En effet, il est question de la mal gouvernance dans la gestion des biens publics, par des mains inexpertes à la bonne tenue des procédures en vigueur et clairement définies. C’est la manifestation d’un comportement blâmable, le signe ostentatoire d’une attitude en nette opposition de l’éthique. Tout ce rejet de respect de la bonne gouvernance, justifie cette volonté participative ou encore élan citoyen, en plus de l’attention patriotique autour des tares managériales ; questions et réponses auxquelles s’adressent les résultats publiés par l’Agence de Régulation des Marchés Publics au titre l’année 2OO9. Les tables rondes autour de cette actualité d’intérêt national ont vu intervenir d’éminents professionnels de la bonne gouvernance. Pour cause : « Je tiens particulièrement à l’ancrage de la bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques. Que l’on me comprenne bien. » Dixit le Président de la République Me Abdoulaye Wade, extrait des Vœux du nouvel an de 2OO5 adressés à la Nation.
L’APIX, à la lueur du travail d’experts de l’ARMP confirmés dans leur fonctions d’auditeurs agrées, est signalée au premier rang du peloton en nette opposition de l’avertissement et ordre de pensée du Chef de l’Etat .Pire, l’APIX s’est illustrée dans un terrain d’application du non respect des bonnes manières et techniques de passation des marchés publics. La directrice, non plus le chargé de communication, n’ont pu calmer les ardeurs des citoyens avertis de transparence. Au contraire, c’est par la légèreté de réponses endémiques, que ce staff du top management et au plus haut niveau hiérarchique de l’APIX essaie en vain de convaincre. Il leur a été montré à la face du peuple, pièces justificatives à l’appui, arguments de preuves convaincantes, leurs manquements notoires et errements dans les règles régissant la bonne conduite de gestion. Les abus de nature diverses faisant ainsi affront à la bonne gouvernance ont été portés à l’opinion publique. C’est le constat à la suite de l’évaluation des débats ceinturant les audits auxquels ils étaient invités par divers médias.
La gestion de l’APIX, autant décriée n’a jamais été l’objet de contestation sérieuse et professionnelle de la part des personnes en charge. Leur avantage personnel au détriment d’une gestion saine est la marque indélébile de leur doigté et empreinte.
L’Etat non plus n’a point crié gare au nom de la bonne gouvernance. On se rappelle comme si c’était hier que Monsieur Djibo KA, pétri dans l’administration publique alors dans les rangs de l’opposition, fustigea sans retenue le statut non conforme de l’APIX. Et sans réserve, porta son jugement dans la presse, l’exploitation non orthodoxe de l’APIX et de demander son audit. Il a fallu son insertion comme partenaire stratégique de l’alternance pour que le Ministre d’Etat de l’heure calmât ses ardeurs de clairvoyance dans la chose publique.
A présent, Il est de droit que le peuple victime de la mal gouvernance de l’APIX demande justice. Une des étapes consiste à les conscientiser sur la gravité des faits, cerner les fautes impardonnables parce que non justifiées. Tous les éléments portés au public par l’ARMP pointent un doigt accusateur en laissant paraitre au grand jour la mal gouvernance de l’APIX. Il y a lieu d’y voir clair. C’est toute la portée des informations apportées par L’ARMP.C’est aussi une stratégie de revalorisation des vœux du Président de la République : « N’oublions jamais que le déficit de bonne gouvernance, sous quelconque forme qu’il se manifeste, constitue une grave entorse au processus de développement en ce sens qu’il décourage l’investissement, porte atteinte à la qualité de service et détourne les ressources autres que celles du développement. »
Les externalités négatives, issues de mauvais choix d’Homme ou de Femme aux commandes d’une société d’Etat, résultent du népotisme et du favoritisme. Les torts sont répercutés sur les pauvres citoyens démunis. Les auteurs ont opté pour la mal gouvernance avec la complicité de l’Etat. Telle est la teneur des corrections à apporter. Les supports de communication de l’APIX, les bénéficiaires des marchés alloués, sans rigueur administrative et les publicités tapageuses n’étaient que de la complicité, pour cacher les défauts d’incompétence et d’inexpertise dans l’exercice des fonctions. ARMP est appelée à aller de loin dans la mal gouvernance décriée dans l’APIX.
Dans les faits, l’APIX a une double particularité combinant à la fois des aspects politico financiers. L’APIX est à l’origine, une agence née sous l’ère de l’alternance et dirigée par une seule personne cumulant à présent des fonctions de ministre et de directrice générale. Il revient à la justice d’apprécier la juste valeur de cette promotion et d’apporter des éléments de réponse au peuple qui demande plus de lumière suite aux résultats publiés par l’Agence de Régulation des Marchés Publics au titre l’année 2OO9, l’APIX en ligne de mire.
• Alassane Seck
• Expert en Evaluation et Renforcement de capacités dans les entreprises publiques. Dakar Fann
alaseck@gmail.com
TERANGA DIPLOMATIE OU « EXISTER AU 21ÈME SIÈCLE » :
La nouvelle approche de Wade !
Les grandes mutations sont difficilement acceptables ou réalisables dans un contexte de précarité. Elles mettent souvent du temps pour que les peuples les intègrent. C’est pourquoi en tenant à mettre le Sénégal en construction et en perspective, le président Abdoulaye Wade s’est confronté à des difficultés liées à sa communication sociale. Pour autant, il y a lieu de le soutenir dans sa marche vers la matérialisation d’un Sénégal nouveau. Il agite des idées nobles, impulse le développement et s’emploie au quotidien à traduire en émergence et à traduire, à sa manière, le vocable abstrait en acte concret pour la survie des sénégalais dans un monde marqué du sceau hommes.
Malgré toutes les aspérités découlant de la tortuosité des cours mondiaux, l’homme s’emploie – de la façon la plus remarquée qui soit- à marquer son territoire et à construire. Preuve par l’exemple d’un développement caractérisé par les notions d’ouverture et d’enracinement, chères au président Senghor, au regard des formes d’art prises par les nouveaux monuments et autres ouvrages modernistes de Dakar.
Car, il s’agit, pour lui et par delà sa vision panafricaniste, de mesurer l’importance de l’urbanité face aux menaces environnementales, de jauger le poids du principe de libre circulation dans le vécu quotidien des peuples, de redorer l’image du Sénégal et d‘en faire une destination privilégiée. Il s’agit aussi, pour lui, de servir son pays de la même façon que les « personnalités historiques » ont bâti le leur et ont eu, à la lecture du chapitre II de La Raison dans l’histoire, « beaucoup à faire parce que les autres ne savent pas ce que veut l’époque et ce qu’ils veulent eux-mêmes… Car l’œuvre du grand homme exerce en eux et sur eux un pouvoir auquel ils ne peuvent pas résister, même s’ils le considèrent comme un pouvoir extérieur et étranger, même s’il va à l’encontre de ce qu’ils croient être leur volonté. Car l’Esprit en marche vers une nouvelle forme est l’âme interne de tous les individus ; il est leur intériorité inconsciente, que les grands hommes porteront à la conscience. Leur œuvre est donc ce que visait la véritable volonté des autres ; c’est pourquoi elle exerce sur eux un pouvoir qu’ils acceptent malgré les réticences de leur volonté consciente : s’ils suivent ces conducteurs d’âmes, c’est parce qu’ils y sentent la puissance irrésistible de leur propre esprit intérieur venant à leur rencontre ».
En effet, après avoir réfléchi sur les notions de liberté et de responsabilité du journaliste puis invité les peuples au culte et à l’exercice de la paix par un dialogue fécond des religions et des races, je me donne à nouveau le devoir d’investir le champ de la pensée constructive, dans la ferveur des convictions savantes et d’un idéal intellectuel, afin de prolonger une œuvre faite de recherches et de prospection, à consacrer cette fois-ci à la diplomatie. A celle d’un pays-cœur toujours en chœur avec la marche du monde : le Sénégal.
Je m’y emploie car depuis peu le président Wade–porteur d’une politique étrangère inédite- est au devant de la scène mondiale, jouant les premiers rôles en Afrique et sur toute la planète en faveur des libertés, de la sécurité, de l’équilibre des forces dans les instances de décisions onusiennes, du développement, de l’environnement, de l’accès facile et équilibré aux nouvelles technologies, de la promotion des énergies renouvelables, de l’unité africaine, de la lutte contre la pauvreté dans un monde difficilement qualifiable. Un monde au sujet duquel nombreux sont ceux qui, à tort ou à raison, ont eu à prophétiser. Un monde qui a fait l’objet de maints commentaires de la part de grands penseurs dont le très célèbre homme de culture André Malraux. Sans doute, l’un des intellectuels français les plus connus pour avoir déclaré que « le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas ». Mais, un monde à lire avec le Président Wade, à la lecture de sa représentativité dans le débat mondial et de sa nouvelle proposition, consistant à faciliter proposer le retour en Afrique des haïtiens qui le désirent suite à la récurrence des calamités naturelles qui ne cessent de frapper ce peuple frère !
Ainsi, si d’aucuns voyaient dans l’énoncé de Malraux, ce français à l’esprit alerte, une vision ; d’autres, par contre, émettaient une révélation, un message. Une analyse des conséquences d’un vécu, à haute échelle universelle, intervenant à un moment où les rivalités Est-Ouest, pas seulement idéologiques, rythmaient la marche du monde. Tout comme lorsqu’il s’est agi, pour les intellectuels, de comprendre comment se conjugue le verbe « exister au vingtième siècle » avec une praxis du dépassement de soi et une action conceptuelle qui habitait et animait les grands ensembles de l’époque... L’époque ? De quelle époque exactement ?
Comprenez par époque, les premières lueurs des instants d’après deuxième guerre mondiale puis le « soleil des indépendances » en Afrique qui coïncida avec l’avènement d’une autre époque. Le temps de la « libération » idéelle. Celui de l’engagement de l’esprit et de la lettre. Celui du « bouillonnement intellectuel »…
Illustration de ce « bouillonnement intellectuel » du vingtième siècle dans lequel Dakar est toujours remarquer : la Négritude, définie par Sartre, dans la préface de « Orphée noir »de Senghor, comme étant « l’être-dans-le-monde-du-noir ». Une manière pour le noir d’assumer sa situation d’homme avili, écrasé par l’histoire, et de se reconstituer par un geste d’affirmation de soi, par l’élaboration d’un projet libérateur. Un projet libéré des chaînes de Gorée et de Weimar, dans un élan d’ouverture soutenu par l’enracinement appelé « Négritude debout ». Un projet qui amène Nkrumah a inventé, dans la foulée des années 60, le panafricanisme.
Le père de la nation ghanéenne l’invente à une époque où Simone de Beauvoir s’étonne… de « découvrir à prés de quarante ans un aspect du monde qui crève les yeux mais que personne ne voit », dénonce « les volumineuses sottises débitées pendant le dernier siècle » et annonce son projet : faire toute la lumière sur celles qui constituent, selon la formule de Freud, « le continent noir » avec une franchise désarmante et un courage de tout dire qui la caractérisent...
Autre illustration de ce « bouillonnement intellectuel » du vingtième siècle : le premier Festival Mondial des Arts Négres organisé à Dakar du 1er au 24 avril 1966, à l’initiative du président Senghor. Un écrivain de haute plume. Un visionnaire pour qui Dakar doit être la porte par laquelle passe et repasse les grandes manœuvres de réconciliation de l’Afrique avec elle-même après plus d’un demi millénaire de chaos avec des aventures aussi douloureuses les unes que les autres, et qui ont pour noms esclavage, déportation, colonisation. Un savant des lettres pour qui Dakar doit être la fenêtre d’Afrique ouverte sur le monde qui entend transformer l’exil en richesse, par l’énergie de ses diasporas ayant déjà prouvé qu’elles avaient cultivé un bout d’Afrique partout où l’atrocité des hommes les avait conduites.
Ainsi, disait-il dans son discours inaugural : « Le Sénégal vous accueille, donc, comme des hôtes insignes et, d’abord, Dakar, qui répond ainsi à sa vocation. Car, soc noir, lancé dans l’océan fertile, Dakar a toujours répondu à l’appel des Alizés, au salut des visiteurs de la mer et de l’air, pour nouer les dialogues d’où naissent les civilisations, en tout cas la Culture ». Un discours qui était tenu non sans faire de Dakar une université mondiale, une académie au sein de laquelle se rassemblent ethnologues et sociologues, historiens et linguistes, écrivains et artistes pour chercher, à dire la fonction de l’Art Nègre dans la vie des peuples noirs et dans celle des autres peuples du monde. Un discours qui était tenu pour que Dakar demeure donc un éternel carrefour. Un point de ralliement de toutes les eaux du monde : « aujourd’hui, au Sénégal, pour prendre un exemple actuel et présent, c’est le nouvel art national qui, enraciné dans le basalte noir du Cap-Vert, s’élabore, encore une fois, en ce carrefour dakarois où soufflent, avec les images et les idées, tous les pollens du monde ».
Dès lors, on se rend bien compte que Dakar est depuis fort longtemps un vieux carrefour. Cela ne fait l’ombre d’aucun doute : la cité l’a été avant l’indépendance. Et, elle le sera. Elle le sera encore des millénaires durant étant entendu que le Sénégal n’a jamais cessé de bâtir sa politique sur le dialogue avec les autres, la participation à l’œuvre commune des hommes de conscience et de volonté qui se lèvent de partout dans le monde, pour apporter des valeurs nouvelles à la symbiose des valeurs complémentaires par quoi se définit la Civilisation de l’Universel. Un statut acquis grâce à Senghor, le premier chef de la diplomatie sénégalaise.
Il nous a toujours demandé d’être nous-mêmes. « Etre nous-mêmes, non pas sans emprunts, mais pas par procuration, je dis : par notre effort personnel – collectif en même temps – et pour nous-mêmes. Sans quoi, nous ne serions que de mauvaises copies des autres au Musée vivant, comme l’ont été les Nègres d’Amérique sous l’esclavage, jusqu’à la fin du 19ème siècle, comme nous l’avons été, Nègres d’Afrique, sous la colonisation, jusqu’à la veille de la deuxième Guerre mondiale... ».
Ce disant et malgré les vicissitudes et les turpitudes de l’histoire ainsi que les variations des discours au fil du temps, le Sénégal continue d’être au cœur du débat universel. Un débat qui, actuellement, porte sur de nouvelles priorités : l’urbanisation de la planète, le réchauffement de la Terre, la lutte contre le Sida, le remboursement de la dette, les privatisations, l’emploi… Un débat qui, nonobstant la pluralité de plaidoyers et le flot d’informations subversives, est sujet à un véritable embrouillement des esprits et une vulnérabilité des repères sans précédent. Un débat qui, pince-sans-rire, a rendu le contexte très peu conciliateur.
Le contexte est d’autant plus menaçant que depuis les attentats du 11 septembre 2001, pas une journée ne se passe, pas un quotidien ne paraît sans qu’un brûlant et bruyant sujet ne fasse l’objet d’un gros titre qui puisse ébranler l’humanité dans sa vocation à rester unie face aux canulars et autres bravades de la nature.
Tous les repères bougent... Partout sur la planète, en Europe, en Afrique, en Amérique ou en Asie, tout se passe comme si l’épuisement des idéologies trouvait son sens et son essence dans la diversité et la tonalité des discours dominants à savoir la question de l’énergie, la brouille des religions, les phénomènes migratoires, le respect des libertés démocratiques, le développement durable, la problématique de la sécurité... Tout se passe comme si le choc des civilisations n’avait de contenu que la dilution des valeurs intellectuelles provoquant « la défaite de la pensée » et la victoire de la polémique. Un affrontement infructueux, un aveuglement du sens, une crise de la communication, un pilonnage de la matière et de l’idée, une confusion qui cachent mal la polémique sur l’expansion et la maîtrise du nucléaire.
Le flou sur les genres, la fragilité des repères, l’impertinence de la théorie de la réduction des incertitudes… et la menace de l’équilibre du monde sont des sujets tout aussi brûlants que le pétrole et le gaz font l’objet de spéculations multiples, amenant les pays non producteurs, notamment ceux du tiers-monde, à essayer de trouver des solutions de rechange tels que les bio-carburants, parce que nourrissant des inquiétudes les plus pesantes quant à la survie de leurs populations ainsi que celle de leur économie si fragile et si vulnérable. Une vulnérabilité apparente dans l’hypothétique relation de causalité entre les trois religions révélées : l’Islam, le Judaïsme et le Christianisme. Un sans-dialogue. Une parodie de cohabitation. Un semblant d’amour qui, pince-sans-rire, bute sur la violence à l’échelle planétaire et le fanatisme poussé se résumant à un vocable : l’extrémisme, au motif duquel des régimes réputés belliqueux cèdent sous le poids des puissances occidentales. C’en a été ainsi en Irak et en Afghanistan. Deux pays censés appartenir à « l’axe du mal », celui des régimes dits « terroristes ». Un enjeu stratégique visant à rétablir la paix dans le monde pour d’aucuns. Un jeu de dupes pour d’autres qui dénoncent le conditionnement psychologique et la manipulation médiatique.
Toutefois, le contexte est également la portance qu’engendrent le crime contre les libertés, les guéguerres d’orgueil ainsi que la survivance de l’instinct haineux symbolisée par le retour en surface du racisme et de l’ostracisme. Sans oublier les phénomènes migratoires qui constituent, en effet, l’un des sujets les plus préoccupants de l’heure : l’épineuse question de « la fuite des bras et des cerveaux ». Une véritable équation pour les pays du Nord, victimes du recul des naissances et du vieillissement de leurs populations, comme pour ceux du Sud, obligés d’émigrer du fait d’une paupérisation et d’une pauvreté galopantes. Un appel aussi. Celui à la redéfinition des paramètres du développement durable et de son corollaire, la gestion de l’environnement aujourd’hui que le débat sur le réchauffement climatique fait florès et actualité et sur lequel insiste le président Wade, notamment à propos de la mise en place urgente d’une muraille verte pour lutter contre l’avancée du désert sur le continent noir dont l’agriculture –principal secteur de développement- est souvent minée par les criquets pèlerins et la grippe aviaire. Une initiative qui vient conforter et réconforter le Sénégal dans sa position d’aiguillon et de promoteur de la paix à travers une nouvelle approche politique et une démarche de rupture que j’appelle affectueusement la Teranga diplomatie.
Pour autant, ce n’est pas en chaussant des lunettes noires fumées qu’on va parvenir à comprendre la nouvelle approche de Wade mais plutôt à travers les binocles de l’Eclairisme, ce courant de pensée dont le sens est de porter, plus en haut et plus loin, un regard partagé sur l’immédiat mais aussi et surtout sur le post-immédiat pour que l’Afrique soit enfin redevenue elle-même, à commencer par le Sénégal : terre de partage et pays d’équilibre. Je le dis d’autant plus que sa vocation est d’éclairer l’avenir et par le dialogue qui, pour nous, est la religion de l’avenir et par le refus de faire nôtre la sale voie martiale ou de ressasser tous les théorèmes de rebut qui nous éloignent de Cheikh Anta Diop et de ses fameuses thèses scientifiques sur l’esprit de fraternité. Ou encore de Senghor selon qui Dakar est art et diversité, résistance et endurance, hilarité et contemporanéité. Comme Jérusalem, charriant foi et lumière. Comme Katoucha Niane, la princesse peulhe, défilant sous les étoiles, dans la douceur d’une nuit noire au cœur du désert exotique… Ainsi, va Dakar : mon arbre à la sève diamantée…
Et si Dakar est une hyper-puissance à part, le Sénégal ne tient pas seulement ce rang de son protocole. Derrière cette machine politico-administrative, il y a bien des « diplomaties » : les sports, les Arts, la défense des droits de l’homme, les actes de foi, le savoir enseigné… Les tambours de la mémoire qui vibrent sous la plume de Boubacar Boris Diop ou encore, les coups de pilon qui résonnent au fond des mortiers écrits de David Mandessi font également partie du décor formaliste. Tout comme les foulées exotiques de Baba Maal, le rossignol du fleuve Sénégal, ou encore Ismaela Lô, chantant la beauté noire. D’Abidjan à Tunis, Mariama Ndoye en a donné la preuve. La preuve que la diplomatie n’est point le propre du politique sinon l’exclusivité des intelligences et cultures combinées.
Enfin, ainsi va Dakar ! Le voici qui, de plus en plus, est présent dans le débat qui détermine l’avenir du monde. Telle une petite Jérusalem. Sa diplomatie est là, bien proactive. Là, dynamique et sans complexe aucun. A travers ses Accords de Partenariat pour le Développement. Là, pour dire à l’Europe que le Sénégal a rejeté les Accords de Partenariat Economique au nom d’une conscience et d’une philosophie. La même philosophie qui a habité la Chine jusqu’à ce qu’elle soit un géant de la production et une grandissime puissance commerciale. La même philosophie ayant fait que l’Inde respire une meilleure santé économique. La même philosophie ayant conduit certains pays de l’Amérique dont le Venezuela à poser les jalons d’une banque du sud devant faire pièce aux institutions de Bretton Woods -le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale- après l’échec de la zone de libre échange des Amériques, pourtant présentée au moment de sa création comme étant ce qui devrait être le plus grand marché prévu entre l’Alaska et la Terre de feu. Une philosophie qui voudrait que Dakar soit…demain.
• Issa Thioro GUEYE
• Ecrivain et membre du réseau des formateurs du NEPAD
• issathioro@gmail.com