OU GEOMETRIE
LE REGARD DE FALLOU Arithmétique ou Géométrie ?
Article Par Fallou Mbacké Diallo, fmdiallo1@yahoo.fr,
Paru le Lundi 14 Mai 2007
En moins d’une semaine, deux des plus proches collaborateurs du chef de l’Etat, en des termes polémiques, ont porté sa parole. Publiquement. Pour dire : l’un, ce qu’il aurait dit. L’autre, ce qu’il a dit n’avoir jamais dit. Sur le même sujet ! Qui croire, entre le conseiller spécial du Président et le porte-parole de ce dernier ? Le communiqué de l’un est validé par son cachet officiel. Mais la parole de l’autre, même officieuse, n’est certainement pas nulle et non avenue. Comme celle d’un fou, n’ayant pour référent, ni la vérité, ni l’authenticité. Seulement, en l’occurrence, Atépa annonçait, énonçait une vérité interdite.
Comme celles qui sortent de la bouche du «fou» (de l’Etat ?). Pour dévoiler, (sans raison ?), ce que la raison d’Etat a quelque raison de cacher, de se cacher. C’est pour cette raison (d’Etat), que, sans être démentie, la promesse du «bâtisseur» a été étouffée et abolie par le discours officiel. Sous la forme ritualisée d’un communiqué, contradictoire jusqu’au bord de la polémique. Finalement, «Ceux qui ont fait reculer Wade ne rendent pas service à la République», s’est-il consolé : les législatives auront bien lieu. Car, accepter de discuter avec l’opposition des conditions de transparence et de régularité des législatives, équivaudrait pour Wade, à admettre que la présidentielle qui l’a porté au pouvoir, n’a été ni transparente, ni régulière. Finalement, il ne s’est agi que de deux répliques opposées d’une même préoccupation du pouvoir libéral : maintenir intacte l’autorité du Président. Comme «seule constante» de son parti et inspirateur omniscient de notre démocratie. C’est de cette confusion que découle le débat actuel sur la succession du Président. Débat puéril et périlleux pour la démocratie. Et dont la seule formulation nous fait glisser vers une oligarchie. Au sein de laquelle, la dévolution du pouvoir tient plus du parrainage partisan et de l’adoubement filial, que du mérite personnel ou du respect des procédures démocratiques. Dans cette logique sans épithète, en marge des structures du Pds et parallèlement à l’action du gouvernement, Karim se positionne de plus en plus comme le chef de file de la «Génération du concret». Qui donne corps à «la vision du chef de l’Etat». Donnant ainsi des «raisons concrètes» à des souteneurs surgis du plus profonds de leurs intérêts. Et qui font aujourd’hui avec Karim comme ils ont fait hier avec Tanor et avant lui avec Jean Collin. C’est précisément dans cette tradition de vassalité vis-à-vis du pouvoir que se sont inscrits nos députés. Pour voter le projet de loi instituant le retour du Sénat. En effet, à considérer l’Assemblée nationale tel qu’elle ne légifère point et le Craes tel que ses «conseils» ne sont pas déterminants dans notre vie socio-économique, l’on peut s’interroger sur l’opportunité d’une chambre de plus. Mais, avec une touchante désinvolture, la réponse nous vient du porte-parole de la Cap 21. Qui, aux responsables non investis pour les législatives, annonce, en toute ingénuité : «Tout le monde ne pouvait pas être investi. Mais nous allons nous rattraper avec le Sénat.» Ce sera donc une chambre de plus. Où, au nom du peuple et de la démocratie, une petite minorité, sur des bases purement partisanes, accédera à des privilèges parfaitement légaux, mais totalement injustes et moralement inacceptables dans un pays comme le nôtre. Où toutes sortes d’hypothèques pèsent quotidiennement sur la vie des populations. Et dont les moindres ne sont pas la flambée sauvage des prix, le rationnement systématique de l’électricité, la lancinante question paysanne, l’émigration clandestine… Malgré tout, le chef de l’Etat, Gardien de la Constitution, Président de tous les Sénégalais, est allé démarrer la campagne des législatives à Touba. Fidèle en cela à son ombre tutélaire, qui, en toute illégalité, avait couvert la liste libérale lors du scrutin de 2001. Pour éviter de tels abus, les acteurs de notre démocratie devraient s’inspirer de ce vieux principe de la Grèce antique et choisir en connaissance de cause, entre Arithmétique et Géométrie. En effet, comme le rappelle Michel Foucault : «(…)l’Arithmétique peut bien être l’affaire des cités démocratiques, car elle enseigne les rapports d’égalité ; mais la Géométrie seule doit être dans les oligarchies, puisqu’elle démontre les proportions dans l’inégalité.» Alors, Démocratie ou Oligarchie, Arithmétique ou Géométrie ? fmdiallo1@yahoo.fr