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INONDATIONS : un Plan de prévention des risques majeurs naturels et anthropiques
De 1970 à 1980, le Sénégal a connu un déficit pluviométrique qui a occasionné un exode massif des populations rurales. Du fait de l’absence (ou du non respect) de Plan d’occupation des sols (POS) ou de Plan local d’Urbanisme (PLU) pour les communes, les nouveaux arrivants se sont installés dans des zones périurbaines non habitables des grandes villes comme Dakar. Aujourd’hui, nous assistons d’une part à la fin de ces cycles de sécheresse et d’autre part au retour des hivernages particulièrement pluvieux. Ainsi, certaines localités du pays vivent chaque année une situation très préoccupante avec la récurrence des catastrophes naturelles comme les inondations. D’où les questions posées aux deux ministères de tutelle chargés du dossier par les députés, à l’hémicycle de l’Assemblée nationale, le vendredi 23 juillet 2010.
Malgré les efforts considérables consentis par l’Etat et les partenaires, la recherche de solutions pérennes se pose toujours avec acuité. Pour dissiper les inquiétudes, les ministres ont annoncé un plan d’action urgent de 2 milliards de Fcfa pour gérer les inondations durant l’hivernage 2010. Mieux, ils envisagent une interconnexion des lacs, des bassins de rétention des eaux et le déversement des eaux sur les bas-fonds. La finalité est d’obtenir des mesures durables pour lutter de façon efficace contre les inondations, à travers un nouveau programme qui comporte le déplacement des populations, l’extension des réseaux d’ouvrage d’évacuation des eaux. La réalisation de tous les travaux de ce programme devrait coûter 167 milliards de Fcfa. Toutefois, l’installation de motopompes dans les zones menacées par les inondations pour soulager les populations risques de rencontrer des difficultés d’application. En effet, l’évacuation des eaux est impossible face au relèvement de la nappe phréatique qui menace les maisons construites de manière anarchique sur les talwegs ou les lignes de réunion (ou collecte) des eaux de drainage.
Notre contribution d’aujourd’hui a pour but d’alerter l’opinion public et les autorités étatiques sur la nécessité de l’élaboration d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels, en consultant les populations et en responsabilisant les maires pour régler les défaillances à l’origine du problème.
Pourquoi un Plan de prévention des risques majeurs naturels et anthropiques (PPRNA) ?
Suite au conseil présidentiel sur les inondations, le président de la République avait demandé aux différents services de l’Etat impliqués dans la gestion de ce phénomène de trouver des solutions durables. Mais la récurrence du problème montre les difficultés des ministres de la République et des fonctionnaires de l’Etat à régler ce problème. Par conséquent, nous leur suggérons de s’inspirer de ce qui se fait ailleurs pour venir à bout du problème des risques majeurs naturels et anthropiques. Par risque majeur, il faut comprendre la possibilité d’un événement d’origine naturelle ou anthropique (action de l’homme), dont les effets peuvent mettre en jeu un grand nombre de personnes, occasionner des dommages importants et dépasser les capacités de réaction de la société. Il est caractérisé par sa faible fréquence et/ou par son énorme gravité. Donc, la préservation des champs d’expansion des crues est un enjeu global majeur pour régler la problématique des inondations qui couvrent de larges bassins versants. Avec le maintien du libre écoulement des eaux, il est possible de ne pas aggraver en amont ou en aval l’impact des inondations sur les zones urbanisées.
La solution est donc de réglementer l’utilisation des sols en fonction des risques naturels auxquels ils sont soumis. Autrement dit, l’Etat ne doit plus attendre la survenance d’un problème pour déclencher un Plan d’organisation des secours (un plan ORSEC). Au contraire, les ministères de tutelle devraient autoriser les autorités administratives locales à élaborer un Plan de prévention des risques majeurs naturels et anthropiques pour le renforcement de la protection de l’environnement et de la sécurité civile. Cet outil administratif constituerait un instrument essentiel de l’action de l’Etat en matière de prévention des risques majeurs, tels que les inondations, la contamination au plomb, les incendies de forêt, la sécheresse, etc…).
L’objectif principal du Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques est la protection des biens et des personnes par la prévention. Il vise en priorité à ne pas aggraver les risques sur les périmètres qu’ils couvrent, tout en se proposant de réduire la vulnérabilité des personnes et les biens. Toutefois, il est important de préciser que ce plan n’est ni un programme d’aménagement, ni un programme de travaux. Une fois approuvé, il constitue une servitude d’utilité publique. Il s’agit donc d’un document réglementaire qui vise à la sécurité des personnes et des biens par la prévention uniquement. Il agit essentiellement sur le champ de l’Urbanisme, notamment en rendant inconstructibles les terrains les plus exposés ou encore en édictant des mesures constructives.
Comment est réalisé un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques ?
Au Sénégal, l’arrêté portant élaboration du Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques (PPRMNA) pourrait relever de la compétence du gouverneur, du préfet ou du sous-préfet pour les raisons suivantes :
une meilleure connaissance de l’existence d’événements récents ou historiques au niveau local sur la base des études universitaires réalisées dans ce domaine (il faut rompre avec le fatalisme) ;
la possession d’un dossier départemental des risques majeurs fournis conjointement par les services déconcentrés de l’Etat, les collectivités locales et les services de défense et de sécurité ;
le bilan des arrêtés interministériels de constat de l’état de catastrophe naturelle pour permettre aux collectivités d’obtenir des moyens d’actions avec le concours d’entreprises locales pour favoriser l’emploi.
Dans cette perspective, le service régional ou départemental de l’urbanisme, est chargé de l’élaboration du dossier de Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques. Il en assure le pilotage au nom du sous-préfet d’arrondissement ou du préfet de département, sous le contrôle du gouverneur. Les chefs des services techniques et les élus responsables des collectivités sont associés, au nom du maire, à l’élaboration de ce document. Mieux, les maires seront mobilisés par les préfets et sous préfets, sur un ensemble de communes ou communes d’arrondissement constituant un bassin de risque. Ensuite, les résultats des études seront remis à la commune par le service de l’urbanisme sur fond cadastral au 1/5000.
Dans un premier temps, des études dites d’aléas permettent de cartographier les contours des zones à risques et de déterminer les niveaux d’aléa, en général : faible, moyen et fort. Puis on détermine les enjeux humains de la commune soumis aux risques étudiés. Par croisement, cela permet d’établir un plan de zonage de risque auquel est associé un règlement définissant les règles applicables dans chaque zone.
Après l’enquête d’utilité publique, l’approbation d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques génère une servitude d’utilité publique opposable au tiers.
La population peut-elle participer à l’élaboration d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques ?
L’Etat du Sénégal n’a pas encore une culture encrée d’associer les populations à « la gestion de leurs propres affaires », sous le contrôle des services déconcentrés. C’est pourquoi, nous préconisons deux phases de concertation publique pour l’élaboration d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques :
sur la base de la cartographie d’aléas provisoire avec l’aide des études universitaires ou de spécialistes ;
sur la base d’un dossier complet d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques provisoire, en amont de l’enquête publique.
Des réunions publiques peuvent être organisées sur le bassin à risques du Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques, lors de la concertation. Des affiches en mairie et communiqués de presse permettent alors d’annoncer les dates. En outre, le dossier de PPRMNA est soumis à enquête publique avant approbation par le préfet ou le sous préfet. Les seuls documents définitifs sont les éléments du dossier de Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques approuvé par cette autorité, représentant l’Etat.
– Première phase de concertation : la cartographie d’aléas provisoire
Une cartographie d’aléas provisoire avec une Notice Explicative est déposée en mairie à cette occasion. Les documents sont également disponibles sur le site Internet du service départemental de l’urbanisme. La population est invitée à faire parvenir les informations et remarques qu’elle juge utiles pour ce service déconcentré de l’Etat. Un formulaire est également disponible. Cette phase marque le début de la concertation publique. Elle dure jusqu’à la seconde phase de concertation publique, mais ne donnera pas lieu à un bilan de concertation.
– Deuxième phase de concertation :
Un dossier complet de Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques provisoire (aléas, enjeux, zonage) sera déposé en mairie à cette occasion. Les documents sont également disponibles sur le site Internet du service départemental de l’urbanisme. Un registre sera par ailleurs déposé en mairie afin de recueillir les observations du public. La concertation durera un temps limité, à priori un mois. A l’issu de la concertation, un bilan des observations et des suites données sera adressé par le service départemental de l’urbanisme. Il sera diffusé en mairie et sera remis à titre informatif au commissaire enquêteur (une personne, indépendante, en général choisie par le président du Tribunal Administratif et chargée de conduire les enquêtes publiques imposées par la loi) du projet de Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques avant l’enquête publique.
Par ailleurs, la concertation ne remplace pas juridiquement l’enquête publique qui se déroulera par la suite selon les formes prévues par le Code de l’environnement.
Où peut-on consulter les documents de concertation ?
La consultation en mairie est le moyen le plus simple pour les populations et les associations. Sinon, les documents doivent être disponibles à la préfecture, sous préfecture ou sur le site le site Internet du service départemental de l’urbanisme voire par la presse.
Calendrier prévisionnel d’élaboration du Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques
En rapport avec le service départemental de l’urbanisme, la mairie affiche le calendrier prévisionnel décliné en plusieurs phases. A titre indicatif nous donnons un échéancier qui pourrait être revu en fonction de l’avancement de la procédure d’élaboration :
le lancement des études techniques : août 2010
la concertation sur les aléas : septembre 2010
la concertation sur le dossier de PPRMNA : avant fin décembre 2010
l’enquête publique : début 2011
l’approbation du PPRMNA : mi-2011
Telle est l’économie de la présente proposition d’un Plan de prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques provisoire soumis à l’appréciation du public et des autorités afin d’apporter notre contribution citoyenne à la prévention des risques majeurs naturels ou anthropiques pour régler les défaillances à l’origine du problème des inondations avant les prochains hivernages.
• Par Malick Cissé, Consultant-Expert
• E-mail : consultant.cisse@yahoo.fr
PS : nous restons à la disposition des services de l’Etat et des communes pour toutes informations complémentaires.