post-électoral
Pour un réel sursaut post-électoral
En réélisant le président Wade dès le premier tour, le 25 février dernier, le peuple sénégalais, souverain, avait à nouveau voté dans un climat extraordinairement serein et avec autant de détermination que durant le scrutin historique de 2000. Mais, cette année-là, notre peuple avait porté au pouvoir l’opposant, devenu au fil du temps le plus célèbre en Afrique, en se préoccupant avant tout de mettre fin au règne du mastodonte socialiste d’alors que de le plébisciter. D’ailleurs, des observateurs avertis ont déjà fait ce constat et apporté, en conséquence, des éclairages très intéressants.
Pour ma part, je n’hésiterai pas à considérer le score validé, au finish, du locataire actuel du Palais de la République comme le résultat le moins inattendu d’un référendum que l’on aurait conçu spécialement pour lui, après sept ans d’exercice du pouvoir, si on se limite seulement à scruter les contours, à tous points de vue, lambrissés des plans de conquête de suffrages de l’opposition dite significative, ou s’en tient aux tergiversations de celle-ci pour se choisir un leader habilité à incarner, avec bonheur, ce qu’elle ne cesse de prôner. Un score qui serait, à la fois, le résultat le plus suggestif auquel on s’attendrait au moins, si l’on songeait toujours au même scénario. Lequel, ébauché de la sorte, constituant assurément un indice probant pour saisir la portée réelle de l’attachement renouvelé à un homme, le candidat de la Coalition Sopi 2007.
C'est pourquoi je comprend mal, à l’instar de bon nombre de mes concitoyens de bonne foi, que le président réélu et ses alliés n’aient pas encore pensé à se livrer à une lecture aussi lucide que réaliste de leur victoire. Etant entendu qu’ils ne devraient pas tarder à consentir le maximum de sacrifices pour poser des actes de première grandeur, tous susceptibles de déboucher sur des projets de développement social, réellement salutaires, ou en rapport direct avec le vécu de chacun de nous. Cela veut dire qu'à côté des chantiers, si bénéfiques et déjà visibles, ou d’autres à réaliser pendant le second mandat du chef de l’Etat, les aspirations très profondes de la grande majorité de nos populations à s’affranchir des affres d’un quotidien, persistant à se dresser farouchement devant elles, seront prises en compte de manière plus diligente. Avec une volonté politique ainsi réaffirmée et à un tel rythme, il n’y a pas lieu de douter que les lamentations, quasi permanentes, de ces dernières sur le coût exorbitant des denrées de première nécessité et sur les pénuries apparemment chronicisées n’arrivent pas à s’estomper. Que les mêmes populations, vivant aussi bien dans les zones urbaines que rurales, n’aient aucun souci pour accéder plus facilement à divers soins de santé. Et que la question de l’acquisition d’un logement décent, à un prix raisonnable, ne hante pas tant l’esprit de très nombreuses catégories sociales.
Je n’oublie point les infrastructures idoines, à créer nécessairement dans les nouvelles régions : par exemple Matam. De même que celles qui sont indispensables pour exploiter les immenses potentialités gisant encore dans les autres régions de l’intérieur du pays. Il urge également que l’on explore, à fond, les possibilités de bien accompagner nos jeunes désemparés, en vue de les rassurer afin qu’ils ne décident plus de renoncer à tout pour un quelconque eldorado. Quant à notre système éducatif, il serait regrettable que les programmes pour y améliorer la qualité finissent par devenir inopérants, à cause de la récurrence des grèves des apprenants et des enseignants.
Dans la même veine, nous ne souhaiterions pas que l’on revienne sur les modes de gestion des crises dans nos écoles, ne favorisant, ni plus ni moins, que le pourrissement de la situation, ou n’aboutissant qu’à une impasse. A telle enseigne que l’on soit enclin à tout supporter amèrement, de part et d’autre. Comme ce fut avec le Cusems pendant plus d’un an. Pour ce cas précis, les autorités concernées, à différents niveaux, ne semblaient pas avoir minutieusement jaugées, dès le départ, la capacité de mobilisation et le degré d’engagement dudit cadre syndical dans un contexte de renchérissement accéléré du coût de la vie. Même si elles faisaient face à un mouvement revendicatif en phase de maturation. Elles se focalisèrent, outre mesure, sur l’inopportunité de l’octroi d’une indemnité de logement modulée dans le secondaire, jusqu’à provoquer momentanément une sorte de bras-de-fer. Ainsi, il n’y a pas eu à temps ce réflexe qui nous aurait épargné des blocages angoissants lors des examens de l’année scolaire passée et, sous un angle purement pédagogique, des conséquences fâcheuses, immédiates ou ultérieures, des grèves successives sur les performances de nos potaches. Surtout quand elles sont dues aux cumuls de programmes inachevés dans toutes les disciplines. Il est vrai aussi que l’intransigeance effarante affichée par les grévistes, d’un côté, ainsi que les habituelles luttes de positionnement au plan syndical n’avaient contribué qu’à assombrir l’horizon des négociations entamées, de façon globale, avec les intersyndicales d’enseignants.
Tout compte fait, les doléances des enseignants grévistes d’hier et celles sur lesquelles portent les négociations actuelles ne sont que des exigences corporatistes s’inscrivant valablement dans le cadre général des exigences citoyennes, indéniables et nullement démagogiques. Et c’est, certes, cet assemblage qui donne une véritable substance à la fameuse demande de mieux-être, inséparable de l’avènement de l’alternance sous nos cieux et toujours forte. Pour cela, le processus de rectification auquel je crois, ici et maintenant, ne pourra pas avoir l’impact recherché auprès de nos masses, tant que sa dimension plus sociale qu’autre, voire sécuritaire au plan multisectoriel, ne leur paraîtra pas nettement privilégiée. Spécifiée, en outre, par une stratégie de communication qui soit la moins controversée possible, parce que menée avec beaucoup de tact, sans chape d’a priori pour brasser davantage d’initiatives heureuses.
Evidemment, je ne pense pas que le processus en question, bien orienté et non erratique, s’impose comme une œuvre réservée en totalité aux vainqueurs d’aujourd’hui. Car, après l’élection ou la réélection d’un président de la République dans notre pays, personne ne devrait avoir l’impression d’y entrevoir même une fracture factice ; c'est-à-dire y imaginer deux camps : celui des élus et celui des exclus. Un pareil dérapage ne profiterait jamais à l’un ou l’autre supposé camp. Il faudrait, en définitive, que nous nous accordions sur un autre choix, en sus du choix suprême qu’indiquèrent tout récemment les urnes. Pour que nous cheminions, la main dans la main, sur la route devant nous conduire vite vers là où chaque Sénégalais aura les possibilités, de façon vraiment méritée, de tirer profit des richesses à produire. En termes clairs, il s’agit de susciter, à la suite de la prestation de serment de Me Wade, le président de tous les Sénégalais, un réel sursaut à l’échelle nationale.
A l’évidence, il incombe à ceux qui ont été réconfortés le 25 février et interpellés en même temps par plus de la moitié des électeurs de la présidentielle de déclencher ce déclic, en s’engageant résolument et incessamment à créer les meilleures conditions pour des retrouvailles. Sans que l’on ne puisse, ni un instant, penser à une acceptation tacite de simples souteneurs, encore moins soupçonner un schéma d’affaiblissement de forces de contre-pouvoir. Seul l’intérêt supérieur de notre cher Sénégal sera placé au-dessus de tout.
Badiallo dit Boucounta BA Formateur à la Fastef (ex-Ens) Dakar